Immanquablement, en croisant le regard de son meilleur ami qui tentait de le rassurer, Rafael n’avait pu s’empêcher de repenser à la dernière fois qu’il était resté dormir chez ce dernier et au sentiment de honte qu’il avait éprouvé. Sentiment qui ne s’était toujours pas atténué, même si Brent ne s’était pas moqué de lui, bien qu’il aurait pu le faire pour tout dire. Ca s’était passé il y avait trois jours de cela. Au milieu de la nuit, Rafael s’était réveillé suite à un mauvais rêve pour découvrir que son lit était trempé, tout comme son pantalon de pyjama. Dans le lit en haut, Ozias dormait à point fermés et gêné par la situation, Rafael était resté assis sur son lit un bon moment, de peur de réveiller son ami. Pour rien au monde il ne souhaitait que ce dernier sache ce qui venait de se passer. Mais il savait aussi qu’il ne pouvait pas rester comme ça. Dès lors, le plus silencieusement du monde, il avait fini par se lever pour sortir de la chambre et appeler timidement les parents de son meilleur ami au travers de la porte de leur chambre. Habitués à recevoir Rafael pour la nuit, ils étaient au courant que ce genre d’incident pouvait arriver. Ce fut le père d’Ozias qui sorti de la chambre pour consoler le petit garçon qui, tout embarrassé, avait fondu en larmes. Pas besoin de mots, l’adulte avait de suite compris ce qui s’était passé. Et c’est sans le gronder qu’il l’emmena vers la salle de bains pour lui donner un pyjama propre. Pendant que l’enfant se changeait, il avait changé les draps et Ozias s’était alors réveillé pour demander à son père ce qui se passait.
Au retour de Rafael dans la chambre de son meilleur ami, Ozias, au courant de ce qui s’était passé grâce à son père qui lui avait tout expliqué, n’avait pas fait de remarque désobligeante sur ce qui venait d’arriver. Bien au contraire, il lui avait dit qu’il ne fallait pas être gêné, que cela pouvait arriver. Mais du haut de ses six ans, Rafael songeait qu’à son âge, cela ne devait plus se produire… D’ailleurs, à chaque fois que son ami venait dormir, il ne se passait pas ce genre de choses… Alors pourquoi ça lui arrivait à lui ? Troublé, le jeune garçon lui avait alors demandé de lui promettre de ne pas parler de cela à leurs camarades d’école le lendemain. La promesse d’Ozias faite, ils n’en avaient plus vraiment parlé.
Evidemment, la perspective de partir en vacances semblait géniale pour le petit garçon, mais il craignait en contrepartie qu’un incident du genre ait lieu pendant toute cette semaine. Et que diraient leurs amis s’ils apprenaient ce qui troublait Rafael ? A coup sûr, ils se moqueraient de lui, c’était certain. Ils riaient déjà quand ils voyaient un petit de maternelle avoir un accident de pantalon… Et leur institutrice, que dirait-elle quand elle ? Elle, elle le gronderait sûrement… Peut-être qu’il valait mieux demander à ses parents pour ne pas partir avec sa classe… Oui… Mais d’un autre coté, Rafael avait sacrément envie de partir s’amuser avec ses camarades…
Ce n’était pas vraiment évident de peser le pour et le contre de tout ça, mais il voulait faire confiance à son meilleur ami et ne manqua pas de lui adresser un petit sourire en guise de réponse avant de prendre une bouchée de son sandwich. Oui, Oz devait sans doute avoir raison. Ca allait bien se passer. « Ca va Raf ? » L’avait alors interrogé un de leurs amis en commun qui n’avait pu s’empêcher de remarquer que le petit garçon avait été troublé quelques instants plus tôt et à présent qu’il avait retrouvé le sourire, ce dernier ne manqua pas d’hocher la tête positivement. « J’ai hâte d’apprendre à faire du ski… On pourra essayer de faire des courses tous ensembles. » Il n’était jamais à court d’idées pour trouver de quoi s’amuser. A présent, il était convaincu que rien ne pourrait entraver sa bonne humeur. Mais c’était sans compter sur la table des CM2 derrière eux qui avaient écoutés une partie de leur discussion. Un des grands justement s’était retourné vers eux, comme certains de ses camarades, pour prendre la parole en regardant Rafael avec un sourire moqueur. « Faudra pas que tu oublies ton doudou pour la nuit… Et que tu fasses attention à pas mouiller ton pantalon quand tu seras sur les pistes… » Ses camarades n’avaient pas manqués de rire, contrairement à ceux de Rafael qui le regardait tous, consternés, attendant sans doute que le petit garçon réplique. Mais il n’en avait rien fait. A la place, il avait juste regardé pendant une fraction de seconde Oz, avant de reposer son sandwich alors qu’il tentait du mieux qu’il pouvait de ne pas fondre en larmes. « Tu m’avais promis… » Pour Rafael, cela ne faisait aucun doute. Il avait souvent vu Oz parler avec ces grands et si l’un d’eux s’en était pris à lui pour faire ce genre d’allusion, c’est que forcément, il devait être au courant de quelque chose. C’est alors que la voix de Kilian, un de leurs amis communs, s’était fait entendre alors qu’il interrogeait Ozias. « Qu’est ce qui se passe ? On peut savoir ? » Suite à cette question, le petit Rafael avait préféré disparaître. Rapidement, il avait reposé son sandwich pour sortir aussi vite qu’il pouvait du réfectoire. C’était déjà assez pénible d’entendre les grands se moquer de lui, hors de questions d’entendre ses amis faire de même. Sans compter qu'avec ce qui venait de se passer, ils avaient sans doute dû comprendre... Même Kilian, même s'il n'était pas toujours une lumière. C'était fini. Il n'avait plus envie de les revoir. Et encore moins Oz. Il lui avait fait confiance. Et il avait tout gâché. Tout ce qu'il voulait, c'était rester seul. Et pour y parvenir, il n'avait pas manqué de s'enfermer dans les toilettes des filles. Oui, tant qu'à faire, il se moquait pas mal de l'endroit où il était. Quitte à se morfondre telle une Mimi Geignarde, au moins, il était à sa place là bas...