J'avais besoin de parler à quelqu'un. Vraiment besoin. Surtout depuis mon altercation avec Sam. Et sans trop savoir pourquoi, je me retrouvais devant l'appartement de Kol. Ouais. J'avais toujours eu l'habitude de me confier à lui, j'savais pas vraiment si je pouvais pour cette situation mais, j'pouvais pas le garder pour moi. J'aimais pas être en froid avec les gens, je détestais ça. Surtout quand j'étais persuadée de ne pas être en tord, c'était pas de ma faute si on avait pas les même convictions. M'enfin. Je tapais presque timidement à la porte entendant sa voix s'élever de l'autre coté. Respire Jordan, tout vas bien. Poussant la porte, je pénétrais dans son appartement avec un petit sourire agitant un sachet de beignet comme si je tentais de l'amadouer. T'as un peu de temps pour moi ? Que je demandais. Après tout, j'avais débarqué à l'improviste, comme ça et peut être qu'il avait des choses beaucoup plus intéressante à faire, voir même plus importante.

Je ne travaillais qu'en soirée aujourd'hui, j'avais donc tout le loisir de me reposer toute la journée. J'étais assez crevé d'ailleurs, nous avions eu une grosse intervention la veille et je n'avais rien dormi de la nuit. Au final, je crois que j'avais dû fermer les yeux pendant à peine une heure, ne trouvant pas le sommeil comme je l'aurais souhaité. J'étais donc enfoui dans mon canapé depuis que je m'étais réveillé, zappant sur les différentes chaînes de sport qui m'étaient offertes, alors que j'entendais quelqu'un toquer à ma porte. Je n'avais invité personne mais bon, si on voulait me cambrioler, je pense que la personne n'aurait pas pris la peine de frapper. « Entrez ! » dis-je du salon, alors qu'on entrait chez moi. Je tourne donc la tête vers le hall, découvrant Jordan qui me tendait un sachet contenant je ne sais quoi. Je lui adresse un petit sourire et me lève pour l'accueillir, bien que je ne sois pas très présentable : torse nu et survêtement. « Coucou toi. » dis-je en m'approchant d'elle en lui faisant la bise. Apparemment, elle avait besoin de moi, j'espère qu'il ne s'agissait de rien de grave. « Vas-y fais comme chez toi. » Depuis le temps qu'on se connait, plus de gêne entre nous.

En même temps je débarquais comme ça, sans prévenir. Peut être bien que j'aurais pu lui envoyer un message avant, juste histoire de dire "coucou, j'arrive". Sauf qu'en fait c'était même pas prémédité. J'avais un peu erré dans la rue, comme une clocharde avant de me diriger instinctivement vers son appartement. Donc voilà, c'était compliqué pour prévenir quoi que ce soit. M'enfin, de toute manière, malgré notre différence d'âge, ont étaient assez proche. C'était le genre de truc qui pouvait paraître assez étrange puisque de base, il était le collègue de mon père mais justement, j'avais limite grandis avec sa présence alors forcément, ça créait des liens. Bref, j'étais là, j'étais entrée dans son appartement avec mon petit sourire angélique et j'avais des tonnes de chose à lui demander. Je t'ai ramené des.. Trucs. Ouais, j'étais pas certaine que les beignets soient très bon mais c'était le seul truc que j'avais trouvé. Et puis c'était mieux que rien, voilà. J'te dérange pas hein ? que je disais en prenant place sur son canapé. Non mais fallait qu'il me le dise au pire, peut être qu'il avait autre chose à foutre qu'écouter les questions d'un bébé dans mon genre. Puis le fait que je me cherche, c'était pas spécialement dans l'ordre de ses priorités.

Jordan, c'est la fille de mon ancien lieutenant quand je débutais à la caserne de Boston. C'est en quelque sorte ce gars qui m'a formé du tout au tout, et c'est grâce à lui que j'en suis là aujourd'hui. Je le respecte énormément, c'est un très bon ami à moi, et c'est pour cela que je connais sa fille. Je la considère comme ma quatrième petite soeur, et je la protège comme si elle était de ma famille de sang. J'aime passer du temps en sa compagnie et la conseiller quand elle en ressent le besoin. Elle est encore jeune, la vie s'offre à elle, contrairement à moi qui suis un vieux papy qui a déjà tout vu. Jordan me tend un sachet que j'attrape, j'y découvre des beignets. « Tu veux ma mort ou quoi ? C'est pas ça qui va m'aider à garder ce corps de rêve. » dis-je en désignant mon torse, un sourire amusé au coin des lèvres. D'ailleurs, je file en vitesse dans ma chambre et attrape un t-shirt que j'enfile vite fait. Je viens m'installer aux côtés de ma petite blondie qui me demande si je ne la dérange pas. « Pas le moins du monde. » dis-je, roulant des yeux, attrapant un beignet dans lequel je croquais. C'est que c'est pas mauvais cette merde. « Alors qu'est-ce qui t'amène ? » demandais-je d'une voix douce, avachi dans mon canapé comme une peluche.

Mon dieu, j'avais l'impression que tout c'était compliqué d'un coup. Merci Tamsin. Parce que c'était elle mine de rien qui avait foutu le trouble dans ma tête et plutôt que me trouver quelqu'un de mon âge, j'allais me confier au collègue de mon père. Y avait vraiment un truc pas net chez moi. M'enfin, de toute façon j'étais là du coup j'pouvais plus vraiment retourner en arrière et je savais qu'il me comprenait. C'était probablement ça le plus important. Je m'installais sur le peu de place qu'il restait puisque monsieur avait décidé de prendre toute la place tel un gros tas juste avant de se lancer trois fleuristes en plein visage. C'est pas la modestie qui te tueras en tout cas que je répondais dans un petit rire avant d'inspirer profondément. Bref, il bouffait mes beignet et moi, j'réfléchissais à comment lancer le sujet. Disons que c'était bizarre d'emmener ça sur le tapis et surtout, fallait pas qu'il aille balancer à mon père. Je.. Comment on sait si on préfère les filles aux garçons ? Omg, j'venais vraiment de dire ça ? C'est pas pour moi c'est une amie. Tentative de rattrapage. Mensonge aussi.

Moi ? Modeste. Pas vraiment. Il est vrai que j'aime bien me vanter de temps en temps, mais uniquement pour rigoler. Je ne suis pas trop le genre de type qui va se la racler toute la journée sous prétexte qu'il a des abdos bien dessinés. Avec Jordan, je peux me permettre ça, elle ne sera pas choquée. « Ça ne peut pas faire de mal. » Je lui adresse un petit clin d'oeil, dégustant toujours mon beignet au chocolat. J'aurai peut-être dû penser à le faire réchauffer, ça aurait été encore meilleur. Bref, Jordan était venue me voir sûrement pour une raison. Ses paroles me surprirent un peu, mais j'écoutais tout de même ce qu'elle avait à me dire. Je arque un sourcil en constatant sa gêne, ne sachant pas trop où me positionner. En fait, je n'arrive pas à savoir si elle veut me parler d'elle ou d'une "amie" soit disant. Hm. Je suis sceptique. « En voilà une très bonne question. » dis-je alors simplement, me levant du canapé pour me diriger vers la cuisine. « Tu veux quelque chose à boire ? » demandais-je à la jeune femme alors que je me servais un verre de jus d'orange. Je revenais ensuite à côté d'elle pour tenter de répondre à ses questions. « Tu sais, c'est pas quelque chose que tu contrôles. Pour moi, on est pas attiré par un sexe, mais par une personne. » Vrai non ?

En même temps, j'étais grave mal à l'aise de parler de ça. Fallait dire que c'était pas commun comme sujet et puis.. Peut être que j'avais peur des jugements aussi. Et j'voulais surtout éviter une réaction à la Sam. Parce que disons que ça avait été un peu violent et j'voulais pas avoir plein d'histoire alors que j'étais une pro pour les éviter. Ouais, donc autant dire que c'était pour une amie, ça passerait probablement comme ça. Mais j'pense qu'on pouvait sentir mon malaise à des milliers de kilomètre à la ronde, j'avais même pas été capable de le regarder en posant ma question et en plus, je m'étais mise à rougir considérablement. En gros, j'étais pas crédible et il avait déjà probablement compris que c'était pour ma personne. Juste de l'eau s'il te plait. J'inspirais profondément essayant de me détendre pour peut être paraître un peu plus crédible. Juste un peu quoi. Ouais je vois.. Mon dieu, si Célestine pouvait voir les choses sous cet angle aussi ce serait vraiment pas mal. Sauf que ce n'était pas le cas et qu'elle était totalement homophobe. De quoi me mettre considérablement dans la merde si j'venais à vraiment être attirée par le même sexe que moi. Mais du coup, comment tu sais si avec cette personne c'est plus qu'amicale ? Ouais parce que moi, j'étais un peu perdu là.

J'avais toujours été le gars qui lui donne des conseils, et ce, depuis que nous nous connaissions. Je ne saurais même pas dire depuis combien de temps je connais Jordan, mais cela doit faire presque dix ans en fait. Voire plus. C'est grâce à son papa que j'ai la chance de l'avoir rencontré. Quand j'ai commencé à venir chez eux, elle était si petite, vers les dix ans. Je l'ai vu grandir en quelque sorte, et je tiens énormément à elle désormais. C'est quand elle se pointe chez moi, comme ça, sans prévenir, que je sais qu'elle a besoin de moi. Nous ne sommes pas du genre à nous appeler trois fois par semaine, mais dès que l'un ressent le besoin de voir l'autre, nous trouvons toujours le moyen de nous voir. Alors que Jordan vient d'arriver dans mon appart, je vais nous servir à boire et reviens m'asseoir directement sur le canapé. Elle a vraiment l'air mal à l'aise, je n'aime pas trop cela, mais je reste impassible. Je pense deviner pourquoi elle est ainsi. Buvant une gorgée de mon jus de fruit, j'esquisse un petit sourire amusé quand la jeune femme me pose toutes sortes de questions sur l'orientation sexuelle de son "amie". J'ai vraiment l'impression d'agir comme son grand frère, ça me touche qu'elle vienne me demander cela à moi. « Tu le ressentiras - enfin ton amie le ressentira. » commençais-je, lui adressant un petit clin d'oeil pour lui montrer que j'avais compris sans la brusquer davantage. « Si en présence d'une certaine personne, ton amie n'est pas tout à fait à l'aise ou qu'elle pense à l'embrasser par exemple, ça veut peut-être dire qu'elle en veut plus. » expliquais-je en essayant d'être le plus clair possible. « Prenons un exemple. Est-ce que tu te sens attiré par moi ? » En disant cette phrase, j'avais envie d'exploser de rire, mais au moins elle verrait peut-être la différence entre moi et la personne par laquelle elle se sent attirée. Héhé.

Puis merde, c'était compliqué de comprendre sa sexualité. Genre vraiment. Moi j'étais complètement paumée, j'avais l'impression que j'arriverais jamais à trouver une réponse et ça me frustrait. Surtout que.. J'étais novice dans tout ça. J'avais toujours trouvé les garçons assez charmant mais Tamsin m'avait embrassé et Tam, c'était une fille. Puis peut être que y avait que elle que je trouvais jolie. Ou autant, ce n'était que l'euphorie du premier baiser. J'en savais rien et ça me frustrait. Putain quoi. Alors ouais, en solution je m'étais dirigée vers Kol. Peut être parce qu'en dehors de Sam qui avait envie de me fusiller ces derniers temps, c'était la personne en qui j'avais le plus confiance. Y avait des années qu'il était dans ma vie. Quand j'piochais dans mes souvenirs, il était présent dans la plupart. Disons que pour moi, c'était dans la logique des choses de venir le trouver quand j'avais besoin de parler un peu. Et de toute façon, j'savais que c'était la même chose pour lui. Malgré notre écart d'âge, il n'hésitait jamais à s'confier ce qui pouvait sembler bizarre puisque j'étais plus une gamine qu'autre chose. Bref, il avait très bien compris que je parlais de moi et pour la peine, je rougissais encore plus, fuck. Et là, il posait la question qui avait le mérite de m'faire faire les yeux ronds genre j'étais choquée par ses paroles. Mais t'es vieux toi, me demande pas ça. J'voulais pas m'intéresser à un grand père t'sais. Mais j'aime bien les garçons, t'sais genre Zach ? Bah.. Il me plait toujours autant alors j'comprends pas pourquoi.. Enfin je.. Ouais bah t'façon il avait comprit, pas besoin de faire des manières en continuant de mentionner cette pseudo amie.

J'appréciais vraiment mon amitié avec Jordan, car au moins, il n'y avait jamais eu d'ambiguïté entre nous. Je crois moyennement à l'amitié fille-garçon d'habitude, mais ce sont des relations comme celles que j'ai avec Jordan qui me donnent de l'espoir pour que ça fonctionne. C'est un peu mon petit bébé cette fille, et bat les pattes, le premier ou la première qui lui fait du mal, je le tue. Ou je le brûle #jesuispompier. J'explose de rire quand elle me traite de papy, non mais oh, faut pas abuser non plus. Je suis encore super beau, super musclé et tout. Mon égo en prend un coup là. « Vieux ? J'ai vingt-deux ans abuse pas. » rétorquais-je, toujours amusé par la situation, car je suis plus près des trente ans que des vingt là. Je me dis que je suis dans l'année de passé une troisième décennie, c'est chaud quand même. Mais alors que nous discutons, je sens que Jordan perd pied et qu'elle ne trouve plus ses mots. Je me rapproche d'elle, attrape son visage de mes deux mains pour fixer son regard. « Respire mon chat. » J'esquisse un petit sourire avant de venir déposer un petit bisou sur son front, j'essaie de tout faire pour la rassurer. Je n'aime pas la voir comme ça. « C'est qui cette fille ? Raconte moi. » Oui, j'en avais déduis que c'était bel et bien une fille qui lui faisait tourner la tête.