J'aurais aimé faire quelque chose. J'aurais aimé pouvoir lui parler calmement, sans la menace de son arme et tous ces idiots qui lui hurlaient dessus qu'il était fait comme un rat. J'aurais aimé lui montrer qu'il n'était pas qu'un numéro, qu'un invisible. Que personne, absolument personne ne l'est. Que chacun compte pour quelqu'un, que chacun a sa place. Qu'il comptait, qu'il avait sa place. Mais je n'ai rien pu faire. Il a menacé de me tuer parce que j'aidais Lou et Maxime, puis il m'a totalement oublié. Je n'ai pas réussi à lui adresser la parole. Je n'ai pas réussi à le sauver lui. Ni même Lou. Je n'ai servi à rien. J'ai assisté à deux pertes humaines, impuissante. Voir l'incompréhension de Charlie me tue intérieurement, j'ai presque envie de lui dire que je divague complètement et qu'elle ferait mieux d'oublier tout ça, mais elle mérite la vérité. Soudainement son visage change et j'en déduis qu'elle a compris. Elle se couvre le visage et éclate en sanglot ce qui me fend littéralement le coeur. Il était perdu. Il.. il ne savait pas ce qu'il faisait. dis-je, essayant de retenir mes larmes. Je dois être forte pour elle. J'aimerais la prendre dans mes bras, mais j'ai peur de la brusquer, alors je ne bouge pas. Encore une fois, je me sens inutile.

Amen tentait de me rassurer en disant qu'il était perdu, qu'il ne savait pas ce qu'il faisait. Soudain son discours un peu étrange de toute à l'heure prenait tout son sens. Elle avait essayé, tant bien que mal, de préparé le terrain avant de m'annoncer ça. Mais comment préparer le terrain pour annoncer une telle chose ? Je balançais ma tête en arrière, essuyant mes larmes rapidement.  « Et t'as vu tout ça ? » Lui demandais-je la voix tremblante. J'étais dévastée mais instinctivement je m'inquiétais pour elle. Elle devait être dans un sale état aussi après avoir assisté à ça. Je me tirais du canapé pour la prendre dans mes bras, la serrant contre moi, sanglotant toujours. « Merci de me l'avoir dit... » ajoutais-je. Au fond je lui en voulais peut-être un peu de n'avoir rien fait pour éviter l'acte désespérer de Gus, mais je ne savais pas si j'aurais pu faire quelque chose à sa place...

Les mots sortent de ma bouche, tant bien que mal et je parviens à lui faire comprendre que l'homme qu'elle aime est mort, après avoir complètement péter un plomb. J'aurais voulu être plus.. diplomate, lui annoncer les choses différemment, être mieux préparé. Mais au fond, comment peut-on être diplomate et préparée à annoncer la mort de quelqu'un ? Je la vois se frotter les yeux, alors qu'elle se met à s'inquiéter pour moi parce que j'ai assisté en direct malgré moi à la mort de Gus. Elle me prend dans ses bras et me remercie de lui avoir dit. Je la serre fort, tout en lui murmurant que je suis désolée. J'ai fait ce que j'ai pu, mais ça n'a pas été assez et je le regrette fortement. Désormais, il n'y a plus qu'à prier pour lui, je crois. Je brise l'étreinte qui nous lie lorsque mon téléphone vibre plusieurs fois d'affilé, comme le signal d'une mauvaise nouvelle, encore. Je le sors de ma poche et parcours les messages, la peur au ventre. Je n'aurais pas la force de supporter une autre mort, pas ce soir. C'est un message de Rome, ce mec c'est l'amour de ma vie. On a pas de lien du sang, mais il est ma famille, mon grand frère. Il n'est pas blessé, mais très inquiet pour moi et m'annonce qu'il vient me chercher. Je lève les yeux vers ma colocataire. C'est Rome.. il veut me voir. Il est très inquiet. Je.. ma voix se coupe brutalement. Je me sens coupable. Est-ce que quelqu'un peut te rejoindre ? Autrement, je reste ici avec toi. Je ne peux l'abandonner dans sa peine, même si l'envie de voir Rome et de pouvoir lui sauter dans les bras après toute la peur que j'ai ressentit pour lui me ronge de l'intérieur. Elle hoche la tête et attrape son téléphone, avant de m'annoncer que sa meilleure amie la rejoint. Je me sens soulagée. Elle ne sera pas seule et je vais pouvoir serrer Rome dans mes bras. Je me lève, lui fais un bisous sur la joue et la préviens du fait que je suis disponible ; un coup de téléphone et je débarque, avant de claquer la porte. Quelle journée.

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