Le programme de sa soirée : un date avec elle-même. Après une journée de cours intense, Imogen se préparait pour un moment de détente dans sa baignoire. Après l'achat de nouvelles huiles essentielles, sa course se terminait dans une librairie qu'elle aimait particulièrement arpenter. Caressant les couvertures des nombreux livres qui s'offraient à elle, le regard de la rousse ne savait plus où se poser devant ce choix indécent. Il n'y connaissait pas grand chose en roman policier, mais elle était prête à assouvir sa curiosité. Attrapant le premier livre du genre qui lui tombe sous la main, elle le retourne pour lire le résumé aguicheur. Elle en oublie les personnes autour et la fermeture imminente des lieux, elle fait abstraction des pas qui se rapprochaient d'elle, si bien qu'elle ne comprend même pas quand les premiers mots de l'inconnu lui sont prononcés. _ Mmh ? Elle redresse la tête et durant une fraction de seconde, la surprise est lisible. L'homme qui, il y a quelques jours, lui avait sauté dessus dans l'ascenseur. Blum repose aussitôt le livre avant de faire le tour de l'étalage pour mettre de la distance. _ Si j'ai besoin d'aide, j'irai trouver le vendeur. Ses sourcils se dressent en continuant de le regarder. Qu'il ose s'attarder.

Repousser des hommes, c'était devenu un reflexe. Avant même de réfléchir à l'optique de se faire aborder, une distance était créée pour permettre aux deux parties de garder la tête froide. Tout comme la première fois, cette rencontre fait l'effet d'une douche froide. Imogen aurait presque l'impression que l'inconnu la surveille et commencerait à se demander si le hasard n'était qu'un concept fumeux pour expliquer sa présence. Flippant. Quand il prend la parole et évoque justement de leur premier échange, Imogen préfère garder le silence, les yeux rivés sur le premier bouton de sa chemise, attendant simplement que l'instant passe en faisant l'autruche. Elle lui reconnaît de l'audace quand il prend sa non-réponse pour une ouverture ; elle n'a que faire de ses conseils littéraires. _ Attends. Ses sourcils se froncent et ses yeux bleus reviennent sur son visage. _ Tu penses réellement qu'avec un simple désolé, cela me donne envie d'entendre tes conseils ? Elle pouffe de rire, fascinée par la stupidité du type. _ Tu m'as sauté dessus comme un assoiffé en manque d'alcool ! Blum n'y connaissait sûrement rien en roman policier, mais elle saurait lui indiquer que les réponses qu'il cherchait, il pourrait certainement les trouver chez un professionnel de la santé plutôt que sur le papier. _ Au revoir. Elle insiste sur les syllabes d'une voix douce et d'un sourire meurtrier.

Il a l'air perdu à chaque fois qu'il pose les yeux sur elle, ne sachant plus comment réagir quand elle se trouve dans son périmètre. Mettre des distances entre eux est la meilleure idée qu'elle trouve pour lui faire comprendre qu'il doit repartir. Quand cela ne fonctionne pas, Imogen lui sert le sourire qu'elle adresse aux victimes de ses propos cinglants. Elle aura sa peau, qu'il le veuille ou non, que ce soit en douceur ou avec violence. Son sourire se transforme en satisfaction d'avoir enfin la paix pour choisir le livre qui occupera quelques heures de sa soirée. Elle fut surprise que les lumières s'éteignent cinq minutes plus tard, la coupant dans la découverte d'une quatrième de couverture. Immy redressa les yeux, en cherchant autour d'elle pour se rendre compte qu'elle était seu-. Ses billes bleues se tournent vers sa voix et pendant un instant, son cœur s'emballe quand elle réalise qu'elle est enfermée avec un type qui, la semaine précédente, a essayé de lui sauter dessus alors qu'il était alcoolisé. Tous ses warnings passent au rouge dans son cerveau et l'instant d'après, elle tape à la porte à ses côtés, la peur dans le regard. _ HEEEYY ! S'il ne se faisait pas entendre, elle n'avait aucune chance de son côté. Reprenant des distances, elle attrapait son téléphone avec espoir et aussitôt, désillusion. _ Ça ne capte pas ici. Elle était coincée dans le scénario d'un début de film d'horreur : la jolie demoiselle en détresse et le psychopathe. _ C'est encore une de tes idées pour attirer l'attention ? qu'elle demande sans se dégonfler et sans bouger parce que dans le noir, elle n'a plus aucune idée d'où elle se trouve.

L'inconnu qui tombe sur elle par hasard, et qui insiste pour lui parler, ne la met pas en confiance pour rester à proximité de lui. D'autant plus quand ce n'est pas la première rencontre hasardeuse et surtout, chaotique. Inspirant profondément, elle reprend sa lecture quand les pas s'éloignent, mais est rapidement interrompue par l'extinction des lumières et la fermeture du rideau métallique à l'entrée. L'obscurité crée aussitôt un malaise chez la jeune femme qui imagine le pire quand la réalité de la présence du brun lui revient de plein fouet. Certes, les accusations n'étaient pas très classe de sa part, mais la vision du hors réseau sur son écran de téléphone venait à lui donner le tournis tant la situation la terrifiait. _ Okay, okay qu'elle souffle de sa voix qu'elle tente de maitriser. Elle n'avait aucune envie d'envenimer les choses maintenant qu'elle était - tout comme lui - en position de faiblesse. Des vagues souvenirs de jeunesse remontaient à la surface et il lui fallut quelques minutes pour se reprendre et contrôler sa respiration. Dieu merci, l'obscurité camouflait toutes ses peines. Un raclement se fit entendre de sa part avant qu'elle ne reprenne contenance. _ Peut-être qu'il y a une porte à l'arrière ? Autant elle était déjà venue chercher des livres, autant elle n'avait jamais prêté attention aux lieux.

Entre la situation et la personne avec laquelle elle se trouvait, Imogen avait bien du mal à garder ses émotions pour elle. Faisant de son mieux, elle se retrouvait malgré tout à manquer de confiance et à le faire comprendre. Après avoir retrouvé ses esprits et remis ses pensées au clair, elle prit sur elle et décida de le considérer comme une personne sans histoire avec qui elle pourrait s'entendre pour les heures suivantes. Après tout, ils avaient un but commun qui était de s'échapper de la boutique et une fois chose faite, elle pourra oublier dans son bain.
Comme bon nombre de magasin, la librairie avait surement une porte de sortie à l'arrière du bâtiment et espérait que celle-ci soit une issue de secours leur permettant de partir rapidement. Son sourire s'effaça dès la seconde où l'inconnu annonça que la situation était inchangée. Elle s'agaça d'un soupir quand il fit de l'humour, mais le mima en s'asseyant un peu plus loin quand il prend cette initiative. _ Tu t'appelles comment déjà ? Aucune idée si cette information a déjà été en sa possession, de toute façon, impossible de réfléchir à autre chose qu'à une solution.