Trois heures du matin bien tapées, au volant de ma Lamborghini, je roulais nerveusement le long de Charles River, ignorant mon compteur qui s'affolait pour juste me concentrer sur ma destination. Il y a à peine une heure de ça j'avais commencé à recevoir des messages de Brinley, visiblement totalement sous l'emprise de stupéfiant. Clairement ça me gonflait. Ayant très peu d'estime pour les personnes qui prenaient ce genre de merde, j'avais du mal à faire la part des choses et à rester zen. Constater que la fois précédente où elle avait fumé un joint pour fêter les partiels n'était en fait à priori pas si exceptionnel que ça me décevait énormément. Et le pire, c'est que je m'agaçai encore plus de me rendre compte à quel point sa personne avait autant d'impact sur moi. J'aurais dû m'en foutre, tout simplement passer à autre chose en faisant définitivement une croix sur elle. Sauf que... non. Ca me prenait la tête, et ce de plus en plus à chaque minutes qui s'écoulait. Et voilà maintenant qu'elle ne me répondait plus. Imaginant milles scénarios plus catastrophiques les uns que les autres, j'avais abandonné mon lit pour aller directement voir ce qu'il se passait. Je n'avais même pas mandaté Kenneth, trop pressé d'arriver sur place et m'assurer qu'elle était en un seul morceau. Ses colocs j'en avais rien à foutre, mais elle.. Enfin j'arrivais sur place. Me garant à l'arrache je me dépêchais de grimper les étages, gorge nouée par l'appréhension. « Brin ? T'es où ? » lançai-je en rentrant dans l'appartement sans même prendre la peine de frapper.

Vison brouillée, téléphone en main, pensées qui se contrôlaient pu du tout, j'envoyais des messages à quelques contacts. Je rigolais toute seule, putain que ça faisait du bien d'être dans cet état. C'est comme si je me sentais de nouveau vivre, comme si tous mes soucis de la vie quotidiennes existaient pu ou avaient jamais existé. Ce que j'avais consommé c'était beaucoup plus fort qu'un simple joint inoffensif. Le stock était incroyaaaable, wow, c'était le paradis sur terre. Je souriais comme une débile devant mes échanges avec Marcus, faisais un finger devant mon écran à la conversation avec Levy et riais devant ma conversation avec ma cousine. Oh Marcus, j'voulais tellement qu'il vienne. Il manquait quelque chose de grandiose, ça serait la meilleure soirée de sa vie. Quelques échanges et pouf, mon esprit se focussait sur autre chose et je délaissais mon téléphone qui était à dix pour cent de batterie. J'étais complètement défoncée, j'suis sûre que j'étais incapable d'épeler mon prénom, mh. « BRINLEEEEEEEY. B R I N L E Y» lâchais-je, pensant à voix haute ce que j'avais pensé dans ma tête y'a quelques secondes à peine. Les mecs avec qui j'étais se foutaient de ma gueule, une de leur copine me faisait danser et je manquais de tomber en loupant des pas. J'avais la tête qui tournait, c'est comme si je venais de mettre ma vie sur pause le temps d'une nuit. On a qu'une vie à vivre pas vrai? C'est ce qu'ils disent tous pourtant, me disent tous. Après quelques minutes, je me retirais du groupe pour souffler un peu, j'avais tellement chaud. Y'a pas d'air ici ou quoi? J'étais partie dans ma chambre, ouvrant la fenêtre le plus possible pour aérer la pièce avec la température glaciale. « Brin ? T'es où ? » Hein? On me cherche? J'arrive senoritooo. T'es qui mec ?! BRIN? C'est qui ce plouc? Au moment où je sortais de ma chambre, je vis un beau gosse. Grand, brun, sexy de dos jusqu'à.. oh, Marcus avec cet air affolé. «Ohhhh Marcus t'es venu. » disais-je en lui sautant dessus.

En quelques secondes à peine j'analysais la situation, jetant des coups d'oeil à chaque coins de l'appart. Quelques gars en train de faire la fête, une nana debout sur la table en train de danser, et cette odeur écœurante de renfermé mêlé à la beuh. Tendu par l'appréhension, je cherchais Brin du regard, ignorant la musique qui résonnait à mes oreilles et les bouteilles qui jonchaient le sol dans un style de beer-pong improvisé, quand un type me barra le passage. « T'es qui mec ?! BRIN? C'est qui ce plouc? » lança-t-il avec sa tête de shooté, se rapprochant un peu trop à mon goût. « Eloigne-toi, merci » lançai-je la mine écœurée, tout le mépris du monde sur mon visage. A tout moment je me choppais la syphilis rien qu'à respirer le même air que lui. Puis je voyais son regard qui se portait derrière moi et je me retournais... juste à temps pour attraper Brin qui me sautait dessus. Une part intérieure de moi souffla, rassuré de la voir debout et non pas en train de faire une overdose dans un coin. L'autre ne décolérait pas. « Pourquoi tu réponds pas à mes messages ?! » répondis-je, agacé. Je me libérais de son étreinte pour la regarder, la sentant tituber sous mes mains. « Bordel mais qu'est-ce que t'as pris ? » demandai-je, ahuri et inquiet de la voir si défoncée.

Je me ruais sur lui dans l'euphorie, tellement heureuse de le voir ici. L'essentiel c'est que j'avais su me montrer persuasive pour qu'il débarque comme ça, le reste j'en avais rien à foutre. L'odeur de son parfum que j'adorais chatouillait les narines, ça me rassurait de l'avoir face à moi. Je le serrais fort fort dans mes petits bras, comme si ça faisait une éternité que je l'avais pas vu. Même plus que l'éternité, j'avais pu la notion du temps. « Pourquoi tu réponds pas à mes messages ?! » Je fronçais les sourcils, essayant de comprendre pourquoi il m'engueulait alors qu'il se libérait de mon emprise pour mieux me détailler de la tête aux pieds. « Euh.. je sais pas.. » disais-je en cherchant mon téléphone, je l'avais pas sur moi. « J'crois que je l'ai perdu quelque part ! » Dans cet appartement du moins, j'ai pas souvenir d'être sortie à l'extérieur. Je répondais comme si c'était banal de le perdre, comme si la situation n'était pas dramatique. Mon sourire s'élargissait un peu plus en observant Marcus, ce mec était la perfection incarnée. Mon sexy boy à mooooi. Par contre j'avais la tête qui tournait, je reculais légèrement et d'un mouvement, je titubais. « Eh bien figure toi que.. » Je m'apprêtais à lui raconter la découverte extraordinaire du moment mais l'un des mecs s'interposait entre nous. Tu vas te casser? Elle a pas besoin d'un babysitter. Je regardais les deux gars se défier, héhooo je suis là. « C'est mon invité, pas l'tien. » répondais-je en prenant la main de Marcus pour l'emmener avec moi plus loin, suivi de ma démarche titubante.

Elle était debout, elle respirait, tout va bien. Ou pas. Le soulagement n'était qu'à moitié présent tant la voir dans cet état me mettait sur les nerfs. Un seul regard suffisait pour comprendre à quel point elle était défoncée, à l'ouest, tout juste consciente de ses faits et gestes. Le sourire béat qui étirait ses lèvres aurait presque pu être mignon si je n'étais pas aussi tendu. Pourquoi est-ce qu'elle s'était droguée ? C'était quelque chose qu'elle faisait régulièrement ? Mille et unes questions se bousculaient dans ma tête sans que je parvienne à faire le tri. Je soupirai légèrement en comprenant qu'elle avait carrément perdu son téléphone, d'où le fait qu'elle ne m'avait pas répondu. Non mais sérieux... « Tu vas te casser? Elle a pas besoin d'un babysitter. » Lui, s'il continuait, j'allais me le faire, shooté ou pas. « Parce que tu sais mieux qu'elle de quoi elle a besoin peut-être ? » lançai-je, faisant un pas vers lui dans un air de défiance. Mais Brin intervenait bien vite, m'emportant avec elle à l'écart dans un mouvement rapide et totalement instable. Instinctivement ma main serrait un peu plus la sienne et ma mâchoire serrée par la tension se relâchait. « Tu tiens à peine debout... » commentai-je en arrivant dans ce que je devinais être sa chambre. « Regarde-moi » dis-je en scrutant son visage, m'arrêtant sur ses yeux voilés. « Pourquoi tu fais ça... ? »

Késaco le combat de coqs là, calmos. Mon coloc connaissait pas le tempérament de Marcus et lui, il connaissait pas le tempérament de mon coloc, vous m'suivez jusqu'ici? La bonne nouvelle dans tout ça, c'est que moi si. En plus, j'avais pas besoin de la permission de qui que ce soit sous ce toit pour inviter qui j'voulais. Content ou pas, c'était pareil et il pouvait aller voir ailleurs si j'y étais. « Parce que tu sais mieux qu'elle de quoi elle a besoin peut-être ? » Oh flemmmme, battez-vous pas svp. J'vous aime, fin différemment, peace & love vous connaissez, non? Tant pis, j'intervenais en éloignant Marcus pour le guider jusqu'à ma chambre. Un) pour qu'il se calme, deux) j'veux pas gérer une bagarre, trois) j'ai toujours chaaaud, en plus Marcus m'donnait encore plus chaud. Mes mouvements étaient aux ralentis, mon cerveau aussi, tout. « Non c'est pas vrai. » Pourtant je m'appuyais contre le premier meuble près de moi, le sol tournait, non en fait c'était ma chambre qui tournait. J'avais mal au coeur, des nausées, good. Métaphoriquement parlant j'étais sur un bateau en pleine tempête. Ses mains se posaient sur mes deux joues, me forçant à le regarder. « On t'a déjà dit que t'avais d'beaux yeux? Incroyable. » Est-ce que je lui avais déjà dit? Si c'était pas le cas, maintenant il le savait. « Faire quoi? Il manque plus d'info pour que je comprenne. » Je répondais à côté de la plaque, je captais rien.

Une fois dans sa chambre j'essayai tant bien que mal de me calmer, bien trop sur les nerfs à cause de l'autre débile et de l'inquiétude qui m'avait bouffée jusque là. J'essayai de me concentrer sur Brinley, sauf que ce que j'avais sous les yeux n'était pas pour me rassurer... Elle était totalement à l'ouest mais même dans cet état là, elle continuait de me contredire. « Viens t'asseoir » dis-je en la voyant se tenir tant bien que mal à un meuble, sans lui laisser le choix. Une fois assise sur son lit je la détaillais du regard, désabusé face à la situation. Je levais les yeux au ciel en entendant me dire que j'avais de beaux yeux, ne pouvant empêcher un léger sourire de se glisser sur mes lèvres. « Ca, je te le ressortirai quand tu seras sobre crois-moi » commentai-je, essayant de rendre les choses moins dramatiques maintenant que je la savais, disons, plus ou moins en bonne santé. Mes mains glissaient de ses joues à ses épaules, me rassurant de la sentir sous mes doigts en chair et en os. « Te droguer. T'as pas besoin de ça » soupirai-je en la relâchant. Je me passais la main dans les cheveux, ne sachant que faire. Pas moyen de la laisser maintenant, j'allais pas réussir à être tranquille sinon. « T'as chaud ou quoi ? » demandai-je en voyant la fenêtre grande ouverte, frissonnant légèrement.

Il me guidait jusqu'à mon lit pour que je puisse m'y asseoir. J'étais beaucoup plus stable comme ça, les chances que je me casse la gueule étaient minimes maintenant. Je comprenais que dalle à ce qu'il se passait. J'essayais de faire fonctionner mon cerveau pour qu'il suive le fil de la discussion qui.. j'crois ne voulait absolument rien dire. Je penchais ma tête sur le côté, plongeant mon regard dans le sien. « Hééé ce qui se dit ici reste ici. » D'où il allait utiliser ça contre moi? Wait, j'avais un meilleur stratagème pour l'empêcher de faire ça. Je savais pas encore quoi, fallait me laisser du temps pour réfléchir. Parce qu'entre ça et cette étrange sensation qui m'envahissait, c'était archi compliqué d'être concentrée. Genre là j'voudrais bien qu'on m'explique pourquoi les murs bougeaient, pourquoi je voyais double et flou. « J'ignorais que t'étais le porte parole du mouvement anti drogue. » disais-je en restant dans cette même position, c'était quoi les arguments qu'il allait me sortir? J'étais bien dans cette ambiance moi, là où tout était simple et sans prise de tête. Omfg rien qu'imaginer Marcus être un vrai porte parole et tout, j'explosais de rire. Si seulement il voyait sa tête en ce moment, où est mon téléphone j'veux le prendre en photo. « J'vais fondre comme un glaçon si je reste ici avec toi. » soufflais-je en me relevant difficilement pour me rapprocher de la fenêtre grande ouverte. C'était beaucoup mieux comme ça, j'avais pu l'impression d'être dans un sauna.        

C'était totalement déroutant de la voir ainsi. Jusqu'à présent, je ne m'étais pas douté qu'elle prenait des drogues dures et à présent, je commençai même à me demander si elle en prenait régulièrement. Je n'aimais pas ça. J'avais une piètre estime de ceux qui tombaient dans ce genre d'addiction. Et là à cet instant, je ne savais plus quoi faire de toutes mes certitudes, un peu comme tous les sujets qui touchaient Brinley de près ou de loin. Je me moquais gentiment d'elle, essayant ainsi de me détendre un peu et de ne pas la kidnapper pour l'envoyer direct en centre de désintox. Voyant que la discussion tournait dans le vide, je soupirai face à sa remarque, comprenant vite que ce n'était ni le lieu, ni le moment pour espérer avoir une conversation sérieuse avec elle sur le sujet. D'autant plus quand elle se mit tout à coup à rire sans raison, de ce rire de droguée à côté de ses pompes. « C'est ça marre toi, au point où on en est » commentai-je sous ses rires. Puis soudain elle se relevait pour s'approcher de la fenêtre, faisant des sous entendus qui me perdaient encore un peu plus. Quoi je lui faisais de l'effet là ? « Tant que tu sautes pas » ironisai-je. Fouillant dans la poche de mon pantalon je me sortais une clope et l'allumais, profitant de la fenêtre ouverte. Après tout, c'était pas elle qui allait me faire la morale là pour fumer dedans.

J'avais l'air pitoyable, probablement hein, d'un point de vue extérieur. Jusque-là, j'avais jamais remarqué à quel point il abordait toujours cet air sérieux. Heureusement que j'avais de l'humour, parce que j'arrivais à faire en sorte qu'il arrête de froncer les sourcils. Voilàààà que c'était mieux comme ça, j'avais pu l'impression d'avoir un flic devant moi avec une face de poker face. « HEEEY SALUT LES GENS ! » criais-je par la fenêtre, en envoyant la main. Ça me pris un moment avant de capter que c'était panneaux qui bougeaient à cause du vent, wowwwww gênant. Pas grave, personne a vu ça. Je baissais les yeux vers le sol, analysant mathématiquement la hauteur de la fenêtre jusqu'en bas. « Aucune chance, j'veux pas finir en crêpe écrasée. » Rien que ce mot me donnait faim, tiens c'était quand la dernière fois que j'avais mangé? Il était quelle heure? J'avais pu du tout la notion du temps, quelque part parmi les petites heures du matin j'imagine. M'éloignant de la fenêtre, je me rapprochais de Marcus qui venait de s'allumer une clope. J'étais outrée qu'il puisse fumer sans me proposer une clope, homme indiiiigne. Je la lui prenais des doigts sans lui laisser la moindre chance, avant de tirer une taffe et d'envoyer la fumée loin de son visage. Puis, la chanson de wild ones se mettait à jouer dans la pièce à côté. « C'est ma chanson préférée ! I heard you like the wild ones ooohh oohhh ! » disais-je en chantant, m'avançant vers lui pour venir me mettre à califourchon sur lui.