wicked game. — (( jude ))

des semaines sans l’avoir vu, prise par l’engrenage d’une vie professionnelle trop chargée et par le retour des vacances à assumer ; parce que t’as plus vingt ans elfy, faire la fête au milieu du summer camp c’est potentiellement plus de ton âge. tu lui as envoyé un message pour lui demander s’il avait ses enfants ce soir et pour savoir à quelle heure il teminait, sans plus entrer dans les détails pourtant, te contentant de l’attendre devant la clinique. ton casque à la poignée de ta harley, un deuxième pour lui sur l’autre, tu fais défiler l’écran de ton téléphone à l’aide de ton pouce en jetant des coups d’œil plus ou moins régulier vers l’entrée, en espérant qu’il apprécie ta surprise quand enfin il s’extirpera hors du bâtiment. de noir intégralement vêtue, ton tour de cou remonté sur ton menton pour découvrir ton visage de tes lèvres à ton front, t’espères qu’il passera pas à côté de toi sans remarquer que c’est bien toi qui te tiens là.

Un été tout à fait banal pendant lequel je n'ai fait que bosser comme un acharné, mais le plaisir d'avoir de temps en temps es nouvelles d'Elfy comme ce soir, où elle me demande à quelle heure je termine et si les enfants sont avec moi. Je sais pourquoi elle me pose la question, mais j'ai été surpris de ne pas avoir de ses nouvelles par la suite. Alors quand je sors de la clinique vers dix huit heures suite à ma dernière consultation de la journée, je suis surpris de la voir près de l'entrée sur sa moto. Un petit sourire se dessine sur mes lèvres et je m'approche d'elle, "Dis donc, tu devais être le cauchemar de tous les parents toi, non ?" Avec ses tatouages et sa modo, je vois bien le tableau. Sans vraiment lui demander, je prends le deuxième casque et je l'installe sur ma tête, enjambant la moto pour m'installer dessus, enroulant mes bras au niveau de sa taille. Je sais pas où elle m'emmène, mais j'suis prêt à me laisser porter.

pour tes déplacements, t’es équipée que de ta moto ; parce que t’as jamais investi dans une voiture, n’en voyant pas la nécessité au vu de ton train de vie et de tes besoins. t’es du genre à vouloir t’évader en sentant le vent contre tes vêtements, à vouloir sentir chaque vibration, à avoir la sensation de t’envoler sur ta harley. occasionnellement tu t’embarques sur un skate quand la distance entre ta destination et chez toi est moindre. sa silhouette qui s’approche de toi, son sourire que tu remarques aussitôt. les yeux qui se plissent légèrement, plutôt fière de ton coup, alors que ses paroles titillent ton ouïe. « lesquels ? ceux que j’ai kidnappé ou ceux que j’ai mangé ? » un sourire amusé qui se glisse aussitôt sur tes lippes ; c’est évident que t’es le grand méchant loup elfy. t’es celle qui mange la grand-mère et les trois petits cochons en même temps. ton casque que t’enfiles en même temps que lui après avoir remonté ton tour de cou sur ton nez, ses bras qui se glissent autour de ta taille et te font frissonner. un signe de main pour lui signifier que tu démarres et aussitôt la sensation de flotter dans l’air qui s’éveille en toi ; plusieurs dizaines de minutes à rouler jusqu’à vous retrouver sur les quais, garant ta moto et le laissant descendre pour en faire de même. tu te libères dès lors de ton casque pour l’accrocher à ton avant-bras, pivotant sur toi-même pour lui faire face. « ça va, t’as pas eu peur d’y laisser la vie ? » que tu lances d’un air malicieux. « je me disais que pour une fois, on pouvait manger un truc ensemble. je sais pas grand-chose de toi après tout, je veux y remédier. » parce que ça fait plusieurs semaines maintenant que vous vous côtoyez pour coucher ensemble mais t’as envie d’en savoir plus parce que, malgré tout, il t’intrigue jude. « mexicain ou irlandais ? j’ai pas réservé, je voulais te laisser le choix du resto. » galante.

Elfy a clairement le profil d'une ancienne membre de la Mather House et ça me fait rire, parce que ça a été ma maison de prédilection pendant tellement d'années quand je faisais mes études à Harvard. Elle n'a pas froid aux yeux et c'est facile de le deviner quand on voit comment elle m'a approché, après que je sois allé dans son salon de tatouage avec un de mes amis qui avait décidé de sauter le pas. Mais si on la croise dans la rue, avec ses tatouages, sa moto et son petit air malicieux, je pense qu'on peut très vite deviner quel genre de personne elle est. Bien sûr, il ne faut pas juger les gens par leur apparence, mais parfois, leur apparence reflètent exactement qui ils sont et c'est le cas d'Elfy. On ne se connait pas plus que ça, c'est vrai, puisque nous ne passons pas vraiment beaucoup de temps à discuter lorsque nous nous voyons. Je ris quand elle me demande de quels parents je parle entre eux qu'elle aurait kidnappé et ceux qu'elle aurait mangé et j'hausse les épaules, "Je parle de ceux qui se sont échappés justement.." Sans me faire prier, je prends le casque que je mets sur mon crâne et je m'installe derrière elle. J'ai déjà fait de la moto une ou deux fois par le passé, mais il y a vraiment longtemps et en tant que conducteur, alors passer derrière est une nouveauté pour moi. Pas désagréable pour autant. Lorsqu'elle s'arrête après une bonne dizaine de minutes, je descends et je secoue la tête, débouclant la sécurité du casque pour le retirer et lui donner, "Non ça va, j'ai eu des expériences de mort imminentes pires que ça", que je dis. La demoiselle semble vouloir apprendre à me connaître et je ne suis pas contre, même si j'aime bien la manière dont on fonctionne déjà, vraiment pas prêt à donner quoi que ce soit de plus que quelques heures de plaisir sous les draps (ou dans mon bureau, n'est-ce pas) de temps en temps. "Mh... Mexicain !", que j'annonce en pointant du doigt le restaurant non loin de là. On s'y rend, on nous file une table et je m'installe en face de la demoiselle, "Du coup tu veux apprendre à me connaître ?", que je demande avec un petit sourire en coin. "Qu'est-ce que tu veux savoir ?" Elle sait que je suis pédiatre, que j'ai ma clinique.. le reste de mon histoire est peut-être un peu moins fun, je ne vais pas mentir.

y a rien qui te freine ; parce que t’as été élevée comme ça, par ton père uniquement. et quand bien même il t’a traitée comme son joyau le plus cher, t’as toujours eu un côté garçonne assez prononcé ; du genre à foncer tête baissée, à pas te soucier du regard du monde autour de toi et à faire ce qui te plaît – dans la limité de la légalité en général. parce que, contrairement à ton père et au sien avant lui, t’es pas prête à baigner dans de sales affaires et à finir ta vie derrière les barreaux. mais tout ça, tu l’étales que très rarement ; simplement parce que t’estimes que ça a pas grand intérêt. si on te demande ce que font tes parents, t’as pas de mal à le dire évidemment ; parce que c’est loin d’être une honte à tes yeux. et pour ceux que ça dérangerait, la porte est grande ouverte. « ah, ouais, c’était des erreurs de débutante mais je me suis améliorée depuis, promis. » l’instant d’après, ton moteur vrombit et traverse la ville jusqu’à arriver à proximité des quais à south boston. manger, discuter, passer du bon temps sans se prendre la tête ; c’est tout ce que tu souhaites pour cette soirée.  « du genre ? » des expériences de mort imminente, toi, t’en as pas eu et tu t’en passes bien ; pas franchement attirée par la faucheuse quand bien même c’est pas quelque chose qui t’effraye. mais t’as encore pas mal de choses à faire là-haut alors elle t’attendra. son choix de restaurant qui se fait et auquel t’acquiesces, le suivant jusqu’à ce dernier pour t’installer à la table qui vous est donnée. les doigts qui glissent sur la carte pour l’ouvrir avant de plonger tes billes claires dans les siennes. « tout ? d’où tu viens, ce que t’as vécu… je sais même pas quel âge t’as. » tu sais pas grand-chose au final ; tu connais mieux son bureau que lui. « me dis pas que t’as soixante ans parce que je vais devoir aller au chiotte pour te poser un lapin. » que tu reprends, un rictus qui apparaît aussitôt sur tes lèvres, t’adossant dans ta chaise, ta carte reposée sur la table pour l’écouter, l’analyser, décrypter son âme.

C'est vrai que je n'ai pas donné beaucoup d'informations sur moi à Elfy et on ne se connait pas plus que ça. Cela ne me dérange pas plus que ça, parce que je ne me sens pas prêt à me rapprocher de quelqu'un autrement que physiquement, mais je ne vais pas non plus l'envoyer bouler si elle me propose qu'on discute un peu, comme elle semble décider de le faire ce soir. Je souris en coin quand elle semble intriguée par ma remarque sur mes expériences de mort imminente mais je ne réponds pas vraiment, parce que si elle veut apprendre à me connaître, elle va comprendre très vite de quoi je parle. On va au restaurant Mexicain et on s'installe à table, regardant le menu alors que je lui demande ce qu'elle veut savoir exactement. "En vrai j'en ai cinquante, je sais pas si ça change quelque chose..", que je lui dis sur un ton sérieux avant d'afficher un léger sourire. Je pose ma carte devant moi et j'hausse les épaules. "J'ai trente quatre ans, j'suis né à Boston et j'y ai toujours vécu. Comme tu sais j'suis pédiatre et je bosse peut-être un peu trop." Je regarde la serveuse qui vient nous servir deux verres d'eau en expliquant qu'elle reviendra sous peu pour prendre notre commande et je regarde Elfy. "Pour le reste, c'est une histoire extrêmement déprimante et je risque de te niquer ta soirée, donc je sais pas si tu veux vraiment prendre le risque" Entre la maladie, l'addiction, la dépression et la mort, mon passé est très loin d'être joyeux et j'ai peur qu'elle me voit un peu différemment si elle sait tout ça sur moi. Il fut un temps où ça définissait clairement qui j'étais, mais c'est de moins en moins le cas et heureusement.

tu sais pas grand-chose de lui, si ce n’est que tu commences à très bien connaître son corps pour le nombre de fois où t’as pu le voir et le sentir. mais, pour le reste, jude laisse un gros point d’interrogation dans ta tête. t’es pas certaine que ce soit franchement nécessaire d’en savoir plus mais t’aimes bien connaître les gens, surtout quand tu les vois de manière plus ou moins régulière, même si ça s’arrête au fait de prendre du bon temps ensemble. les doigts qui ouvrent la carte, tu souris en l’entendant dire qu’il a cinquante ans. « je me disais bien que j’avais vu des rides… » tu diras pas où mais le haussement de tes sourcils en dit suffisamment long sur cette blague vaseuse. et puis, tu l’écoutes répondre à tes questions. trente-quatre, boston. des informations que tu notes dans un coin de ta tête, un hochement de tête avant de répondre à ton tour : « ça nous fait deux points communs, c’est cool. » boston et le fait de trop bosser. pas dans le même secteur mais tu mentirais si tu disais que ton boulot était pas prenant ; pire, que tes deux boulots ne le sont pas. un coup d’œil à la serveuse qui dépose deux verres d’eau, un signe de tête pour la remercier et ton attention revient sur jude. « tu risques de niquer ma soirée qui t’est entièrement dédiée ? c’est con. » t’as pas franchement d’autre plan que de le voir, tu rentreras chez toi ensuite alors, est-ce qu’il va vraiment niquer ta soirée ? t’es pas sûre. « allez raconte, je t’écoute. »