elle se laisse tomber sur le canapé à côté de son meilleur ami. un long soupir franchit ses lèvres, elle ferme les yeux quelques instants. — on commande un truc ? j'ai la flemme de faire à manger. je suis épuisée. elle a changé les bandages de ses blessures - quelques égratignures, rien de bien méchant et sans doute moins grave que les blessures qu'elle se fait lors de ses fouilles. depuis l'accident elle n'a jamais le temps de se poser, le comité doit être sur tous les fronts pour rassurer les proches et trouver des solutions. au moins l'université est fermée pendant la semaine donc elle n'a pas de cours à dispenser et peut se concentrer sur la mairie. — je suis désolée, tu débarques à boston vraiment au pire moment. mais elle est contente qu'il soit là, au moins il apporte de la gaité à son quotidien un peu trop sombre.

Elle était posée à côté de moi, sur leur canapé. J’avais accepté de loger chez ma meilleure amie et sa femme, le temps de me trouver quelque chose. Je n’avais pas forcément le temps de me chercher quelque chose. D’autant plus que je repartais bientôt. Le boulot, ce qui venait de se passer sur Boston, ne rendait pas la vie calme. « Ca me va. Tu veux manger quoi ? » Demandais-je alors que je dégainais déjà mon portable pour aller sur l’application de livraison. « Pourquoi tu t’excuses ? C’est à cause de toi que ça s’est effondré ? » J’hochais de la tête, tout en riant. « De toute façon, même si je n’étais pas sur place, je serais venu… » Bien que je ne sois plus sur Boston depuis longtemps, il semblait que cette ville m’appelait. Tous mes proches y étaient : ma meilleure amie, mon frère, ma cousine, mon ancien amant, ma future stagiaire. C’est comme si cette ville m’appelait. Comme s’il y avait quelque chose qui ne s’était pas terminé ici. Kassim. « Faut que je te dise quelque chose. » Pas mon genre de me confier, mais j’en avais besoin. Mes derniers échanges avec l’homme en question me laissaient en questionnement.

Elle se se plaint pas de son état physique, ses plaies sont superficielles, les médecins ont simplement retiré quelques débris et gravats de ses blessures mais rien de méchant. Elle sait que certains participants sont encore à l'hôpital - beaucoup d'étudiants de l'université d'Harvard en plus. Mais toute cette agitation l'épuise, les réunions avec le comité, les réunions à l'université également, elle doit aussi composer avec ses recherches qui ne peuvent pas s'arrêter du jour au lendemain parce que malgré tout la vie continue. — J'sais pas, un truc gras qui réconforte. Avec du fromage, beaucoup de fromage. elle le mérite, qu'importe si c'est un hamburger ou une pizza, elle a pas envie de faire à manger ce soir et elle a envie d'un truc réconfortant. — Je sais mais à cause de tout ça je suis pas super présente à la maison pour profiter de toi. alors qu'elle l'a attendu de pied ferme et qu'elle avait déjà prévu tout un programme de retrouvailles. Elle tourne son visage vers lui, et hausse un sourcil. — Mh ?

Elle proposait quelque chose de bien gras, avec plein de fromage. Et en bon français que tu étais, tu pensais tout de suite à une fondue. Malheureusement, ça allait être compliqué ici. Ton doigt défilait alors vers les burgers. Toi tu voulais des frites. De bonnes frites bien croquantes. Tout en choisissant vous parliez. De quoi vous retrouver tranquillement. T'inquiètes pas, ce n'est que partie remise. Puis ce n'est pas comme si tu étais très présent non plus. Après lui avoir montré restaurant qui livrait et avoir tous les deux choisis, tu te calas bien dans le canapé. Pret, ou presque, à parler de Kassim. Je ne t'en ai jamais parlé. Parce que c'était de l'histoire ancienne, que ça ne servait à rien de ressasser les souvenirs. Mais ... Comment amener ça ? Tu ne savais pas par où commencer. Bon en gros, en arrivant de l'aéroport, je suis tombé sur mon ex. Ex ? Vraiment ? Est ce qu'on pouvait le définir comme ça ? Tu étais perdu. Enfin je ne sais pas trop si je peux l'appeler comme ça.. mais il a énormément compté pour moi.

Betsi elle a envie de profiter de son meilleur ami, de manger un plat gras et de rester sous la couette à regarder des séries toute la nuit. La seule autre chose qui pourrait lui remonter le moral c'est de la plongée en mer mais l'eau salée sur ses plaies encore ouvertes risque de la faire hurler de douleur. — Ouais, mais ça craint quand même. mais il est quand même là sur le canapé avec elle et c'est ce qui compte le plus, ça et qu'avec sa femme elles se portent bien. Elle se met en tailleur et tourne son visage vers son meilleur ami pour l'écouter attentivement, visiblement il a quelque chose d'important à annoncer et elle l'écoute attentivement. — Ton ex, qui c'est ton ex ? effectivement tu ne m'as jamais parlé de ça ! mais elle fronce les sourcils à la suite de ses propos. — Il ? elle est étonnée, elle ne savait pas que son meilleur ami aimait les hommes. — Commande moi deux menus, je crois qu'on va avoir une longue discussion là. Et parler c'est comme nager, ça donne faim.

Betsi et toi c'est une belle amitié. Vous vous entendez bien sans réellement savoir pourquoi. Mais c'est comme ça. Tu aimes sa compagnie. Tu aimes lui parler et te confier à elle, quand tu en ressens le besoin. Chose qui n'arrive que très peu souvent, mais qui peut arriver. Tu étais content de la retrouver et de pouvoir enfin te poser à ses côtés. Non tu n'étais pas revenu au bon moment, mais au moins tu pouvais être là pour elle, et sa femme. Au moins tu étais déjà sur place et tu avais pu les aider. C'est vrai.. et ça donne pas envie de retourner à un concert où quoi. Oui les séquelles resteront pas mal à Boston. Et tu ne sais pas pourquoi, mais tu avais besoin de te confier à elle. Peut être que cet effondrement te faisait te rendre compte à quel point la vie pouvait basculer en une fraction de secondes. Disons que j'ai essayé de mettre ça derrière moi. Tu te sentais gêné. Non pas de ce que tu lui racontais mais de ne jamais rien lui avoir dit. Oui... Tu te sentis rougir, et tu n'osas pas la regarder. Mais je suis pas gay hein.. enfin j'ai rien contre... Évidemment, sinon Betsi ne serait pas ta meilleure amie. Seulement, tu aimes bien trop les femmes pour aller vers les hommes. A ce point ? Tu sais c'est pas quelque chose de fou... Évidemment que si, tu ne voulais tout simplement pas l'admettre. Alors que tu lui pris ses deux menus, tu posas ton téléphone sur le côté. Bref.. je l'ai revu, on a pris un café.. et je pensais l'avoir oublié. Après 15 ans... Mais ce n'était pas le cas. Il était resté dans un coin de ta tête. Quelque part au fond de ton cœur. Et le revoir faisait resurgir tout cela. Tu ne savais pas quoi répondre à ses questions. Tu voulais le revoir oui. Mais pourquoi ? Est ce que ça serait une bonne idée ? Complètement perdu, tu avais besoin de l'avis de ta meilleure amie. D'un avis neutre. D'un avis féminin.

Ce soir elle n'a même pas fait d'effort vestimentaire pour passer la soirée, elle a enfilé un vieux jogging, ses deux chiens sont blottis contre ses jambes et c'est très bien comme ça. Elle n'a pas envie de se prendre la tête et son meilleur ami l'a déjà vu en pyjama quand ils étaient à l'autre bout du monde, après tout. — Tu sais quoi ? je déteste les concerts. En fait ça me soulait tellement que j'ai demandé à Ingrid qu'on sorte prendre l'air. C'est ce qui nous a sauvé ... sans ça elles auraient subit bien plus de dégâts physiques et psychiques, sans aucun doute. Elle sait que les personnes dans la fosse et les gradins ont été durement touchés lors de l'accident. Plutôt que de se triturer trop les méninges elle préfère écouter les confidences de son meilleur ami et au fil de ses propos elle hausse de plus en plus les sourcils. — Tu es peut-être bi, hein. il a pas l'air d'assumer quoique ce soit en tout cas, mais ça l'étonne pas Betsi et elle va pas s'attarder dessus pour l'instant. Parce qu'il avoue lui même qu'il n'a cessé de penser au jeune homme quinze ans après. — Et ça c'est passé comment, vos retrouvailles ?

Ce soir était une soirée tranquille. Tous les deux sur le canapé, il ne manquait plus que la bouffe qui allait bientôt arriver, et un petit film. Mais avant d'allumer la télé, tu attendais un petit peu. De quoi vous retrouver calmement San être parasité par quoique ce soit. Je t'avoue que je ne comprends pas non-plus.. être dans une foule.. même pas être capable de voir l'artiste qui chante. Beaucoup plus agréable d'être tranquille chez soi, sans qu'on te bouscule dans tous les sens. Certaines personnes collectionnent les concerts. Ce n'était pas ton cas. Trop de gens. Tu n'y trouvais pas de plaisir. Mhh.. je ne pense pas. Non pas que tu n'assumais pas. J'ai essayé après lui.. et crois moi qu'en bas, ça ne voulait pas. Tu n'as éprouvé de désirs sexuels qu'avec un homme, et c'est Kassim. Les autres... ce n'était pas pareil. Donc non, tu n'es pas gay, bi ou n'importe quel terme qui pourrait exister. Tu es tout simplement perdu. Bizarre ? Il avait été calme. Trop calme. Tu ne t'y étais pas attendu. Enfin tu ne t'étais pas attendu à le revoir de toute façon. C'est moi qui suis parti, sans rien dire. Je l'ai laissé ici, seul, sans explications.. Et maintenant que tu disais cela, tu te rendais compte à quel point tu avais du le mettre mal. Car oui, tu l'aurais très mal pris si ça avait été le contraire. Il m'a dit qu'il a été torturé par mon départ.. Mais à l'époque tu pensais réellement que c'était le mieux pour vous deux.

Ça lui fait du bien de discuter avec lui, de parler de tout ça c'est comme évacué quelque chose qui lui pèse. Elle n'a pas envie de pleurer mais c'est quand même dur de penser à ça, de penser qu'à quelques minutes près elle aurait pu être plus gravement blessée, perdre sa femme. — Je voulais y aller pour les associations, pas pour les artistes. Franchement voir Eminem je m'en foutais un peu tu vois. Mais je foutrais plus les pieds dans une salle de concert pendant longtemps.  pour l'instant elle préfère être dans son cocon, dans un milieu qu'elle connaît. C'est rare qu'elle aille à des concerts et les rares fois où ça se produit il se passe un drame. — Je suis pas certaine de vouloir ce genre de détails par contre. mais elle rit de la spontanéité et de la sincérité de son meilleur ami. Certes ils passent outre les tabous et partagent beaucoup de chose mais quand même. — Et pourquoi t'es parti ? elle le tape sur le bras au passage. — Et ça ne se fait pas de partir sans donner d'explications ! elle fronce les sourcils, visiblement contrariée. Il lui en parle pour avoir son avis, non ? Alors elle lui donne, tant pis si ça ne plaît pas. — T'es vraiment un enfoiré.

Les prochains jours n'allaient pas être faciles. Ni pour toi, ni pour Betsi ou encore d'autres. L'ambiance n'allait sûrement pas être des plus joyeuses en ville. Alors tu profitais de ce moment calme en compagnie de ta meilleure amie. Il y a pleins d'autres choses que tu pourras faire pour aider les associations. Lui dis tu pour la consoler, ou la soulager. De toute façon, tu ne pensais pas que les concerts auront de grand succès prochainement. Quoi ? Lui demandas tu innocemment. Non, ce n'était pas forcément votre genre de parler de sexe, alors oui, ça pouvait faire bizarre. Tu étais juste spontané, franc. Tu parlais en toute honnêteté, et tu voulais donc lui faire comprendre pourquoi tu ne te pensais pas bisexuel. Tu savais que tu te ferais taper sur les doigts, et tu assumais. Tu assumais tes actes. Parce que notre relation n'était pas saine.. Tu ne connais pas l'amour, tu ne sais pas ce que c'est d'aimer. D'avoir une relation saine. Mais tu savais que ce qu'il y avait entre vous n'était pas normal. Oui peut-être bien... Tu savais que tu n'étais pas un modèle. Tu ne cherchais pas non plus à être l'homme parfait. Bien au contraire. Betsi... on enchaînait les bon moments.. pour ensuite s'en mettre plein la gueule. Tu ne savais pas comment expliquer la chose. Parce qu'il fallait être dans la relation pour la comprendre. On se faisait plus de mal que de bien. Et le temps de quelques secondes tu te perdis dans tes souvenirs. Le sexe avec lui, c'était quelque chose... mais après, c'est comme si on s'envoyait chier pour... je ne sais pas.. ne pas s'attacher ? On n'acceptait pas que l'autre soit au dessus de l'autre. On voulait chacun avoir le dernier mot. Enfin tu me connais.. bah imagine un 2e moi ? Et pourtant une partie de toi espérait que cela ait changé, et tu espérais peut être pouvoir le retrouver.