@Sofia Dunn-Aguera Réunion à la con, j'sais même pas ce que je fais là. Pourquoi j'ai pris deux bubble tea aux goûts chelou à la place de la bière qui m'faisait envie. Peut-être parce que ça, ça nous ressemblait. Léger et sucré. La bille qui explose et fait monter ta glycémie. Quand est-ce qu'on a arrêté de saupoudrer nos vies de nos rires respectifs ? J'ai pas compris quand ça a glissé. J'aurai dû, je suppose. Mais j'vois pas ce genre de choses, tu sais. Cet été, ça m'a fait défaut du début à la fin. Le summum du type qui ne capte rien. Qui perd, presque, tout. Qui y tenait, pourtant, à ce tout. Alors je me bas avec la pellicule plastique sur le dessus, pour le percer avec ma paille sans en mettre partout. J'essaye avec le tien, aussi. Comme si j'avais peur que du thé sur tes doigts, entraîne une nouvelle faille dans notre désastre. Posé sur un banc face à la flotte, je t'ai prévenu un peu avant. Et je me demande si l'eau est froide. Si m'y noyer serait une bonne solution de sortie ; faire au moins semblant. Si m’abîmer un peu, te ferait m'aimer à nouveau.

@Horace Dawson C'est vide quand t'es pas là. La maison ne résonne pas, les murs ne vibrent pas et le canapé tremble pas. Plus de gros pas, de sourire et de regards complices. Plus d'histoires, de contes, de silences qui nous anime. C'est vide sans toi, et ça fait déjà deux semaines que c'est le cas. Je m'y habitue pas. Pourtant j'ai poussé pour tout ça, j'ai exprimé une colère que j'aurais dû contenir, j'ai usé de mots forts, mais comment faire autrement ? J'ai été mise de côté, seconde dans ton palier. La place que je déteste le plus au monde, venant de la personne que j'adore le plus, j'estime le plus. J'ai eu mal, alors j'ai repoussé. Je t'ai rejeté avant que ce soit qui me rejette. Enfant brisée. Peur de l'abandon, peur que tu sois entouré de mieux, que tu préfères autres. Alors la tête haute, je repousse, je te fais croire que ça vient de moi, que je l'ai décidé, voulu. Stupides traumas. Enfants brisés. "T'as pris avec le moins de sucre ?" quand les yeux retombent sur la boisson.  "C'est mangue et litchi ?" l'autruche qui ne voit pas l'être mais le plastique à côté de lui. S'assoit, prends quelques gorgées déjà, et attends qu'il commence. C'est un peu moins vide, avec toi à côté de moi.

@Sofia Dunn-Aguera J'étais paumé devant le truc, je le suis toujours autant, désormais que tu prends place à mes côtés. J'ai pas compris comment on a glissé. Pas capté pourquoi, dans cette idée de soirée reportée au lendemain, puisqu'un engagement déjà pris, une guerre s'était levée entre nos deux camps. Nous n'en formions qu'un, à l'origine. Le camp de ceux qui se moquent des gens comme nous, assis côte à côte sans avoir rien à se dire. Sans savoir qui commence. J'me suis excusé et t'entendais pas. Peut-être car j'ai toujours pas vraiment compris pourquoi je demandais le pardon. La faute ; quelle faute ? "T'as pris avec le moins de sucre ?" La bouche qui s'ouvre, et si j'ai toujours beaucoup de choses à dire, là, j'patauge. Sur une question aussi simple, je bois la tasse. C'est ce qu'il fallait que je fasse ? Tu m'l'a déjà dis, et j'ai encore rien écouté ? Combien de points à perdre, sur l'équilibre du sucre ? "C'est mangue et litchi ?" Il l'a dit, le type, quand j'lui ai demandé de me mettre le meilleur. Quand j'lui ai dis que tout reposait sur le mélange qu'il allait composer. « Euh.. ouais, ouais je crois. » Pour les deux. J'en sais rien ? Choisi ce qui marcherait le mieux pour toi. J'me noie dans les billes que j'avale tout rond, la main libre accrochée au banc, et le regard sur l'eau. Quand le silence m'étouffe plus que le sucre, j'en glisse un : « Les goûts sont dégueulasses ensemble. » Lèvres qui se soulignent, presque timidement, d'un fin sourire. A ne plus rien oser.