Touchée… et si l’eau ne lui arrivait pas que jusqu’aux mollets, il jurerait - rien qu’au regard interdit qu’elle affiche - qu’elle a coulé, a sombré, bien loin de vouloir répliquer comme d’accoutumé. Cette histoire de fœtus l’a écorchée beaucoup plus qu’elle n’en laisse paraitre et son caractère combatif en a pâti, baissant les armes à la première joute verbale.  « Tu sais quoi ? »  Ses yeux se heurtent aux siens dans l’attente d’une chute peut-être un peu plus réfléchie.  « Toi, tu te noies, » Pauvre Wendy… « et moi je vais retourner à l’hôtel. » Déjà ? Le soleil flirte avec l’horizon certes mais il n’est pas encore l’heure pour eux d’aller se calfeutrer.  Ils ont encore toute la soirée pour profiter des derniers jours de ce spring break. Pourtant elle tourne déjà les talons pour mettre ses paroles à exécution, reprenant le chemin de leur hébergement tandis qu’il la scrute, soucieux de la voir dans cet état apathique. « Et même pas tu restes pour jouir du spectacle ? » Qu’il râle, elle qui pourtant s’amuse depuis le début à le torturer, grisée lorsqu’elle le pense abattu et ambitionnant de le voir ramper à ses pieds. Non, elle est aigrie depuis janvier et rien ne saurait lui redonner le sourire, ou tout du moins ce rictus qui y laisse songer lorsque ses lèvres se tordent et parviennent à dérider malgré tout ses traits.

Elle continue à fendre lentement les flots, s’éloignant petit à petit, l’écume claquant sur sa peau alors qu’il n’a toujours pas bougé, scrutant le rivage à présent et cette étoffe qu’elle laisse derrière elle sans même une dernière fois la regarder. Ce sale caractère dont elle fait preuve lui coute cher mais pas cette fois puisqu’il prend la tangente pour se rapprocher du sable que les vagues viennent frénétiquement lécher, s’abaissant afin de récupérer le bout de tissu qu’il balance sur son épaule. Elle a pris de l’avance sur lui, continuant sa marche alors qu’il allonge le pas dans le but de la rattraper, de la détailler de biais, elle qui est toujours renfermée dans son mutisme princier. A croire qu’elle a décidé aujourd’hui de le faire chier en se montrant plus humaine que jamais, vexée pour une boutade si bénigne comparée à ce qu’ils ont pour habitude de s’envoyer. Alors distrait par cette idée qui va directement la répugner, éveiller normalement chez elle autre chose que la tristesse, il sourit seul avant de fièrement lui balancer : « Si tu le regrettes, je peux t’en faire un,  » de gamin, en passant outre le fait de la répugner s’il n’y a que çà pour la remettre sur pieds. « Sans le reconnaitre. »  cela va de soi, condition sine qua none à ce petit sacrifice, contre ce léger don de sa personne. « Ou le problème... » Si ce n’est pas cette amorce de vie trop vite avortée, «  c’est lui, » cet Adams qui lui manque peut-être plus qu’elle ne veut bien l’avouer. La rouquine carmélite capable d’aimer, un comble pour celle qui ne perd jamais une occasion de l'attaquer sur cet épineux sujet.  

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Encore quelques minutes de marche et ils auront enfin tous deux l’hôtel en vue, celui qu’il leur a été âpreté et elle pourra enfin souffler, se satisfaire de sa solitude, complètement esseulée, à pleurer sur cette chose qui agrémente toujours l’épaule du sino détrempée.  « Non. » Toujours souriant mais plus par médisance que par compassion lorsqu’elle réfute l’Adams comme source de ses soubresauts sentimentaux, l’arc mauvais de ses lèvres s’estompe lorsqu’elle aborde le sujet de la procréation. « Pour les deux propositions. Un asiatique rouquin, » ce qui se fait très bien mais qui n’est pas très commun, éléments génétiques défiant les critères anthropomorphiques de ce qui est ancré dans la logique de chacun… « Ce qu’il serait laid, ce gamin. » La fierté est piquée parce qu’elle se permet de douter sur ses gênes et ses facultés à engendrer quelque chose d’élégant et de racé, un être modelé à son image en un peu plus amélioré.

Alors ses pas ont ralentis, s’enfonçant plus légèrement dans le sable meuble et humide faute de son poids alourdi par le vêtement mouillé. « Sans oublier ton caractère. » Il ne manquerait plus qu’il ou elle soit irascible du matin au soir, qu’il ou elle fasse de ce monde un enfer pour quiconque l’approcherait d’un peu trop près, toujours prompte à décevoir. Il balaye de la tête pensivement face à cette image de l’antéchrist parfait, incapable de se projeter plus loin que sur le visage du chérubin. « Le jackpot, » ils ne pourraient faire mieux en termes de progéniture, ce qui ne figure encore dans ses projets futurs, trop jeune pour se voir freiné par les responsabilités qu’entraine un gamin.  « Puis entre nous, ça me ferait chier que tu l’affubles de tes robes à longueur de journée pour en faire la promotion. » Parce qu’elle en serait capable rien que pour l’image de sa société, que le privé n’a pas réellement de sens s’il peut faire vendre et promouvoir davantage le consortium Witter en oubliant pour un temps la notion d’intimité.


 

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