@Tex Douglas
Des enfants. Il n'a pas tort en ce point. Cela lui rappelle une campagne de fouilles, sur le site de la cité perdue d'Akhenaton, Amarna; des dizaines de tombes creusées à même le sable, contenant les ossements en piteux état, d'innombrables jeunes enfants. Une découverte glaçante, émouvante, laquelle avait su tirer quelques larmes à l'archéologue en herbe, ainsi qu'à ses collègues. - Chaque dépouille enterrée en terre égyptienne, et appartenant de près ou de loin à cette civilisation, représente pour moi un ancêtre à part entière. Ashley n'en démordra pas, ce n'est pas une question de sciences ou de mathématiques, pas même de génétique; ce n'est que pure croyance, une conviction profonde, établissant chaque être du passé comme une marque indélébile à sa propre histoire. Et ça, aucune université ne peut l'enseigner.

Sortie de sa réflexion par une autre, nouvelle, tout aussi profonde; peut-être un axe de désaccord, ou de débat potentiel. Ashley n'a pas souhaité mettre une quelconque barrière entre eux, elle mettait simplement en avant ce qui lui semble évident: on priorise l'homme, de façon générale. Harley Quinn bouscule cette idée, en s'opposant directement au Joker. Reste à savoir comment le professeur Douglas a réfléchi, question posée silencieusement par le regard azuré de la poupée. Oh, et elle comprend. - Pense avoir compris, serait plus exact. Pour un spécialiste du codage informatique, il n'a rien calculé, quel évènement. Son invitation à danser était donc purement spontanée. - Et quelle éventualité pénible associez-vous à la chevelure blonde d'une femme ? le stéréotype du manque flagrant de neurones, potentiellement. Une carte qu'elle sait jouer à merveille, lorsque c'est nécessaire. Pas avec lui. Professeur à l'attitude pour le moins déconcertante, jonglant sans mal entre sa culture débordante, cet air de monsieur-je-sais-tout et un fond hésitant, plus maladroit sans doute. Difficile à cerner, toujours aussi intriguant.

Au musée, ses petites habitudes reprennent vie; un petit signe à Gary, l'employé cool mais un peu trop collant, cliché du célibataire endurci, en quête d'une attache affective, avant qu'elle ne s'attarde sur les premières vitrines ici exposées, contemplant les oeuvres comme s'il s'agissait de sa première visite. Naturellement, sa démarche devrait les conduire au monde antique, l'Egypte en particulier, comme il l'aura deviné. - Les femmes pharaons.. Que connaissez-vous d'elles ? question retournée à l'envoyeur, afin d'établir un point d'ancrage, sur lequel rebondir. Sans douter une seconde qu'il puisse avoir une bibliothèque de connaissances sur le sujet, quelque part dans sa tête.

@Tex Douglas
Frustration liée à l'échange, dont elle peine à cerner les contours; informations données au compte-goutte, servies sur un plateau verbal que le cerveau féminin ne parvient plus à traduire, comme s'ils échangeaient subitement en langues différentes, comme un cartouche égyptien aux hiéroglyphes inconnus; blondinette emmêlée au coeur d'idées, de réflexions différentes, potentiellement incorrectes, voir inappropriées. - Je ne comprends pas. finit-elle par avouer, cliché honnête de la blonde perplexe, préférant assumer son incompréhension, plutôt que de sombrer au coeur de questionnements déplacés, voir hors-sujets. - En tant que femme blonde.. Je veux dire, en tant que potentiel public concerné par votre réflexion, j'avoue ne pas en saisir le fond. et elle s'excuse d'une grimace, gênée d'être aussi affreusement détachée, larguée par la profondeur d'esprit de son vis-à-vis, honteuse de ne savoir soutenir une conversation plus approfondie.

- Je.. Je vous demande un instant. la poupée abaisse légèrement son visage, pince entre pouce et index la naissance de son nez, paupières closes sur cette réalité implacable, mise en relief par sa requête, si simple d'apparence, de surface, transformée en véritable casse-tête pour une égyptienne désorientée. - Ai-je seulement quoi que ce soit à vous apprendre ? le menton se relève, incertain, regard bleuté fébrile sous le joug du masculin. - Il y a un professeur d'Harvard, qui a aussi travaillé à Gizeh. Je ne connais pas les procédés exacts, mais je sais qu'il avait établi une carte en 3D du plateau égyptien, au fil des décennies. Chaque pierre, chaque mètre carré de roche creusée avait été répertorié, et le rendu était.. Magnifique. On pouvait "remonter le temps" sur son écran, distinguer les périodes d'ensablement du grand Sphinx, par exemple. elle déballe ça d'une traite, accompagnant sa parole de gestes spontanés, censés décrire la descente de puits funéraires, la forme des pyramides, les vas et vient incessants du désert. Pourquoi y songe-t-elle ? Parce que le professeur Douglas enseigne l'informatique, et qu'il s'agit, à son sens, d'un parallèle direct, une passerelle vers son monde. - Je dois retourner en Egypte durant l'été, j'en saurais probablement plus à la rentrée. les phalanges ramènent ses mèches blondes en arrière, et la poupée conclut d'un léger haussement d'épaules. Son année d'échange universitaire est pratiquement écoulée, est-il nécessaire de préciser qu'elle n'est pas certaine de revenir ?