Une autre raison pour laquelle elle n'est pas revenue au domicile familial après sa graduation. Avec tous ses frères déjà mariés et d'autre en voie de devenir parent, il ne restait que cette chère Sumalee, qui loin de se plaindre de son statut de célibataire, sans partenaire ou même possible petit-ami. Une torture pour sa mère dont le seul souhait est de voir sa fille aussi traversée l'allée centrale avec son compagnon de vie. Ayant déjà eu sa première déception en amour, elle est loin de vouloir retenter cette expérience, d'où le pourquoi elle se sent loin d'être pressée de trouver sa moitié. Malgré cela, elle envie un peu tout de même sa meilleure amie Lara, cette dernière devenue nouvelle mariée en octobre, et maman d'une adorable fillette qui est aussi la filleule de Sumalee. Quand elle prend le bambin dans ses bras, la pensée que peut-être un jour ça sera son tour lui traverse toujours l'esprit.

Elle chasse cette idée de sa tête, ne voulant pas questionner de plus sur ce que l'avenir lui réserve. Elle ne voulait plus vivre sur les attentes de qui que ce soit, incluant ses parents. " Enchanté de même" un sourire sur les lèvres de la brune qui est reflet de celui de l'homme face à elle. " Ahh, je vois. " Dit-elle sur un ton de compréhension et ne pousse pas plus loin les interrogations en voyant qui ne l’éclaire pas plus sur le sujet. Cela ne la concerne pas et elle ne souhaite pas traverser les limites que Dean impose sur sa vie personnelle. " En fait, je ne fais que leur donner un coup de main ici et là. En réalité, je travaille pour mon propre compte." Elle évite de dire son deuxième boulot au Myung Dong de peur que quelqu'un l'entend et le rapporte à ses parents, une crise à éviter. " Oui, c'est le restaurant de mes parents." Clarifie-t-elle. L'établissement reflète le genre de personne que sont ses parents, des personnes dévouées à leur travail et toujours à offrir leur meilleur.

" De la capital du pays, Bangkok." Bien qu'elle ait quitté le lieu il y a plusieurs années de cela, elle n'avait pas oublié la splendeur de sa terre natale. Comme ils n'avaient pas les moyens de faire des aller-retours d'ici à là-bas, cela fait un moment qu'elle n'y était pas retournée. Un jour, se dit-elle à elle-même, elle y retournera. " Non, je suis venue à Boston quand j'avais 6 ans, et m'y voilà encore. " Hausse-t-elle des épaules avec nonchalance, mais un air d'humour sur son visage. " Et vous ?" Une autre information qui lui brûlait de savoir depuis le début de leur conversation.  

Dévouée à sa famille, c’était ainsi que Sumalee avait été définie par Dean lorsqu’elle avait expliqué aider généreusement ses parents à tenir le restaurant. Le militaire se revoyait alors aider son beau-frère dans ses œuvres. Maçon à son compte, il avait de temps en temps tellement de chantiers que l’Asiatique n’hésitait pas à lui donner un coup de mains sur ses congés et permissions. C’était d’ailleurs une qualité qu’il appréciait chez les autres, le fait de donner sans compter. Dean s’était senti honorer d’avoir une jeune femme comme la Thaïlandaise pour l’accompagner durant le déjeuner. Une rencontre qu’il n’avait pas espère, quarante-huit heures avant de s’envoler pour la Syrie.

J’imagine que ça doit faire un sacré changement entre les deux, supposa-t-il, peut-être à mal. Dean n’avait jamais eu l’instinct de se renseigner sur son pays d’origine, il ne savait même pas à quoi les paysages pouvaient ressembler, ni même s’il s’agissait d’un pays extrêmement pauvre ou qui proposait à ses habitants assez de nourriture pour vivre tranquillement sans avoir peur pour sa vie. Il posa la question par curiosité, pour avoir son ressenti en tant que native de Thaïlande et citoyenne des États-Unis d’Amérique. Et une préférence entre les deux, enchérit-il, parce qu’il y avait toujours des choses à aimer, des choses à détester, son cœur devait bien balancer plus pour l’un que pour l’autre.

Moi ? J’sais pas trop, fut-il sincère, Ratchaburi, ça vous parle ? C’est tout ce qu’on m’a dit. Il n’avait pas non plus voulu feuilleter le dossier de son adoption, parce qu’il n’en avait pas ressenti le besoin. Il avait une sœur plus âgée de deux ans qui avait exprimé son besoin d’en connaître davantage sur ses origines, et elle avait connu une période plutôt sombre à cause de son adoption. Lui, en l’occurrence, avait toujours été détaché de tout ça, se considérait même comme iranien plus que thaïlandais ; il était avant tout américain. J’ai été adopté à l’âge d’un an par une famille de Boston, et donc me voilà, encore , répéta-t-il volontairement l’intonation qu’elle avait utilisée plus tôt ; joueur.

Il porta de nouveau ses lèvres contre le bord du lèvre et commenta : c’est bon, en tout cas. Ça vient de chez vous ? De chez nous ? C’était encore difficile, de se sentir thaï. Vous importez ça directement de là-haut, peut-être par des membres de la famille ? Ou il y a des grossistes dans le coin qui font le boulot, demanda-t-il. Et puis, juste après qu’elle ait répondu, Dean dévia ses yeux sur une personne qui tentait de faire signe à Sumalee sans qu’elle ne le remarque de suite : je crois qu’on vous appelle…


 

À vrai dire, elle a l'impression qu'encore à ce jour, elle apprend à s'adapter à ce pays , bien qu'elle y est immigré il y a près de vingt de cela. Les différences culturelles entre le pays d'accueil et celui natal la choquait parfois au quotidien. Bien qu'elle ait grandi la majorité de sa vie à Boston, elle a toujours baigné dans les valeurs et les traditions de la Thaïlande. Son intégration avait été très difficile pour elle à ses débuts, surtout au niveau de la barrière de la langue. Il lui arrive de temps à autre de prononcer des mots en thaï quand elle n'arrive pas à trouver la bonne traduction en anglais, ce qui ne lui permet pas toujours de se faire comprendre parfois. " Effectivement. C'est très déroutant de changer de pays à cet âge. Perdre tous ces repères n'est pas vraiment facile d'un coup, ce n'est pas une transition qui s’est faite toute douceur. " Surtout d'être une étrangère parmi un groupe, c'est être tout de suite la cible des moqueries. Détail qu'elle n'a jamais divulgué auprès de ses proches, habituées de tout garder pour elle.

" Ratchaburi ? Oui oui, je sais où ce situe cette ville, ce n'est pas loin de Bangkok." Confirme-t-elle ayant de vagues souvenirs de la ville côtière dont certains membres éloignés de sa famille y vivent. Elle se souvient surtout des montagnes rocheuses et de sa verdure abondante. " J'y ai déjà visité quand j'étais enfant. Une ville magnifique." Elle ne peut offrir plus d'informations sur le lieu où il est né, car ses souvenirs en restent limités. " Vous n'avez jamais voulu connaître l'endroit où vous étiez née ? " Demande-t-elle avec précaution, car encore une fois, elle tente de tâter un terrain glissant. Elle n'est pas surprise qu'il soit adopté, loin de là, oh combien sait-elle la certaine misère qui peut frapper les habitants du pays et que certains n'ont pas les moyens d'offrir une meilleure vie à leur enfant, d'où la raison beaucoup d'enfant se retrouvent orphelins. Ses parents à elle ont dû quitter le pays pour offrir de meilleures perspectives d'avenir pour leurs progénitures, eux-mêmes ayant vécu dans une pauvreté qui ne leur permettaient pas de nourrir cinq bouches aisément.

" Oui, on se fournit chez l'épicier asiatique du coin qui le fait importé de Thaïlande. " Ses parents aimaient offrir une vraie expérience authentique de la cuisine thaïlandaise, tout comme ces boissons qui sont aimées de là-bas. Dean finit par remarquer que la mère de la brune tentait d'attirer son attention , mais Sumalee n'avait pas fait attention. " Je crois que les plats sont prêts, je reviens." prévient-elle Dean avant de partir rejoindre sa mère. Effectivement, cette dernière lui informe que la commande du brun était prête. Essayant de convaincre sa fille de lui apporter les assiettes à table, Sumalee refuse son aide gentiment sachant très ce que sa mère tentait de faire. Déposant chaque assiette sur le plateau avant de soulever ce dernier d'une main. Comme à son habitude, elle circule aisément parmi les autres tables, laissant presque croire que la tâche était facile à faire avec une main qui tient le plateau. Elle retourne à la table de Dean et y dépose chaque plat devant lui avant de déposer le plateau un peu plus loin sur la table. " Et voilà pour monsieur, gin hai aroy na !" dit-elle en souhaitant bon appétit au jeune homme dans sa langue maternelle.

Elle connaissait Ratchaburi, et avait même pu lui situer la province dans laquelle il était né. C’était la première fois qu’une personne lui paraissait si… semblable ? Même s’il se considérait Iranien de cœur, il ne pouvait renier le physique qu’il avait hérité de sa terre d’origine, et se retrouver devant une jeune femme provenant de ce même lopin lui faisait bizarre. Alors c’est aussi une ville…, avait-il réfléchit à voix haute, lui qui avait pensé que Ratchaburi n’était que le nom d’une région. Une autre question vint le tarauder alors : est-ce qu’il venait du chef-lieu lui-même où d’un petit village à côté ? L’envie d’en connaître davantage prenait forme à l’intérieur, même s’il tentait de freiner cette sensation de ne pas en savoir assez ; une soif qui prenait place, doucement. Pas vraiment, non, avait-il répondu. Il avait très certainement eu envie de refouler la colère et la tristesse en effaçant cette partie de son histoire.

Alors je viendrai plus souvent, avait-il plissé les paupières en apprenant que les parents de la jeune femme se fournissait chez un épicier qui cherchait à défendre les produits de sa nation. Peut-être même y invitera-t-il une amie, si l’occasion se présentait un jour qu’ils aient à dîner dans le coin. Il n’eut pas le temps d’en dire davantage qu’elle fut appelée à venir chercher les deux plats qu’il avait commandés. Il patienta sagement en observant les petits éléments thaï disposés dans la salle de repas jusqu’à ce qu’elle revienne avec les mains pleines. Ça a l’air délicieux , remarqua-t-il tout en l’aidant poliment à mettre l’un des récipients sur la table. Elle prononça quelques mots dans sa langue maternelle et il fut un peu confus : ça veut dire quoi ? Mots qu’il n’osera pas reproduire, mais qu’il renverra à sa voisine de table dans une langue qu’il maitrisait bien plus : l’anglais.

Il n’approcha pas la grosse cuillère tout de suite d’un des mets, et préféra sentir les odeurs qui s’en dégageaient. Étrangement, ça lui rappela de vagues souvenirs. Les effluves qui s’en dégageaient remontèrent le temps, et même si les images restaient floues, ces épices lui revinrent comme un rappel des cuisines de l’orphelinat. Vous avez dit que ça s’appelait comment , demanda-t-il, les yeux clos, pour inspirer de nouveau les vapeurs du poulet aigre-doux, et c’est courant comme plat, en Thaïlande ? Parce qu’il était certain d’avoir déjà été confronté à cette cuisine. Baguettes dans la main droite, cuillère dans la main gauche, il vint piquer un morceau tendre de poulet coloré de rouge avec quelques légumes tout aussi festifs, avant de le mettre en bouche. S’il n’était pas habitué à la nourriture thaï, il avait appris à manier les baguettes grâce aux sushi, maki, et soupe de nouilles.

Il mâcha le tout, et si les saveurs ne purent le ramener vingt-six ans plus tôt – parce qu’il n’était qu’un bébé à l’époque – il laissa tout de même échapper un petit bruit de sa gorge, discret mais significatif. C’est vraiment délicieux, ça , en reprit-il alors encore un peu. Vous ne mangez pas , l’interrogea-t-il, vous pouvez piocher, je suis habitué à partager de gros plats chez moi. Tout le monde se servait dans le même à la maison. Qu’est-ce que vous pouvez me dire de plus sur Ratchaburi , s’intéressa-t-il.

Elle se demandait comment il faisait pour ne pas vouloir connaître un peu plus sur ces terres natales. Il devait avoir ses propres raisons. Peut-être que l'abandon de ses parents biologiques l'aurait blessé au point de ne pas vouloir fouler les mêmes terres qui l’ont accueilli cette vie qui est la sienne. C’est une part de son identité, pourtant, cela ne semble pas l'intéresser plus que ça. Dans ce cas, Sumalee veut tout de même l'encourager du contraire, pousser son intérêt sur le pays où ils sont nés. " Vous devriez, très jolie comme ville" dit-elle en hochant la tête à l'affirmative pour appuyer ses propos. Elle espère qu'un jour, il changera d'avis.

"On sera toujours très content de vous revoir" elle lui sourit amicalement, satisfaite que le restaurant semble bien lui plaire, bien qu'elle se dit qu'elle en est peut-être pour quelque chose. Dans tous les cas, ils ont peut-être un autre client fidèle parmi les autres. Voir des visages familiers rend heureux les Luang, car ils se disent qu'ils sont parvenus à être aimés dans cette communauté. " Et ça l'est ! " fait-elle fière par les plats qui sont servis au jeune homme. Avec des cuisiniers aussi expérimentés, rien de surprenant qu'ils ont la cote parmi tant d'autres. " Ça veut dire bon appétit " traduit-elle pour lui quand il lui demande ce qu'elle venait de dire dans sa langue maternelle.

Elle le regarda d'un œil intrigué, se demandant s'il allait aimer ou pas. Cela doit faire un moment qu'il n'a sûrement pas goûté à la cuisine thaï, car dans le cas contraire, il aurait tout de suite plongé dans les plats une fois servis au lieu d'observer ces derniers sous tous ces angles. " Celui-là s'est le pad thaï et celui-là le poulet aigre-doux" dit-elle en pointant les pâtes sautées dans une sauce traditionnelle thaï et ensuite le poulet baignant dans une sauce orangé et rougeâtre. " Très. On peut dire que ce sont des incontournables de la cuisine thaï. " Bien que le pays à ses variations de plat qu'on peut retrouver parmi toutes les provinces, ces plats, tels que servis à Dean, sont des classiques de la culture de chez elle.

Un sourire de contentement se répand sur les lèvres de la jolie fleur qui se réjouit de le voir aimé la nourriture de son origine. Et puis, soyons honnête, la cuisine thaï est toujours très bonne, comment ne pas aimer ? C'est tout de même réjouissant qu'il se régale de la sorte. " Vous voyez, je ne me trompe jamais dans mes choix." Elle lui fait un clin d'œil complice avant de rire par après. Toujours aussi taquine comme à son habitude. "Non, non, allez-y, j'ai déjà assez mangé. Comme ça " elle refuse gentiment, car elle n'avait pas faim pour le moment.

" De mes souvenirs, il y a des montagnes rocheuses gigantesques, une nature abondante. Très paisible comme endroit, surtout quand on veut s'éloigner des villes bruyantes. " Décrit-elle au meilleur de ses souvenirs. Elle ne trouve pas que de simples mots peuvent décrire au mieux cet endroit. Ses souvenirs flous et lointains n'aident pas non plus à saisir le charme qu'offre Ratchaburi.

Dean n’avait pas insisté davantage lorsqu’elle émit une négation au partage du plat, il comprenait fort bien qu’elle ne pouvait se permettre d’avaler deux repas en un court laps de temps. Il se régale alors, sans se presser, parce qu’il n’était pas attendu ; on ne l’attendait jamais à une heure, un jour particulier. Il ne mélangea pas les deux plats, goûta l’un puis l’autre. En même temps, Sumalee tentait de lui faire une ébauche de ce à quoi ressemblait Ratchaburi, mais la description ne lui dit rien du tout, - certainement parce qu’il n’avait jamais remis les pieds en Thaïlande -. Y’aurait un endroit, aux Etats Unis, qui pourrait être ressemblant, histoire que je me fasse une meilleure idée, demanda-t-il, bien qu’il n’avait pas la prétention de croire que l’Asie du sud soit similaire à un état d’Amérique centrale.

On n’a toujours pas décrété la manière dont on se serait rencontrés , reprit-il, avant d’ajouter : pour votre maman, je veux dire. Parce que leur rencontre remontait réellement à, à peine, trente minutes. Je n’ai pas été à la fac, alors il faudra trouver autre chose, plissa-t-il ses paupières en lâchant ses couverts pour reprendre une gorgée de boisson pétillante. Il lui laissa libre choix, car grâce à l’armée, il avait appris à assimiler les histoires qu’on lui contait pour se fondre dans la masse. Lors de ses missions, il n’était pas rare qu’il ait à prendre un rôle qui n’était pas le sien. Tantôt bûcheron, tantôt viticulteur, parfois banquier ou simple commerçant indépendant, il avait dû se créer une identité pour ne pas être repéré par l’ennemi et foirer la mission.

Il laissa un petit silence plané ensuite entre eux, observant les allées et venues du personnel de salle, puis les coutumes qui se dessinaient dans les échanges qu’ils avaient avec les clients. Dean avait l’impression d’avoir franchi plusieurs frontières. Il était toujours à Boston, mais la façon de communiquer, d’interagir, ici semblait bien différente de tout ce qu’il avait connu, de tout ce qu’on lui avait inculqué. Il avait pour habitude de gérer les échanges avec les américaines, avec les Moyen-Orientaux, les musulmans, mais pas avec les asiatiques. Je repars bientôt, comme je vous l’ai dit, mais vous pensez que l’on pourra se revoir, histoire que… J’sais pas… que vous m'appreniez des choses peut-être , osa-t-il proposer à la jeune femme, sans savoir si les thaï étaient du genre polis, avenants et désireux de partager ce qu’ils connaissaient avec des étrangers.

Rien, pas même à sa connaissance, ne pourrait être la copie conforme de la ville de Ratchaburi. Bien que les États-Unis à ses propres plaines magnifiques qui méritent un coup d'œil, rien ne pourra imiter la beauté de cette ville ou du pays même. Sumalee n'avait pas besoin de faire des recherches pour s'assurer de cette conviction, car ces deux pays sont tout à fait différents l'un de l'autre. Elle se dit que peut-être Dean tente de se faire une image réelle du lieu où il est né, mais ce n'est pas sur les terres américaines qu'il trouvera réponse à ses interrogations. " J'espère que personne ne t'as entendu, sinon ça aurait été la crise cardiaque pour quelqu'un" dit-elle faussement outré en faisant semblant de regarder autour d'elle que personne ne soit choqué par ces paroles. " Pour répondre à ta question, non. Rien ne peut te donner une meilleure idée de cet endroit que cet endroit lui-même" tient-elle à lui dire, car le charme de l'Asie du Sud ne se retrouve pas aux États-Unis.

Il ramène le point qu'ils n'ont toujours pas trouvé le mensonge sur où ils auraient pu se rencontrer pour éviter tout soupçon. La première idée qui lui vient en tête est bien sûr la fac, car elle y a passé la majorité de sa vingtaine, plongée dans ses études tout en se faisant des amitiés en cours de route. Sauf que Dean l'avertit d'ores et déjà qu'il n'a pas fréquenté une fac, donc l'idée tombe vite à l'eau. Elle essaie de creuser pour trouver quelque chose de potable et réaliste. " On pourrait dire qu'on s'est rencontré via un ami en commun ?" parvient-elle à dénicher après quelques minutes de réflexions. " À moins que tu as quelques choses de mieux à proposer ?"Demande-t-elle.

" Bien sûr, vous voulez mon numéro ? Comme ça, vous pourriez me contacter dès votre retour" toujours aussi aimable, elle se sent choyée que le jeune homme souhaite mieux connaître sur cette culture avec laquelle elle a grandi. Ça lui fera un plaisir de lui faire apprendre un peu plus sur cette dernière, et peut-être lui découvrir la Thaïlande un jour. Toute chose à son temps, mais elle espère lui faire changer d'avis sur la découverte de ses origines.

Un ami commun, ça semblait bien plus probable que n’importe quelle autre suggestion, qui aurait demandé un peu plus de réflexions. Oui, un ami commun, c’était bien. Et il n’y avait pas besoin de prénom, à cet ami, puisqu’on pouvait facilement contourner la question en disant que, de toute façon, la personne inspectrice ne le connaissait pas. L’ami commun avait été adjugé vendu par Dean qui continuait de passer ses baguettes et sa cuillère dans les plats. Il n’avait, de toute façon, rien à proposer ; il avait déjà trop pensé ce weekend, son cerveau était à sec. Votre numéro , demanda-t-il, un peu à côté de la plaque, jusqu’à ce qu’elle en dise la raison, oh vous parlez, pour se revoir plus facilement et parler « Thaïlande » ? Il chercha alors dans ses poches de pantalon après avoir lâché ses couverts, mais son mobile ne s’y trouvait pas, alors il se tourna pour fouiller dans sa veste.

Tenez, je vous laisse le noter et l’enregistrer ? Je ne sais pas comment écrire votre prénom, j’ai peur de vous froisser, plissa-t-il les paupières en lui tendant son téléphone déverrouillé. Il la regarda inscrire les chiffres puis les lettres, patient. Ils sont bouddhistes, en Thaïlande , interrogea-t-il l’asiatique face à lui, après avoir récupéré son bien, ou y’a aussi d’autres religions présentes ? Le pays de ses parents adoptifs était régi par les règles islamiques, la religion faisait partie de la vie de tous les citoyens, qu’importait si on était pratiquant ou non. Dean voulait savoir s’il en était de même dans son pays d’origine ou si la liberté de pratiquer une vie spirituelle restait au bon vouloir du peuple. Et vous, ajouta-t-il, avant de se raviser, c’est peut-être un peu trop personnel pour vous ? J’voulais pas. Si jamais, on peut éviter la question.

Et donc… un restaurant .., fit-il en changeant de sujet, retournant à la contemplation de ce que ce dernier avait à offrir à ses yeux, pourquoi ? Il avait l’impression que tous les asiatiques ouvraient des restaurants, mais c’était ce qu’on pensait aussi de ses compères, avec les « kebab » alors… Peut-être ses parents avaient toujours été restaurateurs ?

Elle se retient de rire quand il assimile le nom de la langue Thaï au nom du pays de la Thaïlande. " En fait, pas seulement parler Thaï, mais aussi vous faire découvrir un peu la culture. Si bien sûr, vous voulez. " Tient-elle à préciser afin qu'ils mettent ses barrières pour qu'elle sache ses limites à ne pas atteindre. Toutefois, elle aimerait lui faire tout découvrir avec un esprit ouvert à apprendre une culture qui est de ces origines.

" Bien sûr, "dit-elle avec un sourire avant de prendre le téléphone tendu vers elle. Elle tape ses informations et son numéro avant de lui redonner son téléphone. Entre-temps, il lui pose une question sur la religion prédominante dans la Thaïlande. Effectivement, la majorité des citoyens du pays sont bouddhistes, incluant elle et sa famille. Bien qu'ils aient immigré aux États-Unis, sa famille a toujours maintenu a pratiquer leur religion dans leur nouveau pays d'accueil. " La majorité l'est. D'autres pratiques l'islam ou bien l'hindouisme." Bien que ces pratiquants d'autres religions se font rares dans le pays, il y a toute de même d'autres religions présents en Thaïlande. "Non, je n'ai pas de soucis à dire que je suis bouddhiste. Je n'aime simplement pas débattre sur le sujet de la religion. Ça devient vite un sujet fâcheux à mon avis." Avoue-t-elle, car sachant dans la société qu'ils sont, et que les différences ne sont pas toujours accepté par certains, elle ne préfère pas s'étendre plus sur le sujet de la religion.

"Eh bien... En vérité, j'en sais rien" finit-elle sur un ton sérieux avant d'éclat de rire. Elle n'avait jamais pensé du pourquoi ses parents avaient ouvert un restaurant. Que dire, peut-être l'idée étaient venu naturellement pour eux. Dans tous les cas, le restaurant leur a permis de vivre une vie confortable. "Pour ça, tu devrais poser la question à mes parents, car j'en ai aucune idée. Il ne m'est jamais venu l'idée de leur demander cela."

Lorsque la Thaïlandaise lui avait rendu son mobile, il en avait profité pour se faire à l’écriture de son prénom, et il s’était intérieurement félicité de ne pas avoir tenté de l'épeler lui-même. Il s’était toutefois rappelé que, sur ses dossiers d’adoption, s’était trouvé un patronyme différent, malheureusement, il n’avait pas trouvé bon à l’époque de le retenir. Peut-être qu’au retour de mission, il se surprendra à demander de jeter un œil un peu plus curieux sur ces fameux papiers ? De quoi surprendre plus d’un membre de sa famille. Se surprendre aussi, mine de rien, mais il ressentait de plus en plus l’envie cruelle de se poser, de se concentrer un peu sur sa vie personnelle après s’être donné corps et âme à sa profession, mais pour ce faire, il fallait qu’il se comprenne davantage, qu’il se connaisse pour pouvoir avancer.

Je comprends parfaitement ce que vous entendez par là, avait-il acquiescé lorsqu’elle avait fait part de son besoin de ne pas exposer la religion qu’elle pratiquait, ni de la dévoiler à des inconnus, pour éviter d’amener à débattre et s’expliquer quant à ses choix. Dean savait quel était ce sentiment, pour avoir longtemps « choqué » ceux qu’il rencontrait lorsque la question sur ses croyances venait à poindre. Il était musulman, et à ce qu’ils s’étaient fait de l’Islam, aux yeux des autres cette religion n’allait pas du tout avec sa tête. Pourtant, il avait grandi parmi de bons pratiquants, qui l’avaient éduqué dans les règles religieuses, et il se sentait en pleine harmonie avec celles-ci encore aujourd’hui. Alors, comme Sumalee, il passait bien vite cette conversation, et parce qu’il passait bien vite cette conversation, il avait décidé de ne pas s’étendre sur la question, et avait accepté la volonté de sa vis-à-vis de garder ça pour elle.

Pour tout vous avouer… J’suis pas sûr que ma curiosité soit assez grande pour oser adresser la parole à vos parents, rit-il lorsqu’elle lui avait proposé de se tourner vers les propriétaires du restaurant. Il avait beau être courageux face à bien des situations, mais peut-être pas au point de se sentir pleinement en confiance pour engager la conversation avec les géniteurs de la jeune femme. D’autant plus qu’elle avait avoué qu’ils désiraient qu’elle se trouve un compagnon, il ne voulait pas la mettre à mal avec sa famille, ni devoir endosser un rôle qui ne lui sied pas vraiment ; à savoir celui du possible futur fiancé de Sumalee. Ce n’est pas important, vous en faites pas, la rassura-t-il, en faisant un signe de main qui lui demandait d’oublier la question et de passer à autre chose, pour la peine. Il reprit alors : vous avez fait des études si j’ai bien compris ? Supposition qui suggérait à la jeune femme d’en dire plus sur son cursus, sur l’université qu’elle avait côtoyée peut-être aussi.

Lui n’avait eu que la graduation du lycée en cursus basique, n’avait rien entamé de plus après le « hat throwing ». Ça n’avait été que son engagement dans l’armée et la tonne de cours de préparation qu’avaient demandés ses qualifications. Il avait tiré un trait sur l’université dès lors que son dossier avait été refusé, et avait choisi une branche un peu plus spéciale. J’vous vouvoie depuis tout à l’heure…, remarqua-t-il ensuite, posa-t-il un regard sur la salle et l’endroit où se trouvait la dame qui l’avait accueilli plus tôt. Une fois qu’il vit qu’elle ne pouvait les entendre, il réclama : vous m’autoriseriez à vous tutoyer ? On est censés se connaître alors… Quoi de plus logique que briser la glace des formalités ?