Dimanche 16 mai 2021

Boston la nuit. Aujourd’hui était un grand jour pour Dolly, elle s’apprêtait à voir Orson sans chemise. Enfin, elle l’avait déjà vu sans sa chemise, mais là, c’était différent. Le professeur de musique était presque en vacances. Ces élèves avaient terminé leur examen et à part quelques allers-retours à Harvard pour préparer la rentrée, Orson était libre. Alors ce soir-là, il portait une tenue plus décontractée, non imposée par le prestige d’Harvard.

Il attendait Dolly devant l’un des cinémas de la ville. Guettant l’heure sur son poignet, il comptait les secondes qui le séparaient de son amante. Parce que voilà, Orson était accro. Accro aux reflets roux de sa crinière, à la façon qu’elle avait de se pendre à son bras lorsqu’ils marchaient côte à côte, au sourire qu’elle portait lorsqu’ils se parlaient ; Orson était dolly addict. Il se retourna en entendant les pas de la jeune femme derrière lui. « Bonsoir » dit-il avant de l’embrasser.

Au guichet, le musicien prit les deux tickets, deux places pour la suite d’un film qu’il n’avait même pas vu : Red is Dead 2 : le retour de Youri. Qui était Youri ? Il n’en avait aucune idée. Tout ce qui lui importait étaient les deux prochaines heures qu’il allait passer avec Dolly.

dolly savait pertinemment que ce muscle lui faisant mal,
c'était pour la simple et bonne raison que la lourde porte de l'atelier d'art où elle avait volé les peintures en compagnie de lyra y était pour quelque chose.
elle se massait la nuque et le trapèze pour se détendre lors du trajet en uber,
mais rien n'y faisait, ça ne passait pas.
sa tenue plutôt légère, elle sortait alors de la voiture pour faire claquer ses talons sur les pavés de boston,
direction : orson.
elle voyait alors ses cheveux l'attendre patiemment.
était-il là depuis longtemps ?
se languissait-il d'elle ?
parce que ce qui était sûre, c'est que malgré ses efforts pour ne pas s'attacher à lui,
son coeur bondissait rien que de le voir.
et comme s'il sentait sa présence, le voilà lui et son sourire qui dérobait ses sentiments la saluer d'un baiser.
dolly ne put s'empêcher de relever une jambe, comme dans les films,
papillonnant de ce début de relation qui s'offrait.
bonsoir orson !
et elle le couvait de multiples baisers sur les lèvres.

il payait alors les places à l'entrée et tout ce qui importait dolly,
c'était à quel point l'avoir contre lui réchauffait son coeur.
ils s'installèrent dans des fauteuils un peu loin du monde, dolly contre le mur,
orson à ses côtés, et elle murmurait. vous ne m'avez pas trop attendu ?

Dans la salle de cinéma, Orson et Dolly étaient deux anonymes, deux spectateurs parmi tant d’autres. Orson avait mis son bras derrière la tête de la jeune femme. Entièrement tourné vers elle, il ne prêtait aucune attention aux pubs qui se pressaient sur l’écran géant. « Un peu mais ça va. Nous n’étions pas pressés, le temps que le film commence … » dit-il d’un geste du menton vers la toile devant eux. De toute façon, qu’aurait-il fait à part l’attendre ? Pour rien au monde il ne serait venu voir ce film-là seul. Orson et les films d’horreur, ça faisait deux. Le musicien n’aimait pas avoir peur et était un public facile pour ce genre de films. « J’aime beaucoup votre robe, elle vous va à ravir » . Sûrement pas l’homme le plus objectif qui soit, il était sous le charme.

Mais l’attention du musicien fut attirée par l’écran lorsque la salle se plongea dans le noir complet. S’il aurait préféré passer sa séance à regarder la rousse à ses côtés, c’était dorénavant impossible. La musique angoissante se mit à fuser de l’enceinte placée juste au-dessus, manquant de peu d’arracher un sursaut à Orson alors que le titre du film n’était même pas encore apparu à l’écran. Il leva les yeux au ciel. Le film durait deux heures ; il lui restait une heure, cinquante-neuf minutes et cinquante-neuf secondes à tenir.

elle glisse ses lèvres contre les siennes en guise de remerciement,
et d'un vous bien encore plus, dolly et orson s'asseyaient dans le noir,
contemplant l'écran noir devant eux.
en fait, dolly n'avait pas spécialement envie de regarder le film,
cependant, l'idée même d'être enfermée dans le noir, pendant deux bonnes heures,
avec l'objet de ses désirs actuels... c'était une toute autre histoire.
mais le son la ramenait à la réalité et le film commençait.
elle était pleinement détendue, la main dans celle d'orson,
et à ses mouvements et aux pressions qu'il exerçait,
la rousse se rendait bien compte d'une chose : les clichés ne s'appliquaient pas à elle.
les minutes avançaient et elle s'exaspérait des mauvais choix des protagonistes,
même qu'orson avait sursauté quelques fois et que ça l'avait fait plutôt rire,
ce qui était certain, c'était qu'elle, elle n'aurait pas utilisé la scie sauteuse.
trop bruyant, trop salissant.
mauvais souvenir d'une douche crasseuse après avoir utilisé cet instrument.
je reviens, je vais aux toilettes ! et elle se levait pour se diriger au petit coin.
...
revenant deux-trois minutes plus tard, elle voulu user d'une vanne classique.
elle s'approcha du dos d'orson et... bouh ! qu'elle dit en appuyant sur ses épaules.

Orson regardait l’écran du coin de l’œil, tentant davantage de comprendre l’intrigue plutôt que d’apprécier les scènes d’horreur. Parce que dans ces dernières, il prenait sur lui pour rester impassible. Il ne voulait pas se ridiculiser devant Dolly. Mais tous ses espoirs avaient été vains et il avait déjà sursauté à de nombreuses reprises. « Revenez-vite » lorsqu’elle se leva pour aller aux toilettes, parce qu’il avait besoin d’elle à ses côtés, ne serait-ce que pour se rassurer.

Plusieurs instants qu’elle l’avait quitté, le laissant seul avec Youri et les adolescentes qu’il prenait plaisir à massacrer. Orson n’aimait pas les effusions de sang au cinéma. Son film préféré ? Le Cercle des Poètes disparus. En termes de jump-scare et d’hémoglobine, il était à des années lumières du film qu’il regardait actuellement. Orson sursauta. Youri l’avait at-Ah non. C’était Dolly. « Vous m’avez fait peur » dit-il sur un ton presque accusateur, lui qui détestait ce sentiment. « Ne me dites pas que vous êtes parties aux toilettes juste pour ça » fit le musicien en la laissant reprendre sa place à ses côtés.

le corps d'orson s'était glacé tant il avait eu peur.
et ça l'avait amusé autant qu'inquiétait. elle était un vrai film d'horreur en elle-même.
elle repose ses fesses sur le fauteuil en faisant un clin d'oeil rapide à orson,
ça l'avait sincèrement amusé et sa réaction d'autant plus.
de le voir s'énerver, être piqué au vif... sexy.
elle l'embrassait alors sur la joue, et reprenait sa main qu'elle entrelaçait de ses doigts,
et posait à nouveau ses lèvres sur le dos de sa main.
et je n'arrêterais jamais de la faire si je peux avoir ces réactions là à chaque fois.

ce côté juvénile, cette innocence qu'il avait mis dans cette réaction purement archaïque,
non, je suis vraiment allée aux toilettes... mais en soi... c'était une très bonne idée de ma part.

puis le film continuait et plus fort qu'elle,
elle ne put s'empêcher de lâcher un :
mais pas dans le bras ! dans l'articulation du coude, plus facile ! exaspérée surtout par l'incapacité de youri.
sa technique avait quand même fonctionnée, cependant.

Lorsque sa paume retrouva celle ce Dolly, Orson retrouva quant à lui du courage. Il pouvait se concentrer sur la caresse du pouce de rousse contre sa peau et non sur la manière qu'avait Youri de courir après ses victimes en brandissant sa faucille et son marteau. « vous êtes un tyran » dit-il en se penchant vers elle, feignant l'effroi (quoi que..). L'énerver pour l'exciter, n'était-il qu'un jouet pour elle ? Surtout que la méthode avait déjà porté ses fruits lors de leur première rencontre.

Alors qu'Orson était occupé à regarder un coin de l'écran, un centimètre carré trop petit pour y voir membres arrachés et têtes décapitées, il sentit la rousse à ses côtés s'agiter. Orson faillit bondir, tournant au lieu de ça la tête vers la jeune femme, surpris. Il haussa un sourcil, « J'ignorais que vous étiez experte en films d'horreurs », loin de se douter de la réalité. Peut-être qu'à force d'en regarder, Dolly avait compris les gimmick de ce genre de cinéma. « Je vous savais douée en... anatomie » surtout la sienne, « je ne pensais pas que cela incluait les démembrements » parce qu'Orson lui, voulait rester le plus longtemps possible attaché à ses membres. Comment jouerait-il de la musique sans ses mains ?

Ils arrivèrent au dernier quart du film. À l'écran, les personnages principaux préparaient un piège pour Youri. Orson regarda sa montre, impatient que cet autel dressé à l'hémoglobine se termine. « Où voulez-vous manger après ? » demanda le professeur, totalement désintéressé du film. Lui mourrait de faim, pas sûr par contre qu'il choisisse de la viande saignante.

orson parle beaucoup.
et elle connaissait ce besoin de lâcher la parole pour pouvoir combler le silence,
comme si le bruit était synonyme de protection.
les victimes ne s'arrêtaient jamais de parler,
et bla, et bla, et bla...
mais orson, lui, c'était différent.
lui, elle le mettrait sous une cloche de verre pour ne pas abîmer ses pétales.
elle aurait besoin de tous ses sens en alerte pour qu'il ne lui arrive rien.
cible des gangs adverses pour être trop proche de rose red, désormais.
je... je regarde beaucoup de films d'horreur, c'est ma catégorie favorite.
oups, t'as failli te griller ma grande.
dolly levait les yeux au ciel et souriat légèrement.

orson avait la main moite. il se contenait et dolly adorait ça,
parce que sa mignonnerie dépassait tout l'reste,
et qu'il semblait essayer cependant d'être un homme sans peur.

dolly avait abandonné le film, bien trop mal fait et mal interprété.
des bagels, ça vous dit ? promis, on pourra prendre ceux au saumon.
elle fit courir deux doigts le long de son bras, puis remettait son index pour taper le bout de son nez.
ou alors steak tartare saignant ?
nez qui se fronce, moue amusée, joues relevées.
avec beaucoup de ketchup !

Orson tourna la tête vers la jeune femme, « Va pour des bagels, ça fait une éternité que je n’en ai pas mangé en plus » . Le doigt de Dolly sur son nez, Orson se mit à loucher pour accentuer la grimace, se retenant de rire pour ne pas déranger les autres spectateurs, parce que contre tout attente, d’autres personnes s’étaient déplacées en salle pour voir ce film. « Je vous laisse la viande, je sais que vous a-do-rez ça » dit-il lui aussi amusé, avant de s’approcher pour saisir les lèvres de la rousse, l’attirant doucement à lui, comme pour augmenter la passion qu’il mettait dans ce baiser.

Le film défilait sans qu’Orson ne s’en rende compte et il aurait pu sortir entièrement de son esprit si par moments, des cris ne venaient pas lui rappeler qu’il avait payé presque vingt dollars pour assister à ça. « Vous ne voulez pas qu’on parle maintenant ? je crois que j’ai perdu le fil du film » , comme s’il y en avait un. « Au pire on trouvera bien un résumé sur Internet … » dit-il en haussant les épaules.

et orson vint l'embrasser sur les lèvres, se désintéressant complètement du film,
et en soi, ça ne dérangeait pas du tout dolly.
elle se moquait de youri et ses nanas pleines de sang et d'envie de survivre : spoiler, youri allait mourir.
voilà.
fini.
gâché.
inutile.
le baiser était bien plus fascinant et attrayant que toute l'hémoglobine du monde.
quoique les deux mélangés... un vrai orgasme.

elle aurait presque voulu s'asseoir sur lui
mais il y avait du monde et il était hors de question qu'elle se fasse remarquer,
quoique la main de dolly venait titiller le torse d'orson.
mmh... j'suis partante.
venez. et elle s'arrache à orson pour se redresser et lui tendre la main.
le faire venir à elle.
aller manger.
aller le manger, surtout.
elle était avide, tout le temps.
je prendrais le saumon, histoire de ne pas paraitre trop... carnassière.
et elle montre les dents, en grognant légèrement comme un petit animal,
puis la lumière du jour apparait enfin et sa rétine l'attaque.

elle pivote, fait voler ses cheveux et attire à nouveau orson.
lips. lips. lips.
elle n'arrive pas à s'en passer.