Sa mère a bien tenté, longtemps, de le réconforter. De lui rappeler combien il était un garçon formidable. Et pourtant, il a pété les plombs Yixuan. À se croire incapable d'être un garçon bien. Et à devenir fou, à répéter constamment les mêmes gestes. La crainte de voir un incendie réduire en fumée leur restaurant, leur appartement. Toujours vérifier dix fois si le gaz est bien éteint. À craindre de voir les flammes immenses dévorer encore et encore les gens qu'il aime. Et maintenant, marqué à jamais par un drame, encré sur sa peau qu'il déteste. À ne jamais la regarder, à ne jamais se regarder dans le miroir. Il soupire doucement, la laisse effacer le vestige de son soulagement soudain quand elle réconforte maladroitement. Loin de lui en vouloir bien entendu. Il pince les lèvres, renifle bruyamment avant de hausser les épaules. « J'ai peur... de tout ? » De lui même, de la réaction des autres s'il le voyait. De passer pour un monstre, de faire peur aux autres. Baisse le nez vers son torse, pose sa main dessus. « Ça n'a rien d'attirant, rien de sexy. Je suis monstrueux. Personne ne peut aimer un monstre. J'ai peur d'être laissé, d'être moins bien, d'être pas assez. Ou d'être trop. J'ai un gros manque de confiance, je le sais. Tu n'en as vu qu'une infime partie... » Légèrement. Juste pour qu'elle sache. « Et tu es la seule à l'avoir vu... » La seule. Même ses sœurs n'y ont pas eu le droit. Lui, il voulait juste qu'elle comprenne pourquoi il avait agi comme un imbécile.

quand y avait sûrement des mots à poser sur les réactions que t'avais pu avoir par le passé. pour celles que tu continuais d'avoir. les larmes sur ton visage suffisant à mettre en lumière les terreurs qui pouvaient t'habiter quand elles n'étaient pourtant pas forcément compréhensibles pour tout le monde. et elle pince les lèvres, les mots qu'elle entend et pour lesquels elle est en désaccord. garde le silence pourtant, te laisser aller jusqu'au bout quand les objections ne tarderont pas à venir. je suis pas d'accord mais est-ce que son avis valait quelque chose présentement ? les mains qui viennent prendre en coupe ton visage, les pouces qui cherchent à essuyer les joues encore humides. t'es pas un monstre quand jamais elle ne t'avais visualisé de la sorte. quand t'employais des mots affreux pour te définir quand ils n'étaient pas légitimes. je te trouve attirant. sexy. et je crois que tu le sais parce que pendant les quelques temps où vous vous étiez fréquentés, elle n'avait eu de cesse de te faire des avances. de se perdre dans des baisers parfois trop passionnés quand tu finissais toujours par freiner la cadence. tu te représentes d'une certaine façon mais ce n'est pas comme ça que je te vois sûrement l'opposé de ce qu'elle pouvait penser d'ailleurs. et si tu m'attirais pas, je ne ferais pas ça à revenir poser ses lèvres sur les tiennes, moins timide que ce que tu avais pu lui offrir quand elle cherche ton accord pour quelque chose de plus langoureux.

Parfois, il se demande ce que son père lui dirait. Quels seraient ses mots pour le rassurer. Lui qui aimait tant sa vie passée. Maintenant, il semble que tout soit compliqué à ses yeux. L'adolescent qui a grandi trop vite, qui n'a pas su profiter. Lâche l'école à seize ans, plus aucune raison d'y mettre les pieds maintenant qu'il doit aider sa mère. Jeté dans l'océan de la vie active. À devoir mettre en rayon, servir les clients, sourire et pratiquer un anglais pas terrible. Et puis, Suha était entrée dans sa vie jusqu'à ce qu'il foute tout en l'air. Et maintenant, quoi ? Il se calme, l'observe. Elle est si douce avec lui. Et il ne mérite pas ce traitement de douceur, quand il avait été un sale rustre avec elle. Pince doucement les lèvres en écoutant les paroles qu'elle prononce. Peut être qu'elle l'idéalise bêtement, à ne pas comprendre que son corps n'est plus qu'un amas de peau fripée. Il soupire doucement, rapidement interrompu par la douceur des lèvres de Suha qui se posent contre les siennes. Et il répond à son baiser, sans savoir où ça va le mener. Le prolonge, le rend langoureux, passionné, comme deux amants qui ne se sont pas vus depuis longtemps. Et il l'embrasse, à se perdre sur ses lèvres jusqu'à se reculer lentement. « Suha... Promet moi qu'on garde contact maintenant s'il te plaît. » Le cœur qui se serre, à comprendre qu'elle lui a trop manqué.

glisser doucement dans les même travers qu'auparavant, à venir jouer avec le feu au risque de pouvoir se brûler sûrement trop vivement. parce qu'elle n'a aucune conviction avec toi, parce que tu pourrais disparaître une nouvelle fois sans qu'elle ne puisse rien faire contre ça. pourtant, ça l'embrase de se retrouver si proche de toi. baiser qui s'éternise, à laisser son coeur palpiter bien trop fort dans sa poitrine quand le monde autour d'elle s'efface peu à peu. tu retournes l'esprit, le coeur peut être aussi. et elle râle quand tu recules, à vouloir revenir te chercher quand elle voudrait pouvoir éterniser le moment. le souffle qui s'éteint pourtant et les épaules qui se haussent. c'est pas à moi de le promettre parce que t'étais celui qui était parti, celui qui l'avait abandonné en un claquement de doigt. et sûrement que t'étais celui qui devrait faire la promesse pour la rassurer sur les jours à venir. celui qui devrait lui montrer que les erreurs ne seraient pas répétées. si tu restes, je reste quand elle n'avait aucune raison de s'en aller, de te laisser tomber. gamine qui n'avait jamais fonctionné à la revanche, qui ne cherchait certainement pas à te faire regretter ce qui avait pu se produire par le passé.

Et elle a raison la brune, à dire que c'est pas à elle de promettre. C'est à lui de le faire, à lui de tenir sa parole. D'être moins fermé, de mieux la traiter. Comme elle le mérite. Il l'observe, les opales accrochées aux siennes. Et c'est fou comme elle est belle. La seule qui a su poser les yeux sur lui et l'intéresser. Il esquisse un léger sourire, teinté d'une évidence. « Tu as raison... T'as rien à promettre. » Ce serait à lui de faire des efforts. Les efforts colossaux dont elle a besoin pour avoir d nouveau confiance en lui. Il se sent chanceux, heureux qu'elle lui accorde une sorte de seconde chance. Bien qu'elle ne le dise pas directement, qu'elle n'avoue pas réellement que c'en est une. Mais c'en est une n'est ce pas ? Sa main glisse contre la tendresse de sa joue, caresse sa peau à chercher à l'imprimer en mémoire. À nouveau passer du temps dans le noir à frotter ses doigts comme s'il cherchait à se souvenir de l'aspect de l'épiderme de Suha. Celle qui a su captiver son cœur et lui qui s'est mal conduit. « Je reste. C'est une évidence. Mais... Je sens mon téléphone vibrer dans ma poche depuis au moins quinze minutes. C'est ma mère. Et si tu veux que je reste en vie, je ferais mieux de retourner la voir. » Des mots soufflés alors qu'il s'est rapproché de ses lèvres sans s'en rendre compte. Et le tendre baiser déposé contre les charnues de la brune, à l'embrasser longuement avant de se redresser. « Je te laisse. » Qu'il lance en sortant son téléphone. Décroche rapidement et commence à parler chinois, s'échappant de l'appartement et retourner au restaurant, se confondant en excuse auprès de sa mère qui hurle dans le combiné.