@Céleste Courtin-Clarins Tu sais pas trop pourquoi, mais depuis peu t'as comme le besoin de lui parler, enfin surtout de l'entendre parler, peut être de comprendre. La faute au fait de la croiser tout le temps à la pfoho, la nostalgie ? T'en sais rien mais t'as promis de lui offrir un verre si vous gagniez le paintball alors ainsi soit-il. Bon finalement c'est pas dans un bar que tu lui donnes rendez-vous mais à la pfoho, terrain connu c'est pas plus mal, pour l'instant. "salut C… Céleste." tu te corriges, l'ancien surnom est remonté tout seul sans que tu puisses contrôler, vestige des souvenirs ou vous étiez C et K.

jeudi 15 avril 2021

Il y a quelques jours, à ma plus grande surprise, Katalia avait fait un pas vers moi. J'avais fait le premier un peu plus tôt, avant de reculer d'une dizaine de pas suite à notre échange légèrement mouvementé sur meets. Sans parler des piques et des regards noirs qui surgissaient dès que nous étions à deux ou trois mètres l'une de l'autre. Alors oui, j'avais été surprise par sa main tendue, par cette promesse de discuter autour d'un verre, juste elle et moi ; mais je n'avais pas hésité à la saisir. Foutue culpabilité qui me bouffe de l'intérieur depuis bientôt six ans maintenant. Et cette envie d'enterrer la hache de guerre une bonne fois pour toutes. Si Katalia le souhaite, bien entendu. « Hey, Kat... » Petit sourire qui flanche quand mon ancien surnom franchit la barrière de ses lèvres, éveillant quelque chose qui s'était éteint il y a un bon moment déjà. C'était la seule à m'appeler comme ça, et j'espère bien que j'étais la seule à l'appeler K. Je m'éclaircis la gorge, tente de reprendre le contrôle sur mon sourire. Ne te montre pas si faible, Céleste. Pas encore. C'est beaucoup trop tôt. « Tu fais une belle blonde, dis-moi. »

@Céleste Courtin-Clarins Etrange d'entendre une certaine forme de douceur dans son ton, et pas juste la la rancœur habituelle. T'avances la cuisine, contournes le comptoir et te tournes vers elle "je ne m'improvise pas barman mais… qu'est ce que tu veux ?" il y a des sodas, des eaux aromatisées, des bières aussi. Mais t'as décidé (d'encore) arrêté l'alcool alors. Pour l'instant c'est plus facile de parler de tout et de rien, de faire semblant. "merci. ça ne me suffisait plus de faire concurrence à toutes les brunes de la planète, j'ai voulu élargir mon champ de bataille." tu réponds avec un léger rire narquois.

Mèche replacée derrière une oreille, puis je prends place de l'autre côté du comptoir, face à la présidente pfo. On dirait le début d'une scène, quand les personnages prennent place tandis que le dialogue s'installe tranquillement entre eux. Le calme avant la tempête, dit-on souvent. Mais quelle tempête ? Celle qui passe comme ça, qui secoue à peine ? Ou celle qui est plus destructrice qu'autre chose ? « Dis-moi qu'il y a du vin ? » Ma petite habitude, mon petit confort, ce qui va me permettre de ne pas me sentir trop déboussolée, trop bousculée. « Sinon, sers-moi ce que tu bois, ça sera parfait. » On se croirait au début, quand le terrain est tâté, jaugé, histoire de déceler la personnalité de l'autre ; alors que franchement, nous nous connaissons que trop bien. La preuve avec son naturel qui revient au galop, et qui me fait rire. « Katalia Borgia, à la conquête du monde. J'ai hâte de te voir rousse. »

@Céleste Courtin-Clarins te demande du vin. Tu hoches plusieurs fois la tête avant de sortir du vin rouge, c'est dingue que tu puisses encore te souvenir que c'est celui-ci qu'elle préfère. Un verre pour elle, tu vas pour tendre la main dans le frigo pour te prendre une canette et finalement… tu sors un second verre et te sers aussi du rouge. La résolution viendra pus tard, t'as besoin de vin pour sortir indemne de ce moment avec elle. "pas sure que ça aille vraiment avec mon teint, le roux. t'as peur que j'empiète sur tes plates bandes si je reste blonde ?" tu vas ranger la bouteille et te tournes de nouveau vers elle, sans croiser son regard pour autant "y'a un temps où on aurait alliées plutôt que concurrentes… mais bon." tu termines d'un ton sec avant de faire glisser son verre sur le plan de travail.

Du bon vin rouge à la pfoho, je ne m’attendais pas à moins venant de cette confrérie. Confrérie qui est la mienne, présidée par la jeune femme de l’autre côté du comptoir, celle qui sort finalement deux verres à pied pour les remplir de ce liquide noble. L’instant aimable se ternit petit à petit, laisse place à un début d’hostilités avec cette première pique. Je soupire car, pour une fois, je ne suis pas d’humeur ; avec tout ce qu’il se passe en ce moment, je n’ai pas la tête à... eh bien, me prendre la tête. J’avoue que je préférais une petite discussion innocente, même si nous tournions simplement autour du pot. Mais il est temps de plonger dedans, apparemment. « Pourquoi maintenant, Kat ? Tu n’arrêtes pas de m’envoyer balader depuis qu’on s’est croisées dans le hall. Qu’est-ce qui fait que tu veux parler de tout ça maintenant ? » Mes doigts se referment autour du verre, que je n’ose pas encore boire. Plus tard. Je vais en avoir besoin, surtout s’il faut que je revienne sur tout ce que j’ai pu dire et causer.

@Céleste Courtin-Clarins La question est honnête et légitime, et tu souffles doucement avant de répondre finalement "je sais pas… je suis fatiguée de toujours devoir faire comme si je te détestais du plus profond de mes entrailles. c'st le bon moment de discuter non ?" c'est un premier pas, non ? "bien que j'aurais espéré que ce soit toi qui vienne la première vers moi." ok c'est clairement plus facile de dire ça. Au fond tu le sais, qu'elle a essayé, plusieurs fois sur meets, plusieurs fois à la pfoho mais la dernière fois lors du paintball… tu sais pas, t'as eu envie de faire enfin un premier pas toi aussi.

Mon regard se perd sur le comptoir, sur la silhouette fine du verre, sur le liquide pourpre. Mais la réponse de Katalia me prend de court et mes yeux cherchent les siens un instant. « Parce que tu ne me détestes pas ? Après... » Ma voix se coince dans ma gorge. Comme si les mots  ne voulaient pas sortir, comme s’ils n’étaient pas prêts. Ou est-ce moi, qui ne suis pas prête à affronter l’un de mes plus grands torts ? Je l’ai fait, il y a six ans. Je m’y suis confrontée. Le soir-même. Ce soir-là, j’ai retrouvé Alizée et j’ai fondu en larmes dans ses bras. Parce que j’avais été horrible avec ma K. Et que ça m’avait demandé toute la force et l’insensibilité du monde pour faire ce que j’ai fait. Je m’éclaircis la voix et continue, « J’ai essayé... de venir vers toi. Un peu maladroitement, je l’admets, mais j’ai essayé. » Je grimace et regarde ailleurs. « Tu n’étais peut-être pas encore prête à m’affronter. » Contrairement à aujourd’hui...

@Céleste Courtin-Clarins "bien sur que je te déteste. mais une partie de moi n'a jamais réussi à oublier les bons moments, j'aurais bien aimé, ça aurait bien plus facile de te rayer définitivement de ma vie, mais il a fallu que tu débarques dans ma fac, dans ma confrérie, dans ma ville, dans ma vie..." dur de tourner la page pour de bon en l'ayant sous les yeux tous les quatre matins. Elle chercher ton regard, tu le sens, mais tu le fuis. "tout ce que je veux savoir c'est pourquoi. est-ce que t'avais une "bonne" raison ou est-ce que c'était juste gratuit, de m'envoyer bouler comme ça ? je veux juste savoir ça." et bien plus encore mais ça jamais tu ne l'admettras.

Bien sûr que je te déteste. Les mots sont comme un poignard qui s’enfonce d’un coup sec en nous. C’est rapide, propre, et douloureux. Bien sûr que la douleur est là. Mais je laisse échapper un petit rire, parce que ça reste du Katalia tout craché. Et puis, je le mérite. Bien sûr qu’elle me déteste, après tout ça. Cela dit, une partie de moi est soulagée, rassurée de voir qu’elle ne s’est pas débarrassée de tous nos souvenirs. Parce qu’il y en a, qu’ils sont beaux et que moi non plus, je n’ai pas pu les oublier. Et je ne veux pas les oublier. Parce que ce sont les nôtres. Parce que c’est tout ce qu’il me reste. « À mes yeux, c’était une bonne raison. » dis-je enfin après quelques secondes, faisant tourner le vin dans son récipient. J’ai une furieuse envie de le vider d’une traite. « Avec le recul, peut-être pas. Peut-être que tu t’énerveras et me détesteras encore plus quand tu sauras. » J’hausse un peu les épaules, histoire de dire. Histoire de me prouver que ça ne m’atteindra peut-être pas autant si elle me déteste encore plus après tout ça. « Mais sans cette raison, jamais je n’aurais été capable de te faire du mal. » Mais il s’est passé ce qu’il s’est passé, ce qui m’a poussée à la détruire de cette manière.