Ça suffit, les enfants ? Que je demande en fronçant les sourcils, mon regard glissant de ton visage à la gueule d'Otis, la tête en l'air, qui ne comprend probablement rien de ce qu'il se passe à ce moment même. On dirait vraiment deux idiots qui tentent d'intégrer un bébé et un chien à leur conversation. Oh. Wait. C'est ce que nous faisons et donc, en conclusion, ce que nous sommes. Mais si ce moment est délicat, bien que le notre et qu'il risque de nous attirer bien des soucis avec les gens à qui nous tenons - et qui tiennent à nous, en quelque sorte - je ne peux qu'être heureuse qu'on arrive à communiquer quand on sait que ça n'a malheureusement pas été notre point fort quand ces moments étaient notre quotidien. Tonton en robe, tonton en robe. Que je souffle, toute joyeuse et souriante, le regard posé sur Eden qui commence à sombrer doucement. Je crois que ce qui endort ce gamin, ce n'est pas l'épuisement d'une journée de découverte, de rire et de jeux mais bien les batailles et duels constants que nous avons, toi et moi. Je mets ma main à couper que, lorsqu'il sera capable de parler, il nous dira qu'on le fatigue depuis des années déjà et qu'il en a assez de nous. Mais pas assez pour nous en vouloir vraiment et nous abandonner comme des chaussettes pourries au bord de la route. Oh non. Je n'ai aucun doute que ce trio sera le plus fort qu'il ne connaîtra jamais. Je ne doute pas une seule seconde que son tonton et sa tata seront toujours à ses côtés, toujours à rattraper ses conneries, mais à lui faire la leçon aussi, d'une certaine manière. Il est hors de question que je le laisse filer avec de grosses erreurs comme tu pourrais le faire. Je sais que l'on risque de s'embrouiller là dessus, dans le futur parce que mon cerveau de chargée des relations presses et de la réputation de ma famille le remettra joliment à sa place. L'aider, oui. Le sauver sans cesse, non. C'est avec les conséquences de ses actes qu'il va devoir apprendre à vivre et tu devrais t'y mettre aussi. On arrive dans la chambre de ton frère, celle que j'ai décidé d'accaparer pour la durée de mon séjour ici. C'est l'une des pièce dans laquelle je n'ai aucun souvenir de rien, où rien n'essaye de se glisser dans ma tête. La boite des souvenirs a beaucoup de ressemblance avec la boite de Pandore. Et si je l'ouvre, ne serait-ce que de quelques millimètres, tout pourrait s'échapper et me prendre de court. Alors, il faut toujours s'occuper et là, c'est Eden notre occupation. Rhabillé, toujours endormi, je te propose de le coucher et ne peux que lever les yeux au ciel quand tu parles de me border. T'as pas peur pour ta jugulaire toi... Que je souffle, mordant ma lèvre pour retenir un rire qui pourrait réveiller notre petit ange. Et quand je pense à cela, à la manière dont mon cerveau a transformé 'mon ange' en 'notre ange', je me dis qu'on aurait fait de bons parents. Si la raison le sait... Et elle, c'est la plus pure. Celle qui ne se laisse pas avoir par les sentiments du coeur. C'est gentil. Que je souffle avant d'attraper le tshirt de Will et de filer vers sa salle de bain, adjacente à sa chambre, et de me changer rapidement. Je fais sauter les boutons et glisser le tissu blanc le long de mes bras pour qu'il s'échoue sur le sol. Un regard vers la chambre et je te vois hypnotisé par le petit. Je n'ai même pas fermé la porte de la salle de bain mais je suis assez reculée pour que tu ne vois rien mais que moi, je te vois. Et j'aimerais te dire que tu es beau comme ça. Qu'avec Eden, tu retrouves ta pureté, tu retrouves ta lumière. Et avant que tu me vois à te regarder, je me redresse et enfile le tshirt. Arrêtes de le fixer comme ça, tu vas vouloir rester ici toute la nuit après. Que je souffle, tapotant le lit pour qu'Otis monte. Je laisse mon fils se glisser entre les oreillers et je regarde Eden dans son berceau, juste à côté. Je sais bien qu'il devrait dormir dans sa chambre mais je préfère rester dans cette configuration. Mes lèvres finissent par s'écraser sur ta joue et je dis Laisse ta porte de chambre ouverte que je crie s'il y a un autre problème pendant la nuit. La courte nuit qui nous attend. Et moi, je me glisse sous les draps après quelques contorsions puisque je dors toujours du côté droit en temps normal mais que j'ai tiré le berceau du côté droit. Toujours au plus prêt d'Eden. Pour toujours.