Une claque au visage, c’était ce qui l’avait ramenée à la réalité. Elle s’était alors rappelée que chez les Reif, ce n’était pas qu’une histoire de vin, de rires échangés et d’harmonie. C’est une tragédie masquée où elle n’aurait jamais dû accepter de prendre part. Quoiqu’elle n’avait jamais eu son mot à dire. Forcée par un papier d’adoption, elle était à jamais liée à cette famille qui ne l’appréciait pas vraiment. Après tout, il semblerait qu’elle avait été choisie dans le seul but de combler le vide laissé par la benjamine Antheia. Elles avaient le même âge et des traits similaires. Ainsi, Ariadne était devenue prisonnière du fantôme de celle qui avait disparu.

Ne jamais prononcer le prénom d’Antheia. C’était la seule consigne que son père lui avait ordonnée une fois devant le palier de la porte. Elle avait juré en hochant la tête. Mais pour une fille d’à peine huit ans, la curiosité était une tentation bien trop difficile à surmonter. Inévitablement, à force d’entendre les femmes de ménage parler d’Antheia, elle avait fini par demander à sa mère. Dès cet instant, elle ne reconnut plus celle qui la réconfortait lorsque ses frères Helios et Zelos l’ennuyaient. Le masque était tombé et elle était terrifiée. Elle avait compris que sa mère était malade. Instable psychologiquement, elle semblait ne voir qu’Antheia en elle. Une douce illusion dans laquelle elle s’était laissée perdre jusqu’à devenir totalement folle. Parfois, elle la serrait tendrement, parfois elle la rejetait violemment allant même jusqu’à la brutaliser. Ariadne était devenue une drogue qui la tuait à petit feu. Puis un jour, ne supportant plus la vue d’Ariadne, elle tenta de la noyer.

A quinze ans, elle avait cru mourir. Elle se souvenait d’avoir appelé son frère Zelos. De l’avoir supplié de l’aider alors qu’il regardait la scène sans broncher. A la fois apeuré et indifférent. Ce n’était pas étonnant venant de lui se disait-elle. Il ne l’avait jamais apprécié. Elle n’était qu’un parasite, celle qui jamais ne remplacerait sa sœur. A chaque rencontre, la tension était palpable. Les quelques discussions finissaient toujours par une violente dispute. Elle était persuadée qu’un jour il finirait par la tuer. Accidentellement ou volontairement. Finalement, il n’aura même pas besoin de salir ses mains. Elle était presque dégoutée. Mais elle s’était réveillée quelque jour plus tard en se demandant si c’était un rêve. Tout était bien réel. Couchée sur un lit d’hôpital, elle avait appris que Helios l’avait sauvée in extremis. Qui aurait cru. Bien que moins agressif et provocateur que Zelos, il s’était toujours montré si froid et distant. Ils s’ignoraient mutuellement. Mais il l’avait sauvée… Quant à sa mère, elle ne l’avait plus jamais revue, dorénavant internée dans un centre psychiatrique.

Aujourd’hui, cet incident semble n’être qu’une histoire ancienne, quelque chose de passé et oublié couvert par le succès florissant des vins Reif. Devenu une rumeur ou un mythe, plus personne n’en parle vraiment. D’ailleurs, il n’y avait plus aucune trace dans les journaux ou même les archives. Disparu, oublié. On dirait bien que leur paternel avait fait du bon boulot pour couvrir l’affaire. Pour ne pas teinter son business probablement. Mais les enfants n’avaient pas oublié. S’ils semblent être proches et inséparables, ce n’était qu’une façade. Devant le public, tous jouaient leur rôle à la perfection. Mais une fois le bal terminé et le masque tombé, ils étaient redevenus eux-même. Helios était toujours aussi froid et Zelos toujours aussi agaçant. Si l’orage était passé, l’ombre d’une nouvelle tempête n’était pas loin. Après tout, la succession du paternel faisait la une des journaux depuis son dernier interview. Qui allait prendre la tête du business ? Ariadne tout comme ses frères était prête à tout pour prendre les rênes.

La dernière fois qu’elle a revu sa mère adoptive date il y a trois ans. Prête à lui pardonner si elle s’excuserait mais elle a préféré blâmer Ariadne de l’avoir envoyé dans un asile. Elle était toujours aussi folle. (+) Depuis sa noyade, elle n’a plus jamais remis les pieds dans une piscine ou à la mer. L’eau l’effraie. D’ailleurs, elle ne prend plus de bain. (+) Déception, coups bas et trahisons… Trop d’hommes se sont servis d’elle pour son statut social. Aujourd’hui, elle a décidé de se jouer d’eux à son tour. Sans aucune attache, juste pour le plaisir et le pouvoir. Ses relations ne sont plus que purement affaire. (+) Souvent en tête de classe, mais pas un géni pour autant. Le succès se mérite et elle travaille énormément. Les nuits sont souvent longues et épuisantes, mais elle ne lâche rien car elle est déterminée à atteindre ses objectifs. (+) Pour évacuer son stress et ses frustrations, elle s’est mise au taekwondo et au baseball ; elle dit souvent avoir un besoin de frapper la balle. Puis pour gérer son calme, elle s’est mise au yoga. (+) Elle a une affection particulière pour les plantes et déteste les fleurs découpées. (+) Ne jamais la défier, la provoquer car elle est ultra compétitive et têtue. (+) Quand tout va mal, quand elle a ras-le-bol de tout, elle est du genre à partir sur un coup de tête. Disparaitre, elle seule sait où. Se déconnecter totalement du monde. Injoignable, elle sera mais elle reviendra toujours après deux ou trois jours. (+) Elle est drôlement douée aux fléchettes. (+) Pour vaincre sa nervosité, elle a tendance à faire un origami. Pas étonnant qu’elle laisse des pliages sur son bureau à la fin des examens.