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w/ @Devon Bulger
Je sens bien que cette révélation te perturbe. Mais même si j’étais vierge lors de notre rencontre, je n’étais pour autant blanche et immaculée. Nous venons d’une époque où il est difficile de se passer de rapprochements de ce type quand on fréquente d’autres personnes. Je viens sourire toutefois, décidant que je n’ai pas à tout te révéler. Après tout, j’ignore tout de ton passé dans ce domaine, je ne sais même pas si avant moi certaines femmes ont compté. « Quelques-uns. » Mais rien de suffisamment important pour qu’on s’y attarde. Jusqu’ici, les hommes m’avaient toujours déçu. Et je viens à l’oublier entre tes bras, lorsque ton corps vient s’allonger contre le mien sur ce matelas qui a pourtant vu nombre de nuits blanches défiler, je t’avoue ces trois mots une nouvelle fois, que tu viens conforter à ton tour, et nos corps s’unissent presque sages dans cette rapidité, laissant une parenthèse au passé, dans lequel je m’éprendrai à te voir évoluer, traçant de nouvelles perspectives sur les sombres souvenirs, te laissant découvrir mes lieux favoris, ceux qui avaient du sens, et les plus anodins aussi.


Quelques jours plus tard, nous voici de retour à Boston. Mes paupières se plissent sous l’assaut de ton baiser. Me réveiller dans ta proximité, dans ton odeur a quelque chose de réconfortant, et pourtant, je viens m’enfoncer sous les draps en grognant. Je dormais bien et pour une fois, je voudrais continuer. Mais les mots qui suivent alarment mon cœur plus qu’il ne faudrait sans doute. Le vieux. J’en conclue que c’est cet italien dont tu m’as parlé. Le genre de vieux brigand qui connaît tout sur tout le monde et qui sait se tenir à l’écart du merdier tout en étant respecté. Pas sûr qu’il veuille parler. Mais trop tard. Mon corps et ma cervelle sont alerte. Doucement, je m’extirpe du lit, pour me réfugier dans la salle de bains. Eau qui vient à couler. Et mon corps qui s’y réfugie, accueillant presque avec plaisir le jet d’eau glacé. La douleur vaudra toujours mieux que la peur. J’attrape le gel douche pour parcourir mon corps à mesure que je parcours mes pensées. Que va-t-on découvrir ? J’ai cette hantise depuis que tu as tiqué sur le nom de ma mère sur cette tombe froide et anonyme. Mes phalanges s’arrêtent un instant sur la cicatrice de mon bas-ventre. Maigre relief pour notre premier crime ensemble. Cette vie de notre union éphémère alors que je portais. Je ne voulais pas d’enfants. Je ne voulais pas infliger ce qu’on m’avait fait, mais c’était à l’heure actuelle la marque du début de notre union, dans la vie, dans la mort, dans la violence, et voudrais-tu toujours de moi alors ? Les choses seraient-elles les mêmes pour toi aussi ? Comme une nausée qui s’insinue dans ma gorge mais contre laquelle je lutte, je peux pas être une gamine encore, je me dois d’affronter. Me séchant rapidement, je m’habille sommairement, rejoignant la pièce dans laquelle tu te trouves. « Je suis prête. » Trop tard pour reculer. Plus le luxe de renoncer.

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w/ @Lyra Bain

Possible qu’il valait mieux éviter le sujet des anciens hommes qui ont pu te toucher d’une quelconque façon, c’était source d’énervement de mon côté et je savais que cette façon d’être pouvait être énervante. D’autant que je n’étais pas forcément irréprochable de mon côté, je le sais. Nombre de femmes ont pu goûter au plaisir de la chair à mes côtés et je ne m’en étais jamais caché. Mais après un nouvel échange sur les sentiments éprouvés, on s’était allé à ce qu’on savait le mieux faire sur ce matelas, Gotham à l’écart de tout ça, sûrement épuisé de nous voir le faire aussi souvent, comme deux animaux. Mais n’était-ce pas ce que nous étions tous ?
Après quelques jours passés à New York, on était finalement rentrés sur Boston et retrouver notre lit, notre confort n’était pas forcément de refus. Vivre dans d’autres lits était assez différent de ce que j’appréciais, depuis qu’on était ensemble, sous le même toit. J’aimais cette dynamique, cette façon qu’on arrivait à s’apprivoiser toujours un peu plus avec le temps. Et pour une fois, j’étais debout le premier. Etonnant, je sais, surtout quand on connait ton habitude à être la première debout. Et bien sûr, il avait fallu que cette journée soit différente des autres, que ton envie de dormir soit plus présente que ton envie de découvrir le monde. Mais tu avais réagi à ma phrase, oui. Tu t’étais redressée et avais fait en sorte de te préparer assez rapidement, sans pour autant te presser. Si bien qu’après une quinzaine de minutes, alors que j’attendais dans le salon en regardant l’actualité sur mon téléphone, tu apparaissais, annonçant même que tu étais prête. Sourire qui se dessine, je me lève du canapé, attrapant mes papiers que je mettais dans ma poche arrière de jean avant de m’engouffrer à l’extérieur de l’appartement, Gotham à mes pieds. Tu suivais, et on pénétrait dans la voiture, afin de nous rendre chez le vieux. « T’es pas obligée de venir, si tu le sens pas. » finissais-je par dire en mettant le contact. Je ne m’insinuais pas pour autant dans le trafic, préférant être sûr que ce soit ce que tu voulais. En apprendre plus sur ta famille, ta mère.

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w/ @Devon Bulger

Il est trop tard pour reculer. Depuis que le sang a été versé, ma vie brisée, j’ai toujours su que je ne pourrais pas revenir en arrière, que je ne trouverai plus le repos. Et que des réponses devraient s’offrir aux énigmes. Mon père m’avait protégé de ce monde, ne me révélant rien si ce n’est quelques blessures de ses noirceurs. Mais ma mère… je l’imaginais à l’écart, comme j’avais pu l’être. L’Histoire m’apprendrait peut-être qu’il en était autrement. Je me faufile à tes côtés dans la voiture, et comme à ton habitude, tu sembles imperturbable, pas le moins du monde stressé par ce qui pourrait nous être révélé. C’est loin d’être mon cas, même si je ne montre pas grand-chose. Si on venait à nous révéler que nos buts étaient inverses, nos familles ennemies. Est-ce qu’on saurait oublier le passé ? Je ne sais même pas si moi-même, j’en serais capable. Mes doigts viennent tapoter contre ma cuisse et tu le notes sans doute puisque tu viens me dire que je ne suis pas obligée de venir. « Je veux savoir moi aussi. » C’est mon histoire et il n’y aucune raison pour que je sois lâche ou que je me cache derrière toi. Qu’importe ce qui nous sera révélé. Je me dois de l’affronter. Quelques minutes passent avant qu’on atteigne le quartier italien de Boston. Je n’y suis jamais allée, mais une certaine familiarité se dégage de l’endroit. Plissant des yeux, je pose mon regard sur une devanture terne et ordinaire, et te suis rapidement à l’intérieur. Tu demandes Alessandro. Et on nous escorte vers une pièce à l’arrière. La décoration est désuète, mais l’endroit sent les doux parfums de nourriture italienne. Un peu comme chez des grands-parents, même si moi je n’en ai jamais eu. Mon regard alterne entre le vieil homme dont les avant-bras sont tatoués abondamment et ta personne, rigide, glaciale dans l’endroit. J’ai sans doute l’air d’une petite souris pour ma part. L’homme nous accueille, après que tu m’aies présenté brièvement, je le vois bien sourciller à la prononciation de mon nom, ce qui m’indique et me confirme que oui, nous sommes sur une piste. « Nous venions pour avoir des informations sur le nom de jeune fille de ma mère. Elle s’appelait Chiara Mannochio. » Je l’interroge du regard alors que celui-ci vient joindre ses doigts, je me cale vers l’arrière de la chaise, prête à recevoir, à voir les révélations se faire.

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w/ @Lyra Bain

C’était quelque chose qui me travaillait, depuis ce moment dans le cimetière. Ce nom de famille qui m’était familier, sans pour autant savoir le positionner quelque part. Mais je ne voulais pas t’inquiéter, je ne voulais pas que tu viennes à te retrouver dans des états pas possibles pour quelque chose qui est peut-être futile. Ou peut-être pas. Seul Alessandro pourra nous aider à y voir plus clair. Il s’agissait du criminel le plus respecté à Boston. Il sait tout, ne fait rien. Il faut admettre que nous vivions dans un mode de vie des plus étranges, pour les plus normaux d’entre nous, mais j’en avais que faire de l’avis des gens. J’avais choisi cette vie et l’embrasais de la meilleure façon qui soit. Et bizarrement, elle était bien mieux depuis que tu étais dedans. Une fois dans l’automobile, je m’assurais que tu voulais bien vivre ça. Vivre ce moment qui risquait de changer les choses, tout comme ne rien changer du tout. Contact enclenché et tu confirmais vouloir être là. Hochant la tête, je me mettais en route vers le quartier italien où se trouvait ce bon vieux Sandro. Le quartier était fidèle à lui-même et je m’arrêtais au bon endroit. Cette adresse que j’avais visité maintes et maintes fois quand j’étais plus petit. Avec Quinn et mon père. Soupçon de nostalgie avant de me remettre dans l’objectif de notre venue. On pénétrait dans les lieux, cherchant à voir le vieux, avant d’être escortés dans la pièce où il était. Il me connait, mais toi non. « Alessandro, Lyra Bain. Lyra, Alessandro. » Son seul prénom suffisait. C’est tout ce qu’il fallait retenir de cet homme. Ça, et le fait qu’il sache tout ce qu’il faut savoir. Une vraie encyclopédie à lui tout seul. Il sourcille oui, à ton nom. Et je pense que la suite l’intéressera d’avantage. Tu prends la parole, lui expliquant les choses et forcément, il prend un air sérieux. « Mannochio tu dis ? » Lèvres qui se pincent, regard qui se tient dans le tien.  « Mannochio oui. Je sais que ce nom a déjà été mentionné par mon père, mais je ne me souviens plus du contexte. Peut-être que tu peux nous éclairer. » J’étais sérieux et il l’était tout autant. Il comprenait sûrement la gravité de la chose avec le visage que tu arborais. En même temps, c’était ta famille. « Les Mannochio sont de la mafia italienne. Bain avait pour mission de dévier un trafic de drogue des italiens, ici, à Boston. Mais il s’est épris de la jeune italienne. C’est ton père, Devon, qui les a couvert quand ils se sont enfuis. Les Mannochio ne se sont jamais remis de ce qui s’est passé. » Il lâche ses mains, se cale contre le dossier de son fauteuil, sans te lâcher du regard.

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w/ @Devon Bulger

Comme un goût de désuet au décor, comme une impression de ces films d’un autre temps. D’un passé qui ne nous appartient plus mais qu’un futur qui saura d’autant mieux se révéler pour nous deux. Je peine à cacher ma nervosité dans ces lieux, mes orbes basculant de mes ongles à ton profil, de tes traits à ceux de notre interlocuteur, revenir à l’envers du décor puis retourner à mes phalanges, boucle infernale, mots expiés des lèvres de l’ancêtre dont la crasse a remplacé l’ombre. Rien ne le fait sursauter sans doute le soir venu. Comme les autres, une mort brutale et violente viendra venir l’assaillir dans son lit. A quoi bon redouter un sort inexorable ? Quelque part je les envie. Parce que quelque part, j’ai encore peur. Pour moi c’est une chose, mais pour toi encore une autre. Et rien n’est pire que cette peur-ci. Mes épaules s’affaissent mais la nuque se redresse lorsqu’il vient conter cette partie qu’on ignore. Une piste se dévoile, un angle qu’on avait pas envisagé jusqu’ici. Ma mâchoire se contracte sous l’aveu des révélations. « Vous pensez qu’ils peuvent être impliqués dans le meurtre de ma famille ? » Peut-être qu’il ignorait sans doute le sort de la famille Bain, mais quelque chose me dit que ce vieux sait tout. Sur tout et sur tout le monde. Et il y a quelque chose d’ironique à envisager qu’une partie de ma famille viennent à en tuer l’autre. Ce que je ne comprends pas, c’est ce que viennent faire les Bulger dans l’affaire. Le Vieux de Devon les avait aidés à fuir mais c’était bien avant ce meurtre et la chute du gang. « C’est possible petite, il se murmure que les Manocchio voulaient faire payer Bain de son affront mais depuis l’eau a coulé sous les ponts. Je peux juste te dire qu’ils se sont rapprochés des russes récemment. » Et le Vieux ne voulait pas trop en dire, c’est normal après tout. « Comment se connaissaient nos pères ? » Alessandro m’explique que mon paternel fût le second de celui de Devon pendant quelques temps et cela a un goût d’histoire qui se répète. Je suis un peu perdue face à tout ça. Il nous propose à boire, à manger, mais je refuse poliment, j’ai l’estomac trop retourné pour en vouloir davantage, ma seule envie est de fuir le lieu dès à présent. Mais il faut rester convenable alors j’écoute Devon et Alessandro parler business quelques instants, rien n’est gratuit et tout se monnaie. Finalement, on ressort au bout d’une bonne heure, le soleil vient me faire plisser les paupières, je n’ai jamais aimé l’excès de lumière. « Il faut qu’on demande à Iakov. » dis-je impossible à calmer, le tumulte me gagne depuis ces mots révélés, comme le sprint final avant le bouquet, terrorisée mais décidée, quand bien même l’ennemi est sans doute bien plus fort, les veines bien plus profondes que ce que j’avais envisagé.

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w/ @Lyra Bain

Me retrouver ici, c’était étrange, encore plus en ta compagnie. Mais après les quelques jours passés à New York, c’était indispensable de venir se renseigner à propos de ce nom de famille, celui de ta mère. Une famille italienne était de toute évidence derrière tout ça. Mais c’était ma mémoire qui me faisait défaut cette fois. Alessandro nous expliquait alors le résumé de ce qui s’est passé, des années auparavant. Donc les Bulger et les Bain se connaissent déjà. Et si mon père n’était pas mort en prison, et si le tien n’avait pas été assassiné, possible qu’ils nous auraient présenté. Mais le fait est qu’ils sont tous deux dans un autre monde et on avait plus que les restes de leur existence, des pièces de puzzle à assembler pour comprendre ce qui s’est passé. Tu le questionnais à ton tour et sa réponse était pour le moins étrange. Les Russes. Sourcils qui se froncent, un besoin d’en savoir plus. Mais ce n’était pas lui qui allait réussir à nous décrocher plus de mots à propos de cette histoire. Donc tu continuais de creuser, ce qui était tout aussi intéressant, mais mon esprit était déjà ailleurs. Par la suite, je m’occupais de ce retour de service avec lui, avant qu’on ne s’en aille. Un refus de boire, manger, sûrement parce que tout ceci t’avait retourné. A peine étions sortis de l’endroit, non sans se faire éblouir par le soleil qui s’était bien plus élevé au ciel, que tu semblais assez motivée pour connaître le fin mot de l’histoire. « Je le vois ce soir. On lui demandera à ce moment-là. » que je finissais par dire en avançant vers la voiture, t’intimant de me suivre pour t’installer dans la carcasse. Ce n’était qu’une fois dedans que je me permettais de parler un peu plus à propos de ce qu’on venait de découvrir. « Possible que le côté maternel de ta famille a fait en sorte de vous éliminer. En l’état, je pense pas qu’ils veulent t’abattre. C’était ta mère et ton père. Surtout ton père. » Mais une certaine logique voudrait qu’ils ont envie d’éliminer toute cette partie de leur famille, ne laisser aucune trace de l’erreur de leur mère.

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w/ @Devon Bulger

Je m’attendais à des révélations mais sans doute pas de ce style. Nos passés bien plus entremêlés qu’il n’y parait. Et sans doute une explication logique à ma venue ici. Après tout, il s’était murmuré depuis le départ que la chute des Bulger était liée au meurtre de ma famille. J’avais quelques pièces de plus pour le puzzle mais sans doute pas toutes encore. « Je me demande simplement pourquoi ils ont attendu toutes ces années ? Et pourquoi j’ai été épargnée ? » Pour la deuxième question, je me doute que c’est simplement le hasard qui a fait les choses me concernant. La voiture en marche, je m’accoude contre la vitre, pensive ne voyant même les rues de Boston qui défilent sous mes orbes. Une grosse famille mafieuse italienne, c’était bien plus compliqué que je pensais. « Je suis vraiment conne. » D’avoir pensé que ce serait facile. Encore des pensées de gosse, j’aurais dû me douter pourtant que mon père ne se serait pas fait avoir par n’importe qui et qu’on lui ferait pas de représailles sans qu’on redoute le risque encouru. Pour les Manocchio, ce n’était pas grand-chose finalement, sans doute une tractation de plus… Mon cœur qui s’affole. Et je repense à Reed, cette pensée étrange. Si c’était ses parents qui… « J’ai l’impression que c’est sans issue, on peut pas s’attaquer à la mafia. » J’ai beau être redoutable, impitoyable, mais je ne suis pas encore complètement suicidaire ou inconsciente.

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w/ @Lyra Bain

Les Bain et les Bulger, de génération en génération. Voilà qui était inattendu. Mais ce qui l’était encore plus, c’était cette famille maternelle qui semblait avoir une rancœur tenace, qui tenait au delà des années écoulées. Il avait fallu que t’aies la vingtaine passée pour qu’ils passent à l’action, mettant à bien leur vengeance bien ficelée. Seulement, on ne devait pas se laisser abattre. Ce qu’on venait d’apprendre, les italiens et les russes contre les écossais et irlandais, ça ne devait pas être un motif pour abandonner. Venger ta famille était ton but premier, ça ne devait pas changer. « Sûrement qu’ils attendaient le bon moment. La bonne force de frappe. Et surtout que quelqu’un souffre pour les “méfaits” de ta famille. » Méfaits, selon les italiens. Parce que de mon point de vue, ça ne semblait pas vraiment en être. En réalité, on pourra jamais vraiment savoir. Sauf si on les confronte directement. C’était le moment de retourner à l’appartement et je te laissais cogiter tranquillement. Après tout, c’était toi qui avait le plus appris aujourd’hui, quant bien même mon père avait été impliqué dans cette histoire. « Je ne laisserai pas cette affaire tant qu’il n’y a pas eu vengeance. Quitte à y perdre ma peau. » Pour toi Lyra, je suis prêt à mourir. Le vois-tu pas ? « Aussi bizarre que ce soit, les Russes sont ceux qui ont repris la main de mon gang. » Non pas qu’il puisse y avoir un lien mais… ça mérite réflexion. Ça mérite peut-être qu’on suive cette piste-là aussi.

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w/ @Devon Bulger

De nos mains meurtrières mais pourtant inexpérimentées encore, on récolte des pièces, des indices, des bouts d’histoires morcelées, qui viendront compléter la trame entière. Je le sais. Un jour tout sera plus limpide sous nos yeux dépossédés du sens de ce récit qu’on nous a pris mais qui nous appartient. Et si je suis ici, entre tes murs, au creux de tes bras, ce n’est pas pour rien, une partie de moi profonde et instinctive en est persuadée. C’est le destin qui nous a mis sur la route l’un de l’autre et non pour accomplir une vie romantique et paisible. Non. La nôtre sera destinée au règne, au sang, aux violences, et peut-être alors dans quelques soubresauts on s’accordera dans nos relents de passions. Parce que ça ne peut être calme entre nous. Pas quand le sang est versé la nuit et que le jour se tapisse de nos ombres. Mon cerveau fulmine comme pour trouver la clé. Je pense à cette histoire avec Reed mais je n’ai pas encore assez d’éléments, ça me traverse simplement et tu évoques les Russes. « Un ennemi commun qui avait tout à gagner. Livrer ma famille, descendre la tienne. » Pour le pouvoir, c’est certain. Quoi d’autre motive le monde ? Sinon moi et ma quête de vengeance. Sinon toi et ton désir de m’y aider. « Tu n’as pas intérêt à la perdre tu m’entends. » La grimace accompagne mes mots. J’ai suffisamment perdu et déjà bien trop. Toi, c’est tout simplement inenvisageable. Je ne savais pas que je t’avais mais la suite ne serait pas possible sans toi. « Tu crois qu’on doit se méfier de Iakov ? » Qu’il puisse jouer un double rôle, informer les deux parties, on ne pensait pas les Russes spécialement ennemis avant ça, mais désormais…

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w/ @Lyra Bain

Sensation étrange, comme quoi tout était écrit. Nos pères, puis nous. Les Bain et les Bulger étaient comme deux racines entremêlées et nous venions tout juste de nous en apercevoir. En fait, j’avais l’impression d’avoir des œillères dans cette histoire, incapable de voir l’étendue de toute la fresque qui se dessinait pourtant face à nous. Comme si les réponses étaient à portée de main, mais on était tout bonnement dans l’incapacité de les lire. Je finissais par nous garer dans notre rue, l’appartement nous surplombant. Mais tous deux restions assis dans la carcasse métallique, les théories fusant les unes après les autres. « Mh. » Je n’aimais pas ça, le fait qu’on se soit joué de ma famille, qu’on ait massacré la tienne, pour des histoires assez vieilles. Plus vieilles que toi de toute évidence. Je devais être tout jeune à l’époque. Pour cette raison que le nom de famille de ta mère me disait quelque chose. « Je suis un dur à cuire. T’en fais pas. Mais s’il faut, je me sacrifie pour toi. » Tu as bien plus à vivre que moi de toute façon. Mon chemin est déjà tout tracé, quand le tien a encore tout un monde à parcourir. « Iakov ? Noooon. Non. Non ? » L’inquiétude pouvait soudainement se lire sur mon visage. J’ose pas imaginer mon bras droit être un agent double pour les Russes. « J’enverrai Izzy faire attention à lui. Voir si elle trouve quelque chose de suspicieux dans ses actes. Il se méfiera moins d’elle que de moi. Ou toi. » Action, réaction. Je ne voulais pas prendre le risque de tout perdre encore une fois parce qu’un connard de russe a réussi à gagner ma confiance.

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