Calliopé devint alors l’ombre du piano, doux son enjoliveur ayant la faculté d’envoûter quiconque se laissait l’écouter. Son jeu était plus demandé par sa chère mère qu’elle-même, elle n’attirait les regards que par son talent. Devenu objet de foire, talent convoité, Calliopé ne faisait qu’exécuter les ordres stricts et sévères de sa mère et de son professeur de piano.


Ce qu’elle ignorait totalement c’étaient les disputes incessantes entre ses deux parents dont son père essayait de l’épargner. Cet homme qui était contre les méthodes employées par sa mère, la violence psychologique dont elle pouvait faire preuve à l’égard de leur enfant, les propos qu’elle pouvait lui tenir et le fait qu’elle refuse de dire à Calliopé qu’elle était adoptée.


La mère de Calliopé lui coupait alors toute relation avec son père et ses demi-frères et demi-sœurs, restés eux-aussi à New-York. Les exigences que sa mère lui imposait étaient toujours plus sévères et ses professeurs de piano toujours plus stricts et virés toujours plus rapidement. Et rapidement, son nom fut inscrit à plusieurs concours, avec des répétitions toujours plus longues. Calliopé cumulait indéfiniment ses leçons de piano et ses cours au collège, lycée, puis université, devant viser toujours plus haut. Calliopé se trouvait isolée sans vraiment pouvoir s’en rendre compte.


Ne serait-ce pas un début de prise de conscience que de ne pas vouloir faire de son métier quelque chose que l’on nous a imposé toute notre vie ? La médecine, quelque chose dans laquelle elle se sentait enfin utile, enfin existante, à sa place. Faire de la musique, égailler le cœur des autres était important certes, mais elle n’y trouvait, au fond, pas sa place.


Cette maladie, encore inconnue et inexpliquée, lui laisser la possibilité de s’extirper un peu plus du carcan qu’il l’entourait, pour enfin découvrir un peu plus la vie.