J'essaie de comprendre le mystère qu'est Veïa Alvisio, et je vois très bien qu'elle cherche à me cacher quelque chose. Il serait préférable de ne pas trop la presser sur le sujet, alors je lui laisse une part de secrets, du moins pour l'instant. Elle semble quand même être une fille géniale et profondément sympathique, mais je vois qu'elle semble surtout plutôt secrète et cachottière. Je me souviens quand même un peu de la veille, et même si j'ai bu énormément et que certaines bribes m'échappe, je me souviens qu'elle buvait beaucoup et assez vite... Je n'en fais pas tout un cas, par contre. À quoi ça servirait? Je préfère tenter de la connaître sans teinter l'image que je me fais d'elle, du moins pour l'instant. Mais j'arriverai au bout du mystère, parole de Détective Aitken!

«Je me propose pour t'aider dans ces rebondissements.»

Lorsqu'elle me dit ceci, j'avoue que je ne peux pas me retenir de pouffer de rire. Je n'avais pas vraiment l'esprit détourné ou pervers, mais ce qu'elle vient de dire, pris hors contexte, avait une tout autre connotation.

-Eh bien, mademoiselle, vous prenez drôlement les devants! Va-t-il falloir que je me trouve une paire de sous-vêtements comestibles pour satisfaire vos envies?

Je me mets alors à rire à nouveau, mais aussitôt je m'arrête, prenant ma tête à deux mains et murmurant  des jurons bien de chez moi. J'avais tellement mal au crâne, il fallait que je me retienne un peu. Il était rare que je me réveille avec une telle gueule de bois, et je devais peut-être essayer de me ménager un peu, de peur que je ne m'effondre de douleur en plein milieu de la salle à manger... Bon j'exagère peut-être, mais essayez de vous réveiller en lendemain de veille. Vous verrez que ce n'est pas reposant du tout.

Elle me parle alors un peu de son passé. Elle me dit qu'elle vient d'Italie, un pays ensoleillé et merveilleux pour lequel je dois avouer avoir une totale admiration. L'architecture, la beauté des paysages, le charme typiquement italien, quoi! Et elle me prouve que le charme ne tient pas seulement à la vue et aux paysages, mais bien dans la manière d'agir et de parler. Je détecte une pointe d'accent, très faible. Il faut dire qu'ayant parlé anglais toute ma vie, et ayant fait les efforts pour être compris par les Américains, je peux voir ça assez vite.

Elle me propose alors un shot pour pouvoir me réveiller. Je me pose une question fugace, qui aussitôt disparaît de ma tête.

-Je crois que l'alcool fort, c'est très peu pour moi ce matin! À moins que tu veuilles me voir ramper sur le plancher de la salle à manger, c'est toi qui voit!

Je la vois me jeter ce petit regard coquin et malicieux, et je comprends aussitôt qu'elle veut entrer dans mon petit jeu. Je lui jette alors un sourire tout ce qu'il y a de plus franc. Voilà la Veïa que je connais! Il faut dire que le mal de crâne n'avait pas dû aider ce matin, mais je la vois tranquillement revivre et reprendre un peu du poil de la bête. Voilà qui me rassurait. Il y a bien une raison pour laquelle j'ai décidé d'habiter avec elle ici, et c'est parce que c'était une fille authentique, joueuse, et excessivement franche. Je savais qu'avec elle, il n'y aurait pas de détour, pas de demi-mesure. Avec elle, j'aurai toujours l'heure juste... Sauf en ce qui concerne son passé, mais bon, je savais bien que j'avais devant moi une cause perdue là-dessus. Je lui faisais confiance, c'est tout ce qui compte.

Elle me met alors au défi de trouver des sous-vêtements comestibles. Oh, ce qu'il ne fallait pas dire! Elle ne savait pas encore que j'étais capable de la surprendre. Un défi lancé dans ma direction, c'était généralement un défi relevé.

-Challenge accepted!

Ma réponse était claire et nette. Je lui jette le même genre de regard espiègle et malicieux qu'elle m'a jeté tout à l'heure, et je sors également la langue.

-En même temps, faudrait pas t'attendre à ce que j'arrive en les portant non plus. Peut-être que ça pourrait être ton cadeau de Noël, qui sait!

Je me mets à rire, malgré le mal de bloc qui commence presque aussitôt à m'élancer comme un chien. J'allais devoir endurer tout ça pour le reste de la matinée, je crois bien. Il fallait que je fasse un peu attention à tout ça... Et surtout, que j'arrête tout de suite les nuits de beuverie si je voulais être en forme pour aller étudier.

Je la vois soudain du coin de l'oeil qui enfile rapidement le shooter d'alcool qu'elle venait tout juste de me proposer. Aussitôt, je ressens une pointe d'inquiétude. Elle le faisait souvent, ce genre de truc? Boire de l'alcool fort le matin? Si oui, tout ça n'était pas rassurant... J'essaie aussitôt de chasser cette pensée de ma tête.

-Tu as des plans pour aujourd'hui? Si t'en as pas, on pourrait se poser devant un film et se faire un petit ciné maison, si tu veux. Je pourrais même aller nous chercher du popcorn!

Veïa avait ce côté très joueur que je n'aurais pas pensé trouver en elle, et pourtant elle réussit à me surprendre à tous les jours. Elle était incroyablement futée, et elle avait le moyen de me faire rire, même quand ça allait plus ou moins bien. Aujourd'hui, elle a décidé d'entrer dans mon jeu de sous-vêtements comestibles, et semblait avoir un malin plaisir à essayer de m’embarrasser, bien qu'elle va bien devoir se rendre compte que c'était peine perdue. Je ne m'embarrasse pas facilement, et même que je peux pousser la blague jusqu'à son paroxysme. Elle ne se doutait probablement pas que j'allais pour sûr acheter lesdits sous-vêtements, question de la faire rire encore davantage. À savoir si j'allais les porter, on verra bien. Il faudra me trouver une bonne raison de pousser la provocation jusque là.

Elle me provoque alors davantage. Tiens, moi qui venait tout juste d'y penser.

-Vilaine! C'est pas bien de me provoquer comme ça. Je risque de le faire pour vrai. Imagine, ouvrir une grande boîte cadeau emballée et me voir sortir de là, seulement vêtu de sous-vêtements comestibles. Tu penses que c'est une bonne idée?

Je lui tire légèrement la langue, question de la provoquer elle aussi. Je sais très bien que ce genre de jeu-là pourrait se rendre très loin, mais en même temps, j'avoue que je suis curieux de voir jusqu'où la chandelle pourrait brûler. Je dois avouer que j'aimerais bien voir jusqu'où elle pourrait continuer cette charade, et si elle allait se dégonfler. Si oui, j'allais chercher une petite victoire.

Je lui propose alors un petit après-midi cinéma. Tant qu'à avoir le mal de bloc, et puisque nous n'avions pas de cours aujourd'hui, c'était la meilleure idée qui m'était venue en tête. Je crois que ça nous permettrait également de se connaître davantage. Je suis ici seulement depuis trois mois, alors si je peux apprendre à connaître les gens, je crois que ce serait la meilleure des choses à faire. En plus, j'avais simplement envie de rester à l'appartement. Bouger et sortir dehors serait une grave erreur de ma part.

Elle se met alors à sautiller vers le divan du salon, comme une enfant. Je crois comprendre qu'elle accepte. Je me dirige alors vers le divan, m'y écroule avec joie, et prend la télécommande.

-Alors, quel genre de film tu veux regarder?