Je boudais, mais je restais une apprentie boudeuse. J'étais bercée par la culpabilité dans le seconde où l'on me montrait que j'avais tort ou bien, quand on me montrait que je n'avais pas à me plaindre de ma situation actuelle. Miles m'emmenait en voyage à Paris parce qu'il trouvait que j'avais besoin de me changer les idées et à côté de ça, mon esprit de contradiction le cherchait, lui donnant le loisir de me faire un retour de bâton dont lui seul avait le secret. Je lui passais sous le nez comme une adolescente de mauvaise humeur alors que mon cerveau était déjà en train de se demander où il allait bien pouvoir nous emmener à midi. Pathétique du début à la fin. Je ne sais pas, c'était mon caractère qui faisait que quand je n'étais pas dans mon élément, je me sentais perdue, incapable de lâcher prise. Et Miles qui continuait son numéro, me donnant une irrésistible envie de le frapper et de me terrer dans un trou. Quand je l'entendis beugler mon prénom, je me retournais vivement, les yeux écarquillée, les joues écarlates. Je détestais ça. Je détestais tellement que je ne bougeais plus, essayant de me faire toute petite alors que je sentais mes oreilles s'embraser à leurs tours. Trente secondes plus tard, ma sucette était dans sa bouche et je me retrouvais à la suivre, collée à lui en lui demandant ce qu'on allait manger pour midi pour faire diversion et oublier ma honte.

Si la balade sur les quais avait été plus que reposante, la suite avait été haute en couleurs. Miles m'avait trainé dans le bar de l'hôtel, me faisant boire tout un tas de de verres dont le nom des alcools et cocktails m'échappaient. Une sorte de dégustation qui pour une fille de mon gabarit - poids plume - commençait à tourner mal. Je n'étais pas ivre pour le moment parce que l'alcool n'avait pas encore fait tout son effet. Néanmoins, j'étais assez pompette pour être complètement désinhibée. Je riais pour un oui, pour un non. Ma posture était plus détendue et plus féminine aussi, dans un sens. « On est à quel étage déjà ? » que je lui demandais en riant à nouveau, alors que je tirais sur mon élastique pour libérer ma tignasse flamboyante. Non pas que mon sens de l'orientation était à revoir, mais plutôt, j'étais complètement partie du principe que Miles gérait la situation. Aussitôt dans la dite chambre, je me précipitais sur le lit en envoyant valser mes talons. La tête dans le matelas, je me mettais à rire. « Petit chat ? » (ça c'était vraiment sur le coup de l'alcool). « J'crois que je vais devoir dormir habillé. Je suis pratiquement certaine que mon pyjama est restée à Boston » et ça semblait me faire rire, allez savoir pourquoi.

Après le mini spectacle que Miles a fait subir à Marla qui signait la fin de la visite du monument, il la sentit à ses talons, quasi collée à lui, lui quémandant le lieu de leur repas le midi. Faut croire qu'elle ne voulait pas se séparer aussi tôt et que Miles n'ira pas à son rendez-vous plus tôt que prévu comme dit. Quelques semaines plus tôt, ça l'aurait sans aucun doute fait ronchonner, voire même mettre de mauvaise humeur, mais là, il afficha un petit sourire de vainqueur à la rousse qui choisit de le suivre. Sur un autre clin d’œil adressé aux spectateurs, il passa une main derrière les épaules de Marla pour la guider et la mener vers le restaurant français qu'il avait réservé, non sans s'amuser, une dernière fois de son embarras en public.  « Détends-toi, ils vont t'oublier dans deux secondes.. » Qu'il tentait tant bien que mal de la rassurer mais sans grande conviction, lui-même grandement amusé puis prit la sortie finale, la bonne sortie.

L'après-midi passa à une allure à laquelle il n'y attendait pas aux côtés d'un rendez-vous bien plaisant. Quand il rejoignit Marla, c'était encore d'une humeur plus joviale que le matin même qu'il la salua, prêt à passer la soirée au bar. Evidemment, il passa sous silence ses activités de l'après-midi, ne voulant pas risquer une leçon de morale ou une énième séance de boudage de la part de la rousse et préféra se focaliser sur l'après-midi de cette dernière, tout en lui glissant des verres à boire. Deux ou trois qu'elle ne mit aucun mal à vider, sous l’œil impressionné et peut-être aussi effaré de Miles. Et à juste titre. Avec sa corpulence, ces deux ou trois verres lui suffisaient largement pour finir joyeusement ivre. La soirée touchait à peine à sa fin mais Miles prit la décision de la ramener à la chambre vu son changement de personnalité léger mais beaucoup trop flagrant pour ceux qui la connaissaient, comme lui. Elle riait, beaucoup. Ce qui l'amusait aussi, faut être honnête, lui qui n'était pas non plus très sobre. Elle l'utilisait comme appui en direction de la chambre et il en riait tout comme elle. « On y est, à l'étage, t'inquiète.. accroche-toi encore un peu » Heureusement que lui tenait beaucoup plus l'alcool qu'elle parce que sinon ils auraient été dans de beaux draps. La preuve, à peine un pieds dans la chambre qu'elle s'était jetée dans leur lit commun, riant aux éclats pour des talons qui volaient avant de l'appeler, de ce surnom ridicule qu'il ne comprenait toujours pas. « Dors en sous-vêtements petit elfe » Quoi qu'il en soit, il répondait toujours présent pour se prendre à son jeu, le sourcil levé depuis qu'elle a proclamé avoir oublié son pyjama. Vu son ton, y'avait aucun doute quant au degré d'alcoolémie qui se trouvait dans son sang aka beaucoup trop élevé pour elle. Mais lui aussi avait de l'alcool dans le sang, ça tombait bien. « Il fait plus de 26 degrés de toute façon, dormir en sous-vêtements, c'est ce qu'il y a de mieux.. Observe le chef et fais comme lui ! » Pour prouver ses paroles, il se déshabilla lui-même, avec un peu de galère, et se retrouva deux minutes plus tard en boxer. Et se jeta sur le lit, à côté d'elle, manquant presque de l'écraser, ce qui le rendit aussi hilare. « Rappelle-moi de te faire boire plus souvent parce que c'est juste gé-nial ! »

Si je me voyais de l’extérieur, j'aurais probablement honte. Le pire, c'est que ce n'était pas la première fois que ça m'arrivait d'être dans cet état. Être pompette, c'était comme ça que je terminais quand je me savais en compagnie d'une personne de confiance. Miles l'était. Je savais qu'il n'allait pas me laisser en plan au milieu du bal à la merci de personnes inconnues. Du moins, je l'espérais jusqu'à ce que je ne sois plus capable de m'en soucier actuellement. De toute façon, il avait décidé qu'il était l'heure d'aller dormir. Docilement, je le suivais. Disons que je n'avais pas tellement le choix. Je me cramponnais à lui, m’interrogeant sur la direction à prendre pour rejoindre notre chambre. « On y est, à l'étage, t'inquiète.. accroche-toi encore un peu » Est-ce que j'avais envie de dormir ? Non. J'avais envie de faire la folle pour quelques heures encore. Je voulais danser, bouger, simplement profiter d'être loin de Boston. Profiter du fait que mon portable, où qu'il se trouvait, n'avait pas sonné une seule fois et que je n'avais pas passé des heures à stalker frénétiquement mes applications. J'étais ivre, mais j'étais bien. J'étais heureuse. J'avais l'impression de retrouver le flottement de bien être qui m'avait bercé durant le spring break, à croire que toutes les mauvaises ondes se trouvaient à Boston. Tout comme mon pyjama que je visualisais très bien sur mon lit avant mon départ de ma chambre universitaire. Me restait plus qu'à dormir habillée en priant pour ne pas mourir sous cette chaleur étouffante. « Dors en sous-vêtements petit elfe » - « QUOI?! Noooon, jamais de la vie. C'est hors de question. » J'étais bien trop pudique pour ça. J'allais dormir en jean et en t-shirt et ça allait être très bien ainsi. « Il fait plus de 26 degrés de toute façon, dormir en sous-vêtements, c'est ce qu'il y a de mieux.. Observe le chef et fais comme lui ! » De quoi ? Toujours allongée sur le ventre, la tête légèrement tournée dans sa direction, il me fallut quelques seconde pour réaliser. « Qu'es-ce que tu- » Plantage. Chaque centimètre de ma peau était en train de rougir en voyant Miles en boxer. Je n'avais pas été prête pour cette vision quelque peu... comment dire... Doux Jesus. Ma tête devait être risible, entre choc et admiration. Respire Marla. Je me réanime tant bien que mal quand il me tombe dessus, je râle et je ris nerveusement. J'étais vraiment pas prête pour tant de nudité d'un coup. Je n'avais plus de doute à propos du fait qu'il entretenait son corps. Et je découvrais sa pilosité aussi. Respire Marla. Inspire, expire. « Rappelle-moi de te faire boire plus souvent parce que c'est juste gé-nial ! » Ou pas. Même ivre, ma timidité arrivait à se faire de la place. Le calme semblait revenir peu à peu, mais pas totalement non plus. Ma main attrapait son menton pour qu'il regarde dans ma direction. « Tu ne diras pas ça demain quand tu m'entendras vomir » Je lâche un petit rire, l’œil espiègle. Même si le silence s'installe quelques secondes, mes yeux n'ont pas quitté les siens. Mes doigts se perdent dans sa barbe de quelques jours. Mes joues me trahissent, mais l'alcool est là pour éteindre mes pensées. Trois secondes plus tard, mes lèvres sont sur les siennes pour l'embrasser délicatement, ne cherchant aucune approbation de sa part, n'en faisant qu'à ma tête. On avait tous nos moments de faiblesse.

Marla avait déjà dû subir un Miles ivre une soirée, mais l'inverse ne s'était jamais produit. Jusqu'ici. Même si Miles ne subissait pas vraiment, au contraire, il était bien heureux d'avoir pu participer au début d'excentricité de la jeune femme. N'importe qui pouvait deviner à son état que ce n'était clairement pas habituel, bien au contraire, il était certain qu'il pouvait compter sur les doigts de la main les soirées où elle perdait le contrôle. Parce que c'est ce qui se passait là, elle perdait petit à petit le contrôle, riant pour un simple oui ou non, si bien qu'elle pouvait se mettre à danser joyeusement devant lui à tout moment, il n'en serait pas surpris. Ceci dit, elle restait tout de même sobre - sans jeu de mots - dans ses agissements et se contentait de rire bêtement étouffée dans le matelas en se plaignant de l'absence de son pyjama. Miles lui proposa alors une solution assez simple, solution qu'elle accueillit presque scandalisée, sa pudeur parlant toujours pour elle, même imbibée d'alcool. Miles, lui, ne semblait pas du tout connaître la pudeur, à contrario, suivant son propre conseil en moins de temps qu'il ne le faut sur le pyjama et se retrouvait en boxer. Il prit un malin plaisir ensuite à juger l'expression qu'affichait Marla, un mélange de choc et.. choc ? : il pensait ça impossible mais elle était encore plus rouge qu'habituellement. Là, Miles savoura ce moment avant de se jeter sur le lit, manquant cependant le regard d'admiration de Marla sur son corps - heureusement pour elle parce qu'il ne se serait pas retenu de lui faire rappeler cet instant jusqu'à la fin de sa vie. « Remets-toi de ton choc, je vais finir par croire que c'est le premier corps d'homme que t'aies jamais vu de ta vie ! » Quoi qu'au final, vu qu'il avait appris à la connaître, ce n'était sans doute pas loin de la vérité - ce qui l'importait peu sur le moment. Il était bien plus occupé à profiter de la Marla désinhibée, fun tout en restant elle-même, c'en était presque fascinant. Tourné vers elle, il ne la lâchait même plus du regard, un sourire béat aux lèvres, peu conscient de la proximité de leurs visages jusqu'à ce qu'elle attrape son menton. Là, il se figea littéralement sur place, tout à coup plus que conscient de sa proximité, de son visage, de ses yeux, son petit nez, ses lèvres.. C'était une sensation de déjà vu, une duplication de la scène à l'hôpital sauf qu'ils étaient dans un lit et lui quasi déshabillé. C'était mauvais. Tellement mauvais qu'il n'écoutait même pas ce qu'elle venait de lui répliquer, vraiment trop concentré sur ses lèvres. Et elle n'aidait en rien en baladant ses doigts fins sur son visage. Est-ce qu'il pouvait ressortir l'excuse du moment de faiblesse si jamais il merdait, encore ? Sans doute pas. Contrôle-toi Miles, éloigne-to.. Trop tard. Leurs lèvres étaient dorénavant scellées, elle l'avait embrassé, elle avait rapproché le visage du sien. Putain, elle l'embrassait. Et lui, comme un con, obtempérait, accentua la pression sur ses lèvres, approfondissait le baiser. Elle ne le repoussait pas. Pas pour l'instant. Et il savait que ce n'était qu'une question de temps. Alors c'était lui, c'était lui qui la repoussa, après avoir eu comme un choc électrique, c'était lui qui se décolla d'elle, en se mordant les lèvres. « Marla.. Si tu n'es pas sûre d'assumer.. arrête.. » Parce que lui, n'était pas sûr de pouvoir s'arrêter si elle continuait. Peut-être qu'ils devraient vraiment revoir la définition du mot amitié.

« Remets-toi de ton choc, je vais finir par croire que c'est le premier corps d'homme que t'aies jamais vu de ta vie ! » Non, ce n'était pas le premier - et d'ailleurs, je me refusais de penser au premier - mais seulement le deuxième. Et puis, cela faisait quoi ? au moins cinq mois. En cinq mois, Miles m'avait embrassé et puis, j'avais embrassé Bleach. On ne pouvait pas dire que mes scores étaient élevés, mais au moins, je n'avais rien fait de stupide. Bien que je draguais sur Tinder, je prenais mon temps et je savais m'écouter un minimum pour ne pas entacher mes principes. Et puis, ivre ou non, je restais Marla. Celle qui s'émerveillait et s'offusquait sans gêne, sans penser que quelqu'un puisse être en train de l'observer. Miles le voyait bien, ce regard que j'avais sur lui. Je me rinçais l’œil sans le vouloir, admirant son physique jusqu'à ce qu'il vienne s'allonger à mes côtés. Cette fois, c'était son visage que je regardais. Bien que je le connaissais déjà, j'avais l'impression de le redécouvrir. Ou peut-être était-ce l'ivresse ? Ma main venait le capturer, redessinait maladroitement les lignes de sa joue. Est-ce qu'il avait conscience qu'il était là ? J'veux dire... Qu'il était là à s'occupe de moi. Est-ce qu'il avait réellement conscience qu'il m'avait trainé ici pour me changer les idées ou bien est-ce qu'il l'avait fait sans trop réfléchir ? Parce que je me sentais bien là et même si j'avais bu, je savais ce que je faisais quand je rapprochais mon visage du sien pour l'embrasser. Ma main venait se nicher dans sa nuque comme si je voulais l'empêcher de me fuir. Est-ce qu'il émettait une résistance ? non. Il prolongeait ce baiser avec force et bien plus d'intensité que j'avais pu en mettre. Bien que j'étais celle qui avait initié, je le laissais me guider jusqu'à ce qu'il me repousse doucement. « Marla.. Si tu n'es pas sûre d'assumer.. arrête.. » Mes yeux s'ouvrent avec surprise, je scrute son visage et tout me retombe dessus très rapidement. L'alcool, la fatigue, la peur. Après quelques secondes à l'observe, le doute me gagne et sème la pagaille dans ma tête. Je me recule sans trop savoir quoi dire. Qu'est-ce que j'ai fait ? Pourquoi j'ai fait ça ? Les questions reprenaient bon train malgré moi. « On devrait dormir ».

Il pensait avoir été au bout de ses surprises avec la Marla ivre et libérée qui avait échangé sa moue boudeuse du matin contre une mine rayonnant de bonheur d'ivresse. Il n'avait pas pensé au déroulement exact de ce weekend mais il pensait passer deux jours assez basiques avec une Marla introvertie, fidèle à elle-même. Well, boy he was wrong. Rien de ce qui se passait actuellement n'était basique. Leurs lèvres collées, une Marla entreprenante. La motivation de Miles pour ce weekend à Paris aux côtés de la rousse pouvait paraître floue, voire bancale même pour lui-même mais il pouvait le jurer aux cieux, ce n'était pas du tout son intention première, ce baiser. Ça ne lui avait même pas traversé l'esprit depuis leur arrivée ici, même en l'invitant au bal, en sachant qu'il avait eu sa dose féminine cet après-midi durant leur moment solo - donc il était réellement le premier surpris face aux événements. Mais il ne semblait pas s'en plaindre, bien au contraire, vu comment il agrippait à son tour le visage de la jeune femme pour approfondir le baiser. Sauf que ça ne lui paraissait pas correct, peu respectable, vu son état, vu son passif relationnel. Lui qui réfléchissait habituellement avec la partie bas de son corps se voyait réfléchir avec la partie supérieure cette fois-ci, se posant à son tour milles questions sur les agissements de Marla et ses conséquences. Et c'est ce qui l'avait poussé à arrêter, se détacher, la rappeler à l'ordre. Maintenant qu'il pouvait à peu près prédire ses réactions, il était quasi certain que même avec l'alcool, elle n'allait pas assumer, allait se cacher, fuir. Et quand bien même ça ne le dérangeait habituellement pas avec d'autres filles, Marla était.. Marla; c'est-à-dire la nourrice de sa fille et cette jeune femme si fragile qu'un rien ne pouvait la chambouler, la casser. Merde, elle était totalement entrée dans sa tête apparemment, ils avaient échangé les rôles : elle était devenue l'inconsciente, il était devenu le réfléchi. Putain. Pourquoi il devait réfléchir maintenant, là ? Comment est-ce qu'elle avait tant d'influence sur lui au point de réussir à totalement le dévier de son comportement de base avec une fille ? Enfin, totalement, ou presque. Parce que moralement, il était peut-être plus respectable, mais physiquement, surtout dans la partie bas, rien ne changeait, les sensations physiques étaient bien présentes, il était.. assez réchauffé, dirons-nous, pour le peu d'habits qu'il portait sur lui. Alors quand elle ouvrit les yeux, forcé par lui-même, se rendit compte de ce qu'elle faisait et arrêta comme il lui avait ordonné, il avala difficilement sa salive. Pardonnez-le, ce n'était qu'un simple homme. Quand bien même il était celui qui l'avait remis sur le droit chemin, c'en était pas moins difficile physiquement de s'en remettre. Dormir ? Dans ces conditions ?  « Yeap.. enfin, j'ai besoin d'aller dans la salle de bain avant par contre.. mais bonne nuit ! » La voix rauque, le corps en feu, il se hâta de se retirer dans cette salle de bain, tout en évitant à tout prix de croiser le regard de Marla, imaginant déjà sa gêne, la gêne en général, le lendemain au réveil. Putain dans quel merdier s'étaient-ils embarqués ?

L'ivresse prenait le pas sur tout le reste. L'alcool qui coulait dans mon sang semblait agir sur ma raison, me poussant à me libérer de ce qui avait pu me tétaniser pendant des mois durant. Aujourd'hui, une nouvelle fois, mes lèvres épousaient celle de Miles. Je ne m'attardais pas sur ce que je pouvais ressentir, ni même sur mes sensations. Le nuage qui occupait ma boite crânienne m'empêchait de m'attarder sur ce qui m'aurait arrêté en temps normal. Mes doigts agrippaient sa nuque, ma façon de l'embrassait, elle aussi, se libérait pour être plus en demande. Rien dans ma tête ne me poussait à m'arrêter. Ce n'était qu'une simple baiser non ? Je n'avais pas tant conscience de l'impact qu'il pouvait avoir peut-être parce que dans le font ça ne nous était pas si inconnu comme sensation. Je n'en savais rien, je n'étais pas à même de réfléchir. Cette fois-ci, c'était Miles qui réfléchissait, me repoussant malgré l'envie qu'il semblait vouloir me communiquer. Réfléchis Marla. Être toi et regarde ce que tu es en train de faire. C'était un moyen comme un autre de me dessaouler. En un rien de temps, je m'éloigne pour mettre de la distance entre nous, lui confessant qu'il était l'heure de s'endormir. La panique était déjà en train de me ronger jusqu'à la moelle. Le feu avait quitté mon estomac pour incendier mes joues. Je m'allongeais sur le dos, à ma place, les yeux grands ouverts en direction du plafond. « Yeap.. enfin, j'ai besoin d'aller dans la salle de bain avant par contre.. mais bonne nuit ! » J'hochais la tête positivement, restant silencieuse alors qu'il s'échappait vers la salle de bain. « t'es conne » que je soufflais à moi-même en me redressant tant bien que mal. Je me débarrassais de mon gilet et... c'était tout. Je n'allais jamais réussir à fermer l’œil avec une telle chaleur. Je finissais par enlever mon jean et me glisser sous la couverture pour que Miles ne se rende compte de rien. Quand il fut de retour dans le lit, j'avais les yeux clos prétextant que j'étais déjà dans les bras de Morphée.

Je ne sais pas quelle heure il est quand j'ouvre les yeux pour la première fois, mais il fait jour. Ma tête me fait mal, mais ne tourne pas, miraculeusement. Il fait une chaleur insupportable et c'est surement cette raison qui m'a poussé à ouvrir les yeux. Ou peut-être parce que je sens contre moi que Miles commence lui aussi à se réveiller. Contre moi puisque mon inconscient en manque d'affection s'est accroché à lui durant toute la nuit. Déjà que je ne me sentais pas très bien pour avoir fini ivre, que je culpabilisais de l'avoir embrassé, le réveil était clairement la cerise sur le gâteau. Mon regard croisait le sien pour la première fois de la journée, calmement. Je ne bouge pas, restant ainsi puisque de toute façon, j'étais cramée. Et... Je ne savais pas quoi dire.

Beaucoup trop de sensations lui traversaient d'un coup le corps pour qu'il puisse dormir paisiblement comme elle l'avait gentiment suggéré, qu'il s'était réfugié dans la salle de bain l'espace d'un instant pour reprendre contrôle et se refroidir. D'une douche froide. Vraiment vraiment froide. Si sur le moment, stopper Marla dans son élan paraissait être un geste honorable, après coup, il se sentait juste comme un abruti fini, avec une sensation de frustration indescriptible. Abruti, abruti, abruti. Juste des amis, tu parles. Il avait pourtant réussi à se convaincre lui-même, n'ayant pas ressenti jusque là cette attraction qui le frustrait. Il ne savait pas ce qui lui passait par la tête mais il ne savait pas non ce lui passait par la tête, à elle. Elle qui avait pris les devants, elle qui faisait tout sauf prendre les devants depuis qu'il la connaissait. Elle venait de foutre le bordel instantané dans sa tête à lui, et il comprenait soudainement pourquoi elle s'était interrogé sur ce baiser à l'hôpital. Qu'est-ce que tu lui as dit déjà mec, tout à l'heure ? Ne réfléchis pas trop ? Donc ne réfléchis pas trop Miles, c'est juste l'alcool. Juste l'alcool. L'alcool qui faisait plus de dégâts que prévu, aussi bien moralement que physiquement. Jésus Christ. Pense à autre chose, pense à autre chose, pense à.. Peppa Pig. Oh tiens, bien ça. Et une douche froide plus tard, et un épisode complet de Peppa Pig joué dans la tête, Miles était enfin refroidi et prêt à aller au lit. Quand il revint dans la chambre, il constata que Marla était maintenant sous les draps, les yeux fermés, sans doute endormi; ça lui convenait parfaitement. A son tour, après avoir lâché un long soupir, il souleva le drap, se para à se glisser dedans puis.. se figea. En s'apercevant de la tenue de la rousse sous les draps, ou plutôt de l'absence de tenue. Oh ciel, pourquoi tant de souffrance ? Pourquoi il avait réservé qu'une seule chambre, rappelez-lui ? Ugh. Se maudissant lui-même, il prit quelques secondes de plus pour se recomposer encore une fois avant de se glisser finalement dans le lit, tentant de rester au plus loin de Marla, au plus loin de la tentation.

Le lendemain, le réveil fut rude. Sans compter la mini gueule de bois qu'il avait, il avait passé une sale nuit, à rêver d'une certaine rousse dont il n'avait sûrement pas besoin de citer le nom et à se battre contre la chaleur monstre, qui l'avait d'ailleurs tiré de son sommeil. Même en sous-vêtements, il brûlait littéralement de la tête aux pieds, et surtout au niveau du torse sans savoir pourquoi. Puis il sentit quelque chose se mouvoir près de lui, près de son torse et forcé d'ouvrir les yeux, il baissa ces derniers pour tomber sur une Marla entièrement enroulé sur lui. D'où la chaleur abondante à ce niveau-là. Fuck. Il ne manquait plus que ça. S'il n'avait pas proprement reconnu la chambre d'hôtel, il aurait bien pu croire qu'il était encore dans un de ses rêves de la nuit précédente. Sauf que non, c'était bien la réalité et Marla le regardait bien maintenant droit dans les yeux, allongée sur lui et ne bougeant pas d'un pouce. Sa gorge se noua, sans relâcher son regard. Qu'est-ce qu'il était censé faire maintenant putain ?  Et comme si une force invisible avait entendu sa question, et y répondit, il sentait son attention déraper vers les lèvres de Marla, encore une fois. Puis l'interroger du regard. Puis son visage s'abaissa vers le sien. Puis ses yeux se fermèrent alors qu'il passa une main derrière sa nuque. Puis il l'embrassa. Encore une fois. C'était comme dans son rêve, sauf que c'en était pas un. Et c'était ce qui allait sûrement le faire regretter, dès qu'elle le repoussera, embarrassée ou peu importe. Peu importe, oui, le baiser était déjà enclenché, foutu pour foutu.

L’interrogation du regard, c'était la pire. Être aussi silencieux, les yeux rivés dans le blanc de ceux de l'autre, avec une proximité étouffante. Avec une gueule de bois qui plus est. C'était clairement pas le moment pour tenter la télépathie, d'autant plus quand les deux personnes sont diamétralement opposées. J'avais de nouveau toutes ces questions qui fusaient dans ma tête, se demandant qu'est-ce qui avait fait que nous avions dérapé de la sorte. Comme on était passé de boss/nounou à "faux amis" à "amis-amis". Rien que pour ça, l'évolution avait été lente au début, mais rapide sur cette dernière semaine. Malgré moi, parce que j'aimerais ne pas avoir à me poser tant de questions, j'en venais à me demander qu'est-ce qui faisait que nous en étions arrivés à s'embrasser. Et si le "moment de faiblesse" était réellement le point de départ ? Faut dire qu'à chaque fois, on se retrouvait à des moments bien précis, avec le moral dans les chaussettes. Peut-être qu'on était en train de développer un besoin irrésistible de quémander un peu d'attention chez l'autre ? Peu importe ce que l'on obtiens. Un sourire, un clash amusant ou comme maintenant, quand Miles, sans avoir brisé le silence, venait approcher à nouveau son visage du bien pour m'embrasser pour la troisième fois. Le moment de faiblesse n'était vraiment qu'un point de départ, là c'était... autre chose. Je ne savais pas encore quoi, mais ça n'avait rien à voir. Mais.. Il y avait quelque chose non ? Le milliard de questions était de retour, déclenchant un besoin de remettre des distances. Si je me laissais faire, profitant de ce qu'il était en train de m'offrir... Il fallait se rendre à l'évidence. Mes doigts glissant sur sa peau nue, je le repoussais un peu pour l'arrêter. « Miles. Ce n'est plus de la faiblesse » Et ça n'avait rien de bon. J'étais clairement le genre de personne à adorer les câlins, les baisers et autres petites attentions, mais j'étais aussi le genre de personne à s'attacher facilement, contrairement à lui. Du moins, j'en savais rien, je ne le connaissais pas vraiment de ce côté là. Je finissais par me redresser complètement, quittant ses bras pour attraper mon jean et l'enfiler en deux-deux. « Je vais prendre une douche ».

Techniquement si, c'était de la faiblesse. Selon le dictionnaire, la faiblesse était l'incapacité à se défendre, à résister. La description parfaite de la situation en somme, de l'état de Miles, l'incapacité à résister. A résister de céder à ses pulsions nouvellement éveillées à cause d'une petite rousse hier soir, à résister à cette proximité au réveil, ce regard, ces lèvres. C'était tout aussi un pur moment de faiblesse, comme à l'hôpital, la différence étant que ce matin-là, Miles voulait réitérer l'expérience encore et encore, au risque de se prendre un énorme stop par Marla qui n'allait pas sûrement pas se laisser faire aussi facilement. Et c'est ce qu'elle fit. Sans grande surprise. « Miles. Ce n'est plus de la faiblesse » Qu'elle clama, en écho à son train de pensées, comme si elle répondait à ces dernières, ce qui le fit doucement sourire. S'il avait été pleinement éveillé, sans une gueule de bois, il aurait sans aucun doute riposté malignement sur la définition de la faiblesse sauf qu'il ne l'était pas, pleinement éveillé et qu'elle avait peut-être pas si tort que ça, à moitié. Ce n'est pas que de la faiblesse, qu'il aurait dû corriger. Ce n'était pas que de la faiblesse, il y avait aussi peut-être un manque d'attention des deux côtés ? Un manque d'attention comblé par l'un et par l'autre d'une façon tout d'abord amicale puis partie en cacahuètes. Peut-être que c'était du désir ? Il ne lui avait jamais caché qu'il lui trouvait du charme, comme n'importe quelle fille avait du charme sauf que ce matin, c'était vraiment du charme charme qu'il avait remarqué. Comme une piqûre de réveil, comme dans ses rêves. Vous voyez ? Lui, il voyait en tout cas. Même si c'était encore flou dans sa tête, il se comprenait, et il pouvait l'affirmer qu'il y avait une énorme partie de faiblesse de son côté, cette incapacité à résister. Il soupira, longuement avant de se passer la main dans les cheveux, perdu et - encore une fois - frustré et égaré dans ses pensées, il ne tilta même pas Marla qui se retirait de ses bras et qui s'habillait - il manqua du coup l'occasion de la reluquer mais soit. Ce n'était qu'à sa prise de paroles, annonçant son retrait pour une douche qu'il bougea enfin, et aussi vif qu'un éclair de feu, il se leva, l'attrapa par le poignet. « Marla, attends deux secondes.. » Se mettant debout à son tour, toujours en boxer, il fit glisser sa main sur ce poignet vers sa paume qu'il caressait doucement du bout du pouce.  « Viens au bal avec moi. S'il te plaît. » Tiens, nous y revoilà sur ce sujet. Il s'était promis de ramener ça sur le tapis et c'est ce qu'il fit, aussi doux qu'un enfant que certains pouvaient se méprendre sur l'identité de ce Miles. Allez, dis oui Marla.