Tu ne demandais pas à être secouru, Stella. Tu n'étais pas une de ces princesses perdue et qui ont besoin d'un prince pour être sauvé. Toi t'étais la reine d'un royaume, et si quelqu'un devait te tendre la main, ça ne serait que ton reflet. T'avais toujours été comme ça, Stella. Tu ne pleurais pas après les mains pour qu'elles viennent t'élever. Jour après jour, année après année, tu t'étais construite sans baiser féérique. Seulement fallait bien avouer que là, allongée dans ce lit d'hôpital, pièce scintillante d'un blanc immaculé qui cherchait à ne rien personnifier, t'avais peut-être besoin d'aide. Juste un peu, juste de quoi te redonner confiance en toi. Quelqu'un qui te dirait, c'est bon, t'as le droit d'accepter que l'on t'aide. Ce n'est pas grave, tout va bien se passer. Était-ce vrai, Stella, que tout irait bien ? Tu fronçais les sourcils, ses mots te rappelaient votre escapade sur le toit, baiser à l'envolé et toi, toi qui s'était échappée. Tu l'avais laissé, pour plus le désiré, pour mieux vous retrouver. Et pourtant, pourtant ce que tu avais imaginé était bien loin de la réalité. Comme toujours, Stella. Il était là, à te couvrir de baiser, à essayer de gommer les plaies qui s'étaient encrées. Tu n'avais pas imaginé que cela puisse arriver, vous, duo de minuit, vous, duo promis à la nuit. Pourtant tu te délectais de ses baisers, de ses iris qui te détaillaient. Ta tête le suivait, tes mains s'amourachaient de sa nuque, de ses cheveux. Tu voulais le toucher, ne pas perdre ce contact qui te réveillait. Enzo te rendait plus vivante, Stella. C'était indéniable, inévitable. Pourtant tu ne voulais pas lui donner cette emprise, seulement, il s'en était emparé sans même te demander. Et ça t'allais, juste là, comme ça. Ça te convenait parce que ça t'apaisais. Le feu crépitait, commençait à te brûler les extrémités. Et si tu devais te consumer pour renaître, Stella, tu le ferais. L'étoile s'avérait être un phoenix. Et tu voulais oublier les décombres du passé, tu voulais t'oublier dans une nouvelle femme née. Tu n'étais pas morte, Stella, simplement bloquée entre le passé, le présent, et le futur. Tu ne pouvais pas lui raconter, Stella. Parler, c'était accepter. Et toi, tu refusais de laisser cet événement s'emparer de ton être tout entier. Alors tu venais poser tes lèvres sur les siennes, les goûtant juste un peu, afin de le faire taire. Qu'il t'aide, tu l'accepterais. Seulement, qu'il ne te force pas à parler, Stella. Le goût sucré de ses lippes te mettaient en appétit. Tu t'éloignais un peu, tu posais ton front sur le sien, comme un pilier. Juste un peu, pas longtemps, tu le promettais. "Grazie Enzo". Tu te décollais de lui, rompant le contact. Putain Stella, on pouvait presque apercevoir une lueur se frayer un chemin au fond de ton coeur. Alors tout ne tenait-il qu'à cela ? Des baisers et des lèvres sucrés ? Des mots italiens et des doigts qui t'envoûtaient ? A vrai dire, tout ne tenait qu'aux flammes qui venaient de se rallumer.

Tu ne savais même pas pourquoi tu t'abaissais à une chose pareille. Tu n'es pas de ceux qui s'inclinent pour une femme ou qui prend soin de ramasser les lambeaux  éparpillés par les fêlures de l'existence. Au contraire, tu repères les faiblesses, tu les exploites, les ramènent à ton avantage. Mais pas avec Elle. Parce que tu es capricieux Enzo. Tu ne la veux que pour toi. Tu veux qu'elle revienne hanter tes frasques nocturnes. Tu veux toujours plus de Stella dans ton existence morne. Tu as besoin de lumière finalement, tu es faible comme les autres. Elle se rapproche de loi, scelle ton silence de ses lèvres furtives et offertes. Et toi tu t'inclines, lion dompté et apaisé. Rien ne t'a préparé à contempler son visage dans cet endroit et au grand jour. Si bien que c'est la faiblesse qui se répand dans ton sang et que la spontanéité refait surface là où  elle était consciencieusement noyée. “Promettimi” (Promets-moi). L'azur bordant tes iris se relèvent vers ce visage à la fois familier et inconnu qu'elle représente. Tes phalanges s'immiscent pour soupeser le menton chétif de la belle, elles caressent doucement le laiteux de la peau dissimulée. L'ombre d'un sourire vient arborer tes lèvres alors que ton regard retrouve cette flamme, cet orgueil qui te sied particulièrement Enzo. “ Abbi cura di te e torna a tormentare le mie nutti.” (Prends-soin de toi et reviens hanter mes nuits.) Tu as cette fulgurante envie qu'elle te promette de venir hanter des draps aussi mais tu te retiens, parce que finalement ce n'est pas ce qui t'importe le plus. Paradoxalement. Tu es trop capricieux Enzo et tu veux continuer ce jeu entre vous. Tu ne veux pas qu'elle s'abîme, tu veux qu'elle enflamme tes ténèbres une nouvelle fois.

C'était étrange pour toi de ressentir cet apaisement qui envahissait ton corps. Comme une nouvelle chaleur, un nouvel espoir. Tu avais avoué, pour la première fois depuis que tu t'étais réveillée, que Stella était toujours là au fond de toi. Tu l'avais dit, à haute voix, que tu n'avais pas oublié qui tu étais. C'était important, dans le fond. Ce qui était d'autant plus étonnant, c'était de voir auprès de qui cela était arrivé. Et ce sentiment de bien-être qui t'enveloppait, tu lui devais, à Enzo. Impensable de concevoir que c'était l'italien qui enflammait tes nuits qui te dévoilerait en plein jour. Pour une fois, vous aviez décidés de troquer la lune pour le soleil et cette image ne te déplaisait pas. Tu ne pensais pas le voir autrement que sous les réverbères des lampadaires, mais cette image d'homme fort et pourtant, d'homme doux. Tu le savais toi Stella, tu savais qu'il n'y avait rien de plus beau qu'un homme sauvage qui faisait preuve d'une humanité déconcertante. Il était beau, Enzo, sous la lumière du jour, ça lui allait bien au teint. Tes lèvres quittaient les siennes lorsque l'homme chercher à te faire promettre. T'étais pas certaine de ce que tu voulais, seulement t'avais l'impression que le chemin sur lequel tu étais avant n'était pas si sinueux. Il y a toujours eu du bon, Stella, fallait simplement que tu te concentres sur toi-même plutôt que sur les problèmes. Sous ses doigts, tu voulais lui dire oui. Oui à tout ce qu'il te demanderait, parce que ce toucher semblait si précieux et si rare. Même l'autre soir, sous les étoiles absentes, il n'avait pas été si doux avec toi. Et tu l'écoutais, les yeux dans les siens, le coeur qui s'affolait. Tu déglutissais, marquant un silence qui ne te semblait pas si long. "Te lo prometto" (je te promets). Qu'il était étrange de l'observer sous ce nouvel angle, et la nuit où tu reviendrais le voir sous l'obscurité nocturne, tu te souviendrais de l'homme qui d'un simple baiser, avait réussi à t'embraser à nouveau. "Devi andartene ?" (tu dois partir ?) que tu demandais, sentant la fin de cette rencontre inespérée se terminer.