"Il est beau ton tunnel ?" tu soupirais. "Sérieux Lu tu parlais de qui ? T'es chiante, arrête, tu me caches quoi encore ?", feindre l'agacement, tu connaissais.

« Très beau. » t'essayes de blaguer mais t'as la boule au ventre. « C'est pas mon intention de te cacher quoi que ce soit ... ça l'a jamais été. » tu veux gagner du temps, t'es pas prête pour ce qui est en train de se passer.

Tu souriais malgré tout, parce qu'elle te faisait rire, tu la connaissais par coeur. "J'te connais, j'ai l'habitude avec toi". Triste vérité, mais tu t'y étais fait. "Alors, de qui tu parlais ? Parce que le seul Italien que je souhaite pas revoir ça serait mon frère. Et j'doute qu'il soit par ici". Tu soufflais du nez, à demi amusé. Tu savais qu'elle t'avait caché quelque chose, elle le savait, elle n'avait rien dit. Tu la torturais par ta connaissance.

Tu restes silencieuses, étranglée par l'angoisse. Elle te rappelle tes erreurs passées, elle prend en otage tes sentiments. T'essayes de chuchoter un "j'suis désolée", mais t'en es pas capable. Il te faut quelques secondes pour reprendre tes esprits et ton sang froid. « Justement. » la sentence tombe. « C'est bien lui que j'ai vu. Il est ici, à Boston. » t'essayes de ne rien laisser transparaître dans ta voix, tu redeviens de glace en attendant le châtiment céleste.

T'aimais jouer double jeu, ça te plaisait. Tu te disais que tu ressemblais à Cosmo, autant cela te débectait, autant tu te disais que c'était ton avantage pour lui faire payer. Tu étais silencieuse, si silencieuse qu'on aurait pensé que tu étais morte. "T'es sérieuse Lu ? Tu m'sors ça comme ça, maintenant ? T'allais rien me dire ?". Silence. Silence. Silence. "J'étais déjà au courant". La sentence n'était que ta vérité, tu la mettais dans la confidence. Après tout, elle était ta meilleure alliée.

« J'te jure que j'allais te le dire amore. Je savais pas comment, j'voulais te protéger... » t'essayes de te racheter. Tu voulais la protéger, et te protéger aussi. T'étais pas prête à te replonger dans les Cavalero dramas, t'étais pas prête à remuer le couteau dans la plaie. Cinq ans n'avaient pas suffit à cicatriser. « Quoi ? Comment ça t'étais au courant ? » la descente, la douche froide.

"Après tout ce que j'ai vécu de sa part, je n'étais pas à ça près. J'ai pas besoin que l'on me protège". La voix était sec, parce que dans le fond, tu n'aimais pas ce lien qu'ils avaient entretenu. Après tout, ils étaient partis tous les deux, ils t'avaient abandonné sans se retourner. La mort en a rapatrié une, l'autre lui, courrait toujours avec la trahison sur le front. "J'ai engagé un détective privé, je le savais depuis des semaines qu'il était arrivé ici. J'suis venue pour lui, j'hésite entre l'étrangler et le tuer". La voix déterminée.

Tu le sais que Stella n'a pas besoin qu'on la protège. Encore une fois, tu parles pour elle alors que tu pensais aussi à toi. Tout comme elle pensait à elle en venant à Boston. La confiance règne. « Je vois. » t'es déçue, t'es pas la seule à avoir tes petits secrets. « T'es au courant depuis quand ? » toi aussi tu te fais froide. T'as l'impression d'être le dindon de la farce. C'est une habitude chez les Cavalero de se foutre de ta gueule.

Tu sentais que la tension avait changé au bout de la ligne, ta meilleure amie ne dégageait plus de la peur, simplement sa froideur légendaire. "Ça va Lu, fais pas la gueule". Tu soupirais, agacé. Après tout, c'était ton frère. "Octobre. J'ai commencé à m'intéresser à nouveau à lui quand tu m'as laissé seule en Italie et que j'avais juste envie de l'étriper d'avoir gâché ma vie en étant parti". Et dans le fond, tu voulais lui rappeler qu'elle l'avait suivi, ta meilleure amie. Elle était partie, avec lui. "Tu voulais que je te le dise ? T'as toujours été amoureuse de lui, j'avais pas envie que tu te mines ta nouvelle vie pour ça. Pas encore, pas cette fois. En plus, je trouvais ça vraiment bizarre que vous étiez tous là. Cosmo, toi, Ernesto. Il ne manquait plus que moi finalement. La pétasse est arrivée, j'espère que mon frère a bien profité de ses années de repos", tu parlais, sans t'arrêter. Lu se faisait si silencieuse que tu voulais combler le vide.

Ils t'en demandent beaucoup les Cavalero. Cosmo au moins n'a jamais cherché à avoir ton pardon. Tu soupires quand Stella te demande de pas faire la gueule. You wish. Mais voilà qu'elle te dit qu'elle est au courant depuis Octobre. Octobre. Quatre mois qu'elle sait qu'il est dans la même ville que toi. « Ah ouais. » la surprise et la déception ne font que s'escalader. « Ouais j'aurais aimé que tu me le dises Stella. » tu grince des dents quand elle utilise le mot en A. « C'est sûr que c'est plus agréable pour moi de tomber sur lui au moment où je m'y attendais le moins. » la rancoeur t'étouffe, mais tu sais qu'elle peut pas comprendre Stella. Elle sait pas, elle sait pas tout, comment le pourrait-elle ? « T'as de la chance de pouvoir planifier vos retrouvailles. J'espère que ça se passera comme tu l'espères. » t'es jalouse de ce luxe, jalouse que ça ne se soit pas passé comme tu l'avais imaginé, parce que t'aurais simplement préféré ne jamais le revoir.