J'en revanais pas. Elle était fiancée. Fiancée. C'était pas comme si elle avait un copain et qu'ils risquaient de rompre dans quelques semaines. Non, là elle allait se marier, et pas avec n'importe qui. Avec Hades. Le Prince, son premier amour, celui que j'avais toujours redouté. Je revoyais toutes ces fois où elle rigolait avec lui lorsque j'étais en couple avec elle, je revoyais le sourire qui s'étalait sur son visage lorsqu'elle le voyait. Et je me disais que tout ce temps elle s'était foutue de moi, de nous. Que tout ça ça n'avait été qu'une comédie, qu'elle l'avait toujours voulu lui et pas moi. Alors j'avais bu, je m'étais saoulé à coup de vodka. J'étais parti de notre rendez vous et j'avais erré dans les rues jusqu'à trouver un bar ouvert. Là je m'étais lâché, j'avais enchaîné les verres, comme j'avais enchaîné les conquêtes après notre rupture. Maintenant je déambulais à nouveau dans les rues, une bouteille à la main, la haine au cœur. Je riais de mon idiotie, de mes conneries, de nous. Parce que justement je disais encore nous alors que t'étais à un autre. Et que j'avais aucune chance de te récupérer. « Taaaaaaaaaam » que je gueulais, y mettant tout mon désespoir. Ouais, j'étais venu la voir elle. C'était la seule qui comprendrait mon mal être, ma putain de lâcheté. Car j'avais plus envie de me battre, j'avais plus envie de l'aimer. Parce que je savais pas comment l'aimer. « Taaaaaaam viens ». Je criais encore, je m'arrêtais pas. J'avais besoin d'aide, d'une infirmière, de bras chaleureux pour me consoler.

Mon appartement donnait sur la rue. C'était cool, certains soirs, et d'autres soirs, un peu moins. Comme ce soir, ce soir, c'était moins cool. Devant mon épisode, à manger des bonbons telle la gourmande que je suis, j'entends qu'on m'appelle.« Taaaaaaaaaam » qu'on m'dérange quand je suis prête à sortir et à faire la fête, pourquoi pas. Quand j'suis en sous-vêtements sous ma couette, un peu moins. « Taaaaaaam viens » Je râle, "Rrrrw " avant d'enrouler la couette autour de moi et de me lever, allant ouvrir la fenêtre, "Les téléphones, tu connais pas ?!" pour le plaisir de râler, parce qu'au téléphone, j'aurais probablement pas répondu. Pas probablement, j'aurais pas répondu, c'est certain. "Qu'est-ce que tu veux ?" le tout à travers la fenêtre, oui. Les meilleures conversations se font comme ça, de toute façon. Et puis, j'peux pas faire autrement, j'suis en sous-vêtement et ma série et mes bonbons m'attendent, alors vaut mieux que sa requête soit rapide et réalisable, j'commence déjà à me cailler sévère là.

Elle me demandait si je connaissais pas les téléphones et je rigolais, comme un idiot. Parce que j'avais pensé à l'appeler mais, je savais pas pourquoi, à chaque fois que j'essayais de taper son nom pour l'appeler, j'y arrivais pas. Tout devenait flou et c'était un nom complètement différent qui s'affichait à l'écran. « Ouvre moi Tam ! » que j'ordonnais avant de tomber en arrière. Mes jambes ne me tenaient plus, comme si elles étaient en coton. Puis elle me demandait ce que je voulais et je répondais pas. Je voulais trop de trucs, c'était ça le problème. Il fallait que Charlie me revienne, qu'Hades sorte de sa vie, que Tamsin casse avec sa copine pour revenir dans mes bras elle aussi et... ouais, aucun de mes caprices ne se réalisait. Alors je restais assis sur le sol, sans répondre, la tête baissée. Qu'est ce qu'il fallait que je fasse ? De toute manière tout était perdu. J'étais perdu. Alors, fermant les yeux, je m'allongeais sur le trottoir, ignorant tout ce qui se passait autour. Il n'y avait plus que ma bouteille d'alcool qui comptait. Car c'était la seule à me soutenir en cet instant.

Quelle princesse ce type. Une vraie Diva, la Beyoncé de l'année, c'est sur. « Ouvre moi Tam ! » je rigole en le voyant tombé, il était plus que fait, là. Il avait certainement bu beaucoup plus que son corps pouvait bien lui permettre. "C'est ouvert !" franchement, j'pense qu'il m'aura à l'usure ce type. Il connait les codes des portes, et j'crois bien que celle du bas ne fonctionne plus très bien de toute façon alors il peut entrer comme chez lui, y a juste ma porte d'entrée à ouvrir, et j'l'ouvrirais. "Lève ton gros cul et monte !" parce qu'il risque d'attraper froid, et moi aussi. Et puis mis à part ça, j'ai mon épisode qui m'attends et j'ai encore deux saisons à finir derrière, j'ai pas le temps de ramasser un type allongé sur un trottoir à la petite cuillère.

Elle me dit que c'est ouvert et, sans attendre plus longtemps, je fonce vers la porte. J'ai besoin d'elle, qu'elle m'entoure de ses bras, qu'elle me dise que tout irait bien, que j'ai pas besoin de Charlie, que j'ai besoin de personne en fait. Je titube, je trébuche sur ma bouteille restée par terre et, pendant un moment, je reste au sol. Je me dis que, peut-être, si je me relève pas, tout le monde m'oubliera. La vie me laissera tranquille, ne me fera pas subir d'autres merdes. Car, clairement, j'en ai marre. Je supporte plus rien. Tamsin a pas l'air de se rendre compte à quel point je vais pas bien. Elle est dans sa couverture, elle me crie de monter. Alors je prends mon courage à deux mains et je me lève, je monte les marches jusque chez elle. Je frappe à sa porte, j'arrête pas, jusqu'à ce qu'elle m'ouvre. « Je dérange ? » que je demande, l'air candide, comme si ça m'a pas traversé l'esprit que tu puisses avoir autre chose à faire que me consoler. Parfois j'oublie que les autres ont une vie, désolé. « Charlie est fiancée ». Finalement je lâche la bombe, je peux plus la garder pour moi. Tout ça c'est trop dur.