Sloan tremblait comme une feuille. Il était incapable de dire si c'était le froid glacial de Boston qui le faisait grelotter ou le message de Serah, sa demie-soeur. Cette dernière l'avait contacté par sms pour lui dire qu'Edward, leur père était présent en ville et qu'il avait invité sa fille chérie dans un restaurant plutôt chic de la ville. C'était gentil de la part de la blondinette de l'avoir prévenu. Ce mec se jouait de ses trois enfants depuis trop d'années, il était temps qu'il paye et que la descendance Bushnell lui rende la monnaie de sa pièce. L'Eliot tira nerveusement sur sa clope et regarda Iris brièvement.  « J'ai pas envie d'y aller, j'te jure, j'le sens pas du tout ce type ... » Et pourtant, il avait, plus que jamais, besoin de réponses à ses questions. Sloan n'en pouvait plus de tourner en rond et de blâmer sa propre mère sans connaître la vérité. Il se passait énormément de choses dans sa vie en ce moment, entre les petites soirées improvisées du maître chanteur, sa fiancée qui le harcelait pour qu'il suive un traitement et cette bipolarité qui ne le lâchait jamais vraiment, il devenait fou.  « Faut pas que je m'emporte, je crains le pire sérieux. » dit-il d'un calme déconcertant. Cela n'allait pas durer. Sloan se connaissait et savait qu'à la moindre remarque déplacée, il allait monter en pression et exploser.  La présence de Suzy l'aidait énormément, il savait qu'elle pourrait le calmer si cette rencontre tournait au drame. Il tira une dernière fois sur sa clope avant de recracher la fine fumée blanchâtre dans l'air frais. Il écrasa le mégot par terre et se racla la gorge.  « On peut encore faire demi-tour t'sais. » Ses yeux se posèrent sur le restaurant de l'autre côté de la rue où devait, certainement, attendre Serah et son père biologique. C'était angoissant de se dire que les vingt dernières années de sa vie étaient basées sur un mensonge. Un putain de mensonge.

Je ne sais pas comment c'est possible, mais je suis retourné à ma vie, à ma routine normal. Ça fait une semaine maintenant qu'on a été libéré et encore très peu de gens sont au courant de ce qui nous est arrivé. En tout cas, moi, je n'ai plus vraiment l'impression d'être la même que j'étais. Voir autant de violence, frôler la mort maintes fois, ça change quelqu'un. Mais ce soir il était question d'un petit restaurant pour rencontrer mon beau-père et... honnêtement, je me sens aussi stressée que mon homme. Bébé... tout ira bien. Ça ne pourra jamais être pire que vendredi dernier, en fait. Il faut que je me change les idées. Sloan fume sa cigarette et je me frotte les bras à ses côtés, en essayant de me réchauffer. Lorsqu'il dit qu'il faut qu'il reste calme, je m'accroche à son bras et lui serre sa main libre avec la mienne. Je sais quel effet que j'ai sur lui, je sais que je suis là pour l'aider à garder son calme... Je laisse mon homme terminer sa clope et mon regard se tourne vers Iris. Pas trop nerveuse ? Lui demandai-je, un léger sourire aux lèvres. Elle était belle ce soir, elle l'est toujours mais on dirait que cette fois-ci elle l'est un peu plus... peut-être qu'elle veut faire regretter son père d'avoir laissé deux enfants qui ont très bien vieilli. Peut-être que c'est juste mon imagination et un petit peu de jalousie qui parle. Lorsque Sloan écrase le mégot de sa cigarette, j'hoche négativement la tête. Non trop tard, aller, on y va. J'ai faim et j'ai froid. Étant la seule qui n'a aucun lien de sang avec cet homme, je franchis les premiers pas en direction du restaurant avec Sloan à mes côtés et Iris pas très loin. Une fois à l'intérieure, je lève le regard vers la salle pour essayer de repérer notre table... Malheureusement, je n'ai aucune idée de quoi a l'air leur demi-sœur, et encore moins leur père.

Putain ma vie est basé sur un mensonge, mensonge créer par ma mère qui est décédée et qui ne peux plus nous expliquer le pourquoi du comment. Ouais je lui en veux, ça se voit, je l'aime mais je lui en veux et je la comprends pas, je ne comprends pas comment on peux mentir à ses enfants sur leur père. Aujourd'hui on allait rencontrer notre père, celui qui nous a renier pendant vingt ans et franchement ça ne m'enchante ps du tout, j'ai pas envie de le voir et j'sais que j'pourrais l'insulter à tout moment. Surtout que Sloan il est bipolaire alors c'est pire, je m'inquiète de ce qu'il pourrait se passer et aussi de ce qu'il pourrait li dire, je suis angoisser, j'ai la boule au ventre, mais j'le montre pas. J'fais la meuf qui s'en fout, cigarette à la main, j'aurais dû fumer un joint en faites, mais qu'importe je crache la fumée avant de répondre. « J'ai pas envie de voir sa sale tête, mais en même temps on doit y aller. » Vingt ans bordel de merde qu'on l'a pas revu et en faites moi je le reconnaîtrais pas puisqu'il est partit quand j'avais un an, j'ai plus aucun souvenir de lui. De toute façon je m'en fous de lui maintenant, j'ai pas envie de le connaître plus que ça, mais il faut bien après tout. Suzy est là pour calmer mon frère, mais il le sent pas et moi encore moins, j'ai peur de ce qu'il va se passer dans ce foutu restaurant. Ma belle soeur me demande si j'suis nerveuse, j'fais genre que ça va et que je m'en fous, mais honnêtement non. « Un peu. J'crois que ça va pas passer entre lui et moi. » Ouais j'suis trop rancunière pour pardonner de nous avoir lâcher, il a même pas essayer de prendre contact avec nous alors on va lui faire regretter. Je fais tomber ma cigarette au sol et l'écrase. Suzy prends les choses en main en rentrant dans le restaurant la première, mon coeur bat fort tandis que je cherche Serah du regard. Je la vois assise à une table, notre père n'est pas encore là. Je m'empresse d'aller vers elle. « Il est pas encore là? C'est une blague?! » Ben quoi j'suis ps du genre patiente en faite.

Lorsque papa m’a envoyé un message pour me dire qu’il venait à Boston et voulait qu’on aille diner, j’ai immédiatement envoyé un message à Sloan pour qu’il en parle avec Iris et que tous les deux puissent venir le rencontrer. Enfin… le revoir. Peu importe comment vous voulez l’expliquer, tout ce que je voulais, c’était lui foutre en plein visage l’erreur de sa vie ainsi que toute la rancune que j’avais à ce sujet envers lui. Bien entendu, il avait choisi un resto hyper huppé pour l’occasion histoire de montrer à tous son compte en banque bien rempli –rien qui ne m’impressionne par les temps qui cours j’en ai bien peur. Je jouai donc le jeu, m’habillant de façon somptueuse pour lui faire plaisir, un cadeau empoisonné rien de plus. Arrivé au restaurant, je donnai mon nom à l’hôtesse qui me guida jusqu’à une table à deux. Je lui file un billet et lui demande de nous préparer une table à quatre –ne sachant pas que Sloan comptait ramener sa fiancé- où nous irons nous installer sous peu, mais pas tout de suite. « Serah, ma chérie! » Comme toujours, aucune effusion affective de la part d’Edward qui se contente d’un large sourire et d’un regard approbateur. « Papa. » Je force un sourire et m’assoit. « Tu m’excuses deux minutes? » Il sort son téléphone de sa poche et disparait. Nerveuse, je regarde autour et aperçoit finalement Iris qui vient vers moi avec le reste de la joyeuse bande Bushnell –Suzy comprise. « Il est pas encore là? C'est une blague?! » Je fronce les sourcils en me redressant. « Chut, parle moins fort. Il est parti prendre un appel et sera de retour d’une minute à l’autre. Allez vous assoir là-bas, j’vous rejoins dès qu’il revient. » Je pointe la table mise en place par l’hôtesse où il manque finalement une place. Je force un sourire à l’intention de la petite brunette. « Vous avez qu’à demander à l’hôtesse une chaise de plus. » Je lance un regard à Sloan et les chasse avant qu’Edward ne revienne. Je m’assois l’air de rien et le fixe lorsqu’il s’assoit. « J’ai un courant d’air ici, on peut changer de place? »

HJ: J'vous laisse la chance de jouer un peu Edward du coup!

Sloan regarda simultanément sa petite soeur et sa fiancée, le coeur lourd. Son passé remontait à la surface, lui qui se donnait tant de mal à le faire disparaître dans un coin de son esprit, il lui explosait en pleine gueule. Le stress l'avait gagné et rongeait son âme. « On lui doit rien du tout, il n'a eu aucun scrupule à nous abandonner lâchement ... c'est lui qui nous doit quelque chose. » dit-il maladroitement en fixant la porte du restaurant. L'Eliot laissa les deux filles parler entre elles et se perdit dans ses pensées. Il revint à lui rapidement, le stress était beaucoup trop présent pour qu'il puisse y faire abstraction. « Ouais allez, on y va. » Plus le choix. Il suivit les filles qui entrèrent dans le restaurant. Iris se dirigea directement vers Serah tandis que Sloan resta légèrement en retrait. Silencieux, il s'était renfermé sur lui-même et allait avoir du mal à s'ouvrir. Il soupira faiblement en prenant conscience qu'Edward n'était pas encore arrivé. La blondinette vint le rappeler à l'ordre en lui disant que leur père était dans les parages, qu'il répondait à un appel et qu'il n'allait pas tarder à revenir. L'Eliot croisa le regard de Serah et lui afficha un faible sourire. Elle avait pu apercevoir un avant goût de sa bipolarité, espérons qu'il réussisse à garder son calme ce soir.  « Merci, viens Iris, on va attendre un peu plus loin. » Il attrapa le bras de sa soeur et la tira vers la table qui leur était réservé. Sans même demander l'accord du couple à côté d'eux, Sloan leur prit une chaise qu'il installa à leur table. Il vint s'asseoir et fixa l'entrée du restaurant, sans écouter les filles. Et là, son coeur s'arrêta de battre et sa respiration se stoppa. Edward Bushnell fit son apparition. Un homme grand, fin, avec une certaine prestance. Choqué par ce qu'il avait devant les yeux, la bouche de Sloan vint s'entrouvrir. Le choc était violent dans son esprit.  « Je m'en vais. » trancha-t-il en se levant. Mais c'était sans compter sur Serah et Edward qui s'approcha d'eux. Que lui avait-elle dit ? Il l'ignorait mais ne pouvait plus déguerpir de là. Pris au piège, l'Eliot se sentait oppressé. Edward ne semblait pas savoir à qui il avait affaire et tendis une main généreuse vers son fils.  « Bonsoir, Edward, enchanté, vous êtes des amis de ma fille ? » Sloan regarda la main de son père et après une légère hésitation vint saisir sa main. C'était stupide, il ne savait pas pourquoi il faisait ça, peut être qu'inconsciemment, il en avait besoin. « Pas exactement. » répondit-il froidement en lâchant sa main. Il le laissa se tourner vers Iris. Sa mâchoire se serra fortement. « En fait, nous nous connaissons déjà et j'suis sur que tu nous as surement déjà reconnus ... » avoua-t-il, impatient d'en découdre avec son père.

Iris et Sloan sont tellement négatif... mais d'un sens, je peux les comprendre. Si j'apprenais que mes parents biologiques étaient vivant, qu'ils m'ont volontairement abandonné... je ne sais pas si je serais plus joyeuse qu'eux. Cela dit, ils ne connaissent toujours pas la vérité et c'est bien pour ça qu'on est là aujourd'hui. Bref, c'est moi la première à marcher vers le restaurant, les forçant à me suivre. À l'intérieur, je cherche deux personnes assises à une table, qui pourrait ressembler à mon fiancé et ma belle-sœur. En fait, je ne sais pas du tout de quoi a l'air cette fameuse Serah... jusqu'à ce que mon regard s'arrête sur la blonde. Je la reconnais de la soirée chez Elliot, je me dis que c'est tellement possible que ce soit elle... et je soupire. Merde, pensais-je, en suivant Iris et Sloan jusqu'à elle. Je regarde les échanges en restant silencieuse et très certainement mal à l'aise. Elle et moi n'avions pas eu une très belle "première rencontre", mais c'est possible qu'elle ne s'en rappelle même pas vu le nombre de shooter qu'elle avait ingurgité.

Encore en silence, je suis encore la fratrie Bushnell jusqu'à notre table et m'installe à côté de mon fiancé. Lorsque Sloan se lève, je lui attrape le poignet pour le tirer afin qu'il se rassoit. Tu restes là. Ils marchent vers nous et mon cœur se serre pour eux. Lorsqu'Edward se présente, je souris, un peu gênée par le malaise qu'il venait d'occasionner sans même s'en rendre compte. Oh lalalala.... Sloan doit bouillir. Je tourne la tête pour regarder mon homme et constate que... ah bah ouais, c'est un homard, il va exploser. Je descend ma main de son poignet à sa cuisse pour le caresser, juste histoire de lui montrer que j'étais là.

Edward sourit et fronce un sourcil, perplexe. Je dois me faire vieux, ma mémoire fait défaut. Excusez-moi, rappelez-moi votre nom ? Je me pince les lèvres et me lève à mon tour pour lui présenter ma main. En fait, il vaut mieux que je prenne les devants pour éviter qu'un des trois fasse une scène explosive.
Suzy Underwood. Fiancée de celui-là... Dis-je en souriant, faisant un petit signe de tête vers mon futur mari. Edward me serre la main et se tourne finalement vers Iris pour répéter la même manœuvre. Enchanté de vous rencontrer aussi. Permettez-moi de vous dire que vous avez de très jolis yeux, ils me rappellent le regard de... d'une amie.

Arrivés au restaurant et à la table où se trouve Serah, je m'énerve direct, ça commence mal, c'est aussi surtout l'angoisse que j'avais au fond de moi. Toute de suite elle réplique et me dit qu'elle a réservé une table. « Autant pour moi... » On se dirige alors à la fameuse table et je m'installe, mon coeur se serre de plus en plus alors que mon frère veut partir, heureusement Suzy est là pour le faire rester et de toute façon c'est plus le moment de faire marche arrière. Oh mon dieu je le vois s'approcher de nous, je ne le reconnais pas, forcément j'avais qu'un an. Ceci dit rien qu'à sa première phrase j'ai envie de hurler. Merde quoi ! Il nous reconnaît même plus... J'suis tellement déstabiliser, je commence à trembler, je ne dis pas un mot alors que Sloan lui réponds. J'ignorais quoi dire, mes yeux sont posés sur lu fixement, sans émotions. Ah ouais il ne sait vraiment pas qui nous sommes, je bouillonne intérieurement, je ne dis rien, je n'arrive pas à parler et pourtant j'aurais tant de choses à dire. Suzy se présente à lui et mon père, je n'ai même pas envie de l'appeler comme ça en faites, lui il s'adresse à moi, j'ai la gorge nouer. Non mais en plus son commentaire me fait limite rire, alors je hausse un sourcil. « Ben il serait temps de me connaître en faites... Ouais les yeux de ton ex femme que tu as tromper par exemple... » Je le regarde droit dans les yeux, si il n'a pas compris c'est qu'il est idiot ou il veux pas nous connaître d'avantage ou même les deux. Croisant mes bras sur ma poitrine, je le fixe encore en ajoutant. « Alors ça fait quoi de savoir que tes enfants sont en vie? Non parce que tu dois sûrement t'en foutre en faites. » Putain faut que je me calme sérieusement, j'ai trop les nerfs et je suis comme mon frère c'est dans les gênes d'être impulsive. Si ça se trouve il va prétexter avoir un coup de fil pour se tirer, ça m'étonnerais pas.

Papa ne semble pas faire de cas de ma requête de changer de table, mais tire une drôle de tête en voyant le reste de la petite famille installée plus loin. Il hésite et leur tend la main en bon homme d’affaire qu’il est. « Bonsoir, Edward, enchanté, vous êtes des amis de ma fille ? » Je pince les lèvres, surveille la réaction de Sloan qui la prend cette main non sans lâcher un commentaire : « Pas exactement. » Il jette un coup d’œil à Iris et je surveille la scène, mal à l’aise. « En fait, nous nous connaissons déjà et j'suis sûr que tu nous as surement déjà reconnus ... » Allez papa, si tu sais quelque chose, c’est le moment d’arrêter de faire le con. « Je dois me faire vieux, ma mémoire fait défaut. Excusez-moi, rappelez-moi votre nom ? » Suzy se lève pour sauver la situation, heureusement d’ailleurs parce qu’on est tous plus con les uns que les autres. « Suzy Underwood. Fiancée de celui-là... » Une nouvelle poignée de main échangée et il continue sa petite tournée, terminant avec Iris qui bouille à vue d’œil. « Enchanté de vous rencontrer aussi. Permettez-moi de vous dire que vous avez de très jolis yeux, ils me rappellent le regard de... d'une amie. » J’avale de travers, il a pas osé, si? « Ben il serait temps de me connaître en faites... Ouais les yeux de ton ex-femme que tu as trompée par exemple... » Ouais, bah on est pas sœur pour rien toutes les deux, mh? Le caractère Bushnell mesdames et messieurs. Edward se rétracte. Pour la première fois de ma vie, j’ai l’impression de le voir rétrécir. « Alors ça fait quoi de savoir que tes enfants sont en vie? Non parce que tu dois sûrement t'en foutre en faites. » Il ouvre la bouche pour parler, mais je l’arrête d’une main sur son avant-bras. « Assit toi papa. » Les regards sont déjà portés sur nous alors à quoi bon attirer d’avantage l’attention. Je tourne ensuite la tête vers les autres, les intimant du regard de faire de même avant de m’installer à côté d’Edward pour l’empêcher de fuir. « Joue pas les innocents, on est au courant. J’ai trouvé les actes de naissance de Sloan et Iris avec ton nom dessus. Parle. » C’est la première fois que je donne des ordres à mon père et bon sang, c’est grisant. Il lâche un long soupir avant d’essuyer ses mains moites sur son pantalon et de les croiser devant lui sur la table. Il cherche mon regard pour un semblant de soutient que je ne lui donne pas. T’es tout seul connard, pagaye si tu veux pas couler. « Je… » Il regarde à intervalle Sloan et Iris. « Je suis désolé. » J’crois que j’ai mal compris. « Je savais que vous étiez en vie, j’ai même essayé à plusieurs reprises de reprendre le contact avec vous, mais votre mère… » Il s’égare un peu, comme si le souvenir de leur mère lui faisait mal. « Elle ne voulait pas me laisser revenir dans vos vies. Pas après être parti avec Ella. » Après avoir foutu le camp avec ma mère enceinte de moi oui.

Le sang de Sloan pulsait dans ses veines. Il ne supporterait pas cette situation et le savait d'avance. C'était trop pour lui, il n'arriverait pas à garder son calme et sentait déjà l'énervement le gagner. Sa main lâcha celle de son père tandis qu'il lutta pour ne pas lui sauter à la gorge. Il n'était pas tout seul, ses deux soeurs étaient là, elles aussi, dans le même bateau que lui. Sa fiancée était également présente pour un soutien sans faille. L'Eliot se surprit à lui parler sans trop d'agressivité dans sa voix. Il ne savait pas d'où lui venait cette force de caractère et cette soudaine patience. Tiraillé entre l'émotion de revoir son père, la haine qu'il éprouvait depuis l'annonce de cette nouvelle, ainsi que toute la nostalgie de son enfance qui revenait en lui, le jeune homme tourna la tête vers Suzy et inspira longuement. Il assista aux différentes poignets de mains et fronça les sourcils en entendant la réflexion d'Iris. Sa petite soeur l'agaçait au plus haut point depuis quelques temps déjà. Sloan n'arrivait pas non plus à passer outre cette histoire d'inceste, une histoire qui l'avait énormément éloigné de sa petite soeur. Cette dernière filait vraiment un mauvais coton et cela la faisait rire. Iris s'en était même prit à Jonathan, le meilleur amie de son frère, en toute quiétude. Son regard se reporta rapidement sur Edward et, lorsque tout le monde vint s'asseoir, il fit de même. Anormalement silencieux depuis quelques minutes, il laissa le soin à Serah de lui expliquer la situation, c'était au dessus de ses forces. « Je savais que vous étiez en vie, j’ai même essayé à plusieurs reprises de reprendre le contact avec vous, mais votre mère… Elle ne voulait pas me laisser revenir dans vos vies. Pas après être parti avec Ella. » vint-il se confondre en excuse. Sloan ne pouvait pas laisser passer ça, il ne pouvait pas. Avec la meilleure volonté du monde, ce n'était pas possible. Sa mâchoire se serra fortement tandis qu'il vint claquer brusquement son poing sur la table, hors de lui. Ayant quand même conscience qu'ils étaient dans un lieu public, il essaya de modérer le timbre de sa voix qui se voulait quand même glacial et tranchant. « De quel droit oses-tu parler de notre mère devant nous ? T'as eu vingt ans pour essayer de prendre de nos nouvelles, t'as eu vingt ans pour tenter de prendre contact avec nous donc ne redis jamais plus qu'elle t'a empêché de nous voir. T'es qu'un sale bâtard, une ordure, une pourriture. Tu t'rends compte du mal que tu nous as fait à ma soeur et à moi ? On a grandis avec l'image d'un père mort et enterré mais en fait, tu te la coulais douce avec ta nouvelle femme, dans ta nouvelle vie. On a pas quitté le Bronx quand tu nous as abandonné, on a vécut dans la misère à cause de toi. Notre mère s'est battu pour nous, elle a parfois enchaîner deux boulots pour qu'on puisse manger. Et toi t'étais où durant tout ce temps ? Hein ? T'étais où ? Quand j'revendais de la drogue pour qu'on puisse garder le taudis dans lequel on a grandit, t'étais où putain ? » Sloan n'avait qu'une envie, attraper le couteau et lui foutre dans la gueule, entre les deux yeux. « J'espère que tu as pensé à nous tous les jours. J'espère que tu n'arrives plus à te regarder dans un miroir parce que là, tout ce que tu mérites c'est de brûler en enfer ! » trancha-t-il en le fixant droit dans les yeux. Putain, c'était plus libérateur qu'il ne l'aurait cru.

La tension était très intense... Le père Bushnell ne semblait pas avoir la moindre idée de qui Sloan et Iris étaient, il s'est même excusé pour sa perte de mémoire. Cependant, trois secondes après, il a osé dire à Iris qu'elle avait les mêmes yeux que son "amie"... Tu parles ouais. Je commençais à me sentir moi-même frustrée en entendant ce compliment, parce que comme tout le monde j'ai compris de quelle amie il s'agissait et j'le trouve pas mal con de ne pas avoir fait le lien justement à partir de ce moment-là. Faut croire qu'il n'était pas là le jour où les cerveaux ont été distribué... Bref. Iris crache un commentaire très négatif, un commentaire qui l'oblige directement à se remettre les yeux dans les bons trous. Mais quel tact... Serah demande à son père de s'asseoir, de s'installer parce que visiblement la balade va être montagneuse. Elle parle ensuite des actes de naissances de mon fiancé et de sa sœur, en lui demandant de ne pas jouer les innocents... L'homme dans la cinquantaine soupire, l'air dépité. Il semble comprendre alors qu'il est temps de sortir la tête du sable et de tout avouer...

Ses aveux me laissent complètement sous le choc. C'était aussi simple que ça, pour lui faire cracher une partie de la vérité. Enfin... si toutefois, c'est la vérité. J'observe l'ambiance à la table, tout le monde est estomaqué... Sloan devient rouge, son expression change, il respire fort. Je connais mon Sloan. Son poing se referme et après avoir donné un coup brusque sur la table, il s'est lancé dans un discours tranchant et hors de toute gentillesse. Dans son timbre de voix, mon fiancé est en colère, triste et c'est avec raison. Il m'apprend au passage des choses sur sa vie dont je n'ai jamais eu conscience, parce qu'il y a certaines choses qu'il refusait de parler en général avec moi, ou avec qui que ce soit d'autre. Je savais que sa vie à Bronx était très différente de la vie qu'il menait ici à Boston... je sais que son comportement et grandement différent que celui qu'il avait avant, qu'il avait l'habitude de fumer beaucoup, de voler beaucoup, d'avoir des amis avec une mauvaise influence pour lui, ce genre de chose... Mais ce qu'il vivait à la maison, avec sa mère... je n'en savais rien. Et j'en ai honte, d'ailleurs. Comment est-ce que j'ai pu manquer des détails aussi important de la vie de mon futur époux ?

Je l'écoute parler la lèvre entre mes dents et mon regard ne l'a pas lâché une seule seconde. Sloan lui a bien fait comprendre que sa vie n'avait pas été facile, à cause de son absence... Lorsque le silence est redevenu maître, j'ai recommencé à le caresser avec mon pouce. Peu importe ce que son père lui répondrait, je voulais qu'il sache que j'étais là pour lui.

Edward est un lâche. Peut-être qu'il l'a toujours été au fond... mais durant ce rendement de compte, il n'a pas quitté le regard de Sloan une seule seconde. Leurs quatre yeux bleus se sont affronté du début jusqu'à la fin. Poliment, l'homme se racle la gorge et éteins son téléphone portable. Il savait pertinemment que cette discussion serait importante et il était hors de question qu'on essaie de le distraire. Il repose tranquillement son téléphone sur la table et se replace la veste. 10 Novembre. 2 Février. Mentionne-t-il. C'est bien vos dates d'anniversaires, non ? Il déglutit, avant d'avaler une gorgée d'eau pour se préparer pour la suite. J'ai rencontré votre mère et croyez-moi, nous étions fous amoureux... On a vécut 10 belles années ensemble, avant qu'elle ne me quitte... Il grogne, il n'aime pas trop en parler... parce qu'encore aujourd'hui, ça lui fait beaucoup de mal. J'ai une condition... une... une maladie. Je n'en parle pas trop, parce que j'ai remarqué que le regard des gens sur moi change énormément et je déteste ça. À l'époque, c'était nouveau pour moi, c'était... fâchant. Votre mère m'a quitté parce que j'ai dis des choses qui lui ont brisé le cœur... des choses auquel je me suis excusé des milliers de fois, parce que je ne les pensais pas. Mais elle avait raison de me laisser... elle avait raison de m'en vouloir, je m'en voudrais toute ma vie aussi à sa place. Le regard d'Edward se perd loin derrière Sloan, tandis qu'il réfléchissait aux mots qu'il employait. C'est comme s'il attendait à ce moment depuis toujours, comme s'il savait que ce jour-là arriverait aujourd'hui. J'ai fais une erreur de parcours... j'suis sortie ce soir-là, j'ai bu comme un con, j'ai appelé une ex comme un con. On s'est retrouvé, on a couché ensemble, on a recommencé à se voir... Je pensais me servir d'elle pour oublier Brooke, sauf qu'en fait, je me suis attachée à sa présence... elle me calmait comme jamais personne n'avait réussi à le faire auparavant. Il savait que ses explications ne mènerait surement pas à un pardon... mais il savait que ça valait la peine d'être honnête, au moins pour essayer... au moins pour obtenir son propre pardon. Votre mère a réfléchi pendant ce temps-là... et elle est revenue vers moi pour s'excuser. Sauf qu'il était trop tard... je... j'étais déchiré. J'étais amoureux des deux. J'ai voulu retourner auprès de Brooke, pour vous... mais je ne pouvais pas le faire sans lui dire ce que j'avais fait. Et la vérité l'a anéantie... Votre mère m'a encore une fois brisé le cœur, parce que je venais encore une fois de lui briser le sien. À partir de là, tout a déboulé... on a divorcé, on s'est disputé, on s'est battu pour votre garde et parce que ma santé n'était pas suffisamment stable, elle a gagnée... Il prend une pause, soupire. C'est encore une fois vers la mère de Serah que je me suis retournée... elle était là pour moi, sans aucun jugement. J'suis tombée encore plus amoureux, elle aussi... Au début je pouvais vous voir, tout allait bien. Puis Ella et moi avions emménagé ensemble, elle acceptait même de vous accueillir chez nous, de devenir votre belle-maman. Mais votre mère... lorsqu'elle a apprit qu'on était ensemble seulement un an après notre divorce, ça l'a rendu furieuse... J'ai dû couper tout contact avec vous, je ne pouvais plus vous appeler, je ne pouvais plus vous garder, ni venir vous voir... J'vous ai envoyé des lettres tous les ans pour vos anniversaires, mais à voir votre réaction je devine que vous ne les avez jamais reçus. Il avait l'air triste... pensif. J'ai essayé de venir vous rendre visite pendant les heures de cours... Une fois, Sloan, tu m'as remarqué. Tu es venu me parler à travers la clôture... tu m'as posé des questions. Sauf qu'une surveillante nous a vu et elle m'a prit pour un pédophile, alors elle m'a chassée et depuis ce jour-là je n'ai jamais pu te revoir, ni te reparler. Puis lorsqu'il a eu fini de parler, Edward s'est enfoui la tête entre ses deux mains. Son visage était caché, mais on pouvait l'entendre souffler, renifler. Enfin prêt à continuer, il dévoile son visage rougit par la tristesse. C'était difficile pour lui de parler de tout ça, à cœur ouvert devant ses deux enfants qui étaient encore pour lui, deux étrangers. Et devant la seule fille qu'il n'ait jamais connu. Lorsque Brooke est tombée malade, j'suis allé la voir pour lui redemander la permission de reprendre contact avec vous... C'est là qu'elle m'a apprit que j'étais mort à vos yeux. Et j'ai compris qu'il était trop tard... que retourner vers vous maintenant, me donnerait le rôle du méchant ou pire encore, vous ferait détester votre mère. Il passe sa langue sur ses dents, tout en réfléchissant, le regard dans le vide. Elle vous aimait plus que tout... je ne pouvais pas lui enlever ça. Il était trop tard pour moi, mais pas trop tard pour elle... et je l'aimais encore assez pour lui offrir ça, pour la laisser partir la conscience tranquille... Alors j'ai pris sur moi... je savais que vous étiez entre de bonnes mains avec son mari, Georges, et j'lui ai promis de rester en dehors de vos vies...

Je regarde Edward, la bouche entrouverte. Ses aveux me font mal au ventre et très certainement, me laissent sans mots. Je n'ose même pas regarder mon fiancé pour voir sa réaction, ni celle d'Iris, ni de Serah... Je fixe Edward, qui viens de nous sortir des explications digne d'un film. Je ne sais pas quoi dire mais... ce n'est pas ma place de dire quoi que ce soit.