J’étais tranquille en train de boire un verre avec Serah quand mon téléphone vibre, m’indiquant la réception d’une notification. J’ouvre donc le message, et là, je manque de m’étouffer. Je crois que je suis saoul. Ou alors, j’ai bien vu ? Je regarde à deux fois le texto et la photo que je viens de recevoir. Une Lucky complètement nue et bouillante. Je lâchais un « attends-moi, je reviens » à l’attention de Serah et m’éclipsais donc à la recherche de la nana un peu trop ivre pour être responsable. Je montais les escaliers et ouvrais les portes qui n’étaient pas marquées de prénoms (Sluzy, d’accord – Nate et Arizona ? Enfin !) pour finalement tomber sur Lucky, assise sur le rebord de la fenêtre ouverte, à moitié dénudée. Mouais, c’était toujours mieux qu’entièrement nue ou en sous-vêtements de bonne sexy. Je restais dans l’encadrement de la porte, m’appuyant contre celle-ci. « Ferme la fenêtre, tu vas attraper froid. » Et puis, qu’est-ce que je m’en foutais moi d’ailleurs ? « T’as des fringues à te mettre sur le dos ? » Et j’essayais d’oublier le message que j’avais reçu quelques minutes plus tôt, parce que je savais que c’était une erreur, un truc qu’elle regretterait une fois qu’elle se réveillerait sobre demain matin.

T’étais insensée, bien trop saoule pour réfléchir à ce que tu faisais. Tu te baladais en sous-vêtements sexy devant tout le monde, tu m’envoyais une photo de toi totalement nue, tu prenais ta douche tranquillement lors d’une soirée chez des gens, tu laissais la fenêtre grande ouverte en plein hiver alors que t’étais à peine vêtue… C’était quoi ton problème? T’avais pas bu tant que ça en plus, si? « Tu me réchaufferai  ? » Quoi? Sérieusement? Je soupirais quelque peu et avançais pour te contourner. J’allais refermer la fenêtre et repartais à mon emplacement initial, dans l’encadrement de la porte. J’comptais pas rester ici. J’voulais juste m’assurer que t’allais bien, et après, j’repartirai, je continuerai ma soirée en bas. « Malheureusement non... » Je levais quelque peu les yeux au ciel. Encore ça? J’croyais qu’on en avait terminé. « Demande à Denys. Ou Liam. Ou peu importe qui tu as dans ta vie, en fait. » Tout le monde, sauf moi. Parce que toi et moi, on faisait plus parti de la vie de l’autre. C’était bel et bien terminé, cette fois. Tu t’approchais, fermais la porte à clé et posais ton front contre le mien. Qu’est-ce que tu faisais, là? « Tu me manques... » que tu soufflais contre mes lèvres. Et moi, à ces mots, je me crispais. « Tu me manques terriblement Elliot... J'en ai marre de nos disputes... » La mâchoire serrée, je restais silencieux pour l’instant. Je te laissais quelques secondes de répit, là, comme ça, contre moi. Parce que j’voyais que c’était ce dont t’avais besoin en cet instant précis. Mais finalement, je posais mes mains sur le haut de tes bras et te fis doucement reculer, plantant mes yeux dans les tiens. « C’est fini, Lucky… Toi et moi, peu importe ce que c’était qu’on avait… Tu sais que c’est fini. T’es juste trop saoule ce soir pour t’en souvenir. » Pour voir les choses en face. Et pourtant, j’avais quand même  eu quelques frissons à ton contact, à l’entente de tes mots. Sensation que j’avais bien vite ignorée.

« J'ai personne dans ma vie... J'ai fait exprès de demander à Denys de jouer le rôle de mon petit-ami pour voir comment tu réagirais. Quelque part, te rendre un peu jaloux... » Oh. D’accord. Est-ce que ça avait marché? Peut-être un peu. Malgré moi. Et d’un autre côté, j’étais déçu. Ça m’aidait, de savoir que t’avais avancé, que t’avais tourné la page et que t’étais avec un autre. Ça me faisait me sentir moins con, moins coupable, moins responsable de ta peine. Ouais, j’étais égoïste. Tu reculais jusqu’au lit où tu te laissais tomber. « Pour moi... Ça ne sera jamais fini. Y'a un truc entre nous, ça ne ressemble pas aux autres. J'sais pas quoi, mais c'est là. Le seul hic, c'est que tu refuses de le voir... » Je pinçais les lèvres à tes mots. Puis, je soupirais quelque peu en secouant doucement la tête. « Faut que t’arrêtes, Lucky… » Fallait que t’arrêtes de parler comme ça, de dire ce genre de choses, comme si moi aussi, j’pouvais être comme toi. Être fidèle et tomber amoureux. C’était pas moi. Alors certes, avec toi, c’était différent. Un truc qui ne ressemble pas aux autres. J’le reconnaissais, maintenant. Mais te l’avouer? À toi? Non, je pense pas. Ça te donnerait trop de pouvoir sur moi, et j’voulais pas de ça. « Saoule ou pas saoule, j'aurais toujours envie de toi... » Et ça, ça m’faisait quelque chose dans le bas ventre. Un petit chatouillement. Et toi, tu affiches un sourire grandiose, et je suis pas sûr de comprendre tout de suite pourquoi. « T'es juste un trouillard. Alors si tu n'as pas envie d'être là, j'peux pas t'obliger t'sais ? » « J’suis pas un trouillard. » répliquais-je, mes yeux ancrés dans les tiens en retour. Ouais, moi aussi je savais soutenir un regard et être perçant. « Y'a juste qu'avant de sortir, tu vas devoir récupérer ça ! » La clé, que tu tenais du bout des doigts, et que tu glissais entre tes seins. Et moi, j’roulais des yeux. Sérieux? C’était à ça que tu voulais jouer? Tu me connaissais mal, c’était pas ça qui allait me stopper. Ou alors, au contraire, tu me connaissais très bien, et c’était exactement ce que tu voulais? Je m’approchais donc du lit et t’enjambais, pour venir à quatre pattes au-dessus de toi. « Tu penses vraiment m’arrêter juste parce que t’as mis la clé entre tes seins? C’est pas comme si j’les avais pas déjà touchés. » Hm?

« J'y arrive pas... J'contrôle rien... Le seul moyen, c'est d'arrêter les battements de mon cœur. En gros, si je sautais par cette fenêtre, j'pourrais facilement stopper mon cœur. » Et là, ma gorge se serrait. T’étais pas sérieusement en train de penser à cette alternative, rassure-moi? Non parce que je savais que t’adorais la vie de manière générale, mais là, bourrée, tes sens et tes perceptions étaient alternés et j’voulais certainement pas que tu fasses une conneries. Dans l’histoire, si tu pensais comme ça, c’était pas moi le trouillard, mais toi. Quoi, t’avais peur de vivre sans moi? Notre histoire avait duré deux jours, le temps de la lune de miel. Depuis, on avait échangé un seul baiser. Et depuis ce dernier baiser, on s’était recroisés une seule fois en ville, l’histoire de cinq minutes. Tu vivais très bien sans moi, et moi aussi de mon côté. Alors pourquoi revenir là? Pourquoi ne pas continuer sur ta lancée? Et, bien décidé à mettre un terme à cet échange qui encore une fois ne mènerait nulle part, je t’enjambais à quatre pattes pour venir chercher la fameuse clé qui était devenue un jeu pour toi, cachée entre tes seins. Mouais, c’était pas ça qui allait m’arrêter, tu le savais au moins? Tu te redressais quelque peu et le bout de ta langue caressa la commissure de mes lèvres avant que tu ne te laisses retomber sur le lit, comme si de rien n’était. Et moi, je jouais à ton jeu. J’ignorais ton geste, comme s’il n’avait jamais eu lieu. Parce qu’à quoi bon? « J'sais. Mais qui a dit que ce serait facile ? Qu'il suffirait de glisser tes doigts entre mes seins ? » Hm? Elle allait chercher un coussin derrière elle qu’elle maintenait contre son buste. Oh, bravo Sherlock. T’as vu mes muscles? Tu crois que c’est ta petite force qui va me retenir? Sauf que c’était ta jambe là, qui me déstabilisait. Ta jambe que tu avais remontée et qui glissait contre mon entrejambe. Et tu pouvais le sentir, puisque je m’étais raidi à ce contact inattendu. « Embrasse-moi... » Je me contentais de te regarder, là, nos yeux plantés dans ceux de l’autre. « J’peux pas, et tu le sais. » J’pouvais pas t’embrasser, ni répondre à tes avances. Pas que j’en avais pas envie — t’étais toujours aussi attirante — mais parce que ça ne serait pas honnête de ma part. Pour toi, ça signifierait quelque chose, alors que pour moi, ça ne voudrait rien dire. Et c’était bien égoïste et petit de ma part, mais j’pouvais rien y faire. Ouais, j’avais envie de toi, mais j’voulais toujours pas avoir à faire à tes sentiments.

C’est vrai ça ? T’y pensais même plus toi-même ? Tu venais tout juste de dire que je te manquais, Lucky, alors comment t’espérais que je crois en tes mots ? « Écoute, si tu veux qu'on reste amie, je peux aussi l'être. On s'touche plus. Si c'est ce qu'il faut faire pour que t'arrêtes de me fuir, alors ouai, j'suis prête à devenir ton "amie" » Amis ? Sérieusement ? « Tu crois que ça serait possible ? » Parce que moi, j’pensais pas que ça le serait. Trop ambigue. « On a essayé ça une fois et ça a pas marché. Pourquoi ça marcherait là ? » Oui, quand on s’est mariés, on n’était qu’amis. Et quand on est parti en lune de miel aussi. Regarde où ça nous a mené. Et tes gestes, ils ne m’indiquaient pas que tu voulais être une simple amie. Ta cuisse contre mon membre… Ca, c’était pas une situation amicale, même si tu semblais insister sur la chose et en être réellement convaincue. « Arrête de réfléchir, t'as envie de moi, tout comme j'ai envie de toi. T'es juste en train de lutter. Mais jusqu'à quand ? » L’une de tes mains glissait dans mes cheveux avant d’atterrir sur ma joue, ton pouce effleurant mes lèvres. Et je lâchai un soupir. Parce que oui, je luttais. J’étais en train de lutter pour ne pas craquer à tes mots. A tes gestes. « Si tu ne veux pas m'embrasser, moi j'peux ? » Je fermais les yeux malgré moi, ta main libre se frayant un passage sous ma chemise, se posant sur ma peau brûlante. Je voulais une dernière fois avec toi. J’en avais envie. Mais pas ici. Pas comme ça. Et sans même m’en rendre compte, mon corps avait pris le contrôle et mes lèvres effleuraient présentement les tiennes, jusqu’à ce que je ne souffle contre celles-ci : « Tu veux pas faire ça maintenant… T’as trop bu, et je veux pas que tu penses demain que j’ai profité de toi. » Alors pourquoi pas, on pourrait remettre ça à plus tard, un au revoir sous la couette. Au revoir à notre histoire passée, à nos disputes. Et bonjour à un nouveau départ, en tant que… En tant que quoi, d’ailleurs ? Amis ? Fantômes du passé ? A voir avec le temps, je suppose…