Son baiser me surprend. Parce qu'il est inattendu, forcément mais parce que son goût est familier et différent à la fois. Comme si le temps avait emporté avec lui l'innocence d'autrefois, comme si notre échange avait été balayé d'une revers de mois. Et même si je ne demande que ça, de passer à autre chose, de vivre au jour le jour, le regret me transperçait de sa lance brillante et désastreuse. Malgré tout je campe sur mes positions, têtu, ne voulant absolument pas me fondre de nouveau en elle pour redécouvrir ce que le manque de sa présence avait été. Je m'y refuse, encore chamboulé par son arrivé précipité. Pourtant ses lèvres m'appellent de nouveau, et ne manque pas de se dessiner à la perfection dans ma tête. J'avais pas mal espéré son retour, je pensais même qu'elle avait eu un problème plus grave ou bien même que c'était une plaisanterie grotesque pour me mettre à ses genoux. Et mine de rien, ça l'avait été, si au départ l'inquiétude avait tiré mes traits rapidement, la déception avait tout emporté sur son visage. Le sentiment qu'on vivait quelque chose, et l'impression indéniable qu'elle s'éloignait de plus en plus de moi. Pourtant maintenant qu'elle était là, juste en face, je prenais peur comme un garçon de cinq ans devant une araignée. Lâche, pauvre con, tout pouvait m'être attribué, néanmoins, je campais encore et toujours sur mes positions. Alors je prends la première porte de sortie, et le mot mariage s'éclaire en rouge fluo dans mon cerveau, et sans vraiment le comprendre il passe la barrière de mes lèvres. Sa réaction se lit sur son visage, et sa mauvaise humeur ne met pas bien longtemps à refaire surface. Elle me félicite finalement, m'applaudirai presque. Je reste de marbre, ne voulant rien laisser transparaître. « Ne soit pas amer, c'est toi qui est parti. » répondis-je en ne cessant de ressentir une certaine amertume à cette action injuste. J'étais rarement rancunier, pourtant, je ne pouvais oublier le ressenti, la profondeur à laquelle Sage avait su me toucher. « On devrait retourner à la fête. » dis-je en la lâchant finalement, libérant en même temps son fin poignet. Rien, absolument rien ne se passait selon mes envies ce soir, tout avait véritablement de travers.