Et même s’il opte pour l’ironie et tente de me faire comprendre que mes idées sont réductrices, je n’en démordrai pas, il est foutrement débile, leur choix. « Un ranch. Ils vivent dans un ranch, » que tu dis, mais je ne crois que ce que je vois. Alors pour le moment, je préfère les imaginer à marcher pieds nus dans la forêt. J’ai toujours adoré les clichés. Je dirais même que je me nourris des préjugés. Son assurance… Elle est amochée par le stylo avec lequel il torture le bureau. « Y’a même l’électricité. Et l’eau courante ! » Tu parles. Son petit foutage de gueule, il ne m’atteint pas, et même s’il veut signer la fin de notre aparté en envoyant valser le stylo. « Elle est enceinte. On le garde. » Intransigeant. Décidé. Presque je pourrais croire qu’il a pris cette décision seul, si je n’étais pas convaincue de le voir juste légèrement sourciller.

Mais j’en hoche le visage par la positive, comme si j’étais prête à l’autoriser. Comme si j’avais réellement mon mot à dire sur le sujet. Et ça fuse dans tous les sens dans mes pensées. J’en mords ma lèvre inférieure et c’est là qu’il me prouve ce que j’attendais, quand il prend la peine de m’apostropher. « Autre chose ? » La preuve que ce n’est pas définitif, loin d’être terminé. Si j’ai quelque chose à ajouter, c’est qu’inconsciemment, il veut que je le fasse. Soit, Sheng, de la méchante, j’accepte volontiers la place. Même lorsqu'il me surplombe, se croit plus fort, ma candeur reste intacte. « Oui, une petite. » Mes griffes, elles sont acérées, et sur ton cou, elles adorent et sont si faciles à refermer. « Puisque tu es tellement sûr de toi. » D’elle et de vous deux, de votre couple si précieux. « Tu ne diras pas non à un petit jeu, n’est-ce pas ? » Après tout, tu ne risques rien, ce n’est qu’un test de tes volontés comme un autre, et pour les défis, t’es comme moi, tu n’y résistes pas, « Dans un mois, Love is blind caste à Boston. » aucun doute, il doit avoir compris mes desseins. A son inscription, au grand amoureux futur papa, j’y compte bien.

I am not a muse
I am the somebody
End of fucking story.

Le problème, tu vois, c’est que même à ton rire, je ne crois pas. Que je ne le sais que trop bien comment tu fonctionnes et quand tu veux le nier, mon désir d’écraser Haiwee bouillonne. Alors j’ai cité Love is blind comme j’aurais pu choisir n’importe quoi, peut-être même de passer un weekend avec moi, selon mes lois. Et me réjouir de plaisir au moment où tu aurais cédé ; ne mens as Sheng, tu l’as, après tout, déjà fait. Puis nous savons tous les deux que la fidélité, ce n’est pas ta tasse de thé. « Tu peux y aller si tu veux. » Néanmoins, ce n’est pas ça, mon idée. Mon envie c’est celle de lui prouver qu’il aime toujours autant jouer, avec le feu et le danger, qu’il ne l’est pas, rangé. Que la tentation finit toujours par gagner. « Mais j’ai du mal à te voir là-dedans. » Moi, je n’ai rien à prouver. Je ne fais pas semblant. Je ne m’invente pas des sentiments. Être sans cœur et sans attache, je l’assume totalement.

Et malgré toutes ses bonnes intentions, je la vois, la lueur dans ses prunelles, celle qui le conduit à me demander des explications. « Approfondies. » Voilà, juste là. Il a basculé de l’autre côté. S’il ne voulait vraiment pas jouer avec moi, il n’en aurait jamais demandé des précisions. Sheng… vilain garçon. « Si tu es sûr de tes sentiments, convaincu d’avoir trouvé la femme idéale et de ne pas craquer pour une autre, participer à ce petit jeu dans le fond, ce n’est rien. » Un passe-temps comme un autre, et briser des potentiels cœurs sur le chemin. Un plan que je trouve divin. Autant qu’ajouter à mon arc des flèches pour flinguer la Haiwee. « Et ne me dis pas que ça ne te ferait pas du bien… » de redorer ton égo, de te prouver que tu sais encore charmer les femmes, même sans les voir. De te rassurer au milieu de la perdition dans laquelle t’a plongé ton histoire. « Réfléchis-y. » que je balance en haussant les épaules, comme si ce n’était pas grand-chose. « Tu me tiens au courant, » mais je le sais déjà qu’il est décidé, faible comme il est, « t’as mon numéro. » Viens jouer avec moi, Sheng, juste pour le plaisir de prouver à Haiwee et votre futur marmot que l’amour, ce n’est pas très beau. Et sortir ensuite de ce bureau.

I am not a muse
I am the somebody
End of fucking story.