un mois que tu es sous traitement afin que ton rein ne te lâche pas. le rejet t'as fait flipper, tu te voyais déjà de nouveau perfusée pour les dialyses. ce retour à des années en arrière aurait été violent. heureusement, le traitement a fonctionné et t'es un peu plus soulagée. tu pourrais prendre un abonnement à l'hôpital tellement t'y es souvent. mais aujourd'hui ce n'est pas pour toi que tu y mets les pieds mais pour accompagner capucine à son rendez-vous. t'es plutôt inquiète pour elle. t'aimerais pas qu'il lui arrive des misères. t'es bien placée pour comprendre et savoir alors t'as une empathie peut-être un peu excessive à son égard. assise à côté de ton amie dans la salle d'attente, tu tentes de lui changer les idées. — tiens regarde, j'ai vu cette robe incroyable chez prada, t'en penses quoi ? tu tournais ton téléphone dans sa direction.

Voilà que ça fait plusieurs semaines que tu te sens particulièrement fatiguée. Non, tu ne fais aucune activité qui puisse justifier cette asthénie, et dors paisiblement. Tu parleras de tout ça à ton néphrologue, le voyant aujourd’hui en la compagnie de ta meilleure amie. Ana est la seule informée de cette consultation et tu lui as assez fait comprendre qu’elle ne devait en parler. Inutile d’inquiéter tout le monde pour seulement un check up. Assise sur l’une des chaises de la salle d’attente, en silence, tu tentes de cacher ce stresse qui grandit au fil des minutes qui vous rapprochent de l’heure fatale. Non, tu n’es pas sereine, mais t’évites de trop le montrer. ❝ Ah ouais, elle est sympa. Tu vas l’acheter ? Bon tu pourrais être plus loquace et moins dans le retrait, fais un petit effort pour cacher tout ça.

capucine est l'une de tes meilleures amies, l'une des plus anciennes aussi. elle est loin d'être comme toi, bien au contraire. plutôt distance et qui ne laisse rien transparaitre, ton exact opposé, toi qui peut passer dix minutes à pleurer pour un truc que tu trouves mignon. mais depuis toutes ces années, tu as aussi appris à repérer les signes qui montrent qu'elle n'ait pas dans sa meilleure forme. s'il y a une chose qui vous réunit, c'est vos problèmes de santé. tu sais par quoi elle passe et inversement, bien que vos histoires ne soient pas similaires. assise à côté de ton amie dont tu sens le stress l'envahir, parce que t'es pire qu'une éponge, t'essayes de faire diversion en lui montrant une robe. — je pense que je peux craquer ouais. tu soupires, toutes tes tentatives d'occupation ayant jusque là échouer, tu décide de mettre les pieds dans le plat. téléphone que t'enfouies dans ta poche et bras que tu croises autour de ta poitrine en te tournant vers elle. — bon parle ! dis quelque chose ! que tu flippes, que tu t'en fou, que t'es stressée, j'en sais rien, mais reste pas comme ça capu ! ton légèrement sévère, c'est rare que tu t'adresses de la sorte à tes amis, sauf en cas de force majeur.

Tête que tu secoues mollement, tu acquiesces à sa réponse en silence. Cool que tu penses, mais en réalité tu t’en moques à cette instant, songeant plus à ce qui va suivre. Et ça Ana ne le sait que trop bien. Elle est juste la personne idéale pour ce genre de rendez-vous, seule à savoir ce que vous vous trouvez ici, à attendre l’heure du rendez-vous médical. C’est pénible d’attendre, la patience mise rudement à mal et ça tu ne sais que trop mal le cacher. ❝ Je stresse. Je dis pas que j’ai peur, car ça voudrait forcément dire que j’attends une mauvaise nouvelle. Or c’est tout ce que tu veux éviter, t’espères sortir de là avec zéro inquiétude et que de bonnes nouvelles. Pourtant, il y a cette petite voix en toi qui tourne en boucle, une idée assez négative. Jouant avec tes ongles manucurés, tu garde toute fois cette difficulté à pouvoir ressortir tout ce que tu ressens. Nom qui raisonne dans le salle, vous vous levez pour rejoindre le médecin qui vous donnera des nouvelles pas plus réjouissantes. ❝ J’ai envie d’un verre là, même plusieurs. Mauvais idée après une annonce pareille, mais t’as besoin d’évacuer et c’est ça ou les drogues…

n'y a-t-il pas meilleur conseiller que quelqu'un qui sait exactement ce par quoi vous passez? même si tu détestes les hôpitaux et que la vue du sang te fait tourner de l'oeil, pour rien au monde tu n'aurais laissé capucine se rendre seule à un rendez-vous aussi important. d'autant plus qu'il est rare qu'elle montre ses faiblesses. la reine beauregard, nesbitt maintenant, tu la connaissais sous son meilleur jour, mais aussi ses pires. tu soupires à sa réponse. selon toi, le stress engendre forcément une forme de peur, mais tu ne réagis pas, préférant la laisser se convaincre de ce qui pouvait la rassurer. — t'as raison, le positif attire le positif paraît-il. son nom résonne dans la salle et tu accompagnes ton amie. rendez-vous pas plus positif que ça. t'es intérieurement pas très bien pour elle mais tu sais aussi que les médecins d'ici sont de très bons professionnels. t'en connais un rayon, vu le temps que tu peux passer entre ces murs aseptisés. — ok ouais.. si tu veux répondais-tu pas vraiment convaincue que ce soit la meilleure solution, mais t'allais pas l'en dissuader. — on va chez moi, on sera au moins tranquille et elle pourra se défouler comme elle le souhaite et tu ne lui laisses pas le choix de toute façon. t'attrapes son bras en le croisant avec le tien. pas tactile la française, mais peu t'importe, tu vas la trainer comme bon te semble jusqu'à devant une bouteille de ce qui lui fera plaisir. — j'ai pas bu depuis... une éternité, mais j'crois que ça va pas me faire de mal non plus! à toi non, à tes reins, c'est une autre histoire. mais ça tu y penseras après coup, quand t'auras mal ou que tu te feras engueuler parce que toi aussi, tes résultats ne seront pas top. t'as envie de vivre, de partager, de prendre du plaisir et le plaisir ne se trouve pas forcément dans les meilleures choses.

Boule au ventre, gorge nouée qui vient te torturer, tu veux oublier cette annonce non pas catastrophique mais que tu sens devenir particulièrement compliquée au fil des semaines qui vont défiler. Le verdict n’est pas encore tombé, mais il ne saura trop tarder. Désormais tu le sais. Adieu l’esprit optimiste et la seule merveilleuse idée pour digérer cette information s’est d’aller boire. Boire pour oublier. Enfin, tu doutes avoir le courage d’aller jusqu’au bout, jusqu’à une ivresse que tu n’as pas connu depuis tant de mois. Toi t’avais en tête d’aller dans un bar, d’être au comptoir et de lever le petit doigt pour que le serveur vienne te servir. ❝ Je pensais plus à … Ok, pas le temps d’aller au bout de ta phrase. La brune s’empare de ton bras et t’embarque avec elle vers ce que tu supposes le chemin qui va mener directement chez elle. Tant que tu peux boire, tu t’en moques. T’aurais bien voulu un petit joint au passage… C’est trop demandé ? Au pire t’en demanderas à Aidan, il pensera que c’est pour vous détendre et il ne dira pas non. ❝ On est deux, on se flingue ensemble. Enfin façon de parler… T’as ce qu’il faut chez toi ? Ou je vais directement acheter une bouteille de Tequilla ? Attaquer le mal par le mal, super idée Nesbitt.

soigner le mal par le mal. c'était la tanjeante que voulais prendre ton amie et tu ne comptais pas la contredire. tu ne sais que trop bien que vos problèmes de santé peuvent être inquiétants, prenants et mettre un coup au moral. alors, si elle voulait boire, tu ne l'empêcherais pas. du moins, pas aujourd'hui. tu attrapais son bras en le bloquant dans le tien afin de la traîner en dehors de cet endroit aseptisé. direction ton appartement, lieu où tu savais qu'elle pourrait déverser ce qu'elle ressent sans crainte, bien que t'avais compris que ce n'était pas la première chose à laquelle elle pensait. peu importe, tant qu'elle a de quoi boire non ? — on s'amuse, on s'flingue pas! t'essayes de relativiser et de dédramatiser vos situations, histoire de. — bien sûr que j'ai de quoi faire ! t'as un bar qui n'attends que d'être ouvert. y'a encore quelques mois, tu n'avais aucun mal à mettre le nez dedans mais depuis tes problèmes avec la codéine et de fait, ton rein, tu avais levé le pied sur l'alcool que t'ingérais. — j'ai des bouteilles qui pleurent de solitude et qui seront contentes de voir deux bombes comme nous! vins divers, tequila, vodka, tout ce qui pourrait faire le bonheur de capucine. trajet rapidement effectué, tu accueilles ta meilleure amie chez toi. — t'as faim ? tu sais la réponse, mais politesse oblige. — c'est là dis-tu le doigt pointé vers le bar pour qu'elle se serve. deux verres que tu sors, dépose sur la table basse. tu t'installes sur le tapis, adossée contre le canapé.