@Rainier de Danemark || TW : Effondrement ; PTSD || J’ai beau ne pas avoir été directement touché par les événements du TD Garden, j’en reste profondément marqué. Ce qu’il s’est passé fait écho à un passé que je pensais enterré depuis longtemps, ravive des souvenirs que je pensais disparu. Mais ils sont là, suffisamment enfouis pour ne pas y penser au quotidien, mais pas assez pour qu’un traumatisme ne les fassent pas remonter. Dans mon esprit, tournent les mêmes questions que depuis sept ans, à base de ‘et si’ ou de ‘ça aurait pu être moi’. Le contexte n’est certes plus le même, mais le sentiment de culpabilité qui en résulte lui si. J’ai donc besoin de me vider la tête, de penser à autre chose. Ce que Novel et Anaé m’ont aidé à faire dans un premier temps, avant que le quotidien ne me rattrape, obligeant ma présence en cours, commençant à avoir des nouvelles de mes proches et amis présents au concert. Mais le monde continue de tourner, avec ou sans nous, et c’est une leçon de la vie elle-même que je ne pouvais plus oublier. Le monde tourne donc, ne se préoccupant pas de mes angoisses, ne se préoccupant pas que je puisse être à fleur de peau. Les gens sortent à nouveau, retournent à leur quotidien, et pourtant, le mal-être est toujours là.

Dans l’optique de le pousser à disparaître un peu, j’avais moi-même accepté l’invitation de Rainier à sortir boire un verre. C’est pas tellement une habitude pour nous deux, mais ça ne pourrait pas nous faire de mal de passer une soirée dans un bar, à discuter, encore moins avec tous les évènements qui arrivent dans la vie de mon prince et ami. Nul doute que le pays n’allait pas tarder à être secoué. La voiture garée un peu plus loin en ville, je décide de faire le reste du trajet à pied, prévenant Rainier de mon arrivée imminente. D’après ses messages à lui, il était déjà arrivé, alors lorsque je me rapproche du bar, je me fais tout de suite plus observateur, cherche la silhouette du prince parmi les autres et l’identifie avec une aisance déconcertante. L’habitude. Je me rapproche de lui, pose une main sur son épaule pour le saluer alors que je commence à prendre place sur le tabouret à côté de lui. Je regarde le verre qu’il tient dans la main, m’interroge sur son contenu qui semble particulièrement sucré et inoffensif. « On est venu pour boire de la limonade ? Si j’avais su, j’aurais amené Anaé. » Le ton est un petit peu moqueur, mais en rien méchant. J’étais juste un peu surpris par ce choix, même si c’était sûrement le plus raisonnable. « Je plaisante. Je ne la laisserais jamais mettre les pieds dans un bar. Jamais ! » J’en fais un peu trop mais comme tous les pères, je finirais par redouter le jour où ma fille grandirait et où elle se ficherait bien de mes interdictions si la loi l’en libérait. « Comment te sens-tu ? » Que je demande, parce que même s’il n’avait pas été grave touché par l’incident du TD Garden je n’oubliais pas qu’il y avait été.

@Rainier de Danemark || TW : Effondrement ; PTSD || Malgré ce que peut laisser entendre ma blague, je ne suis pas vraiment surpris de voir Rainier avec une boisson soft. Pour avoir été à son service  ou celui de sa famille depuis suffisamment longtemps, je savais très bien que le jeune prince ne pouvait pas boire. C’était ce qui le distinguait - entre autres - du reste de la royauté mondiale. Là où les héritiers et héritières du monde étaient régulièrement cités pour avoir fait quelques excès, Rainier lui, restait humble et raisonnable. Pas forcément par choix, souvent par la force des choses, mais ça le faisait malgré tout sortir du lot. Un lot duquel il n’est pas toujours simple d’être exclu, encore moins quand on ne l’a pas choisi, et pourtant, Rainier il a trouvé sa place. En tout cas, c’est l’impression qu’il me donnait le reste temps, quand je le croisais pendant les soirées ou activités étudiantes. Sans se mettre en danger, il savait être là, présent, et il le faisait. Alors non, le diabolo, ce n’est pas un problème, et quelque part, même, c’est presque tentant. Et sûrement l’option la plus raisonnable également pour moi. « La même chose. » Que j’annonce finalement au barman en prenant place sur un tabouret à côté du prince. « Je lui dirais que si elle veut sortir, c’est avec deux gardes du corps. Et quand elle s’en plaindra, je dirais que Tonton Rainier aussi en avait, et qu’il adorait ça ! Tu approuveras, et du coup tout ira bien. » Je sais pertinemment que ce n’est pas vrai, que la vie avec des gardes du corps est loin d’être si enviable. J’étais de l’autre côté de cette barrière depuis longtemps, très longtemps pour savoir qu’on peut être entouré et se sentir très seul. Et puis je savais aussi que ma fille - qu’importe si elle avait hérité de mon caractère ou de celui de sa mère - ne se laisserait pas faire et trouverait sûrement une parade pour échapper à la pire des surveillances. Comme je l’avais fait. Comme Johan l’avait fait, et comme Rainier le faisait également.  

Les bras croisés sur le bar, j’écoute attentivement Rainier lorsque je remarque qu’il grimace. Je ne suis pas surpris par sa réponse, connaissant l’ampleur de ce genre de traumatisme. Ce qui me surprend par contre, c’est qu’il se laisse tromper par les apparences, par celles et ceux qui laissent penser que tout va bien, quand le monde sous leurs pieds est sur le point de céder. « Tu devrais pourtant savoir que ce n’est qu’un masque. Ils donnent l’impression que tout va bien, mais l’édifice est aussi fragile que des domino. Il suffirait de le bousculer un peu pour que tout s’effondre. » Ca ne tient à rien, à un fil, avant que tout ne bascule. « J’ai été à leur place Rainier, et je sais très bien qu’on oublie pas si facilement. Encore moins dans ce genre de circonstances, encore moins quand on a conscience que la mort nous a effleuré. Mais le monde ne s’arrête pas de tourner pour autant. Alors on essaye de trouver une raison, on tente de rester debout pour protéger les autres, on fait croire qu’on est solide, mais je serais pas étonné de croiser tous ces gens dans la salle d’attente de mon psy. » Car peu sont ceux qui sauront s’en remettre d’eux-même. « T’as déjà fait face au deuil, tu sais qu’on réagit pas tous de la même façon face à ça, même si on aime. Là, c’est pareil. » Le deuil, le traumatisme, pour beaucoup, présents. « T’as le droit de prendre du temps pour t’en remettre, même si t’es en un seul morceau. Et prends le. Parce que c’est important. J’ai négligé ce genre de choses par le passé, et maintenant… Je regrette un peu, parce que j’ai encore beaucoup à faire face. » Moi qui pendant si longtemps refusait de parler de mes sentiments, de suivre une thérapie, aujourd’hui, je prenais conscience de mes erreurs.

@Rainier de Danemark || TW : Effondrement ; PTSD || Il va vite d’imaginer ce que le monde sera quand on a des enfants, bien que tout cela reste hypothétique. Ma fille me ressemblera t-elle en grandissant, ou bien ressemblera t-elle à sa mère ? Ou un autre membre de la famille ? Pourrait-elle ressembler à Navier ? Salomé ? Ou bien à aucune de ces personnes ? Les questions sont multiples, infinies, et pourtant, elles sont là, et elles le seront pour toujours. Car il est apparemment normal qu’un parent s’inquiète pour son enfant, et il est courant que cela dure toute la vie. Je ne semble pas pouvoir faire exception à la règle, et je sais que dans ces nombreuses blagues dans lesquelles je prétends que je ne laisserais jamais ma fille sortir seule, aucune ou presque ne verra le jour. Parce que je ne doute pas que certaines personnes seront là pour me raisonner, me contredire, ou m’apprendre à faire confiance à l’adolescente rebelle qu’elle pourrait devenir. Le plus tard possible, je l’espère. « Moi, jeune ? Je pense que tu fais erreur sur la personne. » Bien sûr que je l’avais été, physiquement parlant, mais l’avais-je vraiment été dans ma tête ? Enfance volée et mensongère provoquée par la folie d’une femme, adolescence turburlante d’un garçon mal dans sa peau et avec si peu de repères, il est certain que j’avais fait des conneries, défié l’autorité, mais la crise d’adolescence en était-elle vraiment la cause, ou bien n’était-ce que les conséquences de nombreux problèmes psychologiques que je n’avais pas réussi à résoudre plus tôt ? Difficile de conclure sur le sujet, bien qu’il y ait une chose dont j’étais certain : je ne veux pas de cette vie pour Anaé. « En réalité, je lui souhaite d’avoir une enfance et une adolescence plus paisible que la mienne. Ca va piquer par moment, mais comme tu dis, il faut bien que la jeunesse se fasse. » Et que je le veuille ou non, elle se fera, alors autant simplement faire en sorte que ça aille pour elle, quoiqu’elle décide de faire. Tout comme on fait en sorte que les choses aillent pour nous aussi.

Alors que je prends une gorgée de ma boisson, j’écoute Rainier évoquer les récents évènements qui ont secoué la ville. Par chance, ni moi ni Novel étions à l’évènement, et pourtant, nous aussi étions désormais marqués par ce drame. A un autre niveau, d’une autre façon, mais pourtant bien réelle également. Mais face à la douleur et la peine, tout le monde ne gérait pas de la même façon. « Je ne remets pas en cause ton avis, ni ton ressenti. Tout le monde gère à sa façon. Mais certaines personnes sont juste incapables de mettre des mots sur ce qu’ils ressentent avant des années. » Je fais moi-même partie de ceux-là, de ceux qui ont besoin de temps pour faire face à leurs sentiments avant de poser des mots dessus. Je suis de ceux qui s’enferment dans le mutisme, dans la colère et qui finissent par exploser quand les choses deviennent trop lourdes à porter. « Laisse leur un peu de temps, et quand ils seront prêts, ils s’ouvriront à toi. En attendant, si tu as besoin, je suis là pour toi. Je ne suis peut-être pas le mieux placé puisque je n’ai pas connu ce que tu as vécu. Mais ça ne me dérange pas de t’écouter. » Si je suis loin d’être bavard, ça ne me dérange cependant pas d’écouter. Si plus jeune, j’avais eu quelqu’un de confiance à qui me confier, peut-être que tout serait différent désormais. Peut-être que j’aurais eu moins de difficultés à me remettre de tout ce que j’avais traversé.« Alors vas-y, lâche-toi si tu veux ce soir. Y a pas de couvre-feu, et t’es loin de me saouler. D’ailleurs ça fait du bien aussi d’écouter autre chose que des gazouillis. »  Je ris légèrement mais ça faisait du bien aussi, d’avoir des conversations d’adultes et de ne plus avoir à imiter je ne sais quel animal pour les prochaines heures.

@Rainier de Danemark || TW : Effondrement ; PTSD || J’ai beau avoir grandi proche du décor princier je n’imagine que partiellement la pression que peut représenter ce statut pour un enfant. J’en ais eu des aperçus avec Johan et Rainier, qui pourtant n’étaient pas promis au trône. Mais futur roi ou non, la pression était telle qu’ils n’avaient jamais non plus grandi comme les autres enfants. Malgré tout, l’espoir était permis pour Rainier et moi, d’offrir à nos enfants - et ceux à venir - une enfance plus chaleureuse, moins oppressante que celle que nous avions connu. Et je ne doutais pas que nous réussirions. Bon, pour moi, si, je doutais, mais pour lui aucunement. Il était le mieux placé pour savoir que le protocole était dépassé, oppressant et injuste, et nul doute qu’une fois roi - ou même papa - il se chargerait de faire évoluer tout cela. Parce qu’il était visionnaire Rainier, bien plus que moi qui n’avait aucune idée de comment changer les choses. Pourtant, j’étais prêt à le suivre, à lui faire confiance, et quand bien même son père n’était pas du même avis, Rainier saurait fédérer les gens. « On fera en sorte que ce soit le cas. » Je lui adresse un fin sourire sincère, moi-même convaincu de mes mots. Seul, je n’aurais jamais autant cru en moi, mais je sais que je pouvais compter sur des personnes de confiance pour m’aider, et Rainier en faisait parti.

Lorsqu’il évoque alors ce qui le taraude depuis plusieurs jours, je n’essaye pas de changer de sujet, l’écoute attentivement. Je remercie l’univers d’avoir eut bébé ce soir-là et de n’avoir même pas essayé de me rendre au concert, car qui sait dans quel état je serais aujourd’hui si ça avait été le cas. Personne en ville n’a été épargné, que ce soit directement ou pas le biais d’un proche, et je n’osais imaginé tout ce ceux présent avait ressenti. Pourtant, qu’importe le poids du traumatisme, je savais aussi très bien combien il pouvait être difficile d’en parler, surtout après une si courte période. J’étais l’exemple même de ceux qui ne parlaient pas, de ceux  qui gardaient pour eux leurs souffrances et leurs craintes. J’étais de ceux qui préféraient éviter le sujet, intérioriser, et par conséquent j’étais de ceux qui frustreraient le prince. Mais qui pouvait lui en vouloir, d’avoir sa propre façon de faire face aux épreuves de la vie. « Parce que tu penses que moi, je suis moins impulsif ? » Je me retiens de rire mais affiche néanmoins un jour amusé. Pour ce qui était question d’impulsivité, j’en connaissais un rayon. « Soit juste patient Rainier. Et ça viendra. » Je sais combien s’était difficile, mais seul le temps pouvait aider à avancer dans ces moments là. Le visage tourné vers Rainier, j’arque un sourcil, curieux, quand il mentionne une petite victoire personnelle. Sa façon d’annoncer la chose m’amuse, ce qui n’enlevait rien à sa volonté pour autant. « C’est un bon début. Certains ne trouvent jamais la motivation ne serait-ce que d’essayer. Quelques semaines, c’est toujours mieux que rien. » Je le regarde, ne sachant pas vraiment comment le soutenir dans cette voie sans avoir l’impression d’en faire trop. Après tout, je n’avais jamais eu aucune addiction de la sorte, et n’avait donc aucune idée des efforts ou de la maitrise de soi que pouvait demander l’arrêt du tabac. « Et t’as de la chance en plus, c’est pas moi qui t’entrainerais dans cette voie. » Car ce n’était pas moi qui lui proposerait une cigarette. Jamais.

@Rainier de Danemark || TW : Tabagisme, bagarre, agression|| Je ne sais pas bien quoi répondre à Rainier. Est ce que je m’étais assagi ? Oui, sûrement que oui. Les conséquences des années, mais pas que. Des relations m’avaient aidé à grandir, et je ne parlerais même pas de la paternité. Difficile de continuer d’agir comme un adolescent rebelle quand on était responsable d’une autre vie que la sienne. Même s’il était parfois tentant de continuer à faire comme si rien n’avait changé, je n’arrivais pas à ignorer tout ce que l’arrivée d’Anaé dans ma vie avait provoqué comme changement. Elle était derrière chacune de mes décisions ou presque, parce que je devais penser à elle, à comment elle serait impactée par mes choix. Alors oui, Rainier avait sûrement raison. J’avais dû grandement m’assagir depuis un an. Même si certaines choses ne changeaient pas, comme cette petite grimace que je lui adresse en réponse à son sourire malicieux. Prince ou pas, je n’allais pas me gêner. ” Il est certain que j’ai été plus impulsif que je ne le suis aujourd’hui. Mais tu comprendras quand bébé sera là. Et que tu auras mon âge. “ Ce de quoi il n’est plus très loin. Deux ans à peine, qui passeraient plus rapidement qu’il ne peut l’imaginer. Tout comme je ne pouvais l’imaginer.

Sans jugement, je célèbre avec lui cette victoire qui est la sienne. A mon sens, il n’y a pas de petite victoire, encore moins face aux mauvaises habitudes. Il trouve en lui la force et la volonté d’essayer, un déclic que d’autres ne trouveront jamais, et on ne peut que l’encourager pour cela. J’incline mon verre légèrement dans sa direction comme pour porter un toast silencieux à son égard avant de soulever un point important à mon sens. ” Et tu t’inquiètes de ne pas être à la hauteur hein ? “ Je ne suis pas inconnu à ce sentiment, mais quand j’écoute Rainier, je sais déjà qu’il fera tout ce qui est en son pouvoir pour être un bon père. Ca ne fera pas de lui le père parfait, mais au moins, il essayerait. ” Ton enfant n’est même pas encore né que tu te préoccupes déjà de sa santé. On a déjà vu moins concerné. “ Le simple fait qu’il soit prêt à abandonner ce plaisir pour la santé de son enfant, plus que pour la sienne en disait long sur lui. Très long. ” Et puis c’est sympa, pense à ces après-midi qu’on pourra passer ensemble et à discuter autour d’un café pendant que les enfants font la sieste. “ Clairement, j’étais pas contre passer du temps avec un autre parent, sans avoir à forcer les choses pour m’en faire un ami comme ça pouvait être un peu le cas à la crèche.

Alors que je repose mon verre désormais vite sur le bois du comptoir, je regarde Rainier et hoche la tête.  Les tabourets n’étaient pas des plus confortables, et refaire circuler un peu de sang dans mes jambes ne pourrait pas me faire de mal. Mais alors que je glisse de mon siège, des éclats de voix se font entendre, quelques corps sont bousculés. Je fronce le regard face à cette situation qui commence à s’annoncer tendue, ce qui ne manque pas d’échapper à certaines personnes. ” Qu’est ce t’as toi ? C’est quoi ton problème ? - Aucun, on ne reste pas. “ Que je réponds sans pourtant réussir à me détendre. D’un mouvement de tête, j’encourage Rainier à me suivre rapidement, préférant éviter les ennuis, mais pas le temps pour nous d’arriver jusqu’à la porte que certaines tables commencent à être renversée, et nos corps bousculés. Merde ! que je jure au fond de moi, bousculant quelqu’un dont la main s’était un peu trop approchée de Rainier à mon goût. ” Viens, on sort vite “ Maladroitement, j’étais de pousser le prince vers la sortie tout en gardant un oeil sur le reste de la salle qui avait commencé à virer à la bagarre générale.