L'histoire commence de façon banale, presque trop ordinaire que pour valoir la peine d'être racontée. Mais la voici quand même. La petite Gaïa, de son prénom de baptème Anaé, nait dans une famille unie, du moins en apparence. Sa mère quitte son emploi à sa naissance, préférant se consacrer autant que possible à l'éducation de sa fille, seul enfant que le couple réussira à avoir. Son père, paysagiste réputé, lui donne le goût à la nature même si il ne se doutait sûrement pas que sa fille finirait par fumer de l'herbe, c'est bien toute l'ironie de la situation. La petite Anaé, puisque c'est là encore son prénom, est une petite fille curieuse, qui adore mettre les mains dans la peinture et repeindre toute la jolie maison de banlieue de ses parents. Certains diront que l'esprit rebelle était déjà en elle, d'autres que c'était simplement un talent enfantin qui s'exprime.
Anaé a 13 ans quand elle choisit de se faire appeler Gaïa. Son père décède brutalement au cours du mois de juillet dans un ouragan, sur un chantier qu'il avait en charge, bien loin de leur maison à Portland. Sa mère tombe alors en grave dépression, perdant rapidement la garde de son enfant pour gagner l'hôpital quelques temps. C'est donc à ses grand-parents maternelles que la toute jeune adolescente est confiée. Si on pourrait penser qu'un tel traumatisme a dû grandement influencer la vie de Gaïa, ce n'est pas vraiment le cas. Bien sûr, elle a beaucoup pleuré de ne plus jamais pouvoir voir son père et de se retrouver séparer de sa mère. Mais finalement, la liberté offerte par cette nouvelle vie et surtout le laxisme de ses grand-parents lui convenaient plutôt bien. A 14 ans, elle commence à fumer des joints, d'abord pour s'amuser, puis par habitude, comme d'autres fument des cigarettes. C'est aussi à cet âge là qu'elle décide d'arrêter la viande et la plupart des substances animales, par conviction mais aussi par dégoût de ce genre d'aliments. Ne sachant pas gérer son végétalisme parfois abusif comme tout ce qui fait l'adolescence, elle traverse de nombreux problèmes de poids, toujours trop maigres, pleine de carences, mais avec l'aide de ses grand-parents, elle finit par trouver un équilibre de vie correcte. Ses résultats scolaires s'améliorent grandement. Si l'adolescente est discrète et maigrelette, elle n'en est pas moins intelligente. Son dossier est excellent et c'est un avis favorable qu'on lui donne pour les grandes universités, les doyens appréciant son allure discrète et son talent pour le dessin qui fera d'elle une parfaite candidate aux cours d'arts.
Mais à Harvard, c'est une autre vie qui commence pour elle. Livrée pour la première fois entièrement à elle-même, sans personne pour la brider, elle peut enfin laisser s'exprimer son talent pour le dessin et très vite, s'intéresse à l'art du tatouage. Il ne lui faut que quelques semaines pour franchir le pas de son premier tatouage, couvrant tout son bras gauche. Le second, sur la cuisse, est réalisé en mémoire de son grand-père, décédé au cours de sa première année à l'université. Sa mère peu à peu remise de sa grave dépression la soutient dans son choix de faire carrière dans le domaine de l'art tout comme elle insiste pour qu'elle ne commette pas l'erreur de s'arrêter avant d'obtenir son diplôme de fin d'études. Une chance que les fonds importants de la famille et l'argent de l'assurance vie de son père lui permettent de rester à l'université sans soucis financier même si elle ne peut se payer un grand appartement. Toujours dans son coin, Gaïa choisit ses amis avec soin, ne s'entourant que de gens qu'elle apprécie vraiment. L'hypocrisie, les faux-semblants, très peu pour elle et c'est sûrement pour cela qu'elle est si peu populaire. Mais vous savez ce qu'on dit, mieux vaut se méfier de l'eau qui dort, elle peut rapidement se réveiller et laisser derrière elle un champ de ruine.