Punta Cana… En regardant par la fenêtre de sa chambre, elle n’en revient pas. Elle, la fille perdue, celle de la forêt, qui explore le monde une nouvelle fois. C’est comme si elle vivait, un rêve éveillé. C’est dingue comme elle craint d’ouvrir les yeux et de se retrouver à nouveau au cœur des montagnes enneigées. Emprisonnée. Cette pensée, elle se dépêche de la gommer, car elle est là, et qu’elle a une folle envie de profiter de cet endroit avec toi.

Forte de ce désir ce sont quelques messages qu’elle lui envoie, trahissant, sans s’en soucier vraiment, son net besoin de le retrouver. Parce que même s’ils ne partagent pas la même chambre, faute de leur relation qui manque – selon elle – cruellement d’exclusivité, il n’en reste pas moins, qu’elle éprouve une indéniable hâte d’être à ses côtés. Bien sûr durant le séjour, elle envisage de passer du temps avec ses amis, mais rien n’est comparable avec les moments qu’elle passe avec lui. Ils sont encore très présents les souvenirs de leurs anciens SB, Azulik, son havre de paix. Alors oui, c’est Sheng qu’elle veut pour cette première soirée. Que toutes les nuits, elle aimerait.

A peine le rendez-vous lancé, qu’elle ressent déjà l’adrénaline se distiller dans ses veines, l’ocytocine qui vibre au rythme de ses mouvements. Elle quitte sa chambre avec rapidité, si bien qu’elle ne songe pas à mettre de chaussures à ses pieds, mais elle n’en a que faire, en un sens, malgré ses réminiscences de prison, elle renoue un tantinet avec celle qu’elle a été. Celle qu’incontestablement, elle est. Changée, évoluée peut-être, mais jamais tout à fait. Elle traverse l’hôtel, ne croise que deux ou trois badauds empruntant le chemin inverse, à cause de l’heure avancée, et lorsqu’elle arrive au lieu-dit, ses lèvres s’étirent à la vue de sa silhouette, là à quelques mètres, « Laissez-moi deviner… Vous attendez une de vos conquêtes ? Une brune un peu sauvage peut-être ? »  

D’une main, elle rabat sur le même côté l’intégralité de ses boucles brunes, un tantinet collantes à sa nuque, faute de la chaleur nocturne. Quand il s’approche, les traits indubitablement malicieux, elle en éprouve une accélération des battements de son cœur, elle accuse même un frisson, alors qu’aucune brise ne pourrait le justifier, pas une once de vent ne vient altérer les ondulations de sa robe, tout ce qu’elle éprouve vient de lui, comme si elle pouvait encore en douter jusqu’ici. Et quand il l’observe dans son entièreté, elle se fond dans un sourire gêné à remarquer qu’il tique sur le fait que même une paire de tongs n’a su trouver grâce aux yeux de la sauvageonne agitée en cette soirée. « Vous l’avez croisée alors…» Elle expire un soupir qui s’approche sommairement du rire. Si bien que la tête baissée, de sa langue elle va humidifier ses lèvres, palliant l’aigreur artificielle que provoque les mots de l’étudiant.

Puis elle mord son inférieur lorsqu’il reprend, « J’crois qu’elle s’est défilée. » elle opine, comme si elle avait une véritable compréhension des faits, approuvant la fuite de la brune susnommée, « Elle ne devait pas savoir nager. » si bien qu’elle réduit encore la distance, s’approche de quelques pas… « Une chance pour moi dans ce cas. » Tous ses aprioris, elle les passe sous silence, ici et maintenant, plus rien d’autre n’a d’importance. Le temps s’est arrêté, et quelque part, en son intérieur, elle sait, qu’il n’y a qu’eux qui peuvent compter. De fait, elle poursuit dans ce rôle qu’elle leur a inventé, pour revêtir les habits d’une autre, « Elle m'a parlé de règles que vous comptiez violer... » d’une femme qui ne serait pas effarouchée à l’idée d’outrepasser les lois imposées.

D’un regard qu’il lance en direction de la piscine, il confirme sans mot dit la teneur des règles qu’il désire violer, « Quelques-unes c’est vrai, » le bassin désigné donc, elle lui rend le sourire qu’il vient de lui offrir. Pour lui, elle sait, qu’elle est capable de se surpasser, d’abattre les murs de sa forteresse, de vivre en essayant d’omettre ses lacunes ainsi que ses faiblesses. « Mais pour certaines, il faut être deux, » étonnamment elle ne les voit plus comme des interdits, mais plutôt comme des futurs jeux. Cela dit, parce qu’elle reste égale à elle-même, à la Haiwee si obéissante, si respectueuse des prohibitions, elle ne peut se retenir de balayer les alentours de sa vision, à l’affut de la moindre apparition.

Mais à la faveur de ces prochains gestes, elle oublie le reste. Retenant sa respiration quand il la contourne, quand il brûle sa peau d’un regard inquisiteur, qu’elle éprouve son souffle dans sa nuque, quelques secondes suffisent à l’embraser, c’est lui, la plus grande défaillance de la Haiwee. Alors elle déglutit, cherche à se contrôler, à l’écoute des mots qu’il s’aventure à susurrer, « Vous m’la rappelez, » ses lèvres s’arquent avec impétuosité, véloce pour récupérer son regard du sien, cependant c’est en vain puisque l’étudiant attrape sa main.

Elle se laisse entraîner, le sourire toujours aux lèvres quand il s’abaisse pour s’immerger dans l’eau encore habillé, ça lui arrache un rire de surprise, pour le coup, à l’encontre du thème de la soirée, indiscret. Elle n’a pourtant pas les mains pleines de pouces, n’est pas maladroite pour un sou mais comme leurs paumes restent liées, elle perd son équilibre, juste un tantinet. Puis s’il semble attendre qu’elle plonge elle aussi, elle se fait faussement rebelle, se contente de s’assoir, l’eau mordant les bords de sa robe au niveau de ses mollets.

L’effet est déjà vu, songe d’une nuit d’été, durant lequel ils s’apprivoisaient, à peine ils se connaissaient, mais aujourd’hui, c’est différent, l’attirance qu’elle ressent à son égard, elle ne la subit pas, bien au contraire, elle assume qu’il soit son choix. Alors de ses jambes, elle se risque à chercher la proximité, forte de la distance minime qui les sépare et va naturellement le ceinturer au niveau de son dos. « Vous pourrez probablement passer du temps avec elle durant le séjour, » hausse les épaules, elle soupèse ce qu’elle peut présumer, « si elle n’est pas trop occupée… » une supposition erronée, c’est un maximum d'instants qu’elle désire à ses côtés.

Après les mots de l’amérindienne, le corps emprisonné de l’étudiant est victime d’une légère oscillation, un effet qu’elle souhaitait produire et qui lui donne instinctivement l’envie de sourire. D’ailleurs, elle se laisse charmer par celui qu’il lui offre, elle y voit presque, une certaine affection, bordée de tendresse. « Vous insinuez… » il reprend, et elle, à ses lèvres, elle se suspend. Elle ne remarque pas, qu’il en profite pour planter ses bras de chaque côté de sa silhouette. Avec douceur, dans l’attente de la suite de sa pensée, elle incline la tête. « Qu’elle serait capable de me faire passer au second plan… » Jamais, Haiwee n’arrive même pas à l’imaginer si bien que ça la mène à sourire de l’envisager, tant c’est une absurdité. Au second plan… Mais Sheng, tu le sais pourtant, que c’est elle qui t’attend. « Après le lapin de ce soir ? Pas très flatteur » Quand il est tout ce que désire son corps et son cœur.

Alors elle opine d’un mouvement positif du visage répétitif, arquant ses lèvres d’une manière désolée. « Elle serait stupide, c’est vrai. » Admettant avec cela que l’abandon de sa personne n’est pas dans ses projets. Car malgré les jugements qu’on a pu lui porter, elle est loin d’être stupide, la fille de la forêt.
Dans un premier temps, elle s’amuse à récolter de l’eau dans ses paumes, la dépose sur ses omoplates, et suit la course des gouttelettes de ses ongles. Elle frôle ses bras, elle éprouve les sillons de ses muscles qu’elle adore et aux creux desquels elle se sent indéniablement en sécurité. Puis remonte jusque son cou auquel elle décide spontanément de se cramponner. Elle improvise en se laissant glisser du dallage détrempé. Accrochée à lui, elle aspire à ce qu’il la maintienne, ce que naturellement, il fait, tandis qu’elle brave sa volonté de l’embrasser en approchant sa bouche de son oreille à la finalité, lui murmurer ; « Jamais. » tu ne seras le second, toujours le premier. Puis son regard, le retrouver, et un avertissement amusé lui ai donné. « Me faites pas couler. »

Mais elle a déjà coulé, elle a plongé dans cette histoire, dans cette relation qui était bien plus forte que tout ce que pouvait lui dicter sa raison. Et là, alors qu’elle se raccroche à son corps qu’elle se plaît à connaître et apprendre, elle ne doute pas qu’elle a fait le bon choix.

D’un mouvement adroit, il rectifie sa prise sur la Haiwee, qui d’ailleurs se mordille la lèvre lorsqu’il lui impose un soubresaut et raffermit sa prise en installant l’une de ses paumes en aval qui saurait à elle seule engendrer quelques frissons à la vue de la finalité de sa position. « Le problème, » il amorce et fait sourciller la brune qu’il tient dans ses bras, parce que des problèmes, elle n’en voit pas. Alors elle se suspend à ses mots, sans réaliser qu’elle retient sa respiration, peureuse qui attend la suite de son énonciation. « c’est que je fatigue déjà et … » Si elle craque un sourire, elle l’observe quand il décline son propre regard sur le côté, la brûle de ses prunelles, ou peut-être que cela vient simplement de leur proximité, de l’effet qu’il possède sur elle… « Elle ne me le pardonnerais jamais, » Elle en exulte un soupir, synonyme de compréhension, qui trahit un tantinet ses émotions.

Sa dextre glisse avec une lenteur mesurée de son cou, jouant de l’ongle de son pouce dans l’espoir de le marquer, pour se perdre en une caresse sur sa joue. Elle s’attarde une à deux secondes et puis son doigt va érafler sa bouche, avide de son touché, quand elle vient affirmer ; « Je crois … que vous la sous-estimez. » Car l’amérindienne peut en supporter beaucoup, elle lui a pardonné son aventure avec Wendy après tout. Ses sentiments pour lui, elle n’en a jamais douté, elle a toujours pensé que si l’étudiant ne le fait pas, elle, pour deux, elle l’aime assez. Et si elle a envie de lui dire qu’elle le désire comme elle ne l’a encore jamais fait, elle signe cette appétence en apposant sur ses lèvres qu’elle a tout juste griffé, un fiévreux baiser.