tw ✧ None

♪♫

    Assis sur une chaise longue à l’extérieur de la villa, William savourait tout doucement son café en regardant le soleil se lever sur la mer par cette St-Valentin qui deviendrait très certainement l’un de ses souvenir les plus précieux. Vêtu simplement d’un maillot de bain orné de perroquets multicolores, son âme se laissait bercer par les lents et incessants allez et venus de l’océan.

    Ce voyage arrivait véritablement comme une bénédiction au milieu d’un moment passablement turbulent de son existence, où ses convictions vacillaient dangereusement. Peu enclin au voyage, il se lassa guider par une Victoria qu’il espérait ravie de l’itinéraire qu’il avait construit. Après tout, tout ceci se voulait un peu son cadeau de Noël, ainsi qu’un rappel de la conversation téléphonique qui avait tout fait basculer sa vie sentimentale, au début de l’année dernière.

    Il avait donc réservé cette somptueuse et tranquille villa donnant directement sur une plage de sable blanc de Grenade, dans les Caraïbes, pour la semaine. L’endroit ne convenait absolument pas à son budget de fonctionnaire fédéral, mais ne représentait pas grand-chose face aux revenus que ses activités ‘extra-professionnelles’ généraient. Ils avaient passés les deux premiers jours à profiter de leur décor paradisiaque, à se prélasser au soleil, à tout doucement explorer la colorée ville de St-George et, surtout, à profiter l’un de l’autre à un rythme bien différent de ce à quoi leur quotidien effréné les avait habitués.

    Fidèle à sa promesse réalisée dans les premiers instants de leur vol, Will ne regardait son téléphone que pour émettre de brèves réponses à certains textos qu’il recevait. Aucune nouvelle du monde extérieur, aucun contact avec le travail sous quelque forme que ce soit, rien que le moment présent. Il réussissait d’ailleurs si bien que, hier matin, Victoria lui avait apporté un exemplaire du journal local, pour le récompenser avec humour.

    Hier, ils avaient été invités à souper sur le ‘modeste’ yacht d’un ‘ami’ de William. Hank, le quarantenaire en question constituait plutôt un futur partenaire d’affaire de Will, mais il n’avait pas jugé pertinent de le mentionné à sa dulcinée. Surtout considérant la nature des affaires dont il était question… Le repas avait été préparé avec soin par le chef privé du millionnaire et ils s’étaient séparés de Hank et de sa toute aussi jeune que sensuelle fiancée de vingt ans aux petits heures du matin, après que les deux hommes aient partagés un court moment loin des regards pour signer d’une poignée de main les termes de leur entente.

    Aujourd’hui, ils devaient éventuellement aller prendre possession d’un catamaran de douze mètres. Le plan était d’aller dormir à la belle étoile, ancré dans la baie du dragon, et de revenir avant le lever du soleil le lendemain.

    Il entendit la porte-patio coulisser et il se retourna doucement vers celle avec laquelle il partageait ces doux moments.

« Bon matin, chérie. »

tw ✧ None

♪♫

La main étendue sur sa droite, Vic cherchait naïvement la présence de son petit-ami dans le lit tout en sachant que la probabilité qu’il s’y trouve encore était faible, pour ne pas dire inexistante. Cet homme ignorait ce qu’était le repos, malgré l’heure tardive - ou plutôt matinale - à laquelle ils étaient rentrés. Elle levait légèrement la tête et lorsque son regard ne trouva pas Will dans la chambre, Vic écrasa celle-ci à nouveau contre l’oreiller. L’oreiller le plus confortable sur lequel il ne lui avait jamais été donné de dormir. Si un paysage paradisiaque ne l’attendait pas à l’extérieur, la chirurgienne pourrait passer sa journée allongée là, à simplement profiter du confort mis à leur disposition.

Après une vingtaine de minutes à chercher soit le sommeil à nouveau, soit le courage de sortir du lit, Victoria parvenait à s’extirper des draps pour se rendre à la salle-de-bain. Afin de pouvoir enfiler son bikini au plus vite et profiter du soleil, elle passa rapidement à la douche. Habillée et les cheveux tressés, elle déambula pieds nus jusqu’à la terrasse, les yeux plissés face à l’attaque impitoyable du soleil. Ses lèvres s’étirèrent en un sourire lorsqu’elle posa les yeux sur William, une fois habituée à cette nouvelle luminosité. Bonjour. Dieu qu’elle pouvait le trouver sexy dans ses costumes, tiré à quatre épingles, mais rien n’égalait la vue qui s’offrait à elle depuis qu’ils étaient ici. Est-ce que tu as seulement dormi? Vic demanda en caressant la nuque de William du bout des doigts avant de prendre place sur le bord de la chaise longue sur laquelle il se trouvait. Il s’était allongé à ses côtés au retour de leur petite escapade mais cela l’inquiétait qu’il dorme si peu, de manière générale. Tôt ou tard, son coeur - et le reste de son corps - finirait par lui faire payer.

Je pense que j’ai passé l’âge de rentrer si tard… ou si tôt. Elle mentionna avec un sourire fatigué avant de s’allonger à moitié sur lui, la tête contre sa poitrine. Victoria avait beau être habituée aux horaires de nuit, elle rattrapait généralement ce sommeil en journée hors ils avaient profité d’une longue journée au soleil suivie d’une soirée/nuit avec des amis à William. C’est peut-être pour cela que Hank a choisi quelqu’un de si jeune. Shiri était toujours aussi fraîche au petit matin. Pourtant, Vic n’enviait en rien la jeune femme avec qui la conversation était plutôt limitée. C’était une personne pétillante, agréable et relativement gentille mais à mesure que la soirée avançait, la chirurgienne s’était retrouvée de plus en plus limitée dans les sujets à aborder avec la demoiselle afin de lui faire la conversation.

tw ✧ None

    « Comme un bébé, » répondit-il avec un demi-sourire lorsqu’elle le questionna sur sa nuit de sommeil. Il savait qu’elle s’inquiétait pour lui à cause de ce volet de son hygiène de vie, et même si il banalisait fréquemment la chose, lui-même devenait sensible aux arguments de la chirurgienne. Cependant, malgré la présence de cette dernière dans sa vie et dans son lit, qui constituant pourtant un incitatif extrêmement puissant à se prélasser sous la couette, la réalité demeurait qu’il ne parvenait tout simplement pas à étirer ses heures de sommeil. Dans un rythme qui le dépassait, il ouvrait systématiquement les yeux à 5h du matin. Et quelques secondes plus tard, son esprit prenait sa vitesse de croisière, qu’il s’agisse de passer en revue ses dossiers en suspens où d’évaluer les risques et les opportunités qu’offraient les différentes machinations auxquelles il se retrouvait mêlé.

    Plus récemment, cependant, un nouveau type de pensées s’invitaient au rendez-vous chaque fois : une peur incontrôlable que quelque chose n’arrive à Victoria…Même s’il savait la chose irrationnelle, dès que l’idée prenait naissance, il se faisait entraîner dans un inexorable tourbillon dont il ne parvenait à se sortir qu’en se levant pour aller prendre un café.

    Ou un cachet d’amphétamine, lors des mauvais jours…

    Ça aussi, c’était devenu un problème, puisqu’il n’a pas pris le risque d’emmener ses ‘suppléments’ en voyage. Heureusement, Hank venait tout juste de résoudre le problème.

    « Trop vieille ? T’es encore pratiquement une étudiante. »

    Il retrouva avec bonheur la sensation du corps de la presque étudiante contre le sien, l’entourant délicatement de son bras droit.

    « La bonne nouvelle, c’est que tu as encore plusieurs jours pour t’en remettre. Promis, à partir de maintenant, c’est toi qui décides de l’heure du dodo. »

    Il réprima un éclat de rire lorsque Victoria émit une hypothèse sur l’union entre Hank et Shiri.

    « Je suis profondément convaincu que c’est la seule et unique raison derrière ce choix. »

    En tout honnêteté, il savait bien que Shiri n’était qu’une femme trophée que Hank se plaisait à exhiber à droite et à gauche. En plus d’une déduction fiscale et d’une façon de blanchir certains acquis... Il le savait parce que c’était lui-même qui en avait fait la suggestion à Hank, empochant par le fait-même 15% des économies annuelles réalisées grâce à son plan financier…À l’époque, Shiri venait d’être nominée finaliste pour miss Bermuda.

    Le fait que la pauvre fille soit sincèrement sympathique faisait en sorte que, maintenant, les poils de William se hérissaient lorsque Hank lui montraient des photos de ses maîtresses…

    Il se demanda brièvement si ce dernier pensait que Victoria n’était également qu’un trophée, pour lui ?  

    « Désolé de t’avoir abandonné un petit moment. Je sais que Shiri n’a pas exactement le profil des gens avec qui tu te lies d’amitié. »

tw ✧ None

♪♫

Est-ce que tu réalises ce qu’est le sommeil d’un bébé? Vic le questionna avec un sourire au coin des lèvres. Elle n’avait jamais compris cette expression alors qu’il n’y avait rien de plus léger que le sommeil d’un bébé, réveillé toutes les deux heures pour manger ou parce qu’il avait besoin d'être changé. Cela lui fit penser qu’il y avait un sujet qu’elle devait aborder avec William, pour lequel elle reportait sans cesse l’échéance et aujourd’hui ne serait pas différent. Il n’était pas question de mentionner leur futur alors qu’ils étaient isolés du reste du monde, bien loin de Boston et de leurs habitudes.

Pour en revenir à William, Victoria savait qu’elle avait raison de s’inquiéter mais il avait malheureusement passé l’âge d'être bordé et surveillé. Elle n’avait de toute façon pas le pouvoir de l’hypnotiser mais sans doute pourrait-elle l’aider d’un point de vue médical, s’il lui laissait l’opportunité de le faire.

Une très vieille étudiante. Elle le repris en marmonnant, ses doigts glissant distraitement sur la poitrine de son petit-ami sur laquelle elle traçait des formes imaginaires. Ne te détrompe pas, je veux profiter un maximum des vacances. Mais j'aimerais aussi rentrer reposée. Vic souhaitait faire le plein de vitamine C et de sommeil car ces derniers mois l’avaient mise sur les rotules. Être ambulancière n’était pas de tout repos mais c’était facile comparé aux horaires de l’hôpital, auxquels elle essayait toujours de s’adapter.

Tu crois? Elle demande sincèrement, tout en connaissant la réponse. Elle ignorait l’envers du décor mais Vic n’était pas dupe et voyait bien quel genre de personnage était Hank et les raisons qui avaient pu le pousser à choisir une femme bien plus jeune, qu’il pouvait exposer fièrement. Est-ce que William était de la même trempe et risquait, à tout moment, de la larguer pour une étudiante bien plus jolie et fraîche qu’elle ne l’était ? L’idée lui fit de la peine et elle la chassa immédiatement. C’était inutile d’aller s’imaginer le pire alors qu’ils étaient actuellement au paradis sur Terre et qu’il ne semblait pas y avoir de nuages au-dessus de leur relation. C’était presque trop beau pour être vrai mais après toutes les épreuves des dernières années, Victoria acceptait avec plaisir l'accalmie qui s’offrait à elle.

Pas exactement mais c’est quelqu’un de relativement gentil. Vic préférerait mille fois avoir affaire à quelqu’un de stupide - il fallait dire les choses! - mais bienveillant plutôt que quelqu’un doté d’une grande intelligence mais mesquin, voire méchant. J’ai le droit de savoir pour quelles raisons tu m’as abandonnée ? Parce que tu m’as fait la promesse de laisser le boulot à Boston pour quelques jours. Elle lui rappela, l’air de rien, même si Will savait parfaitement qu’elle ne lui en voudrait jamais d’être carriériste. Le fait est que Vic souhaitait le voir décrocher pour son propre bien et non pour elle.

La main en appui sur le torse du brun, elle se redressa pour se servir une tasse de café. Je vais nous commander le petit déjeuner à la chambre. De quoi as-tu envie? La terrasse avait une vue exceptionnelle et c’est en bikini, et surtout en têt-à-tête, qu’elle souhaitait manger et entamer cette journée.

tw ✧ None

   
« Bon point – je suis définitivement moins bruyant quand je me réveille. »

L’un des plus grands regrets de sa vie. Enfin, pas sa capacité de se lever sans s’époumoner pour que quelqu’un vienne lui dire coucou ou lui préparer un café, mais de ne pas connaître ces moments partagés avec un petit être en plein devenir. Sa volonté de devenir papa était d’ailleurs au cœur de son divorce. Ou du moins, le croyait-il.

Il adorait les enfants, et pour palier à ce rôle paternel que les circonstances de la vie lui refusaient jusqu’à présent, il ne manquait aucune opportunité de l’exercer, aussi temporairement cela soit-il. D’ailleurs, pour une deuxième saison consécutive, il avait accepté d’être le coach de ses petits Razorbacks de Roxbury, une équipe de baseball d’un des quartiers les plus défavorisés de Boston. Peut-être qu’un jour, il pourrait apprendre à une mignonne petite Bennett comment frapper une balle… Même si une partie de lui savait pertinent qu’il n’était pas exactement ‘good father material’ par les temps qui couraient… C’était une chose de s’expliquer à soi même les petits travers moraux grandissant qu’il se permettait. C’en était une autre de l’expliquer à une petite bête de 5 ans.

Et puis, dans sa conception d’une famille, il fallait être deux adultes consentants avant de penser à se multiplier, et la conversation ne s’était jamais pointée le bout du nez depuis le début de sa relation avec Vic.

Peut-être ces vacances allaient-elles marquer la plaque tournante vers la prochaine étape de leur vie à deux?

« On peut canceller le catamaran pour paresser langoureusement sur le bord de la mer, si tu préfères. C’était le seul truc qui nous restait officiellement sur notre horaire de toute façon. »

Il se surprenait d’à quel point il appréciait ces moments de lenteur partagés avec Victoria, malgré le puissant contraste qu’ils offraient avec sa vie qui défilait à 100 miles à l’heure. Elle était la seule en compagnie de qui il pouvait se contenter de profiter du moment présent, sans être constamment oppressé par l’idée qu’il n’était pas en train d’accomplir quelque chose. Pas comme cette génération qui carburait à l’adrénaline, incapable de demeurer en place et toujours à la recherche de nouvelles expériences. William, lui, ne se dépêchait jamais. Mais chacun de ses actes, chacune de ses paroles, avaient tendance à s’inscrire dans la réalisation d’un projet de longue haleine.  

« Je m’excuse, »  répondit-il lorsqu’elle le questionna sur la teneur de sa conversation privée avec Hank. La perspicacité et le tact de son amoureuse ne cessait jamais de le surprendre.

« Ce n’était pas prévu. Comme un peu tout le monde, il se … questionne beaucoup sur la conjoncture économique actuelle. Il a beaucoup à perdre et il avait besoin d’être rassuré. Je n’ai pas pu lui dire non… Et je peux comprendre qu’il ne voulait pas en parler devant son épouse.»  

Un tissu de mensonge qui lui vint beaucoup trop naturellement. Rien de trop élaboré, mais suffisant pour cacher qu’au fond, c’était cette conversation là qui était la raison de ce voyage dans les Caraïbes. Hank se préparait non seulement à transférer une partie beaucoup plus importante de son volumineux portefeuille à travers les sociétés écrans que pilotaient William, mais à également à lui ouvrir le marché de son réseau de contact. Multipliant de ce fait les revenus et l’influence de Bennett.

La présence de Victoria n’était qu’un bonus. Un fabuleux bonus, bien entendu. Qui avait le triple mérite de rendre la présence de l’agent du FBI dans une des régions où foisonnent le plus grand nombre de paradis fiscaux moins suspicieuse et de développer le lien humain l’unissant à Hank. Leurs deux partenaires se connaissaient, maintenant. Ce qui rendait toute trahison entre les deux parties beaucoup plus difficile….

Mais la vérité était que, même sans Victoria, il aurait passé son 13 février sur ce yacht, au large de St-George, en Grenade. Que Hank lui aurait probablement proposer la compagnie d’une – ou deux- émule de Shiri. Et que sa très intelligente petite amie n’avait aucunement besoin de le savoir…. Combien de temps encore pourrait-il maintenir la cadence ? Combien de temps pourrait-il continuer de lui mentir ainsi, en la regardant droit dans les yeux ?

Tout d’un coup, il comprenait un peu plus ce qui avait poussé Hank à s’entourer d’une femme comme Shiri….

« J’irais pour croissant, café, mangue et… l’autre truc rouge qu’ils ont apporté, hier ? Et, bien entendu, la plus fabuleuse chirurgienne en devenir d’Amérique du Nord. »  

tw ✧ none

♪♫

L’inverse serait pénible. Se réveiller six fois - au minimum - par nuit afin de s’occuper d’un bébé faisait partie de ses rêves les plus fous. Ce n’était pas le mariage idéal avec sa carrière mais elle ne s’était jamais questionnée sur la faisabilité de ce beau projet. Victoria savait, tout simplement, que les pans de sa vie s’emboiteraient pour former un magnifique puzzle dont il lui manquait encore quelques pièces. Non sans difficulté, mais celles-ci ne l’effrayait pas le moins du monde - peut-être, aussi, parce qu’elle savait que ce n’était plus une option. Border son enfant était et resterait un rêve, ni plus, ni moins. En l’absence d’un nouveau-né, la chirurgienne se passait bien de subir les mêmes réveils de la part de son petit-ami, qui ne dormait de toute façon pas suffisamment d’heures par nuit pour avoir l’opportunité de juger son sommeil comme perturbé.

Non, gardons le catamaran. Au lieu de me prélasser au bord de la piscine, je le ferai sur le bâteau. Au beau milieu des Caraïbes, il y avait pire comme programme. La chirurgienne souhaitait profiter du voyage pour se ressourcer mais il n’était pas question d’avoir fait un si long vol pour rester cloitrée à l’hôtel. Ils n’avaient déjà que quelques jours sur place, elle n’allait pas les passer à dormir, quand bien même elle en avait besoin. On lui avait mentionné la possibilité de faire du snorkeling lors de leur sortie en catamaran, activité qui figurait sur sa bucket-list fictive, elle comptait bien cocher cette case. Ce n’était pas ses premières vacances paradisiaques - Harvard avait toujours su les embarquer sur des plages de rêves pour le Spring Break ou le Summer Camp - mais elle n’avait jamais sauté le pas. L’océan l’effrayait un peu mais Victoria se sentait prête à sauter le pas.

Loin d’elle l’idée d’endosser le rôle de la petite-amie qui souhaitait avoir le contrôle, elle ne put s’empêcher de poser des questions sur le contenu de la conversation entre Hank et William, tout en rappelant la promesse que ce dernier lui avait faite avant le départ. Victoria  n’avait, pour sa part, pas le choix de décrocher complètement et aurait aimé voir Will en faire de même pour ces petits jours loin de la réalité. Elle écouta son explication et hocha doucement la tête, les lèvres pincées. Elle n’était pas ravie de le voir plongé dans les affaires alors qu’il s’accordait de rares vacances, mais Victoria ne s’estimait pas en droit de le lui reprocher. Elle était tombée, pour la seconde fois, sous le charme de William en connaissance de cause. Il lui plaisait, avec ses qualités et ses défauts, dont son addiction au travail.

Je ne suis pas certaine qu’elle était en mesure de suivre la conversation quoi qu’il en soit. No offense Shiri. Mais si les deux hommes avaient tenu cette conversation à table, à ses côtés, elle n’aurait sans doute pas pu dire de quoi il en résultait. Victoria se contenta de cette simple remarque, peu élégante à l’encontre d’une jeune femme qui ne lui avait absolument rien fait. Son but était avant tout de rappeler à William qu’il avait besoin de décrocher et non de lui faire passer un interrogatoire. Et ce malgré le sentiment qu’il ne lui révélait pas toute la vérité. L’agent avait été clair au début de leur relation sur les questions auxquelles il ne pourrait pas toujours apporter de réponse, raison pour laquelle Vic essayait le plus souvent de ne pas en poser afin de ne pas être frustrée. Ca ne lui convenait pas totalement d’accorder sa confiance, les yeux fermés, mais c’était la seule option. Option qu’elle acceptait pour l’instant, bien trop éloignée de la vérité pour sentir le danger. Leur mode de vie est si loin du mien. Tu es parvenu à le rassurer ? Elle demanda néanmoins, pensant aux pauvres dollars que contenaient son compte épargne, elle qui remboursait toujours son prêt étudiant. Vic ne s’était jusqu’ici jamais demandé ce qu’il en était pour William, parce qu’elle accordait rarement plus d’une pensée à l’aspect financier des choses, mais cette petite escapade répondait en partie à la question.

Il me semble que c’était du PItaya. Sans certitude, n’étant pas assez aventureuse pour goûter des fruits qu’elle ne connaissait pas et dont l’odeur n’était pas très convaincante. Un coup de fil passé à la réception, elle attrapa son portable sur la table de nuit et revint vers William, un main perdue distraitement dans sa nuque tandis que l’autre scrollais sans but meetsa. J’ai bien envie de faire de la plongée, il y a des sculptures à voir sous l’eau, mais j’ai peur de ne pas parvenir à respirer. Elle lui confia tout en lui montrant les photos des sculptures en question, sorties tout droit des sites touristiques.

tw ✧ none

♪♫

La chirurgienne se voyait bien prendre le soleil sur le catamaran, avec rien d’autre que l’océan à perdre de vue, et son homme. Elle était, certes, fatiguée de la veille mais cela n’appelait pas à beaucoup d’énergie. On peut dire ça. Tu as de la chance que je sois une femme simple mon chéri, je me contente de peu. Elle désigna le paysage paradisiaque qui s’offrait à eux pour appuyer ses mots. Peu, le paradis. Son sourire ne quittait plus ses lèvres depuis qu’ils avaient quitté un Boston humide et froid.

Elle eut envie de lui préciser que ces choses promises et matérielles n’avaient en rien joué dans sa décision de leur offrir une seconde chance mais Vic s’en abstenait. Il savait tout ça. La blonde n’aspirait qu’à une vie de couple saine. Se blottir dans ses bras après une journée compliquée à l’hôpital valait tout l’or du monde. Elle n’avait jamais connu la pauvreté, pas plus qu’elle ne connaissait le luxe. Vic avait toujours été partagée entre la réussite sur le plan professionnel et personnel, elle souhaitait briller, faire partie des plus grands chirurgiens au monde, mais c’était la reconnaissance et non l’aspect financier qu’elle convoitait.

Je crois que je ne comprendrai jamais les gens qui ne vivent que pour l’argent. Il contribue fortement au bonheur, là-dessus il n’y a aucun doute, mais il y a tellement plus important. La santé, la famille, l’amour, une carrière brillante. Tout cela ne lui offrait pas des vacances de rêves mais ça avait une valeur tellement plus précieuse. Victoria ne cracherait pas sur un prêt étudiant entièrement remboursé et des échappées plus régulièrement au paradis, il ne fallait pas lui faire dire ce qu’elle n’avait pas dit, mais ça ne serait jamais une priorité pour elle. Quand bien même elle pourrait très vite s’habituer à tout ça.

Le petit-déjeuner commandé, elle rejoignit William sur la terrasse et lui montra brièvement ce qu’elle avait pu voir sur internet et qui avait attiré son attention. Elle ignorait si cela faisait partie de leur programme et si leur catamaran avait une trajectoire bien définie à suivre, mais ça ne devait pas être impossible de faire un arrêt par ces fameuses statues, sous l’eau. Elle roula doucement des yeux, amusée, lorsqu’il lui conseilla de ne pas respirer sous l’eau, avant de s’échapper. Une amie lui avait signalé qu’elle n’était jamais parvenue à respirer avec le tuba, se sentant oppressée sous l’eau, et la chirurgienne qui n’était déjà pas très à l’aise en mer s’imaginait très bien rencontrer le même souci.

Les genoux rabattus contre sa poitrine, elle posa son menton sur ceux-ci pour observer la petite démonstration que lui offrait William. Elle se mit à rire et le poussa à l’aide de son pied lorsqu’il les éclaboussa. Elle se débarassa du verre d’eau qu’il tenait pour pouvoir monter dans ses bras à califourchon. Quelle démonstration. On devrait peut-être envisager de quitter Boston, tu ferais un excellent instructeur de plongée. Elle se moqua et passa ses mains sur le visage du brun pour se débarrasser des gouttes d’eau, avant de poser les lèvres sur les siennes. Rapatrie mon corps à New-York si j’échoue. A nouveau, elle l’embrassa avant de l’observer, ses mains jouant avec ses mèches rebelles. T’as déjà eu l’occasion d’en faire? J’ai toujours eu un peu peur de l’océan. Sans raison, c’était juste trop vaste à son gout.

tw ✧ none

♪♫

Rien que pour ça ? Elle demande, clairement à la recherche de compliments. C’était toujours plaisant à entendre, bien que Victoria n’avait aucun doute sur sa relation avec William. Ce n’était pas aussi passionnel que ça avait pu l’être avec son ex-fiancée mais peut-être que justement, c’est ce qui faisait que leur couple était fait pour durer. Passé la trentaine, Victoria ne recherchait plus vraiment l’adrénaline mais bien le confort et la stabilité. Quelqu’un sur qui elle pouvait se reposer, et inversément, et c’est exactement ce que William représentait.

Vic écouta William répondre bien trop sérieusement à sa réflexion, avant de lever les épaules à la conclusion de celle-ci. Peut-être était-ce parce qu’elle ne faisait pas partie de ce gratin mais la valeur d’un homme ne se quantifierait jamais au nombre de zéro sur son compte pour la jeune femme. Ca lui donnait mal au ventre de savoir que certaines personnes se tuaient à la tâche pour peu alors que d’autres se contentaient d’empocher des millions, ou des milliards. Bien sûr, la plupart avaient travaillé dur pour en arriver là, l’argent ne leur était pas tombé du ciel sans le moindre effort, mais ça la dépassait malgré tout ce genre de différence dans la société. Ils contribuent peut-être à l’économie mais leurs mains ne sauvent pas des vies. Elle sourit tout en serrant les doigts de William dans les siens. A sa façon, William sauvait également l’humanité en mettant derrière les barreaux des hommes et femmes mauvais. Ils étaient un “power-couple”, dont le temps était mis au profit de la société et elle en était très fière.

A condition de pouvoir exercer dans l’hôpital de Cairns. Il n’était pas question de passer de chirurgienne à guide touristique ou barmaid sur la plage. La vérité est que Vic ne partirait jamais s’installer aussi loin de ses parents, et ce même si la destination et l’homme qui l’y accompagnait faisaient rêver.

Tu as carte-libre pour agir en fonction de tes envies. Au cas où tu aurais des doutes… Ces choses qu’il parlait de faire à son corps, elle était tout ouïe. Toute à lui. William n’était pas le plus doué pour la convaincre de sortir en mer, la jeune femme pensait maintenant à l’enfermer dans la chambre pour le reste de la journée afin qu’il puisse lui montrer toutes ces choses.

Je pense que ça va être mieux que “sympa”. Elle avait vu des vidéos, des photos, afin de promouvoir les activités de la région et c’était à couper le souffle. On sera seuls sur le catamaran ? Allié leur petite sortie aux idées de Williams n’était peut-être pas complètement improbable s’il n’y avait personne à bord du bâteau avec eux. Ca ne le sera pas, je te fais confiance. Et à partir de là, Victoria savait qu’il ne pouvait rien lui arriver.