nube ☾ i hear voices over my shoulders
w/@michelle ford  — cambridge, janvier 2019.

Le nouvel-an est passé. Adieu 2018, bonjour 2019. Mon retour à la Nouvelle-Orléans m’a permis de recharger mes batteries. Je suis prête à retrouver Cambridge. Après avoir déposé ma meilleure amie chez elle, je suis ensuite partie quelques jours au coven sur Salem. J’ai pu me confier à mes soeurs et désormais, me voilà de retour au manoir, mes valises dans la malle de ma Coccinelle rouillée. Le soleil se couche. Mes cheveux bruns me barrent la vue alors que je suis couchée dans mon coffre, à m’énerver contre un bagage qui fait de la résistance. Tiens, je t’ai eu ! Le posant sur le sol, je referme le hayon au-dessus de moi et je rentre à la baraque où mes deux chiens me sautent instantanément dessus. Ouf, la voisine a fait son job, ils sont toujours en vie. Laissant mes valises près de l’entrée, je pars vérifier que tout est en état, qu’il n’y a aucun squatteur et j’allume directement mon ordinateur pour consulter mon blog à l’abandon. La page est sur un article de magie blanche, un sort que j’exerce régulièrement. Faut que j’réponde aux commentaires, mais je suis assoiffée et surtout affamée. Je me dirige alors au frigo et tout à coup, la sonnerie de la baraque retentit partout. Je sursaute, ma bouteille de coca-cola sur les seins. J’attends personne ce soir, c’est étrange. C’est peut-être encore un tour des âmes emprisonnées dans ce taudis. Par curiosité, je pars tout de même vérifier, -sans le coca-. J’apporte mon oeil au judas et découvre Numa, complètement métamorphosé par le prisme du verre. « Je veux pas de vos chocolats débiles et de vos tickets de tombola ! » Je ris et déverrouille aussitôt la porte pour éviter de te laisser te décomposer sur le perron. « On fait des visites surprises maintenant ? Entre, je viens de revenir de mes vacances, t’as de la chance » Sur ton passage pour pénétrer dans ma demeure, je pose mes lèvres sur ta joue hâlée et je referme automatiquement derrière toi. Merde, mais t'es jamais venue ici, tout mon univers de petite sorcière est exposé. Super, tu vas pisser dans ta culotte et en prime, j'vais devoir me justifier sur tous ces grimoires, ces gris-gris, ces potions qui recouvrent des étagères entières.

Noël et le Réveillon chez les Ford. Putain, c'est pas joyeux. Mes parents font comme si tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes, après tout ils leur restent leurs deux filles parfaites. Parfaites, tu parles. Papa, Maman, jamais vous aurez les petits-enfants et le gendre dont vous rêvez. J'suis stérile et lesbienne, combo de choc. J'sais pas si vous le saurez un jour, je tiens à l'héritage. Mes grands-parents font toujours des remarques sur Kibwe et à quel point il leur manque. C'est quoi le pire ? Se taire ou parler ? J'ose même plus trop recroiser mes amis restés à Toronto, tout à tellement changé. J'embarque dans l'avion qui me ramène à Boston soulagée. Sauf qu'il y a personne sur le campus, c'est mort de chez mort, je passe les premiers jours de l'année tapie chez moi, à traîner sur Internet. Je me perds, au coeur de la nuit je tombe sur un site bizarre, des sorcières, des... what tf ? En haut à droite, header du blog, je vois une bouille familière. Pheebs. Je zoome mais c'est sans appel. L'année 2019 sera riche en surprises. Je parcours le blog ahurie, des sorts, des esprits, des noms en latin, incompréhensibles. Bah putain. Et bien sûr, y a cette idée totalement twistée qui germe dans ma tête toute embrûmée. Peut-être que c'est le bordel momentané dans ma vie, les retrouvailles avec ma famille, ou juste cette question que je me suis retournée un milliard de fois dans la tête : pourquoi mon frangin s'est tué ? Incapable de dire ce qui motive ma folie mais le lendemain, je suis devant chez Phoebe. Je parcours l'annuaire du campus pour trouver l'adresse, easy peasy. Je veux contacter les fantômes, Phoebe si t'es la sorcière que tu prétends être tu sauras quoi faire. Le grand manoire biscornu manque de me faire rebrousser chemin avant même que je sonne. Ding, dong. Trop tard. La porte s'ouvre sur la peau hâlée de Phoebe. "On fait des visites surprises maintenant ? Entre, je viens de revenir de mes vacances, t’as de la chance." Elle me claque la bise, je pénètre dans la demeure. Le plancher craque, je dois plisser les yeux pour voir un truc dans ce taudis sans lumière. "T'es mi-humaine mi-taupe en fait, t'as pas ouvert les volets ?" Je demande en riant, mais à peine. Sérieusement, faudrait penser à percer une grosse baie vitrée, là au milieu du salon. "J'ai trouvé ton adresse dans les pages jaunes et je sais pas, je suis venue." J'ose pas encore trop formuler ce qui me trotte dans la tête, c'est peut-être vraiment une mauvaise idée. Parce que je voulais pas trop y croire, à ces histoires de sorcellerie. Mais force est de constater que ces vieux bouquins qui manquent de dégringoler de la bibliothèque, c'est pas des livres de cuisine. Des grimoires, putain j'y crois pas. "T'as une déco... mortelle."

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w/@"michelle"  — cambridge, janvier 2019.

Je suis scotchée. Je voudrais pas me décaler et plutôt te laisser sur le perron. Si t’entres, tu vas rencontrer tout ce qui te terrifie le plus au monde. Numa a une sainte horreur du surnaturel, tout ce dans quoi je trempe en fait. Je suis une sorcière, pas à 100$, mais il y a quelques brujas dans la famille, des brujas mexicaines. Je suis ma à l'aise, mais j’adopte cette attitude décontractée pour ne rien laisser transparaître. J’affiche mon plus beau sourire, ce sourire d’une blancheur extrême qui contraste si fort avec ma peau hâlée. Je peux pas te repousser, t’as fait du chemin pour venir jusqu’à moi et ça m’inquiète. Alors je me déplace sur le côté et je ferme les yeux lorsque tu pénètres enfin dans ma piaule hantée. Si si, des âmes errent ici, des bonnes et des mauvaises, j’vous jure. « Je t’ai dit, je viens à peine de rentrer, mais je préfère quand il fait sombre, le soleil brûle ma peau, je suis une vampire » Je sors mes dents, mes canines et je croque dans l’vide tout en déployant mes doigts crochus vers toi. C’est une blague. Me tape pas une crise cardiaque ma puce. « Je devrais vraiment me désinscrire de ce merdier, je veux pas qu’on me fasse chier, sauf toi hein » Je tapote ton épaule alors que tes yeux s’émerveillent ou déchantent en observant ma décoration un tantinet lugubre. Moi je l'aime. Je trouve que l’endroit est plein de charme, enfin, ce que j’en ai fait. Je l’ai rendu cosy. « Je te remercie, j’y ai mis beaucoup de coeur pour que ça ressemble à ce que tu vois. J’croyais que tu détesterais .. C’est d’ailleurs pour cela que je n’ai jamais osé t’inviter ici. L'ambiance est un peu trop .. "mortelle" » Mes mains trouvant place dans les poches arrières de mon jean, je recule à tâtons pour chercher mon bureau où se trouve mon mac allumé. Damn, mon blog est bien ouvert et un gif d’un pentagramme clignote. « Tu me fais peur, tout va bien Numa ? Tu as besoin de quelque chose ? » Hop, mon fessier de latina se cogne au meuble recherché. Ma main gauche sort de ma poche et cherche à refermer le clapet de l’ordi. « Une envie de bière ou de vin ? »

"Je t’ai dit, je viens à peine de rentrer, mais je préfère quand il fait sombre, le soleil brûle ma peau, je suis une vampire." Ses doigts crochus qui se rapprochent de mon visage, ses dents qui claquent. Je manque de sursauter. "Ha-ha, très drôle." Je fais la maligne pour qu'elle oublie que je suis une totale flipette, des sueurs froides rien qu'à l'idée d'avoir posé le pied dans cette maison biscornue. "Trouve autre chose, un vampire c'est pâle comme la mort." Ce qu'on m'avait dit à Halloween, 12 ans alors que j'avais revêtu une cape de Dracula. "Je devrais vraiment me désinscrire de ce merdier, je veux pas qu’on me fasse chier, sauf toi hein." Ravie d'être l'exception parmi les casse-couilles. Mes yeux fouillent un peu cette antre sombre. "C’est d’ailleurs pour cela que je n’ai jamais osé t’inviter ici. L'ambiance est un peu trop .. "mortelle"." Je hoche la tête, c'est pas que j'aime pas hein, mais on est mieux dans ma chambre à la Cabot. Je fais traîner mes doigts sur une espèce de boule de cristal posée sur le guéridon de l'entrée. "Tu me fais peur, tout va bien Numa ? Tu as besoin de quelque chose ?" Je relève la tête du globe de cristal, le sourcil haussé. Clic. C'est pas son boule qui m'empêche de voir l'écran de son Mac se fermer dans son dos. T'inquiète Pheebs, je suis au courant pour le blog vaudou. Je secoue la tête. "Tout va bien, t'inquiète, c'est juste le Noël en famille, ça m'a foutu le bourdon." J'évite de m'étaler sur le sujet, c'est plus un secret depuis longtemps à Harvard. Je suis la nana qui a un frère suicidé, ça s'oublie pas. "Une envie de bière ou de vin ?" Grand sourire qui fend le visage. "Si gentiment proposé, je dis pas non à un verre de rouge." Je la suis dans la cuisine, je me fraye un chemin au milieu de son mic-mac. Elle sort deux verres d'un placard, une bouteille de rouge. "Tu sais j'pense que tu devrais trouver un autre nom pour ton truc sur Internet. Pheebs ma sorcière bien aimée, t'en dis quoi ?" J'suis pas originale, mais c'est pas le but. Ouais surprise, c'est ça la vraie raison de ma venue ici. T'avais pas besoin de mettre ton ordi en veille. Je prends mon verre, le porte à mes lèvres. C'est pas ce que j'ai bu pendant les fêtes, mais du vin cheapos ça fait très bien l'affaire. "Je veux pas paraître hautaine hein mais... ces trucs, c'est pas du pipeau ?" Parce que ça m'a toujours laissé plutôt sceptique, ces trucs de magie. Déjà croire en Dieu, ça a toujours été trop mysthique pour moi.

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w/@"michelle"  — cambridge, janvier 2019.

T’es adorable comme fille. Tu dégages que de bonnes ondes. J’sais pas comment l’expliquer, mais on a envie de te faire confiance. Tu sens bon aussi, comme une odeur de vanille/noix de coco. J’ai envie de te renifler, mais je garde mon nez collé à .. ma propre figure quoi. Je le laisse pas se balader dans ton cou, ça pourrait être mal interprété et je veux pas te faire fuir, surtout que t’as pas l’air super à l’aise dans mon environnement morbide. « Wooow, ça fait des commentaires cachés sur la couleur de ma peauuuuu. Pourquoi il n’y aurait pas des vampires black hein ? » Tu m’expliques ensuite comment tu as trouvé où j’habitais et ça me fait chier que ce soit possible. Je veux pas que les fan de Charmed viennent me faire chier à toute heure de la journée ou de la nuit. Je vais devoir rectifier ça et me foutre sur la liste rouge. Tes yeux scrutent toujours autant ma décoration spéciale et moi, je continue de me justifier sur le fait que je ne t’ai jamais invité ici. Je voulais te préserver, parce que t’es une pétocharde, mon monde est dark alors que le tien, il est .. pink. Me rendant compte par la suite que mon ordi est allumé sur la page de mon blog, je me déplace en moonwalk pour aller le refermer et puis je tente de faire diversion en t’interrogeant. « M’en parle pas, c’était catastrophique pour moi aussi » Je suis retournée aux origines pour finalement y retrouver mon ex-petit ami redevenu mon petit-ami et ma meilleure amie qui porte le gosse de mon .. mec. Génial. « Du vin rouge pour madame, comme si c’était fait ! » Je me dirige vers la cuisine pour sortir deux ballons et une bonne bouteille. J’ouvre le bouchon en serrant mes dents et alors que j’allais verser le liquide sombre et épais dans nos verres, tu fais référence à mon blog et je relève mes prunelles vers ta frimousse. « Quoi ? T’es .. T’es au courant ? J’en dis que je suis pas une sorcière bien-aimée, alors ce serait du mensonge que d’utiliser ce nom » Je soupire et reprend mon activité. Je déverse le rouge dans les verres et je t’en tends un. Un silence s’impose entre nous. J’entends juste nos œsophages qui avalent le liquide. Je décolle ensuite mes lèvres du récipient et je te dévisage. Bordel, tu viens jusqu’à chez moi pour te foutre de ma gueule ? « C’est comme si tu disais au Pape que Dieu était du pipeau Numa. J’y crois, c’est tout ce qui compte. J’ai foi en tout ça et ça me .. fait tenir en vie tu vois ? Peut-être que c’est du pipeau pour 99,9% des gens sur cette Terre, mais pas pour moi. J’ai déjà pu communiquer avec des personnes en décomposition sous terre. Et ici, il y a aussi des âmes qui errent et qui me parlent. Je crois que je suis née comme ça, sensible au surnaturel. J’ai .. des canaux ouverts. J’ai déjà planté des poupées sur demande et quelques jours plus tard, la personne visée était à l’hosto .. Coïncidence ou non ? »

"M’en parle pas, c’était catastrophique pour moi aussi." Joyeux Noël. Je devrais être désolée pour ma pote pourtant ça fait du bien de se dire que je suis pas la seule à en avoir bavé. "Du vin rouge pour madame, comme si c’était fait !" Voilà qui va me remettre d'aplomb. Elle me sert et je balance les news. "Quoi ? T’es .. T’es au courant ? J’en dis que je suis pas une sorcière bien-aimée, alors ce serait du mensonge que d’utiliser ce nom." -"Je suis tombée sur ton site, je cherchais un vieil épisode de Charmed et..." Petit moulinet de bras qui se veut explicatif. Ouais, y avait ta tête en gros et puis après une espèce de charabia qui m'avait filé la chair de poule. Phoebe finit de me servir. Je prends une gorgée, le bout de mes lèvres se colorent façon vampire, histoire qu'on fasse la paire. Silence incofortable que je rompts avec mon ton un brin condescendant. "C’est comme si tu disais au Pape que Dieu était du pipeau Numa." Oups, ouais j'ai commis un impair. Je plonge mes yeux dans le fond de mon ballon, je fais pas la maligne. "Désolée, je voulais pas me moquer, c'est juste que j'ai jamais vu ça que dans des films et..." Et ouais, jamais j'aurais imaginé que ma pote soit un peu vaudou. Je sais pas si j'y crois, à tout ça, j'ai un peu de mal sûrement. "Tu... hum. En fait, je suis tombée sur un truc, tu sais sur ton site. Et ça va peut-être de paraître bizarre hein..." Je bégaie un peu, mes mains gigotent dans tous les sens, je tourne autour du pot. "Fin voilà, l'article parlait du ouija, la communication avec les esprits tout ça, et hum... En fait de base, de base, je venais ici t'en parler." Je suis pas claire, mon dieu je suis pas claire. "Tu le peux  vraiment, parler avec quelqu'un qu'est mort ?" Parce que je suis intéressée. C'est les vacances dans ma famille, j'en ressors jamais indemne. A chaque fois ça remue tout en moins. Cette famille hantée par cette putain de question : pourquoi ? Pourquoi Kibwe a sauté du quai ? Qu'est-ce qui allait pas dans sa vie, qu'est-ce qu'on a pas vu ? Je veux des réponses.

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w/@"michelle"  — cambridge, janvier 2019.
Je suis grillée. Tu as vu mon site avant même de ne débarquer chez moi. Je peux plus mentir ou cacher tout ce qui a un rapport avec la sorcellerie ici. Je suis démasquée. « Toi tu regardes Charmed ? Je croyais que tu détestais tout ce qui a un rapport avec le surnaturel » Je garde mon calme, j’suis pas forcément à l’aise lorsqu’il s’agit de parler de ce qui m’anime. Je crains toujours d’être une bête de foire et c’est le cas là. Tu critiques mes croyances et je me crispe. Je me froisse. Je monte sur mes grands chevaux en moins de deux. J’ai grandi autour du vaudou et désormais, je pratique la Wicca. C’est toute ma vie, on me supprime ce droit, je sombre en dépression et bye bye. Alors bois mon vin et revois ton discours Numa, je t’en prie. Essaie de voir ‘ma religion’ d’un autre oeil. « À une époque où les films n’existaient pas, des gens s’y adonnaient le plus sérieusement possible et j’en fais partie. Je perpétue tout ça du mieux que je peux » Je m’enivre à mon tour, faisant danser le vin dans mon ballon lorsque tu te montres bégayante et plus intéressée par mes pratiques. Je te regarde silencieusement t’agiter. Balance, vas-y. Le ouija. C’est pas toujours aisé de savoir si un esprit malin se moque de nous au cours d’une session, mais ouais, j’ai déjà fait et ça parle souvent. Surtout ici, c’est un lieu occupé par diverses âmes. « Moi j’y crois, certains disent que c’est psychologique, un réflexe. À toi de t’en faire ta propre opinion, j’ai la planche comme tu t’en doutes, tu veux essayer ? » Je dépose mon verre et me déplace jusqu’au salon vers mes étagères pleines à craquer. Je grimpe sur un escabeau et tire la boite contenant le plateau. « Par contre on ne le fait pas pour faire joujou, crois pas qu’on se tape une partie de Monopoly là. As-tu un défunt particulier avec lequel tu veux correspondre ? » Et là je me rends compte que je te connais pas plus que ça au final, que tu t’es que très peu livrée à moi. Je vois pas qui aurait disparu près de toi. Tu m’as jamais parlé de la mort. « Avant ça, je dois te faire boire une potion pour faciliter la communication avec l’au-delà .. C’est un mélange de plantes de mon jardin et quelques substances qui font un peu entrer en transe, t’es opé ? »

hj : la potion c'est du bizutage

"Toi tu regardes Charmed ? Je croyais que tu détestais tout ce qui a un rapport avec le surnaturel." -"Tu me prends vraiment pour la dernière des poules mouillées c'est pas possible." Je rigole en faisant mine d'être vexée. J'avouerai pas que je finissais tous les épisodes cachée sous ma couette, nope. Glouglou, une gorgée de vin, je me fais petite, riquiqui, désolée Phoebe pour cette mise en doute c'est que j'ai toujours été habituée à penser dans une case moi. Je crois bien que j'suis gay et ça me semble déjà l'apogée du paranormal. Je hoche la tête. D'accord, le respect d'une tradition millénaire, pas touche, je critique plus. La vérité c'est que je suis venue ici pour en savoir plus, pour te croire. Séance de ouija, je suis peut-être folle à lier. "Moi j’y crois, certains disent que c’est psychologique, un réflexe. À toi de t’en faire ta propre opinion, j’ai la planche comme tu t’en doutes, tu veux essayer ?" Je finis mon ballon de vin pour m'aider à déglutir. Est-ce que je veux ? C'est bien pour ça que je suis venue mais j'sais pas... "Ouais." Je souffle en hochant la tête. Ni une ni deux, on s'embarque dans le salon, Pheebs grimpe sur un tabouret, farfouille au milieu d'une étagère bourrée à craquer pour en sortir une boîte, mystérieuse, très mystérieuse boîte. "Par contre on ne le fait pas pour faire joujou, crois pas qu’on se tape une partie de Monopoly là. As-tu un défunt particulier avec lequel tu veux correspondre ?" Je hoche la tête comme une gamine à qui on fait la leçon. Je commence à flipper. "Mon... petit frère." Je baisse les yeux, tortille mes doigts. Est-ce que je dois en dire plus ? Quelque chose qui l'aide à, j'sais pas, faire un pont jusqu'à l'univers des fantômes ? "Il s'est..." -"Avant ça, je dois te faire boire une potion pour faciliter la communication avec l’au-delà .. C’est un mélange de plantes de mon jardin et quelques substances qui font un peu entrer en transe, t’es opé ?" Pas l'temps de m'épancher sur les malheurs de la famille Ford. Putain, une potion magique c'est ça que tu veux me faire avaler ? "C'est sans risques ?" Je bégaie. "En transe, en transe... Tu vas quand même pas me faire prendre de la beuh ou un truc du genre ?" Nan parce que je suis pas précisément dans le mood adéquat pour ça là tout de suite. Je finis par hocher la tête, ok, j'l'avalerai son truc. De toute façon c'est elle qui s'y connaît en sorcellerie, je suis là en bon petit soldat, je suis à ses ordres.