Elle n’a pas l’air non-réceptive malgré tout quand elle reçoit la main de Victor. Mais elle finit par poser une question inattendue en rapport avec Lou. Elle la connaissait ? C’était idiot de sa part de croire le contraire parce qu’elle était relativement populaire à Harvard mais c’était le genre d’association qui n’avait pas eu l’air de faire de lien dans son petit cerveau d’idiot. Il fronçait les sourcils. Louison, c’était cette fille dont il était tombé fou amoureux et qu’il avait tiré des enfers. Elle connaissait les moindres détails de sa vie, même les plus sombres. Elle connaissait la mère de Victor au point de lui pardonner ses frasques sectaires. Il frottait légèrement son menton endolori par la glace de la météo. « Yeah, Chamberlain. » dit-il avec l’accent le plus français qu’il puisse réussir à prendre. « She’s cool but i played dumb with her when i was in Paris. Old story. » Il n’avait pas idée des conséquences que cette révélation venait faire sur la gueule de Camila alors il continuait à parler comme si de rien n’était. « You know her ? » Il sortait une clope de son petit sac en plastique que lui avait donné le flic et il alluma avec son briquet. Au moins, cette nicotine aurait le don de le réchauffer pendant une seconde. Il tira une longue bouffée et il lança même son paquet sur Camila pour qu’elle l’attrape au vol. Avec toutes celles que Victor lui avait prise, il pouvait bien lui en payer une.

j’pourrais me mettre à genoux à cet instant précis pour te supplier. pour te dire que j’ferais tout, n’importe quoi pour que tu sois pas relié à elle. et j’crois que bêtement, j’ai un petit d’espoir. puis je me souviens que je suis camila wildingham et que la chance, elle est jamais de mon côté. que je vais probablement m’effondrer une nouvelle fois parce que c’est comme ça que ça fonctionne et que ça sera sûrement le coup de trop. yeah, chamberlain. putain, j’étouffe. j’ai les bras qui retombent le long de mon corps et ma respiration qui s’intensifie. non, non. pourquoi ? pourquoi moi ? il était où le taux de probabilité dans tout ça ? et j’écoute plus. j’veux rien savoir de votre histoire ou bien d’elle. j’veux pas écouter, j’veux pas que tu me racontes quoi que ce soit. j’ai la nausée, ça tambourine dans ma poitrine si fort que je suis obligée de reculer jusqu’à m’asseoir sur les marches du bâtiment. j’tiens plus debout, j’ai la tête qui tourne comme si j’étais en train de perdre l’équilibre. tu me jettes ton paquet de clope mais je réceptionne pas. à la place, j’coince ma tête entre mes mains me balançant légèrement comme pour tenter de calmer le tout. mais c’est la tempête à l’intérieur. t’as aucune idée de ce que tu viens de déclencher. « she is the new girl of my ex husband. » j’le lâche mais j’ai la voix qui tremble. et douloureusement, je me redresse. « i gotta go. » m’faire péter la tête jusqu’à plus être capable de réfléchir. me laisser sombrer une nouvelle fois puis crever moi même si possible. tant que ça s’arrête, j’prends tout.

Il accuse le coup. Depuis tout ce temps, il était avec l’ex-femme du nouveau mec de son… ex ? C’était un putain de film ou quoi ? Il fronçait les sourcils, mais pas forcément par inquiétude. En fait, il comprenait que le coup dans la gueule, c’était Camila qui devait se le prendre. Il sentait qu’elle allait flancher, et… non. Il était hors de question. Il n’en était pas question. « No way you’re running away. » Et il lui attrapa le poignet une nouvelle fois mais pour l’attirer à elle. Pas pour l’embrasser, pas même pour la serrer contre lui même si ses bras étaient fébriles en cet instant. Surtout pour qu’elle souffle un peu. Putain, mais le monde était fait pour leur casser la gueule non ? Donc en gros, s’il résumait bien, elle était tombée enceinte du mec de Louison. C’était ça, l’histoire ? Non. Elle était tombée enceinte de son mari, et il est parti courir dans les bras de Louison. Ouais, sûrement ça. « I can hold your punches. » Ou alors, il pouvait l’aider à se reposer pendant le temps d’une heure ou deux. « You need a fix ? » Lui aussi, il en avait besoin. Il tremblait, mais ce n’était pas le froid qui le prenait aux tripes, loin de là. Les conséquences de tout ça, c’était dans quel but ? Il n’y avait pas de répit pour Victor et Camila, pour elle encore moins. Et ce que Victor devait représenter, c’était le pacte avec l’ennemi, tout au plus.

j’prends absolument tout. l’overdose, la chute, être renversée. je m’en fous tant que ça se finit. mais là, c’était le coup de trop. j’étais pas capable de l’encaisser. et toi, tu cherches à m’en empêcher une nouvelle fois. sauf que ce que tu ne comprends pas, c’est que là, j’dois juste me tenir loin de toi. louison. t’es le putain d’ex de louison. j’encaisse pas. j’prends pas ses restes non plus. j’fréquente pas les même gens qu’elle alors non, j’veux pas de toi dans ma vie. et j’sais pas si le sort s’acharne juste sur moi ou si c’est fait exprès. j’suis quasi sûre que c’était prémédité. qu’est-ce qui me dit que vous avez pas vu ça ensemble ? que c’était pas le but ? me laminer encore plus. me divertir pour m’éloigner de pluton et m’enculer par la suite ? ouais, c’était sûrement ça. « leave me alone. » fais ce que tu veux mais laisse moi. « don’t touch me. don’t fucking touch me. » j’tire sûrement trop fort pour me libérer de toi et glisse sur le sol gelée pour finir au sol. mais j’m’en fous tu vois. je m’en fous, j’voulais juste que tu me lâches moi. ma main s’accroche à la rambarde pour me redresser alors que je recule encore. le plus loin possible de toi, ne me touche pas. « that was funny ? play me for a fool ? what’s the point? i.. do i deserve that ? » j’sais pas. tu me détestes à ce point victor ? c’était drôle ? vous avez jubilés à quel point de m’infliger ça ? « oh god, i’m so stupid » j’passe mes mains dans mes cheveux reculant encore. « congratulation, you win. » va bien te faire foutre.

Il voit une Camila qui s’effondre, qui n’arrive même plus à tenir debout. Elle ne portait plus cette couronne, mais surtout les ailes noires d’un ange qui venait de découvrir le feu. Puis elle le repoussa, elle ne voulait pas être touché par Victor. Il pouvait potentiellement comprendre mais là, elle délirait complètement. La prendre pour un con ? Dans quel but ? Il commençait à perdre patience, et ce n’était pas bon. La dernière fois qu’il avait perdu patience, il s’était retrouvé dans la cellule… soit quelques heures plus tôt. « What the fuck are you saying ? It was not... » Il ne trouvait pas les mots pour la rassurer, parce que même lui expliquer que ce n’était pas vrai, elle n’y croirait pas. Il secouait la tête en la prenant dans ses mains, réfléchissant à toute vitesse. Il avait presque envie d’avoir le pouvoir de remonter le temps histoire de rectifier le problème. Mais la magie, ça n’existait que dans les contes, et ils étaient pas dans un putain de film. « We were not… that personnal Camila ! We didn’t tell each other the names of our previous lovers, you’re the one who... » Putain, mais fais chier ! Il ne supportait pas de devoir se justifier, surtout auprès de Camila. Bien sûr qu’elle ne méritait pas ça, mais putain, est-ce qu’il avait fait exprès de tomber amoureux de… non. Non, cette phrase n’allait pas se terminer dans son esprit, il la gardait sous un rocher aussi lourd que trois immeubles, entouré de barbelés, et gardé par des crocodiles. Il se mettait presque maintenant à hurler sur Camila. « I didn’t win anything ! I didn’t know ! » Il levait les bras en l’air, comme s’il était une nouvelle fois un prisonnier et qu’il était prit en flagrant délit. « I’m still... » moi ?  Puis il laissa tomber. Elle était dans un état second.

j’suis à bout. j’réalise tout comme si c’était logique. comme si c’était un putain de puzzle et que les pièces étaient en train de s’emboîter. et je pars en vrille. j’dérive. j’ai l’impression d’avoir une fois de plus été l’idiote de service. celle qu’on utilise, qu’on fait tourner en rond. putain ça fait mal. j’ai l’impression que les derniers morceaux de mon coeur sont en train de lacérer ma cage thoracique. et j’écoute à moitié tes vaines justifications. tu vas pas au bout de tes phrases comme à chaque fois. probablement parce que j’ai raison. par ce que tu m’as prise pour une conne et que j’ai rien vu venir. avoue que tu jubiles au fond. p’tain. « i.. fuck it. » j’suis en train de péter un câble. y a tout qui se mélange dans ma tête et j’redeviens un foutu bordel. j’te déteste. j’te hais. « maybe i’m fucked up. and maybe i’m a whore but i never play with you. never. what do you think ? you can’t treat me like i am nothing. i am a person. a fuckin’ human. » putain mais merde. pourquoi ? « you’re the worst. i don’t even know why i fall in lo.. » j’ferme la bouche, rapidement. non. j’inspire lentement, les mains toujours tremblantes. « fuck you. » et j’tourne les talons. j’pars à la dérive. j’pars en courant. j’entends les bruits des klaxons qui retentissent, les voitures qui pilent et les insultes qui viennent avec. mais j’m’en tape. je m’en tape de tout ça. t’es pas mieux que les autres. t’étais le seul à me maintenir un tant soit peu et tu viens de me cracher dessus. va au diable. crève. agonise. fais ce que tu veux du moment que tu sors définitivement de ma vie. moi, j’ferais en sorte de m’éteindre dans mon coin mais j’veux plus jamais entendre rien que ton prénom.

Mais Camila, l’problème, c’est qu’elle est persuadée d’être le mal incarné et que Victor aime s’acharner sur elle. C’est faux, mais elle l’entend pas, elle veut pas l’comprendre. Mais lui, aussi, il comprend pas comment il peut ne pas réussir à parler. Les mots, comme d’habitude, reste coincé dans sa gorge, et à chaque fois c’est la même chose. Toujours la même chose. Il encaisse ce qu’elle lui dit. Il a envie d’lui hurler que non, elle n’est pas folle, qu’au contraire, c’est juste le monde autour qui fait de la merde et qu’elle pourrait être la reine de son monde. Qu’il pourrait se tenir à ses côtés pour la voir brûler les champs de blé et le sillage, elle pourrait raconter son histoire dans un livre qui la rendrait riche, et Victor se tiendrait toujours dans son ombre pour l’aider à accomplir son grand combat. Puis elle commet la gaffe de trop. Celle qui l’fissure, le Victor. La gaffe qui vous fait perdre le contrôle de tout, et il a l’impression qu’un tank est en train de l’écraser de tout son poids. Elle finit par partir, et lui, il est incapable de la retenir. Ils sont brisés, tous les deux. Ils ont vu l’horreur, le sang, la peur et l’effroi. Ils savent pas communiquer. Victor encore moins. Il sait qu’il devrait parler, que sa langue se délit mais s’il le fait, qui ne dit pas qu’il finira pas par s’écrouler lui aussi ? Il serre les poings, et il arrête de la voir dans la brume de la matinée qui commence à débarquer. Elle s’est enfui en laissant un parfum fruité dans les airs, et Victor a cette impression qu’il ne pourra plus jamais regarder ces yeux voraces qui l’assassinait souvent. Il aurait voulu lui dire que lui aussi, lui aussi il était en train d’aimer. Et ce petit mot, il s’est glissé dans les failles du rocher pour venir le toucher directement en pleine gueule. Tout son être lui criait de la poursuivre mais c’était la peur qui le maintenait. Alors au moins, il y avait quelque chose de positif. Il avait accepté l’inacceptable. C’était là, en face de lui depuis le début et il n’avait pas saisi l’occasion d’en faire quelque chose. Il aurait pu toucher le bonheur du bout des doigts si son cerveau ne s’était pas verrouillé comme ça pour lui cacher cette abominable vérité : il aimait Camila.