Le problème c’était ça. C’était pas juste que j’étais attendri. C’était pas juste que j’étais attaché. C’était pas juste que je devenais sentimental et que je voulais l’épargner, par bonté, touché par une certaine fragilité ou sensibilité de la demoiselle. Non. Si ça n’avait été que ça, ça aurait été plus simple. Le truc, c’était que je pourrais les lui dire ces mots, ça ne serait pas un mensonge. Le truc c’était que j’étais vraiment en train de tomber amoureux de Belle. Alors oui j’avais besoin d’elle, et si elle ne me quittait pas, si elle ne m’envoyait pas balader, probablement qu’elle m’aurait dans ses basques éternellement. Se tournant face à moi, la jeune femme sourit en m’écoutant, reprenant la parole pour me signifier qu’elle ne me laisserait pas, que je devais arrêter de le lui réclamer, scellant ses mots d’un baiser. Ma bouche répondait à la pression de la sienne, retrouvant ce contact, retrouvant la saveur de ses lèvres avec une sensation exquise. J’étais complètement fichu… Accro. Mordu. Et elle ne me laisserait pas. Mon visage s’écarta du sien pour reprendre mon souffle. « Tu accueillerais le grand méchant chez toi pour la nuit, petit chaperon rouge ? » demandai-je alors en référence à son déguisement de la veille. Mais comme si parler d’Halloween pouvait rouvrir la brèche et nous relançait dans une discussion plus tendue, j’ajoutais : « Je vais faire des efforts Belle. J’aime pas être celui qui efface ton ravissant sourire… »

Encore une fois, c’était moi qui étais là, à la réclamer… Pas à réclamer un moment dans ses bras, non, à réclamer une nuit en sa compagnie. Pas la première. Pas la dernière. Et puis même si je ne voulais pas rouvrir la plaie de ce douloureux halloween où je l’avais blessée, je me devais quand même de promettre une chose : des efforts. C’était bien ça, c’était vague, et ça ne m’engageait pas non plus dans une voie complètement rigide qui ne me ressemblait pas. J’allais essayer en tout cas, de ne plus la heurter. Je détestais la voir pleurer, je détestais en être la cause… Elle s’écartait pour refermer la porte derrière nous, confiant savoir que cela se reproduirait, ajoutant que c’était inévitable, paroles qui me firent sentir un peu plus coupable, peut être aussi qui cela me poussait inconsciemment à lui prouver qu’elle se trompait sur ce point, et que j’étais véritablement capable de mieux, même si j’étais pas en mesure de lui offrir le statut de ‘couple’. En tout cas, j’avais la jeune femme pour moi pour la soirée, et j’avais beaucoup à me faire pardonner alors j’annonçai : « C’est toi la chef ce soir, tu décides du programme. » Je n’avais qu’à m’y plier. Même si, si ça n’avait tenu qu’à moi, on se serait fait un remix de la soirée de la veille, parce que je l’avais trouvée vraiment trop sexy en petit chaperon rouge et que je me serais fait un plaisir de lui arracher son déguisement…

Promesse d’efforts, seule promesse sincère à laquelle je me risquais puisque ce n’était pas trop engageant, et puis pour me racheter ensuite c’était le programme de la soirée que je lui confiais. La chef pour la soirée, elle avait les rênes et je n’aurais qu’à me soumettre. Je lui devais bien ça ? Sauf que quand elle évoqua le célèbre dessin animé sur lequel on avait d’ailleurs divagué lors de notre première rencontre, je regrettais un peu mes mots… C’était loin du programme sulfureux que j’aurais pu souhaiter pour nos retrouvailles. Et puis en fin négociateur, je marchandais direct : « Est-ce qu’on peut regarder ça dans ton lit ? Collés l’un contre l’autre ? Complètement nus ? » Rajoutant un peu plus de conditions à mesure que je parlais… Et une fois dans la cuisine, c’était une autre idée de punition qui traversa l’idée l’esprit de la demoiselle : « Les menottes, le fouet aussi peut être pendant que t’y es ? » rigolai-je à sa suggestion, des images SM s’imposant un peu dans mon esprit. La jeune femme commençait ensuite à fouiller dans les placard, proposant de faire à manger. Je la rejoignais en quelques pas et mes doigts attrapèrent doucement ses poignets, la stoppant dans son geste. « Hors de question que TU fasses à manger. Je t’ai gâché la soirée hier, je vais m’en charger. Faut bien que je me rattrape un peu… » Sauf que mon regard se relevait vers le placard ouvert et son contenu, les ustensiles de cuisine un peu plus loin, avant de revenir se poser sur Belle : « Ou sinon, on commande quelque chose ? » Parce que je suis une tâche et que je sais vraiment rien faire de mes deux mains dans une cuisine…