C’était celui qui gueulerait le plus, celui qui aurait le dernier mot. On était deux furies, tous les deux à vouloir avoir raison. Agressifs à souhait, la voix élevée, on se toisait. J’attrapais tes poignets pour te forcer à me regarder quand tu détournais les yeux. Sauf que j’en avais marre, j’me lassais bien plus vite que toi. Alors j’te lâchais, prenant conscience de la dure réalité de la chose. Wyatt était mort. Il était mort aujourd’hui. J’le reverrai plus. J’lui parlerai plus jamais. La morphine avait décidé de me lâcher, l’effet cache-douleur s’effaçait peu à peu et j’étais comme une bombe à retardement. J’avais soudainement trop chaud, je retirais ma chemise que je laissais tomber par terre, marchant à reculons jusqu’à me cogner les hanches contre un meuble. Meuble sur lequel je prends appui, me retournant dos à toi. Respiration haletante, coeur qui palpite, perles de sueur qui se forment dans mon dos et sur mon front, larmes qui me montent aux yeux, situation qui me frappe de plein fouet. Je sens ta main qui se pose sur mon dos trempé, tu me dis de respirer et ouais, j’essaye. Puis je peux même pas parler parce que je vais manquer d’air et finir par m’étouffer. Je puise le peu de forces qu’il me reste pour faire quelques pas jusqu’au balcon, ouvrant les fenêtres en grand pour m’appuyer sur la rambarde. J’ai les larmes qui coulent toutes seules et ça n’aide en rien à calmer ma crise de panique, au contraire. Et j’cherche même pas à’ réprimer mes sanglots. Je pleure comme une gonzesse et avec ma respiration qui fait des siennes, ça fait des bruits chelous, on dirait un animal en train de suffoquer à mort mais whatever. J’contrôle plus rien là, et y’a tout le déni, toute la pression qui retombe et ça fait putain de mal.

Chemise qui tombait au sol, il reculait jusqu'à heurter un meuble contre le mur. Il se retournait de sorte à me tourner le dos et sans vraiment m'poser de questions, je faisais quelques pas dans sa direction. Ma main se posait dans son dos et.. j'entendais sa respiration qui se faisait de plus en plus haletante. J'étais loin d'me douter qu'il était en train de faire une crise de panique. J'essayais d'être là pour lui, essayer de le calmer en lui disant de respirer. J'avais la gorgée nouée, j'étais pas bien. Sans me jeter un regard, il se dirigeait vers le balcon. Appuyé contre la rambarde, j'le suivais et il sanglotait. Des sons chelous sortaient se faisaient entendre et ça m'faisait mal de voir l'homme que j'aimais dans cet état. Des larmes coulaient sur mes joues, j'me mordais la lèvre en détournant le regard. Tous les deux on craquait, c'tait notre plus grosse altercation j'crois et avec le décès de Wyatt.. on réalisait qu'il ne reviendrait jamais. Doucement, je m'approchais un peu plus et j'tirais sur son bras pour le forcer à me regarder. J'comprenais sa douleur, j'vivais exactement les mêmes putains de maux que lui. Et j'avais déjà vécu ce mal-être y'a quelques mois. J'regrettais les mots que je lui avais balancé y'a quelques minutes, c'était juste pour le secouer un peu. Et.. ça avait fonctionné. Du revers de ma main, j'essuyais les larmes qui coulaient de mes yeux, alors que ma gorge se serrait un peu plus.  

J’arrive pas à parler, j’arrive à peine à respirer. Comme à chaque fois que je fais une crise de panique, j’suis partagé entre l’envie de me recroqueviller en boule comme pour comprimer la douleur et l’envie de me déployer au maximum comme pour ingurgiter le plus d’air possible dans mes poumons. Appuyé dehors contre la rambarde du balcon, l’air frais de la nuit qui frappe mon visage, je pleure. Je laisse mes larmes couler, mes sanglots prendre le contrôle de mon corps. Celui qui a osé lancer l’idée que les mecs ne pleurent pas est un gros con. Je te sens tirer sur mon bras pour me faire pivoter vers toi et à peine mes yeux croisant les tiens, à peine je te vois essuyer tes propos larmes, je te tire contre moi pour que t’atterrisses dans mes bras. Le geste est peut-être un peu brut, mais je contrôle pas vraiment et j’crois qu’on est plus à ça près. Mes bras tremblant t’enlacent, je te serre fort contre moi. Et t’as raison, j’suis égoïste. Parce que cette étreinte, elle est plus pour moi que pour toi. Parce que j’ai l’impression que si tu le tiens pas, si je me raccroche pas à quelque chose, j’vais m’écrouler et j’ai aucune envie de me relever après.

On était tous les deux dehors sur le balcon, lui appuyé contre la rambarde en train de sangloter. Et moi, qui étais derrière lui en traim d'essuyer les gouttelettes qui coulaient sur mes joues. Pendant que j'faisais ça, je tirais sur son bras pour l'obliger à pivoter vers moi. Lorsque Elliot se retournait vers moi, nos regards se croisaient et ça m'faisait mal au coeur de le voir dans cet état. Le voir complètement lâcher prise, pleurer sans retenue.. ouais c'tait difficile. De mon côté, j'pleurais Wyatt, j'pleurais pour ce qui s'était passé tout à l'heure. Quand j'avais surpris Elliot en train de se droguer et de boire en même temps. Debout devant l'autre, il me tirait contre lui. Geste un peu brut mais j'disais rien, je m'en foutais. Instinctivement, je m'agrippais à lui pour pas chanceler. Ses bras passaient autour de moi, m'offrant une étreinte si forte. Cette étreinte était remplie d'émotions. Mon visage dans le creux des son cou, j'fondais en larmes. « Je.. je t'aime. » disais-je dans un souffle. Je m'en foutais de pas l'entendre en retour, c'tait pas ce que je demandais à cet instant. J'voulais juste.. lui dire que je l'aimais.      

Quand tu tirais mon bras pour attirer mon attention, je ne réfléchissais pas. Ni une ni deux, je te prenais dans mes bras. Je te serrais fort, comme si j’avais besoin de me raccrocher à quelque chose, comme si c’était toi, la solution à tous mes problèmes et à tous mes maux. Et j’crois que... toi aussi, tu t’agrippes à moi. Et j’sais pas, bizarrement, ça me calme un peu. Ça calme ma crise de panique. De me dire que t’as besoin de moi autant que moi j’ai besoin de toi. Tu niches ton visage dans mon cou, moi j’ai le nez dans tes cheveux pour respirer ton odeur. J’ai plus de sanglots qui me secouent le corps mais les larmes ne s’arrêtent pas pour autant de couler, mouillant tes cheveux. Toi aussi tu pleures. Tu pleures, et entre deux sanglots, tu me dis que tu m’aimes. Tu m’aimes, Agathe? Oui, tu me l’avais déjà dit par sms. Mais j’pensais que c’était un je t’aime impulsif, comme tu aimes le chocolat ou le soleil. J’pensais pas sur c’était réellement sérieux. Et je rêverai pouvoir te dire que je t’aime aussi. Mais j’peux pas. J’pense que je t’aime. Mais les mots, ils veulent pas sortir. J’ai fait l’erreur de les sortir trop rapidement avec Vega et Cléo, et j’ai été déçu. C’est pas juste pour toi, je le sais, parce que t’as rien fait. Mais c’est comme ça. Et puis, tu sauras que le jour où je te le dirai, ça sera vrai, à 100%. En attendant, je remonte une main sur ta nuque pour te serrer un peu plus fort contre moi, pour te montrer l’amour que j’éprouve pour toi sans forcément avoir besoin de te le dire. Les actions sont plus fortes que les mots, n’est ce pas? Et je dépose mes lèvres au sommet de ton crâne pour un tendre baiser. « Je suis désolé... » Pour tout ça, pour tout ce qui vient de se passer ces dernières vingt minutes.

Je m'agrippais à lui pour l'enlacer à mon tour, ses bras m'emprisonnaient pour me serrer si fort. Tellement fort que j'pensais qu'il allait me casser en deux, un geste qui voulait dire tant de choses. Je fondais en larmes contre lui, sans pouvoir contrôler ce sentiment qui m'habitait. Mon visage dans son coeur, je sentais son souffle dans mes cheveux. On restait comme ça, pendant plusieurs minutes. Minutes qui duraient une éternité. Elliot avait arrêté de sangloter en tremblant, de mon côté j'continuais de pleurer. Un je t'aime sortait de ma bouche, ces mots j'les pensais. Des mots puissants que j'avais déjà sortis auparavant sans vraiment m'poser de questions.. Sauf qu'aujourd'hui, c'était différent. C'était sorti tout seul, d'eux-mêmes. J'étais tellement triste et dans un autre état que je m'attendais pas à l'entendre en retour. Il m'avait fait vivre un putain de calvaire ces dernières vingt minutes, j'pensais qu'il allait continuer de faire l'égoïste plutôt que de m'écouter. L'une de ses mains remontait sur ma nuque pour me serrer un peu plus contre lui. Il déposait ses lèvres sur le haut de mon crâne pour un baiser. Il me disait qu'il était désolé. Désolé pour quoi? De pas être capable d'me dire les mots? De m'avoir foutu la trouille? D'avoir agit en égoïste? Tous ces trucs combinés ensemble? Probablement. « Pu jamais Elliot, tu m'fais pu jamais ça.. » J'étais capable d'encaisser des choses mais ça, non.      

Tu sanglotais chaudement entre mes bras, alors que moi, j’étais redevenu de marbre. T’sais, ce sentiment de vide qui t’envahit quand t’as trop pleuré? Alors, j’avais pas énormément pleuré, mais comme je pleurais jamais, mon quota était très restreint. Je me contentais donc de te serrer fort contre moi, et quand tu me disais que tu m’aimais, ça ne brisait pas mon silence. Je remontais une main sur ta nuque, déposais mes lèvres sur le dessus de ta tête, avant de te présenter des excuses. Pour tout. Et la façon dont tu disais tes mots, ça me serrait le coeur. Parce que ça se voyait que ça t’avait touché. Que t’étais mal pour moi. À cause de moi. Alors j’hoche doucement la tête et viens prendre ta main pour te tirer jusqu’à ma chambre comme un enfant. Je m’allonge dans le lit par dessus la couette, j’prends même pas la peine de me désapper. Et je t’attire contre moi pour que tu fasses de même. Une fois que t’es allongée, c’est moi qui vient me poser sur toi, tête sur ta poitrine. Je tâtonne pour trouver ta main et une fois trouvée, je la fais glisser dans mes cheveux. J’suis égoïste ce soir, et j’en suis désolé. La morphine dans mon système, la sentiment de vide, la culpabilité... Tout ça, ça m’épuise, et je finis par m’endormir contre toi, l’envie de pleurer toujours bien présente.