Il tourne en rond, Rafael. Déjà prêt dans son appartement, il réfléchit. Il réfléchit beaucoup trop, d'ailleurs. Prendre la voiture, ou commander un uber. Voilà la question qui le perturbe, qui le torture. Depuis son accident, il n'a pas retouché à une voiture. Il fait attention à chaque fois qu'il traverse la rue. Il est clairement traumatisé. Pourtant, il sait que c'est con. Après tout, il s'est fait renversé à pieds, il n'a jamais rien eu quand lui il était au volant. Il fini par soupirer, et attraper les clés de sa voiture avant de quitter son appart. Il en a marre d'être comme ça, il en a marre de vivre avec cette boule au ventre permanente. Alors il va conduire, il va dépasser cette peur. Il a eu un seul accident, il y a tellement peu de chance que ça recommence. Installé au volant, il démarre doucement, commençant à avancer. Au début, il doit rouler à la vitesse d'une tortue. Il observe tout, les gens, les autres voitures. Puis après quelques kilomètres, il commence à se détendre. La confiance reprend doucement le dessus, ses muscles se relâchent et il fini même par sourire. Au fond, il est fier de lui. Il vient de réussir à dépasser sa peur, sans l'aide de personne. S'il était pas en train de conduire, il serait en train de faire une danse de la joie. Sauf que cette fameuse joie, elle est de courte durée. Tout se passe très vite, trop vite. Une silhouette qui sort de nulle part au milieu de la route, Rafael qui tourne le volant pour l'éviter, avant de piler. C'est tout tremblotant qu'il ouvre les yeux, pour voir que la silhouette est toujours debout. Il a percuté personne, il a tué personne. Il sort de la voiture à toute vitesse, se dirigeant rapidement vers la personne. « Vous allez bien ? Vous n'êtes pas blessée ? » Il est en panique, il tremble comme jamais, son coeur est prêt à exploser. Et cette personne pleure, pourtant il voit bien qu'elle n'a rien. Est-ce que c'est le stresse ? « Qu'est-ce qui se passe ? » Qu'il demande complètement perdu, sous le choc. Se jurant par la même occasion qu'au final, la voiture, c'est définitivement terminé.

les injures qui fusent dans mon esprit, les couleurs du mal qui explose pour venir tâcher mon âme réduite en cendres. il suffisait d’un appel, d’un écho de voix, d’un son autoritaire pour que tout revienne me hanter à la surface. mila elle a ses marques sur le corps qui la brûle à nouveau, comme si elles étaient fraîches, comme si elles venaient d’être infligées. elle a le corps qui lui fait mal, les souvenirs douloureux qui viennent la torturer. « t’es morte mila. » quatre mots, une promesse que je sais qu’il tiendra. la peur au fond de la gorge vient nouer mes entrailles et je suffoque dans l’appartement. fallait que je sorte, que je sente le contact de l’air frais qui viendrait refroidir les blessures qui font rage. les larmes au bord des yeux que je me retiens pour ne pas qu’elles coulent, suivant les lampadaires sans savoir où ils me mèneraient. me mèneraient-ils seulement quelque part ? je me noie dans mes pensées, dans ma crainte qu’il a réussi trop facilement à remettre en place. moi qui pensais qu’elle avait définitivement disparue, me voilà déjà en train de penser à un billet pour une autre destination. tout quitter ici, harvard, boston et tout ceux que j’ai pu côtoyer. tout oublier encore une fois, repartir de zéro pour une énième fois. à croire que mon livre n’a pas de chapitre, qu’il n’aura jamais de faim. que je change systématiquement de livre pour ne jamais revoir le méchant de l’histoire. les rêves d’une possible paix s’estompent avec cet appel, je sais maintenant que je n’avais aucune chance. je regarde face à moi sans vraiment regarder, je coupe une rue la vision brouillée par les perles salées. l’esprit brouillé par un châtiment omniprésent. un grincement, le bruit des pneus qui glissent et râpent contre le béton. je sursaute légèrement, je comprends pas tout d’suite la scène jusqu’à ce que tu sortes du véhicule. je baisse le regard, ma main contre le capot encore chaud à ma hauteur. j’efface toutes traces d’indices, celles qui pourraient te montrer la taille de mes maux. je respire doucement, cligne des yeux avant de finalement les relever vers les tiens. - non ça va, mais t’as eu ton permis dans une pochette surprise ou quoi ?! que je grogne la voix rauque d’être restée trop longtemps silencieuse. tu me demandes ce qu’il se passe, je ravale le noeud dans ma gorge qui m’empêche d’exploser et mes yeux ne cessent de soutenir les tiens. - il s’passe que je viens de casser mon rouge à lèvres préféré ! j’hausse les épaules dans mon mensonge, les mots sortent à la perfection dans une intonation qui prêterait presque à confusion. - et toi ? c’est quoi ton problème de prendre la route sans savoir conduire ? que je réplique froidement. c’est toi qui trinque pour tout les autres ce soir, pour tout les cauchemars et les voix qui cognent dans ma tête sans me laisser de répit. t’as heurté le mauvais rocher.

Il ne peut pas croire que ça vient réellement de se passer. Comme si le cauchemar était devenu réalité. Deux mois à ne pas vouloir conduire, à refuser de prendre le volant, pour éviter un nouvel accident. Deux mois de peur, pour que tout devienne réalité ce soir. Le sort s'acharne sur lui. Il voit directement cela comme un signe du destin. Mais avant de penser à lui, de se concentrer sur son état, il court rapidement vers la jeune fille à qui il aurait pu ôté la vie. Et ça ne se passe pas du tout comme prévu. Elle se met à hausser le ton, directement. A tout lui mettre sur le dos, à le pourrir. Son stresse, cette peur omniprésente en lui, elle disparaît dans la seconde. « Excuse-moi ? C'est toi qui te jette au milieu de la route sans regarder et ça va être ma faute ? » Il va la tuer de ses propres mains. Ou redémarrer pour écraser cette espèce de garce. Le pire, c'est sûrement la suite de ses paroles, la réponse à sa question. « Un rouge à lèvre ? Il y a vraiment que les pouffes superficiels dans ton genre pour pleurer pour ça. » Il ne se retient plus, il lâche tout. Sûrement car la peur a été si grande, qu'il passe ses nerfs sur elle. Mais elle le cherche, elle le provoque. Elle ressemble juste à une de ses princesses qui ne font jamais rien de mal, qui ne prennent jamais leur responsabilité. C'est toujours la faute des autres, après tout, elles sont parfaites. Elles le pensent, en tout cas.  « T'es mignonne, mais je sais conduire. C'est pas ma faute si tu sais pas regarder où tu vas. » Il n'est pas en faute, il n'a rien fait de mal. Même s'il tremble encore, même si son coeur continue d'être prêt de l'explosion. Mélange de peur et de colère. Il ne compte pas s'excuser comme prévu, il ne compte pas culpabiliser pour ce qu'il vient de se passer. Au vu de l'énergumène face à lui, il n'a pas envie de faire le moindre effort. « La princesse que tu es devrait rentrer chez elle pour pleurer, plutôt que de faire chier les gens. » Qu'il lâche en soupirant, retournant près de sa voiture pour récupérer son paquet de cigarette. Il a besoin de fumer, il a besoin de faire redescendre la pression. Il ne peut pas reprendre le volant de suite, surtout pas dans cet état. Ce serait bien trop dangereux, pour lui et pour les autres.

tu réponds, tu grognes, tu craches. moi je reste juste impassible, ne trahissant aucune émotion parce que si je m’autorisais à en avoir, là, je finirais pas tout lâcher. j’ai pas envie, par orgueil, par fierté, préférant cacher les douleurs d’hier derrière un brin d’arrogance et de superficiel. je sais bien le faire, t’as vu ? je suis forte maintenant à ce petit jeu. toi, tu plonges sans réfléchir. t’es dans tout tes états, je peux le voir quand ta poitrine se gonfle et se dégonfle trop brusquement. trop fort. je peux le sentir à ta respiration qui fouette mon visage, légèrement saccadée, tremblotante comme si tu venais de me tuer pour de bon. sûrement que t’aurais dû, tu m’aurais peut-être rendue service. t’aurais pas dû freiner, ça t’aurais évité à toi aussi d’entendre mes conneries. ma voix crispante. mon insolence. - et si ce rouge à lèvres il avait eu une valeur sentimentale ? tu l’ouvres sans savoir. tu juges à l’apparence toi aussi. comme tout les autres, t’as rien de mieux, rien de pire. t’es qu’un mec banal qui se fond dans la masse, qui ne voit rien. aveuglé par les idéaux de ce monde. je m’en tape, t’es personne de toute façon et demain je t’aurais déjà oublié. - tu pleures pour quoi toi, dis moi ? parce que faut une bonne raison pour pleurer, faut une raison valable sinon t’es directement rangée dans la catégorie « pouffe ». - le piéton est toujours en raison, alors je m’en branle de regarder où j’vais. j’hausse à nouveau les épaules, je m’en foutiste à souhait. - ah bon ? tu crois ? je te laisse me traiter de princesse, au fond ça me fait bien rire. je suis le rôle que je te joue ce soir, je peux être qui je veux quand je veux. véritable caméléon de l’âme, de l’esprit. aujourd’hui tu me détestes, demain tu peux m’aimer à en crever. - tu me ramènes alors ? je suis perdue. que je souffle sans attendre la réponse, je grimpe déjà à l’intérieur de ta caisse en volant ta clope au passage. - merci. que je lâche avant de refermer la portière en aspirant une bonne taffe.

En plus d'avoir failli tuer quelqu'un, il se retrouvait face à une fille qui est tout ce qu'il déteste. Il comprend pas très bien le message que l'univers essaye de lui faire passer ce soir. Il sait juste qu'il aurait dû prendre un uber. Ou encore mieux, rester enfermé chez lui devant la télé. Il ne serait pas dans cette situation, il ne serait pas à deux doigts d'exploser face à cette fille qu'il ne connait pas. « Oh, toutes mes excuses, c'est vrai qu'un rouge à lèvre c'est ultra important. » Une valeur sentimentale, elle se fout de lui là. Il essaye de garder son calme, il tente de reprendre son calme. Ce qui serait beaucoup plus simple s'il ne l'avait pas en face d'elle, faut avouer que c'est pas simple de se sentir mieux avec une fille comme elle. « Quand il se passe quelque chose de réellement grave. » Elle est si stupide que ça ? On pleure quand on perd quelqu'un, quand on se fait mal, pour pleins de raisons. Mais certainement pas pour un rouge à lèvre cassée. Mais elle continue de chercher, elle continue de le provoquer. Il préfère juste serrer les poings, soupirer un bon coup et ne rien dire. Cela ne sert à rien de discuter avec elle de toute façon, il le comprend. Ils ne seront jamais d'accords, alors à quoi bon ? Retournant à sa voiture, il s'allume directement une clope. Mais il n'a pas le temps d'en profiter qu'elle lui prend des mains. « Fais-toi plaisir bien sûr. » Qu'il lâche en levant les yeux au ciel, avant de la voir rentrer dans la voiture. Avant de comprendre qu'elle veut qu'il le ramène. « Tu rêves là, sors de ma voiture. » Elle le traite comme de la merde, et en plus il doit la ramener ? Jamais de la vie. Puis, faut avouer qu'avoir la responsabilité de quelqu'un en conduisant, ça lui paraît insurmontable à l'heure actuel. Il est déjà même pas sûr de réussir à conduire jusqu'à chez lui, de pouvoir redémarrer. Alors certainement pas avec elle. « Je déconne pas, je te ramènerais pas. » Il peut pas. Il en est incapable.

le rouge à lèvres. l’excuse merdique pour cacher la vraie, de toute façon t’as pas besoin de savoir pourquoi je pleure ce soir. qu’est ce que le goût de mes larmes peuvent bien te foutre ? alors que je te sorte un bon vieux mytho ou encore une histoire vraie, qu’est ce que ça changerait à ma vie ? à la tienne ? pas grand chose. alors je préférais attraper le seul moyen que j’ai sous la main pour oublier un peu, pour ne plus y penser. toi. t’es le seul moyen que j’ai croisé depuis t’aleur.  - peu importe la raison, l’importance, le degré de gravité. quand on pleure, c’est forcément que ça nous touche. chacun à sa manière de verser des larmes. toi, t’es personne pour juger l’importance d’un mal. rouge à lèvres ou pas. j’hoche la tête, évidement que ta clope me fait plaisir. je recrache même la fumée contre ton visage. t’es facile à énerver, à irriter et moi ça m’amuse. je vois ta mâchoire qui se crispe, la surprise et la peur sur ton visage quand je te demande de me ramener. - je bougerais pas. je ramène mes jambes en tailleurs, pour te prouver que je compte vraiment pas sortir d’ici. - alors tu devras te contenter de ma compagnie toute la nuit. la voix qui se fait un peu plus douce, moins hargneuse. moins teigneuse. mes yeux s’envolent vers les tiens, à peine perceptible dans la pénombre d’un clair de lune. y’a quoi dans tes yeux ? y’a quoi dans ta peur ? j’sais pas, t’as ce quelque chose qui m’intrigue un peu. ou c’est peut être juste la fatigue, la bonne excuse pour ne pas rester toute seule ce soir. un mélange de tout ça peut être aussi. j’en sais trop rien, j’ai pas envie de me poser toutes ces questions à la con. - t’as faillit m’tuer, j’ai le droit de savoir ton prénom ? que je demande en te rendant ta clope, plutôt ce qu’il en reste.

Elle est incroyable cette fille. Mais pas dans le bon sens du terme. Là, il n'y a rien qui va, et il n'arrive pas à la comprendre. Lui qui aime cerner les gens, c'est sûrement impossible avec elle. Et elle continue sur cette histoire de pleure, comme s'il pouvait croire une seule seconde qu'il y a une bonne raison de pleurer pour un rouge à lèvre. Alors encore une fois, il ne dit rien. Il préfère se taire, se dire que de toute façon elle va partir de son côté et lui du sien. Qu'ils ne se reverront jamais et qu'il pourra simplement essayer d'oublier ce qu'il s'est passé. Mais non, vu qu'elle s'installe tranquillement dans la voiture. Et qu'évidemment, elle continue de faire sa chieuse. « Tu te fous de moi ? » Il arrive pas à croire qu'elle décide de s'imposer de cette manière. Même si au fond, il ne devrait pas être très surpris vu son comportement plus tôt. « Tu me parles comme une merde, tu m'incendies pour rien, et en plus tu veux m'obliger à te ramener ? » Il se dit que peut-être, en lui rappelant ça, elle va comprendre et partir. Mais il n'y croit qu'à moitié, il ne pense pas qu'elle soit du genre à changer d'avis. Et elle doit sûrement être très têtue. Alors il s'installe au volant, coupant le moteur qui tournait encore, avant de tourner la tête vers elle. « Tu finiras bien par partir. » Il l'espère en tout cas. Il ne se sent absolument pas de conduire avec elle à côté. Avec personne de toute façon. Il aimerait juste appeler un ami à lui pour qu'il vienne le reconduire chez lui, et aller se coucher. Mais c'est impossible pour l'instant. Impossible qu'il lui explique le problème. Il ne va certainement pas se montrer vulnérable devant une inconnue. « Rafael, et toi ? » Il n'a même plus la force de se battre, alors qu'il s'allume une nouvelle cigarette vu le peu qu'elle lui rend. Ca doit sûrement être ça son enfer au brun, être bloqué dans sa propre voiture avec une fille qui ressemble au diable.

je secoue la tête. non, je suis même très sérieuse. je compte pas bouger, j’aime bien l’odeur de ta caisse. y’a ton parfum qui flotte encore dans les airs, elle a quelque chose de.. rassurant ? ou c’est juste que je peux trouver un rien protecteur après l’appel. mais je suis bien ici, j’ai pas envie de rentrer. pas envie de me retrouver avec moi-même, mon passé et les démons qui y habitent. - tu m’as presque renversée avec ta voiture, tu voulais que je réagisse comment ? que je te remercie ? non, t’as pas été assez rapide pour que je te dise merci. la voiture qui tremblait encore s’arrête enfin, tu coupes le moteur pour installer un calme effrayant. ta voix qui résonne empêche le silence de nous bouffer, les pensées de me rattraper. - tu peux me ramener aussi, tout simplement. ça irait plus vite et tu seras débarrassée de moi. les mots qui grincent entre mes dents, mon regard qui se défile vers le ciel populaires en astres ce soir. j’ai pas envie que tu vois ma détresse, que tu vois que j’ai carrément pas envie que t’écoutes ce que je viens de te dire. je veux que tu restes, c’est tombé sur toi, je dois être à moitié dingue aussi. - il sent la chaleur ton prénom, tu viens d’où ? t’es sûrement pas américain toi. toi et tes traits prononcés, toi et tes cheveux bruns. - mila. juste mila parce que je crois que le reste n’existe plus. que j’ai tout détruit en refusant d’entrer dans la case parfaite pour moi. pour eux surtout.

Il a envie de la sortir de force de sa voiture. Mais étant donné qu'il a déjà failli la tuer, il risquait pas de se la jouer violent avec elle. Surtout que ce n'était pas son genre. Il lève les yeux au ciel à ses mots, tournant la tête vers elle. « Non, mais t'étais pas obligée de m'agresser. » Certes, elle a dû avoir peur elle aussi. Ca a peut-être été le stresse qui l'a fait s'énerver comme ça. Mais faut avouer que ça a dû mal à passer pour Raf. Parce que lui aussi, ça l'a bien stressé cette situation. Et le pire, c'est qu'elle a raison par la suite. S'il la ramène tout de suite, il se débarrasse d'elle. Mais rien que l'idée de redémarrer la voiture pour recommencer à conduire, lui donne la nausée. Il sait pas comment il va s'en sortir là, c'est la merde. « J'ai pas envie de te ramener, j'ai.. j'ai des choses à faire. » Excuse de merde. Béguaillement qui renforce le côté mensonge de ses paroles. Il est pathétique pour le coup, il faut l'avouer. Mais il espère que ça va passer, il espère qu'elle ne va pas se poser de questions. Il a vraiment pas envie de parler de toutes ses angoisses avec elle. Puis, au vu du spécimen, elle serait capable de se foutre de sa gueule. « Je viens du Brésil. » Faut dire qu'il a pas la tête du bon américain, il a encore ce léger accent qui le trahit facilement. Mila. Il se voit déjà raconter à ses potes de faire gaffe à une certaine Mila, qui ressemble seulement à une pouffe. Lui qui ne juge jamais aux apparences, il faut croire qu'il fait une exception pour ce soir.

- p’têtre. t’as sûrement raison. j’étais pas obligé, tu m’as prises en flagrant délit de faiblesse et je savais pas comment me défiler. alors la meilleure solution, c’est l’attaque chez moi. cloîtrée dans ton tas de ferraille éteint, beaucoup trop sobre pour arrêter de réfléchir. la voix de mon frère encore fraîche résonne dans ma tête, les menaces vives de faire couler le sang viennent me serrer le cœur au moment même où j’y repense. - tu mens. que je réplique à peine ta phrase terminée. je recrache le dernier halo de fumée légère, embrumant l’intérieur de la carcasse avant de jeter le mégot par la fenêtre. - pourquoi tu mens ? tu peux juste dire que tu m’aimes pas donc tu me ramèneras pas, pourquoi tu te fatigues à me sortir une excuse à la con ? tu bégayes, tu mens mal en plus. t’es sûrement quelqu’un de trop honnête pour moi, de trop droit. - tu veux vraiment que j’me casse ? que je demande en haussant légèrement la voix, la main qui se pose sur l’ouverture de porte prête à descendre. - bonne soirée rafael. en fait, j’ai pas envie d’attendre ta réponse. je la connais déjà, alors je vais te donner ce que tu veux depuis t’aleur. je vais me barrer. je claque la portière derrière moi une fois les deux pieds posés au sol, je retrouve le vent glacé d’une nuit tourmentée. morbide. froide, un peu comme moi. comme toi aussi ce soir, t’as le regard et le teint livide.