de ton pouce & ton index tu fais tournoyer cette petite cuillère. le sucre fond. les minutes passent. tu l’attends à cette table d’une petite boulangerie française. elle doit lui rappeler ses cours d’été, c’est ce que tu t'aies toujours dit en passant devant. t’as jamais eu la chance d’aller en France toi mais t’iras un jour. il le faut bien. croissants à côté tu patientes. il est encore tôt mais les rues sont pleines. le monde est actif quand tu es passive. tu laisses le temps s’écouler comme si les minutes n’avaient aucune importance. comme si le temps n’était pas de l’argent. comme si le temps n’était pas maître de tout ce que tu pourrais accomplir. tu portes ton café à la crème de lait à ta bouche, il te réchauffe. t’as déjà pris la parole devant des caméras, devant des gens qui crachaient sur tes convictions pourtant tu n’as jamais été autant anxieuse qu’aujourd’hui. pourquoi après tout ? ce n’est que Charlie. là est le problème, c’est Charlie. pas n’importe qui et son avis compte. tu sais déjà qu’au fond il trouvera ça stupide. tout le monde trouve ton choix stupide, même toi. c’est puéril, pourquoi as-tu besoin de faire ça pour lui montrer que tu sais ? pourquoi faire ça pour lui faire regretter ses cachoteries ? finalement tu l’aperçois, te lèves et le salues d’une bise sur la joue. « je t’ai pris un croissant » on a connu mieux comme salutation. surtout entre vous. « j’avais envie de te voir. » et aussi envie de te confesser.

On a pris rendez-vous, ça faisais longtemps. Normalement il y a toujours la petite Isis qui te colle dans les pattes ou un de mes deux meilleurs amis dans le coin. Là, on se retrouve dans une boulangerie française, rien que toi et moi. J'suis pas nerveux - j'le suis jamais, mais je ressens l'envie de te revoir plus intense que jamais. Tu m'as manqué, mais je ne te l'admettrai surement jamais. Pile à l'heure, j'entre dans la petite boulangerie et constate que t'y est déjà. Ayant déjà été ma petite amie, tu sais parfaitement que je déteste attendre alors t'as surement fait exprès d'arriver avant moi. Je marche jusqu'à toi la tête haute, avant de balayer mon air sérieux pour laisser place à un petit sourire. T'es resplendissante, je me demande si t'as fait exprès de te mettre belle pour moi, aussi. Je t'embrasse alors les joues. Merci. Au fromage ? Les croissants au fromage sont mes préférés, mais bon, je raffole des croissants tout court alors ça me gênerait pas de l'avoir au beurre. Ah ouais ? Mon sourire s'élargit. Oui, il est hors de question que je te dise que j'avais envie de te voir aussi... du moins, pas avant que tu me flattes un peu l'égo. Faut le mériter, c'est normal. Je t'ai manqué tant que ça ? Je m'assois face à toi, puis tourne la tête vers le tableau où la liste des prix est affichée. Cette boulangerie me rappelle la France. C'est exactement ce que tu avais prédit. Mais je doute que la qualité soit la même.

son visage apparait dans ton champ de vision. enfin t'aimerais dire mais il est parfaitement à l'heure, t'as juste toujours tendance à être en avance. bonne ou mauvaise habitude, à voir. ton regard ne quitte pas son visage, que tes mains ont tant de fois parcourues, tes lèvres avec. il est beau Charlie merde mais tu n'oublies pas. t'aurais pu te venger comme tu peux le faire trop souvent mais l'amour que tu lui portais t'en avais empêché, tu n'étais pas prête à rentrer en guerre. surtout pas avec lui. tendant tes joues pour y recevoir sur chacune un baiser, tu te replaces sur ta chaise, lui souriant. "vu l'heure je pensais qu'un pur beurre serait mieux mais je peux t'en prendre un autre" t'étais pas à un croissant près puis tu savais qu'il préférait au fromage mais tu n'en as fait qu'à ta tête. considérant que le matin un au beurre serait meilleur, t'as peut être tort. souriant de nouveau quand son sourire s'élargit tu hochas la tête. t'es tellement toi & en même temps timide devant lui. t'as tellement pleuré pour cet homme, tu t'es tellement remise en question, tu t'aies même reproché des choses qui n'avaient pas lieu d'être. "tu m'as manqué, c'est tout." tu sais qu'il aimerait que tu lui dises qu'il t'a profondément manqué mais tu n'allais pas lui faire ce plaisir, il savait que tout ne lui était pas dû avec toi. "c'est ce que je me suis toujours dit." mais il le savait, il savait beaucoup de choses sur toi. de ton histoire à ton caractère passant par ta façon de faire. "j'aime pas tourner autour du pot...je fréquente quelqu'un" commenças-tu "je t'ai dit que ma mère avait eu un amant. le mec avec qui je sors est le fils du sale type." et t'espérais qu'il allait comprendre pourquoi tu faisais ça, où tu voulais en venir. tant qu'il ne s'énervait pas après tout, tu prenais n'importe quelle réaction.