Je ne le montrerai pas, mais revoir Serah après six mois d’absence sans oser lui donner de nouvelle, me rend légèrement craintif. Je sais qu’elle est en colère après moi, même si j’trouve que sa raison est complètement futile, mais je ne sais pas à quel point. Je vais le savoir très bientôt, puisqu’elle m’a promis de se défouler sur mon corps à grands coups de poings, pour tout le mal que j’ai pu lui faire. Mon numéro de chambre donné, il ne me restait plus qu’à t’attendre. Tu venais de me dire par texto que tu arrivais, alors je me suis tenu près de la porte et dès que j’ai entendu du bruit contre la porte, je t’ai ouvert, bombant le torse prenant une grande respiration… m’attendant au pire.

La porte s’ouvre alors que j’ai fulminé sans arrête depuis ma chambre jusqu’à la tienne. En un rien de temps, j’ai traversé les étages et les chambres nous séparant pour me retrouver devant cette porte et malgré ma frustration, lorsque je te vois, j’ai l’impression que c’est moi qui reçoit un poing en plein estomac. J’ai un mouvement de recul et fronce immédiatement les sourcils en te détaillant malgré moi de la tête aux pieds. T’as pris des muscles ou j’suis cinglé? Je serre la mâchoire et me ressaisis rapidement, me secouant un peu en faisant un pas vers toi, l’air menaçante. « T’es qu’un putain d’enfoiré! Un connard de la pire espèce Silas Rothschild! » oh, ce que ça soulage de te le dire en face, avançant toujours vers toi en t’obligeant à reculer dans ta chambre. « Maintenant parle avant que je ne change d’avis. » Je te crache ses paroles au visage avec tout le venin qui se trouve en moi.

Lorsque tu m’aperçois, j’ai adoré le mouvement de recul que tu as eu. Effectivement, je me suis mis à la musculation pour m’aider dans mon deuil. Tu me fais reculer, bien malgré moi et je te retrouve. Tu m’as manqué, tu le sais ça ? Mais cela n’avait rien à voir avec la satisfaction que j’ai pu avoir lorsque tu m’as envoyée en pleine gueule ta phrase de frustration. J’aime ça lorsque tu m’donnes de l’attention comme ça. Je te regarde à mon tour de la tête aux pieds et toi, te bouffant du regard, tu n’as pas changé. Toujours aussi… baisable et magnifique. Dire que j’ai tout gâché en un rien de temps alors que j’ai pris du temps à t’avoir pour moi. Chose désormais révolue, je dois m’y faire. « J’sais pas, j’aime bien t’entendre me dire des obscénités. » Ma voix rauque, enveloppes la plénitude de la pièce avant d’ajouter. « Tu me détestes peut-être là, mais j’vais réussir à apaiser la haine que tu peux ressentir à mon égard ! » Je me retourne pour me diriger vers le mini-bar. « Tu veux quelques choses ? » Est-ce que j’essayais de gagner du temps ? Probablement, parce que lorsque j’aurai fini, tu partiras et je n’aurai plus la chance de te côtoyer.

« J’sais pas, j’aime bien t’entendre me dire des obscénités. » T’as pas le droit Silas. T’as pas le droit de me regarder avec ces yeux-là, de me regarder comme si j’étais encore à toi, comme s’il te suffisait d’hausser les sourcils pour que mes fringues tombent au sol ou de sourire pour que mon corps s’embrase. Non, t’as pas le droit parce que t’as tout gâché, pas moi. T’as tout foutu en l’air et il est trop tard maintenant pour revenir en arrière. « Tu me détestes peut-être là, mais j’vais réussir à apaiser la haine que tu peux ressentir à mon égard ! » Je serre encore plus la mâchoire et les poings, les dents me font mal et mes jointures sont blanches, mais ça ne m’empêche pas de te suivre de près alors que toi tu vas trouver à boire comme si c’était la moindre des choses. « Tu veux quelques choses ? » Je m’approche de quelques pas encore et attrape les deux verres en vitre qui sont fournis dans ta chambre avant de les balancer contre le mur le plus près où ils explosent dans un bruit de verre strident. « Non, j’veux pas boire. J’veux que tu parles sinon c’est ta gueule après les verres. »

Tu attrapes les verres et ceux-ci se brisent en morceaux un peu éparpillés dans la chambre. T’es si proche qu’il ne me reste plus qu’à étirer le bras pour t’attirer contre moi. Et en moins de temps pour que tu puisses comprendre ce qui était en train de se passer. Mes lèvres se retrouvent sur les tiennes, mais je les retirer presque aussitôt, avant que tu me mords. « Ça… c’est pour te faire fermer la gueule. » Je t’attrape par les hanches et te dépose sur le lit avec précaution, alors que je me retourne pour aller chercher un balai et un porte-poussière. « Ça serait dommage que tu te blesses à cause de quelques éclats de verre. » Je me penche et commence à nettoyer ton dégât. « C’était pas sur moi que t’étais sensé passer tes nerfs? Non parce que les verres t’ont rien fait. » Je suis étrangement calme, ce qui est rare. On dirait que je suis absolument zen, alors qu’à l’intérieur, je bous de rage. « J’peux connaître la vraie raison de cette haine que tu m’accordes ? » Je la sais à moitié. Je sais que c’est parce que j’ai choisi mon père mourant au lieu de toi, mais sinon…

J’suis tellement, tellement frustré contre toi Silas que j’en suis à tout péter autour plutôt que de devoir te toucher. Parce que ouais, si on est honnête tous les deux, j’ai peur de trop m’approcher. Te toucher pourrait être fatal pour moi, mais alors que je compte bien garder mes distances et m’apprête à reculer, tu m’attires contre toi et plaques tes lèvres contre les miennes. « Ça… c’est pour te faire fermer la gueule. » Je n’ai même pas le temps de fermer les yeux, déjà, tu te recules et me tiens par les hanches pour m’assoir de force sur ton lit. « Ça serait dommage que tu te blesses à cause de quelques éclats de verre. » Je te regarde sans même savoir quoi dire ou faire. Je ne m’attendais certainement pas à ce que tu fasses ça et j’ai encore la sensation brûlante de tes lèvres sur les miennes. Fuck. « C’était pas sur moi que t’étais sensé passer tes nerfs? Non parce que les verres t’ont rien fait. » Je me relève, comme piqué par une mouche ou alors simplement parce que je réalise que je te donne un peu trop de pouvoir sur moi. « Va t'faire foutre. » C’est certainement pas toi qui me fera assoir Silas. Tu balais calmement et je ne pense qu’à le prendre ce foutu balai et te l’enfoncer dans le derrière. « J’peux connaître la vraie raison de cette haine que tu m’accordes ? » Je lâche un rire sec en secouant la tête et lève les bras dans les airs. « Tu peux pas être sérieux là. » Je fais quelques pas en me tenant malgré tout loin des éclats de verre. « Tu sais très bien pourquoi j’te déteste comme ça, me fais pas croire que c’est simplement pour me poser la question que tu m’as fait venir ici. » Je marche dans la direction opposée à la tienne et m’arrête, me retournant pour te regarder en claquant ma langue contre mon palais. « Ma patience se tari rapidement, parle Silas. » Je reviens vers toi et m’arrête encore à une bonne distance. « Et ne t’avises pas de me retoucher, j’te brise les doigts. »

Qu’est-ce qui te prends Serah ? Il me semble que je t’ai déjà vu plus féroce que ça, non ? Aurais-tu les jambes tremblantes lorsque j’ai déposé mes lèvres contre les tiennes ? Ouais, parce que moi, j’avoue que ça m’a fait drôle, comme si je revenais six mois en arrière et que je pouvais encore te tenir dans mes bras. Ça serait immonde de te dire que tu m’as manqué. Que nos délires m’ont manqué ? Pas simplement, nos parties de jambes en l’air, mais tout m’ont manqué chez toi. Et j’aimerais bien savoir les véritables raisons, sauf que tu ne sembles pas d’accord. Tu sembles penser que je sais déjà tout. « Je t’assure que j’connais pas la raison. » Et c’est bien vrai et c’est dommage, parce que j’sais pas si je serai en mesure de passer à autre chose, sinon. Même si j’en ai clairement pas envie. Sois dit en passant. Je me relève pour aller jeter les éclats de verre dans la poubelle et me dirige de nouveau vers toi. Ce ne sont pas tes menaces qui vont me faire peur. Si tu veux les casses mes doigts, vas-y, ça sera toi la pire, au final. Alors je m’approche toujours et encore plus de toi, mais je fais en sorte de pouvoir te couper dans ton élan de fuite, si l’idée t’en prenait pour finalement te dire : « Je t’ai menti. J’ai rien à te dire, parce que de toute façon, ça changerait rien. Tout c’que j’voulais c’était te revoir, parce qu’aussi bête que ça peut paraître, tu m’as manqué, en vrai. » Là Silas, tu vas y avoir droit à cette gifle. Mais autant être honnête avec elle, non ? Au pire, elle s’en ira et tu feras, mais une chose est certaine, tu ne la laisseras pas sortir de ta vie aussi facilement. Parce que selon toi, elle en vaut la peine. Elle vaut la peine que tu te battres pour elle.

« Je t’assure que j’connais pas la raison. » J’te crois pas Silas, j’peux pas te croire. Tu peux pas être assez stupide pour ne pas savoir à quel point tu m’as tout arraché quand t’es parti comme ça. « Bullshit. » T’as laissé un vide énorme dans ma poitrine où mon cœur était avant et j’sais plus quoi faire pour le remplir. Tu me bloques le chemin, te plantant devant moi alors que je te regarde d’un œil mauvais. « Je t’ai menti. J’ai rien à te dire, parce que de toute façon, ça changerait rien. Tout c’que j’voulais c’était te revoir, parce qu’aussi bête que ça peut paraître, tu m’as manqué, en vrai. » Tu peux pas me dire ça, tu peux juste pas. Mon bras se lève sans que je ne puisse le contrôler, ma main vole et avant de te percuter, mes doigts se referment pour former un poing que j’abats directement sur ta mâchoire dans un craquement dégueulasse qui peut tout aussi bien venir de toi que de moi. Je recule d’un pas en secouant ma main, c’est que t’as la tête dure! Du plat des deux mains je te pousse contre le torse pour te faire reculer. « Ta gueule! » Je te pousse à nouveau, une et deux fois. « FERME TA PUTAIN DE GUEULE! » Un nouveau coup de poing, dans le ventre celui-là alors que je tremble de tout mon corps.

Crois-moi ou non Serah, je ne connais pas la raison de ton refus de pardonner mon départ précipité. Peut-être qu’un jour, tu comprendras que je n’avais pas le choix et que si j’avais pu, je t’aurais amené avec moi en Allemagne. J’aurais adoré t’avoir à mes côtés, mais tout cela était impossible. La tonne de papier que j’ai dû m’occuper, les sympathies des gens venus à l’enterrement de mon père, les pleurs de ma mère, je n’aurais pas eu la force et surtout, je n’aurais pas voulu que tu me voies dans cet état lamentable. Je ne sais pas à quoi, j’ai pensé revenir comme ça et te parler. J’aurais tout simplement pu continuer ma petite vie sans tenir compte de ta présence, mais tu me manquais et ça, je n’y pouvais rien. Sauf que cela n’a pas l’air à t’enchanter. Un énorme craquement se fait entendre lorsque tu m’assignes un coup-de-poing sur la mâchoire. Ma main vint rejoindre mon visage sur le coup, alors que je serre mes dents. Je me demande même si je ne saigne pas de la lèvre… Je croyais que tu t’étais défoulé, je ne m’attendais pas du tout à recevoir ce coup-de-poing dans le ventre qui me fit perdre le souffle. Je m’effondre sur le sol et retiens les larmes qui menacent de franchir la barrière de mes yeux. « Okay, c’est correct, j’ai compris... » Dis-je avec énormément de difficulté, reprenant mon souffle peu à peu. « Tu peux t’en aller, j’te laisse tranquille. » Je me relève tranquillement pour m’asseoir sur le lit, sans te regarder. Non, je préfère que tu t’en ailles. Hors de question que tu me vois dans cet état de faiblesse, par ta faute. J'ai compris, tu ne veux plus me voir et tu souffres, mais crois-moi Serah, je souffre aussi.

Je tremble et je peine à tenir sur mes jambes. J’arrive pas à croire que je t’ai frappé comme ça et pourtant, depuis le temps que j’ai envie de le faire, non, que j’ai besoin de le faire… j’aurais cru que ce serait plus satisfaisant que ça. Sauf que d’te voir plié en deux, les larmes aux yeux? J’aurais cru que ce serait l’ultime victoire, mais ça ne fait que me blesser d’avantage. « Okay, c’est correct, j’ai compris... » J’avale de travers et retiens les larmes qui veulent couler. Putain, hors de question que je chiale. « Tu peux t’en aller, j’te laisse tranquille. » Tu t’assois tant bien que mal sur le lit et moi je continus de trembler comme une feuille. J’peux pas partir comme ça, j’peux simplement pas. Même moi, j’ai plus de cœur que ça. Alors je fais un pas vers l’avant, puis un deuxième. Merde, j’sais pas comment je tiens encore debout, j’ai jamais autant tremblé d’toute ma vie on dirait un mauvais trip sur une drogue complètement inconnue. Au fond, j’suppose que c’est un peu ça quand on est envahi pas des émotions qu’on n’a encore jamais ressenties. « Silas.. » ton nom m’échappe dans un murmure brisé et je tends la main vers toi avant de la poser doucement sur ton épaule. « Silas regarde-moi. » Ma voix est à peine audible, tremblante et mal assurée, mais bon sang..