Une fois de plus mon regard se pose sur la silhouette qui se tient devant moi, l’examinant sous toutes les coutures avant de grimacer. Je suis pire qu’une fille. Ça fait 4 fois que je me change, me regarde dans le miroir, m’examine et change d’idée. Quand est venu le temps de chercher un habit pour le bal de fin d’année, j’ai pas su me décider entre deux ensemble et j’ai fini par acheter les deux puisque c’est quelque chose que je pourrai probablement reporter ailleurs. …pour le peu que je porte des complets. Je dois reconnaitre que depuis mon stage à New-York, ça prends presque la poussière dans mon placard. Décidant de la remué un peu plus, je me débarrasse du veston que j’avais enfilé et le jette sur le lit. La chemise suit peu de temps après. Pourquoi je suis si girouette aujourd’hui? Je sais pas. C’est pas mon premier bal pourtant. Pas le premier évènement où je veux bien paraître non plus. Je me mets peut-être la pression parce que les deux derniers ont été haute en revirement et que j’espère que celui-là sera parfait? Je serais guimauve à ce point? Peut-être.

Soupirant contre ma bêtise, je décide mettre en marche la radio, histoire de me détendre et de canaliser mes pensées pour arrêter le tourbillon qui menace de s’y installer. C’est juste assez pour que je m’allume aussi une cigarette après avoir ouvert la fenêtre pour ne pas empester la chambre. Pieds nus, je continue de farfouiller dans mes fringues en évitant de les cramer si possible. Mes doigts s’arrête sur un veston et j’ai un sourire, il me fait parfaitement ce veston, mais le collet est ultra abimé. J’ai pas voulu m’en débarrasser parce que j’avais un n…

- Oh!

Je me fige un instant en me rappelant les textos et les plaisanteries. Oh! ...Et je pourrais peut-être fixer le tout comme j’avais fait avec un ancien blouson de cuir. Oh! C’est hors de question que je porte autre chose ce soir!!

Attrapant mon cellulaire, je compose rapidement le numéro de ma belle soeur, lui expliquant mon plan de dingue alors qu’elle rit au téléphone, mais accepte de me rendre service.


Une main dans mes cheveux, me fixant à nouveau dans le miroir, j’essaie de placer moindrement ma tignasse comme Shirley me l’a conseillé avant de partir, y’a un peu plus d’une demi-heure. Depuis, j’ai retiré mon veston pour ranger le reste du bazar que j’ai foutu ce matin et éviter de faire croire qu’une bombe de linge a explosé de mon côté de la chambre!

Remettant ma veste qui pèse désormais nettement plus lourde avec toute les épingles que j’ai ajouté sur le col. Ma belle-soeur a gentillement accepté d’aller faire une razzia en vitesse dans les magasin afin de trouver une énorme quantité d’épingles à nourrisse pour donner un look unique à mon veston pour le bal. Mon “âme d’artiste” la fait rire. Un sourire aux lèvres, j’ajuste le col de la chemise violet et le noeud papillon taillé dans le même tissu que mon veston. C’est ce qui m’a fait me décider finalement. Juste pour voir la tête de Jax suite à nos sms. Reste à savoir ce qu’il pensera du reste. Parce que, oui, mine de rien, j’ai envie de savoir que je lui plais ce soir! Et chut avec vos pensées mignonnettes!

Le voir figé un instant, me fixe à mon tour. Le look ne passera pas? Le col désormais plus que métallisé du veston, c’est de trop? L’inquiétude tente de se faire une place dans mon système nerveux jusqu’à ce que je remarque la légère coloration sur ses joues. Puis son regard. Le ton de sa voix quand il prononce mon prénom. Et cette rose rouge.

Mon regard se pose un instant sur les pétales avant de remonter pour croiser les iris de mon petit ami. Progressivement un large sourire prend place sur mon visage et laissant la fleur entre ses doigts pour un moment encore, je pose les miens sur sa mâchoire pour l’attirer à moi et cueillir ses lèvres.

- T’es adorable, soufflais-je en le laissant respirer. Merci!

Me reculant d’un pas, j’attrape la rose avec un léger rire, puisque je sais que ce n’est pas le qualificatif qu’il préfère pour sa personne, même si s’en est un qui lui convient particulièrement bien pour certains de ses actes. Pendant que mes mains sont occupées à épingler le présent, je me permets d’apprécier la vue que m’offre Jax.

- …et tu portes très bien ton surnom, le taquinais-je en le détaillant des pieds à la tête.

Il est sexy. Peut importe ce qui le couvre - ou ce qui ne le couvre pas -, je le trouve sexy. C’est pas nouveau. C’est pas secret. Et si je le vois souvent “bien” habillé, puisqu’il met définitivement plus d’effort dans son look que je peux le faire pour le mien, ça reste que je ne l’ai jamais vu ainsi. Chemise, oui, quelques fois. Veston et cravate, non. Et il est à tombé!

- Je vais rendre tout le monde jaloux d’être avec toi, magnifique comme ça, murmurais-je encore contre ses lèvres pour lui voler un nouveau baiser, tout léger.

Je ne me détourne ensuite que quelques secondes, m’assurant de verrouiller la porte de ma chambre. Je glisse ensuite mes doigts entre ceux de mon beau tatoué, le questionnant muettement à savoir s’il est prêt pour cette soirée. Je suis heureux, encore un peu nerveux ou fébrile, mais ma bonne humeur est indéniable. J’avais déjà dans l’idée que le but de ma soirée était d’éviter les scandales, les crises et les moments en montagnes russes, pour ne laisser place qu’à des rires, de la danse et des surtout de bons souvenirs. Et parmi ceux-ci s’inscrivent déjà quelques détails : le look tout en classe de mon compagnon, cette rose qu’il m’a offerte et…

- La couleur c’est une pensée pour moi? Ne puis-je m’empêcher de demander.

Un léger rire me secoue lorsqu’il me dit qu’il s’est inspiré des films américains pour adolescentes (de ce que j’en déduis par ses termes) pour cette soirée.

- Ça va, on te présente pas à la reine quand même! Me moquais-je doucement. Y’a pas de pression à avoir, c’est qu’un bal, lui assurais-je doucement.

Ça m’étonne un peu qu’il soit si nerveux - je suis pas mieux placé pour parler, en fait -, je me suis peut-être trop rapidement habitué à ce que ça ne l’embête pas tellement qu’on nous voit ensemble comme un couple depuis notre promenade au parc et la virée boutiques. Ou alors c’est qu’il ne sait pas s’il peut/doit se comporter de la même manière parce que c’est moi qui l’accompagne cette fois et pas une fille? Si c’est les mêmes règles, les mêmes codes. Si, aussi simple que ça, je vais m’offenser qu’il m’offre une rose à mettre à ma boutonnière. Pour ça, la réponse est clairement non. Ça ne m’offusque pas du tout et, même, il aurait pu m’offrir un bouquet à X ou Y occasion que je n’en aurais pas été insulté non plus. J’apprécie énormément la pensée au contraire! Et c’est pourquoi, je l’épingle avec plaisir sur mon veston.

Son rire me répond lorsque je lui mentionne qu’il porte très bien le surnom que je lui donne. C’est peut-être sans surprise quand on nous connait et une grande part d’évidence quand on le regarde, mais je le trouve tout simplement magnifique, ce soir.

- Que ton petit ami est un excentrique? Proposais-je lorsqu’il me demande ce qu’il pourrait dire de moi si j’affirme que plusieurs voudrait être à ma place, les doigts croisés au sien.

Ouais, y’a peut-être quelques filles qui souhaitent mon malheur ou ma disparition pour se subtituer. Quelques mecs aussi, mais ça je sais pas si Jax le réalise véritablement. Je n’ai pourtant pas envie d’en parler, préférant me concentrer sur nous deux et la soirée promise. C’est soir de fête, c’est fait pour s’amuser! Et ça commence bien!

Je pouffe franchement lorsqu’il me dit que la vendeuse a tiré une tête quand il lui a expliqué que c’était un petit ami et non une petite amie.

- T’as détruit tous ces rêves et fantaisies, me moquais-je en riant encore. Mais elle avait raison pour cette veste : tu es très beau, lui assurais-je en le regardant tendrement.

D'accord! Je peux pas m'empêcher de sourire! Mais je suis heureux, foutez-moi la paix! L’entrainant dans les couloirs, on traverse la Lowell House, maximisant les passages intérieur pour se rendre sur les lieux du bal.

- Ce sont tes textos qui m’ont fait penché, pour ma part, avouais-je à Jax en pointant le noeud papillon que j’aborde avec une tête qui se veut angélique, même si le contenu des sms l’était beaucoup moins.

À ses paroles, j’arrête de marcher un instant, le fixant avant de me remettre en marche, mes yeux toujours sur lui suite à cette révélation.

- T’es sérieux? M’étonnais-je. T’as jamais été à un bal de fin d’année?

Je veux bien que ces anciennes relations ne ce soit pas rendu jusqu’à cette période ou qu’il n’était pas en couple à ce moment de l’année, mais j’aurais cru vu l’allure, les muscles et la facilité à faire baver un peu tout le monde que c’était pas les invitations qui devait manquer. Même si c’était juste des minettes qui voulait bien paraître ou rendre jaloux leur ex petit copain. Combien de fois j’ai servi à ça moi? Ou juste pour sauver la mise à une fille qui ne voulait pas y aller seule.

Lorsqu’il me demande ce qu’il devrait dire à mon sujet, puisque j’affirme qu’il est sexy, j’ai un rire et laisse tomber qu’il pourrait peut-être me qualifier d’excentrique. Surtout aux vues de ce que j’ai fait avec le col de mon veston ce soir. Souriant à ses paroles, j’échappe un souffle amusé tandis qu’il dit que je suis mignon. Lui qui déteste que j’utilise ce terme pour sa personne.

- Excentrique c’est différent, décalé …et peut-être un peu bizarre parfois, clarifiais-je avec un sourire qui se veut doux.

Je n’ai aucun problème avec ce terme pour moi. Je le trouve assez vrai par moments. Il s’appliquait même plutôt bien avant que je déménage. Je disais que j’étais le mouton noir de la famille Davis. Au final, je n’ai peut-être des Davis que le nom, même si Jason affirme le contraire, sans vraiment vouloir me dire ce qu’il a supposément trouver.

- C’est pas un secret pour tes tatouages : tu sais que je les adore, acquiesçais-je en faisant pression sur sa main pour qu’il s’arrête. Mais j’aime aussi le mec qu’il y a sous toute cette encre, affirmais-je contre ses lèvres avant de l’embrasser. Et parlant de photos… ajoutais-je en le libérant et incitant le mouvement pour qu’on se remette en route, tu voudras bien qu’on en fasse une de nous deux, ce soir?

Je n’ajoute pas que je l’ai promis à maman lorsque je lui ai parler, hier soir, sachant que le sujet de sa propre mère est assez sensible. Je ne l’ai jamais rencontré, mais je n’aime pas savoir qu’il se sent de la sorte à son sujet. Autant peut-être qu’il n’aime pas savoir que je n’ai pas de bonnes relations avec le paternel. Mais pour la photo, oui, je l’ai promis. Ma mère aurait aimer être là, ce matin. Peut-être pour rattraper les années qu’on a pas passé ensemble et les évènements dont on a pas de souvenirs communs, mais Sam a une compétition ce weekend et je ne voulais pas qu’elle le lâche pour moi, on commence à pouvoir discuter sans qu’il n’essaie de m’assassiner du regard, j’aimerais ne pas trop reculer. Et puis, plus de 20 heures de route aller-retour pour m’aider à me préparer pour ce soir, je ne voulais pas que maman risque de trop se fatiguer.

Jax m’explique pour la vendeuse et je pouffe de rire. La pauvre, il a dû détruire toutes les fantaisies qu’elle pouvait se faire. Mais considérant que c’est mon petit ami, je ne la plains pas tellement : je suis même heureux de l’entendre dire qu’il a affirmé cash être avec un homme. Disons qu’on est loin de notre relation cachée de l’automne dernier! Lui expliquant la raison de mon propre habillement, je pouffe à nouveau et me permet un long regard en sa direction soutenu d’un sourire joueur.

- Je ne trouve pas fou, mais juste parce que tu l’as dit de cette manière, je pourrais parier que t’as déjà 36 images d’un tout autre contexte qui te passe en tête, me moquais-je doucement.

J’ai beau être artiste, Jax n’a aucune raison d’envier mon imagination. Du moins sur le plan du privé. C’est même tout le contraire!

- Hum, non, facile je dirais pas, fis-je après un mince instant de réflexion.

Pour peu que je me souviennes de notre première rencontre, je crois que j’ai dû insister pour qu’on passe la nuit ensemble. Alors, facile, je dirais pas. Qui plus est, je crois qu’il est un minimum critique et select pour ses conquêtes. Bah, ex-conquêtes.

- Mr. Le solitaire a l’air d’apprécié ma compagnie pourtant. Mais sinon, je sais pas, j’aurais cru que t’aurais peut-être accepté de servir de trophée pour une soirée comme j’ai déjà fait plusieurs fois. Mais bon, j’avoue que j’ai l’argument que je passais mes soirée sur la piste avec la demoiselle. ...parce que oui, j’ai jamais vraiment été à un bal au bras d’un mec, mentionnais-je en riant. Du moins, avant d’arriver ici. Après, c’est ...compliqué, résumais-je vaguement, avant de chasser le tout d’un revers de main négligent pour retrouver mon sourire.

Pas de ce genre de pensées ce soir!

- La soirée s’y prête bien, non? Sur notre 31, avec musique et ambiance et tout... qui sait si je ne voudrais pas te faire tomber dans mes bras encore plus? Plaisantais-je.

Lorsqu’il accepte pour la photo, mon sourire s’agrandit sans que je ne le contrôle vraiment. Pas qu’il me réprimande normalement quand je le prends en photos - bon, y’a certaines photos que j’ai pas le droit de partager ...non, je suis égoïste, cherchez pas à voir - mais je suis normalement derrière l’objectif. À quelques clichés d’exceptions. Cependant, je suis content d’avoir son approbation. Je ne sais pas s’il sera toujours pour lorsque je l’enverrai. On en reparlera rendu là. Je sais que ce serais compliqué d’envoyer cette photo à sa propre mère autant pour les histoires de famille complexes que pour l’acceptation de son orientation qui pourrait créer problème. De mon côté, je n’aurais pas de problème à le présenter à maman. Il y aurait peut-être un malaise, puisque, même si elle le sait, que je suis gay, que je suis en couple, je ne sais pas si ça la dérange ou si ça passe plutôt bien. Ce serait à verifier avant une première rencontre peut-être.

La conversation dérive sur le noeud papillon que je porte, spécialement à cause d’un échange textos qu’on a eu il n’y a pas si longtemps, et je pouffe de rire lorsqu’il me demande si je savais que mon petit ami est un pervers. J’avais vaguement remarquer, oui. J’ouvre la bouche pour répliquer, mais ma phrase se coince dans ma gorge le temps qu’un large frisson parcourt mon échine à cause de son coup de langue. Le con!

- Si tu refais ça, pas de joli spectacle ce soir : tu dormiras tout seul, le menaçais-je en bougonnant, le rejoignant puisqu’il m’a devancé.

Honnêtement, je sais pas qui de nous deux serait en penitence si je venais à appliquer cette menace.