tu avais perdu du poids depuis peu. les événements passés, le sport intensif, en somme une myriade de petites choses t'avais rendu complètement à l'ouest, oubliant la chose la plus primordiale dans ce monde, celle étant de se nourrir, t'oubliant complètement même. mais aujourd'hui était un autre jour, et ta garde-robe ne t’allait plus du tout, la carte bleue allait très certainement chauffer et pas qu'un peu. après plusieurs magasins, les mains bandées par les accroches des sacs de luxe où de précieuses étoles encore soigneusement pliées y reposaient. du coin de l'oeil, une boutique plus rustique, tu ne résistes pas longtemps avant de t'y engouffrer. là, où une clochette retentit à peine le pied posé sur le sol. L'odeur de la friperie te saute au nez, celle des vieilles senteurs où le linge se refait une beauté, se donne la chance de vêtir à nouveau la peau d'une personne qui l'aimera autant qu'elle a pu l'être dans le passé. tu valses entre les rayons dans l'optique de trouver la merveille parmi les autres, la pièce unique et radieuse qui égaillera le reste de tes achats. quelques morceaux de tissu t'attires, que tu prends, avant de te diriger dans l'espace des cabines d'essayages, en choisissant une par pur hasard sans prêter la moindre attention à l'activité s'y pratiquant à l'intérieur. vide ou pas ? tu t'en foutais clairement, tu n'avais pas le temps de peser le pour ou le contre, alors tu ouvres le rideau. et tombes sur ziggy, surpris, pris à son propre piège, il referme immédiatement le tissu velours cachant ses formes. et dans ta stupeur, tu tiltes, fronces les sourcils d'incompréhension avant de tirer de nouveau le voilage dévoilant ce que ton esprit avait emmagasiné à la va vite. « Qu'est-ce que.. ? » t'es sans voix, sous le coup de l'émotion, tu ne sais pas vraiment quoi dire, et même ressentir. tous les mots semblent dévaler ta bouche avec facilité, mais les prononcer était une autre pair de manche. « T'es enceinte ? » absolument pas gêné de montrer à la vue de tous -même si seul le vendeur s'y trouvait- le ventre nue de la jeune femme.

@MEGHAN HARRISON

— so drop that thing like a fumble

— boston, mars 2018
être soudainement enceinte, c’était une plaie. faire un déni ? encore plus. donc là, j’étais officiellement à quatre mois, je le savais depuis une semaine et du jour au lendemain j’avais pris 7 kilos dans les dents parce que comme si ça suffisait pas, j’attendais des jumeaux. génial, on pourrait au moins faire un reportage sur moi style « tellement vrai » ou « confessions intimes ». bref, rien de bien glorieux. résultat, j’avais fini par passer les portes d’une friperie avec mon maigre budget pour essayer de me trouver quelques fringues à ma taille vu que ma garde robe ne m’allait plus. et clairement, ça rajoutait encore des frais comme si j’avais besoin de ça. cinquante dollars en poche, un genre de jogging dans les mains et un tee shirt taille xxl et je prenais la direction des cabines d’essayage l’air dépitée. je détestais mon image pour le coup. j’avais l’impression d’être difforme mais chance pour moi, le jogging passait tranquillement. au moins un truc qui pourrait me dépanner pour quelques temps. retirant le pull que je portais, c’était le moment que choisissais un inconnu pour soudainement ouvrir le rideau de la cabine pour la refermer aussitôt. un inconnu ? pas vraiment. marin. mais pas le temps de réagir que le rideau s’ouvrait une nouvelle fois parce que visiblement, il en avait pas grand chose à faire que je sois en soutien gorge. ouais, l’irrespect chez ce mec était constant. j’arrivais même pas à comprendre comment est-ce que j’avais pu être avec lui en fait. ma main venant attraper le rideau, je tirais légèrement dessus histoire de me cacher un minimum de la vue du vendeur lançant un regard  noir à l’eliot. « bravo sherlock, moi qui pensait que l’intelligence faisait pas partie  de tes attributs. » bien sûr que j’étais piquante et sèche. mais marin et moi on avait un sacré historique et clairement je ne comptais plus le nombre de fois où il m’avait gratuitement attaqué alors ouais, je ne pouvais qu’être sur la défensive quand il s’agissait de lui.

Les images te reviennent successivement, celle d'un autre temps qui avait l'air même d'une autre époque, le monde semblait grandir sans toi. Ziggy, tendrement amoureuse de celui que tu étais, complètement hébété et un inconscient, tout était tellement différent à présent et l'intérieur de son ventre ne manquait pas de te le faire remarquer. Tu restes là, choqué, ne comprenant pas encore très bien comment ton ex avait pu en arriver là. elle, être mère ? vraiment ? elle ? si tu étais un handicapé des sentiments, ziggy l'était tout autant, et la voir s'occuper d'un enfant était pour toi une addition complètement faussée. depuis quand ? et surtout, avec qui ? qui avait eu le don de la foutre en cloque ? les yeux t'en tomberaient presque tellement la nouvelle t'assomme. « Mais. » les mots ne sortent pas encore, non c'est beaucoup trop tôt pour que tu puisses émettre un quelconque avis. du moins, c'est l'idée qui te passe à travers l'esprit avant de délibérément la juger. non mais à son âge ? les américains pouvaient être complètement fou par moment. « Pourquoi ? » finis-tu par dire tandis que la jeune femme tentait par tous les moyens de se cacher de ton regard mais aussi du vendeur au fond de la boutique. « Qu'est-ce que t'as encore foutu ? T'as voulu piéger un pauvre innocent c'est ça ? » que tu demandes, t'es complètement perdu, dans le fond ça te chamboule un peu cette nouvelle, parce que ça aurait pu être toi. ça aurait pu être vous. et ça te fait flipper, et à la fois non, t'étais toujours à un niveau complètement célibataire sans attache alors que d'autre construisait leur famille. ça se bouscule dans tes pensées.

— so drop that thing like a fumble

— boston, mars 2018
puis il était clairement sans gêne là. le rideau ouvert, à m’observer comme si j’étais un morceau de viande. puis de quel droit est-ce qu’il restait là de toute façon ? il était personne et au point où j’en étais, je le trouvais tout aussi con que philip et dieu seul savait à quel point le winthrop avait baissé dans mon estime ces derniers temps. alors ouais, ça me saoulait qu’il soit là, qu’il me voit comme ça et qu’il se sente obliger de regarder comme si c’était un spectacle. en soit, ça ne regardait personne et surtout pas lui alors ouais, s’il pouvait se tirer ça m’arrangerait vraiment. « ah, faut que je t’explique comment on fait les bébés maintenant ? » j’sais pas, il en avait d’autres des questions cons. parce que pour le coup, le « pourquoi » il était juste stupide et j’avais clairement rien à répondre à ça. « ouais, voilà, exactement. je suis le diable en personne, t’avais oublié ? » putain mais frère, t’es sérieux ? dans quel monde est-ce que j’avais déjà essayé de piéger quelqu’un ? le seul fourbe ici, c’était toi et sans le moindre doute. j’trouvais ça dingue que tu m’accuses limite d’un truc pareil alors que c’était clairement pas mon genre. « j’vois même pas pourquoi ça t’intéresse en fait. » on avait arrêtés d’avoir des rapports cordiaux au moment même où tu m’avais largué comme une sous merde. donc en soit, j’avais pas de compte à te rendre et toi, t’avais certainement pas à me regarder comme ça. « c’est bon, tu dégages maintenant ? » dans le fond, c’était pas lui qui était impliqué alors y avait aucune raison qu’il dise quoi que ce soit.

Zig était plutôt hargneuse, tu la sentais terriblement irrité par tes mots mais aussi rien que par ta présence. mais ce n'est surement pas son caractère de merde qui allait te dicter quoique se soit et encore moins quand ta curiosité n'était pas encore assez satisfaite. « Tu peux pas juste me répondre avec calme et maturité ? » c'est vraiment l’hôpital qui se foutait de la charité, mais tu ne reculais devant rien juste pour l'enterrer encore un petit peu, mais aussi comprendre. qui était le père ? quand elle allait accouché ? Pourquoi ? depuis quand l'envie d'un bébé faisait-il parti de ses envies ? « M'expliquer comment ? Tu pratiques ? Je veux bien un cours particulier. » que tu dégaines à sa suite rien que pour la déstabiliser, mais aussi par pointe de jalousie. même si tex exs ne t'appartenais plus, quelque part, les regarder s'épanouir ailleurs qu'avec toi te rendait légèrement piquant. Surtout elle, parce que c'était la plus récente, mais aussi parce qu'elle t'avait tapé dans l'oeil la première fois. « explique-moi. je t'écoutes. comme deux adultes. parle. » ça n'avait ni queue ni tête, mais tes réponses tu les voulais à l'instant T et pas à un autre moment. ça te brûlait au vif. « quoi ? je peux pas être intéressé par toi ? ça te semble si impossible que ça ? » tu fronces les sourcils, mais la jeune femme ne fait que virevolter entre toi et le vendeur qui devaient vous dévisager, prêt à intervenir en sa faveur en cas de problème. tu prends donc les devant, entre dans la cabine et referme le rideau pour crée un voile d'intimité. « non je dégage pas. à moins que tu répondes à mes questions. » tu étais dur en affaire, tu négociais souvent pour que tout tourne en ta faveur. et tu exigeais sur le champs de savoir qui était celui qui l'avait foutu en cloque.