Huit heures pétantes, je suis dans le gaz complet, encore embrumée par les excès de la veille, assommée par l'insomnie et le manque de sommeil. Les cheveux camouflés sous un bonnet, une veste trop large sur le dos, l'odeur de tabac froid qui me colle au cul, j'entre dans l'enceinte principale de l'université, et je garde mes lunettes de soleil sur le nez, parce que j'ai complètement zappé qu'elles étaient là. Je marche, du moins je déambule dans le couloir tel un zombie, errant entre les gens. Certains se décalent, d'autres pas. Finalement, peut importe qui se pousse ou non. J'en ai rien à foutre, ce matin. J'ai juste envie de gagner ma salle de cours, me foutre dans un coin et comater ne serait-ce que cinq petites minutes. Mais même si je commence déjà à être en retard, je sens quelqu'un agripper mon bras pour me parler. Mais malheureusement pour cette personne, je ne suis vraiment pas d'humeur à être sociable à cet instant précis. « Lâche moi, bordel. » râlais-je doucement, sans faire d'esclandre. Mais visiblement, c'était pas sur la bonne personne.

Lorsque tu avais entendu ton réveil ce matin même, tu avais ressenti une sorte de soulagement parce que tu n'allais plus te lever avec l'envie de tuer quelqu'un comme c'était le cas pendant les derniers jours du Spring Break. Non là, tu étais trop heureux de pouvoir revivre. Même si cela voulait dire que tu devrais retourner à l'université mais ce n'était pas un souci... De toute façon, tu aurais tes examens finaux pour passer en cycle « Graduate ». Tu n'étais pas n'importe qui, tu étais bon en cours, tu révisais avec attention. Et de toute façon, le Prince de Monaco ne pouvait pas échouer ! Cela m'était complètement interdit. Qu'importe, tu allais te rendre dans la Harvard Law School mais sur ton chemin, tu remarquais la présence d'une personne que tu connaissais bien. Ta lesbienne Mather préférée, Cloé de son petit nom ! Du coup, comme tu n'avais pas cours avant la deuxième heure, tu allais pouvoir l'embêter un peu et donc tu te précipitais pour la rattraper. Tu lui agrippas le bras afin de la retenir mais à sa réaction, tu te doutais qu'elle était en retard. Intéressant ! « Ben alors, Copine Valentine, on ne dit plus bonjour » la taquinas-tu avant de la relâcher pour éviter qu'elle te donne un coup de poing.

En me retournant, je vis que c'était Arthur. Autant parfois c'est un mec super, mais parfois, c'est vraiment un imbécile de première. Et étrangement, aujourd'hui, je crois que c'est un imbécile. Il essaie de me taquiner, parce qu'il doit avoir le temps de flâner dans les couloirs tandis que moi, je suis déjà en retard pour mon cours de littérature. Déjà que c'est un cours assez soporifique de bon matin, autant que je sois de bonne humeur pour l'aborder sereinement. Il me lâche enfin le bras, alors que j'avais déjà armé mon poing. « Si toi t'as le temps de te toucher les couilles ce matin, c'est pas mon cas. » répondis-je sèchement à mon interlocuteur, en essayant de reprendre le chemin de ma salle. « Mais si tu insistes sur la politesse, bonjour monsieur le prince. » dis-je avec une pointe de provocation dans mon sourire. J'ai bien envie d'une bonne prise de tête de bon matin. Ca fait le même effet fédérateur qu'un bon coup au lit, mais le plaisir est différent.

Tu ne savais pas pourquoi, mais tu étais d'humeur à embêter les gens aujourd'hui ! Et ta première victime de la journée, c'était Cloé Delgado ! Cette jeune femme, tu l'appréciais autant que tu la détestais mais c'était ainsi qu'était faite votre relation. Une sorte relation chien et chat qui se taquinent tout le temps. Tu aimais trop la faire chier, surtout quand elle était d'humeur aussi mauvaise. Tu avais remarqué qu'elle se préparait à te frapper, donc tu l'avais relâchée rapidement pour parler. « Allons ! Je suis presque sûr que ton cours du matin, tu peux le sécher pour un vieil ami » ironisas-tu tout en la suivant alors qu'elle te disait bonjour avec une pointe de provocation dans la voix, surtout quand elle t'appelait « Monsieur le Prince ». Tu te mis à rire légèrement avant de répondre : « Ah je préfère ça, bonjour à toi aussi Miss Delgado. N'ai-je pas le droit de passer un peu de temps avec toi, vu qu'on n'a pas pu se voir pendant le Spring Break ? ». Tu affichas une fausse mine triste mais tu avais surtout ton sourire malicieux et taquin... Pourquoi étais-tu aussi enclin à embêter les gens de si bon matin ?

Quand il s'y met, ce mec est une vraie tête de con. J'ai qu'une envie, c'est de le frapper, de l'insulter, de lui dire d'aller se faire foutre. Un peu comme ce matin. Il a cet air au dessus de tout, d'intouchable qui m'énerve à mort. Bref, ce matin, j'ai plus envie de le détester que de l'apprécier. Il me suivait, me disait que pour lui, je pouvais bien sécher mon premier cours de la journée. Un léger rictus agacé venait se glisser dans le vacarme des alentours. « Pour les aristos dans ton genre, sécher les cours c'est mal perçu, il me semble. Mais pour les petites gens comme moi, c'est pas bien grave après tout. On a pas un peuple à diriger, c'est ça ? » Je levais les yeux au ciel, du moins au plafond, désespérée de voir à quel point il était relou quand il s'y mettait. Je soupirais rapidement quand il faisait semblant d'être triste durant mon absence du Spring Break de cette année parce que je travaillais. « Si tu veux passer du temps avec moi, t'as qu'à venir en amphi avec moi. Mais à ce rythme là, j'vais plus me faire virer qu'autre chose. » Putain, il avait gagné ce boloss. Je tournais les talons vers la sortie, mon paquet de clopes entre les doigts. « Tu payes le café. » dis-je alors, légèrement saoulée de lui donner ce qu'il voulait.

La voir ainsi te faisait sourire et ça t'amusait beaucoup. Oui c'était un peu ton côté sadique qui ressortait, mais ça c'était de la faute d'Echo... Ou plutôt grâce à la jeune femme puisqu'elle t'avait permis d'accepter vraiment ton côté sadique et dominateur, caché sous ton masque de prince tout mignon... De plus, voir Cloé s'énerver de si bon matin, ça ne pouvait que te faire plaisir parce que tu avais trop envie de l'embêter. « On peut sécher des cours aussi, mes parents ferment les yeux sur mon comportement tant que je ramène des notes convenables... Arrêtes, tu n'es pas une petite gens comme tu dis... Tu es mon amie, ça change tout » répondis-tu avec un sourire malicieux avant de lui faire savoir que tu étais très déçu de ne pas l'avoir vue pendant le Spring Break. Donc ça expliquait pourquoi tu voulais passer un peu de temps avec elle. « Je te suivrais bien mais je n'ai pas cette option dans mon cursus et t'inquiètes, si tu as des problèmes, je m'en occuperais. J'expliquerais que tu avais des affaires bien plus urgentes ». Ouais tu passais en priorité non ? Mais tu te doutais que tu venais de gagner, puisqu'elle venait de tourner les talons en direction de la sortie afin de sortir son paquet de clopes. « Ça va de soi » souris-tu d'un air ravi malgré la tête dépitée et énervée de ton amie. Elle allait te le faire payer, non ? Mais pas de souci, tu n'attendais que ça.

Qu'est-ce qu'il est devenu énervant depuis quelques temps. Je ne sais pas trop qui il fréquente mais en tout cas, je crois que je ne vais pas trop la porter dans mon coeur. Déjà que j'évite d'y porter du monde. Il me sortait que ses parents, des aristocrates bien connus du monde pour gouverner sur un rocher, l'autorisaient à sécher des cours tant que ses notes étaient correctes. Mouais. Je pense surtout qu'il a un sacré pouvoir de persuasion sur eux pour leur faire croire que c'était super dur. Et il disait que j'étais son amie et pas une personne lambda. « Et le fait que je sois ton amie, quand t'as envie, ça change tout peut-être ? A part que tu vas sortir une disquette monumentale pour sauver mon petit cul. » dis-je alors en levant les yeux au ciel. J'avais horreur qu'on me prenne pour une jouvencelle en détresse. Et son sourire là, j'avais envie de lui coller une gifle pour lui faire disparaître. Une fois vers l'extérieur, j'allumais ma clope et inspirais longuement. Il disait que ça allait de soi qu'il paye le café. J'espère même qu'il va lâcher la formule petit déjeuner la plus chère. « J'ai la dalle. J'me prendrais un truc à bouffer au passage. » dis-je en espérant qu'il joue la carte du bon prince, ou voir si ça allait le gaver de passer pour un radin.

Tu avais conscience que tu étais très lourd là mais tu avais envie de passer du temps avec Cloé même si cela voulait dire que tu allais la faire chier toute la journée, fin là c'était surtout la matinée ou les deux heures où tu n'avais rien comme cours. Tu lui faisais comprendre que tu t'en fichais un peu de sécher étant donné que tes parents le toléraient de plus en plus, tant que tu respectais tes engagements... En l'occurrence, c'était ton futur mariage qui faisait partie de tes principaux engagements. « Ouais ça change tout ! Je sais que tu m'aimes bien même si je te fais chier comme aujourd'hui ! Et t'inquiètes, je ferais les yeux doux à ta prof ou ton prof. Ou alors, je glisserais un petit chèque bien sympa » souris-tu d'un air amusé. Mais tu n'avais jamais soudoyé un professeur, contrairement à certains membres du conseil d'Etat monégasque... C'était une arme de persuasion très efficace surtout pour les chercheurs d'or. Qu'importe, tu l'invitais à boire un café avec toi et une fois dehors alors qu'elle allumait sa clope, et elle disait qu'elle avait la dalle donc elle prendrait un truc à manger. « Ben alors ? On saute le petit déjeuner ? » la taquinas-tu avant de poursuivre : « Je t'offre tout. Tant que tu peux tout manger, ça me dérange pas. Starbucks ou un café de la ville ? ».

Le problème avec Arthur, c'est qu'il avait trop souvent ce qu'il voulait. Le souci principal des gosses de la haute société en règle générale. Malgré la fortune familiale, j'ai eu la chance de ne pas être comme ça. Je ne manque de rien, mais je me dis qu'à tout moment, tout peut s'arrêter. Mais si un jour pour lui tout s'arrête, bah ça sera le premier mec fauché qui va gouverner sur cette principauté. J'espère que lors de son futur mariage, il a un contrat béton pour pas se faire plumer. Il sait que je l'aime bien, ce con, même si des fois je le déteste bien plus qu'autre chose. Ca a toujours été le cas, depuis qu'on se connait. Des opposés en tous points. Il n'y aurait que les femmes pour nous rassembler, j'imagine. Je riais légèrement. « Ca, pour m'énerver aujourd'hui, tu m'énerves. Mais t'es pas un mauvais gars, p'tit con. » dis-je alors en lui donnant un coup de poing dans l'épaule. Il a pas du sentir grand chose, vu mes petits poings et mes petits bras tous frêles. « Tu peux soudoyer mon prof comme tu veux à mon avis, j'le soupçonne d'être gay. Un petit compliment sur sa cravate et t'auras même droit à un rencard. » m'amusais-je à dire. Voir Arthur se faire draguer par un mec et complètement mal à l'aise, ça doit être magique. Une fois dehors, il me demandait si je sautais le petit déjeuner, avant de se proposer pour me payer tout ça. Il est adorable quand il veut, le petit prince. « J'ai pas spécialement eu le temps de manger ce matin. A peine le temps d'un café pour sortir mon cerveau de mon lit. Mais puisque tu m'offres tout, autant que tu choisisses le lieu. Fais moi rêver du p'tit déj. » répondis-je alors, en marchant lentement.

Tu faisais partie de ces personnes qui n'acceptaient pas les refus parce que ça n'existait pas dans ton vocabulaire. Du coup, tu étais content que Cloé ait fini par céder et qu'elle accepte de t'accompagner, malgré sa mauvaise humeur. « Tu sais que j'aime beaucoup t'embêter ma chère Cloé. Mais je suis mauvais ! Je suis un Prince, non ? » répliquas-tu en lui tirant légèrement la langue alors qu'elle te donnait un petit coup de poing dans l'épaule. C'était à peine si ça te piquait ! Elle te disait que tu pouvais soudoyer son prof parce que soi-disant c'était un gay ! Mon Dieu ! C'était marrant ! « Je me ferais un plaisir de le rembarrer... Après ça ne serait pas la première fois qu'un gay me drague donc je sais à quoi m'attendre ». Tu souriais d'un air amusé. Maintenant elle te faisait clairement comprendre qu'elle avait fait et qu'elle espérait que tu paies tout. Cela ne te dérangeait pas vu que tu l'avais quand même forcée à te suivre. « Tu devrais faire comme moi ! Te réveiller assez tôt pour avoir le temps de faire un peu de sport, puis tu déjeunes et c'est parti ! Moi, j'aime bien déguster mon café depuis les infos le matin » lui expliquas-tu alors que vous marchiez en direction de la sortie de l'Université. « Il y a un petit café bien sympa, pas loin d'ici. ». Il était assez cher mais tu aimais bien te poser là-bas, du coup ça ne te dérangeait pas d'emmener la jeune femme avec toi. Quelques minutes plus tard, vous étiez arrivés. « Après toi ! »