T’as l’impression de courir une course contre la montre. Depuis que tu peux remettre ton précieux fessier sur les bancs de l’université, c’est comme si on te noyait en permanence sous les piles de cours à apprendre, de travaux dirigés à préparer, de projets à rendre. Tu trouvais le rythme déjà assez soutenu depuis la rentrée de septembre mais là t’as le sentiment qu’on te demande d’accomplir une mission impossible en essayant de rattraper ces deux mois complets manqués à cause de ta suspension. T’avais été prévoyant au début, continuant d’étudier dans ton coin durant les premières semaines pour ne pas accumuler trop de retard sur tes camarades, certain que ton nom serait très vite blanchi. Mais la longueur de l’enquête et le break des vacances de Noël ont rapidement rongé tes bonnes résolutions. La série de malheurs qui a frappé tes proches, surtout, n’a fait qu’empirer la situation et t’as fini par passer toutes tes journées à l’hôpital avec Maxine et Agathe, ou bien à préparer ton déménagement dans un nouvel appartement, ou bien à faire des recherches sur Meghan en te demandant si ou non tu étais sain d’esprit. Trop de choses à penser et de soucis à régler pour te consacrer à tes études, une négligence que tu payes aujourd’hui au prix fort. Concentré sur une étude de cas que tu dois rendre dans deux jours, la sonnette de l’entrée te fait sursauter lorsqu’elle retentit. Te sachant seul dans l’appartement en ce début de soirée, tu pousses un soupir et te décides à aller ouvrir pour chasser le pauvre type qui a dû se tromper de porte. T’es loin de t’imaginer que c’est Ziggy qui se trouve là, dans l’embrasure, et qu’elle ne s’est absolument pas plantée de porte. « Ziggy ? Qu’est-ce que tu fais là ? »

j'pouvais pas rester comme ça. je détestais ce doute planant sur ma vie et surtout, je détestais avoir l'impression que philip me prenait pour la dernière des idiotes. le pire ? le fait qu'il m'ignore plus où moins depuis. alors non, personne ne pourrait me faire croire que ce n'était qu'une erreur. hecate et sullivan étaient les premiers à trouver ça louche et.. moi j'avais besoin de réponse. j'avais laissé le temps passer un peu. me disant que peut être je finirais par mettre tout ça de côté et faire comme s'il n'y avait rien sauf que.. ce n'était pas le cas. j'voulais des réponses, je voulais des certitudes et pour l'instant, je ne les avait pas. sully passait la soirée avec des amis, j'étais libre et après avoir tourné en rond comme un lion en cage dans mon appartement, j'choisissais finalement de me rendre directement chez le concerné. en face à face, il ne pourrait pas m'éviter. sois disant qu'il avait des preuves que ce n'était pas moi ? je voulais les voir. c'était légitime et après avoir instauré un doute pareil dans ma tête, j'étais persuadée qu'il était dans l'obligation de me les donner. sonnant à l'entrée, j'inspirais un coup attendant sagement que la porte finisse par s'ouvrir sur celui qui était possiblement mon frère. et j'avais encore du mal avec ça. du mal à me dire que toute ma vie était un mensonge, que mes parents n'étaient pas les miens et que je n'avais pas grandis là où je l'aurais dû. "il faut qu'on parle" que je répondais, plaçant ma main sur la porte pour éviter qu'il ne me la referme au visage. tant pis si je n'étais pas la bienvenue, j'étais pas là pour me faire envoyer sur les roses encore une fois. "moi, je crois qu'on est peut être reliés toi et moi. et je sais pas pourquoi est-ce que d'un coup tu fais autant d'effort pour me pousser loin mais j'ai besoin de réponse et t'as pas le droit de me laisser comme ça." les coïncidences, mes rêves.. les photos sur internet. ça faisait beaucoup trop de chose en fait.

En ouvrant la porte, tu ne t’attendais vraiment pas à ce que Ziggy soit là, juste devant toi et de toute évidence bien remontée. Déjà tu ne sais même pas comment elle a eu ta nouvelle adresse, cela fait des jours que tu l’évites intentionnellement, elle ou ses proches qui sont au courant de toute cette histoire, à savoir Hecate et Sullivan. « il faut qu'on parle » qu’elle te dit d’une voix ferme qui ne laisse place à aucune contestation possible. Pourtant t’as clairement aucune envie d’avoir cette conversation, là maintenant avec elle, mais tu te résignes et soupires en t’écartant légèrement pour la laisser entrer. Tu te doutais bien que cela finirait par arriver un jour ou l’autre. Tu ne connais pas Ziggy depuis très longtemps mais une des premières choses que tu as apprises sur elle est qu’elle est du genre hyper coriace. Tu savais que ce n’était pas en quelques sms à peine qu’elle allait lâcher l’affaire maintenant que tu avais instillé le doute en elle. « moi, je crois qu'on est peut être reliés toi et moi. et je sais pas pourquoi est-ce que d'un coup tu fais autant d'effort pour me pousser loin mais j'ai besoin de réponse et t'as pas le droit de me laisser comme ça. » C’est vrai, sa demande est tout à fait légitime et tu aurais sûrement fait la même chose si tu avais été à sa place. Et c’est dans cette optique que tu t’es préparé à cette éventualité en définissant un plan en béton pour la convaincre du contraire. « Viens t’asseoir. » lui demandes-tu en désignant le canapé sur lequel vous vous posez. Tu respires un bon coup et déroules ta défense. « Je reconnais que j’ai pensé pendant un moment que tu pouvais être Meghan. Et je suis désolé que ça se soit passé comme ça, je ne pensais pas parler directement d’elle ce jour-là mais c’est sorti tout seul. Et visiblement ça t’a perturbé, plus que je ne l’imaginais. Hecate m’a appelé, elle m’a raconté. Et pour être honnête, moi aussi ça m’a complètement chamboulé. Je savais plus quoi penser. » Tu marques une courte pause pour la laisser assimiler les choses avant de reprendre, la regardant droit dans les yeux. « Alors j’ai fait des recherches. J’ai rouvert le dossier de l’enquête, passé des coups de fil à nos contacts qui avait bossé dessus à l’époque pour revoir tous les détails de l’affaire, essayer de comprendre ce qu’il s’était passé, savoir s’il y avait une chance pour que tu sois effectivement elle. Et la réponse est non. Tu n’es pas Meghan, j'en suis certain. »  

y avait un truc louche dans tout ça. j'étais pas bête comme fille mais je voulais des réponses de sa part à lui parce que c'était celui qui avait commencé à instaurer des doutes dans mon esprit. alors ouais, je méritais qu'il arrête de me prendre pour une débile. je méritais qu'on se pose même cinq minutes et qu'il me dise la vérité parce que c'était impossible de me laisser comme ça. et ouais, je ne comptais absolument pas lui laisser le choix. je voulais savoir ce qu'il en était, je voulais des vrais réponses et si jamais c'était faux -ce que je n'arrivais pas à croire- je voulais des preuves. et puisqu'il m'invitait à entrer pour m'asseoir, je poussais un soupir de soulagement le suivant dans le salon. sauf que les mots qu'ils avaient, j'avais du mal à y croire. j'avais du mal à me dire que c'était juste fini, que ce n'était pas moi et qu'il n'y avait aucun souci. "dis moi alors. dis moi ce qui te fais dire que je ne suis pas elle. dis moi philip. parce que je t'ai juste demandé un test adn et t'as pas voulu. dis moi pourquoi." j'avais la voix qui tremblait, j'étais pas bien et.. ouais, putain, j'avais l'impression qu'il me prenait pour une conne. "si je ne suis pas elle, pourquoi je fais le même rêve depuis gamine où je porte ce prénom. pourquoi les photos de meghan sont le portrait craché de quand j'étais enfant ? pourquoi est-ce que y a tout ça ? tu peux pas me dire que je suis dingue ou que j'invente des choses pareilles.." je passais mes mains dans mes cheveux cherchant à retrouver mon calme. mais ouais, je détestais ce que j'étais en train de traverser en fait. "j'pourrais aller voir les flics et.. dire que je pense avoir été kidnappé et dans ce cas là, j'aurais pas besoin de toi pour avoir des réponses." alors dans le fond, c'était son choix. mais si j'avais pas son soutien, y avait quelque chose que je comprenais pas. "même si t'es pas mon frère, t'es mon ami. t'as pas le droit de me laisser comme ça."

Elle t’écoute déballer ton argumentaire sans t’interrompre, attentive à chaque mot que tu prononces, chaque geste ou expression qui pourrait te trahir. T’as toujours été plutôt bon comédien, le genre de mec capable de faire croire n’importe quoi à n’importe qui. Mais là face à Ziggy, c’est un challenge d’une toute autre envergure auquel tu fais face.  Il te faut faire appel à tout ton talent pour réussir à la regarder dans les yeux en alignant mensonges sur mensonges, pour la convaincre que malgré l’évidence qui est désormais sous vos yeux, tout cela relève de la pure coïncidence. Elle ne se laisse pas démonter néanmoins et demande des preuves tangibles qui pourraient appuyer tes dires. Tu n’as pas d’explication à lui fournir pour ses rêves de quand elle était enfant ou pour le fait qu’elle ressemble trait pour trait à Meghan, en revanche tu es prêt à franchir le point de non-retour pour lui sortir un élément irréfutable, capable de clore le dossier une bonne fois pour toutes. Ta conscience te torture douloureusement, en particulier quand tu entends sa dernière phrase. T’es son frère et son ami, et tu t’apprêtes pourtant à trahir cette confiance pour toujours. « Si je t’ai dit de pas faire de test ADN, c’est parce que… j’en ai fait un moi. » finis-tu par lâcher. Devant la surprise qui se peint sur son visage, tu enchaînes les explications. « L’autre jour après que tu sois partie du McDonalds, j’ai récupéré ce que tu avais laissé sur ton plateau pour l’amener dans un laboratoire et faire le test. Empreintes, salive… il y avait même un cheveu qui traînait sur une serviette. Le lendemain matin, j’ai pris l’avion et fait un aller-retour express à New York pour aller récupérer de quoi tester mes parents. J’ai aussi fait tester mes propres échantillons pour comparaison… Les résultats sont négatifs. Nous ne sommes pas de la même famille. » Tu détournes le regard, comme honteux de toi-même pour avoir été assez timbré pour récupérer les restes de sa bouffe. « Je voulais pas te le dire par peur que tu me prennes pour un psychopathe d’avoir fait ça. » En vrai, t’es peut-être un vrai psychopathe pour avoir réussi à sortir une histoire aussi énorme sans ciller et dans le plus grand des calmes.

peut-être que quelque part j’essayais de l’apitoyer sur mon sort. jouer la carte « ami » pour avoir des réponses. mais putain, fallait pas disposer d’une intelligence hors norme pour savoir qu’il était normal que j’ai autant besoin de ces réponses. j’avais besoin d’entendre si oui ou non ma vie n’était qu’un pathétique mensonge. et j’le sentais. je sentais que y avait un truc, qu’il était en train de me mener en bateau. j’pouvais pas dire pourquoi ni même expliquer comment est-ce que je pouvais avoir une sensation pareil mais c’était ce que je ressentais et putain, j’voulais juste que pour une fois on arrête de me prendre pour une gamine naïve incapable d’encaisser les choses. j’étais bien consciente que si c’était la vérité ça allait totalement me retourner mais je préférais connaître les faits plutôt que continuer à vivre comme si tout ça n’était pas un monde inventé de toute pièce. et au moment où il m’avait avoué avoir déjà fait un test adn, je tombait de haut. de très haut. les yeux brillants sûrement un peu trop fort. presque larmoyant. j’arrivais même pas à savoir si j’étais soulagée, déçue ou si je ne croyais tout simplement pas à ce qu’il était en train de me dire. et.. non. je me levais, les jambes un peu tremblantes. « donc t’es en train de dire que je suis juste folle ? » parce que c’était ça la conclusion. mes rêves n’étaient rien d’autres que des fabulations, les photos le fruit de mon imagination. est-ce que c’était ça ? est-ce que j’étais juste complètement dingue ? « je me souviens de cette espèce de foire, des gens partout et du fait que j’étais.. perdue. c’est dans un truc comme ça qu’elle a disparu meghan, pas vrai ? » j’avais la voix qui vacillait légèrement et putain, j’étais mal. « est-ce que je suis folle ou est-ce que t’es un menteur ? »

T'as l'impression que chaque mot qui franchit tes lèvres te brûle la bouche. Pourtant d'ordinaire, raconter des salades aux filles pour obtenir ce que tu veux est quelque chose que tu fais sans sourciller et surtout sans aucun remords. Evidemment ici tout est différent. T'as l'impression d'être la personne la plus horrible du monde de balancer une telle énormité à la gueule de Ziggy. Mais tu sais que tu le fais pour son bien. Que c'est la meilleure chose à faire pour tout le monde. Alors il ne faut surtout pas que tu craques. C'est maintenant plus que jamais qu'elle a besoin de toi. Qu'il faut que tu la protèges de la triste vérité comme le grand frère que tu es bel et bien. La culpabilité t'écrase de tout son poids, ta conscience hurle à la mort dans ta caboche, mais tu dois tenir bon. Pour elle, pour ne pas détruire sa vie et ceux qu'elle aime. Parce que tu sens que tu es prêt à tout pour la préserver, prêt à tout endurer pour elle, prêt à vivre avec ce secret qui te déchire de l'intérieur jusqu'à la fin de tes jours. « Ni l'un ni l'autre. » finis-tu par dire doucement. Bon Dieu que c'est difficile de continuer à lui mentir alors que vos regard s'affrontent, le sien presque larmoyant mais fermement planté dans le tien à la recherche d'une vérité que tu refuses de lui donner. Tu pries de tout ton être pour qu'elle ne se mette pas à vraiment pleurer devant toi. Tu sais déjà d'avance que tu n'y résisteras pas. Les larmes du sexe opposé t'ont toujours rendu faible, elles te désarçonnent en quelques secondes et tu ne sais jamais comment y faire face, comment les gérer. T'as plus qu'à espérer qu'elle soit suffisamment forte pour encaisser ce que tu t'apprêtes à lui dire. « Des fillettes qui ressemblaient à ma soeur, on en a vu des dizaines pendant l'enquête. Tu n'es pas la seule. De même que ma soeur n'est certainement pas la seule petite fille à s'être perdue dans une fête foraine ou un parc d'attractions, c'est quelque chose qui arrive tous les jours. Et ça a peut-être dû t'arriver aussi quand tu étais petite. T'es pas folle Ziggy, mais tu prends tes rêves pour une réalité qui n'existe pas. Tu n'es pas Meghan. »

j’avais l’impression de perdre tous mes moyens et je détestais ça. parce que j’étais venu dans l’optique d’hurler un bon coup, de réussir à avoir la vérité et là, il était en train de me faire douter de moi même. si bien que je prenais même en compte le fait qu’il était possible que je sois instable mentalement. c’était pour dire l’état dans lequel il était capable de me mettre. et ouais, je luttais contre les larmes qui venaient obstruer mes yeux parce que j’avais pas envie d’être ridicule. moi, j’étais venue là dans l’optique d’avoir des réponses à mes questions, pas pour chialer comme une madeleine. et j’avais les mains qui tremblaient beaucoup trop pendant cette confrontation parce que je détestait tout ce qui était en train de se produire. je détestais qu’il puisse une nouvelle fois me mettre dans le doute comme ça. j’étais juste en train de devenir folle en fait dans cette histoire et je ne savais même pas s’il s’en rendait compte. « je ne suis pas meghan » que je répétais d’une voix presque inaudible alors que la première larme venait rouler sur ma joue. larme que j’essuyais d’un revers de main. chose idiote puisque la deuxième s’écrasait à son tour comme si j’étais juste incapable de retenir tout ça. c’était pas de la ressemblance, il avait tord sur ça. si je ressortais des photos de moi au même âge que « meghan » personne ne pourrait dire qu’on était pas la même personne mais je ne voulais pas pousser plus loin. pas s’il me repoussait aussi fort. « j’aurais pas du venir, excuse moi. » c’était une erreur. tout ça n’était qu’une foutue erreur et maintenant, la seule envie que j’avais était de fuir le plus loin possible pour m’être ridiculisée de la sorte. « j’crois que.. je devrais me tenir à l’écart de toi pendant quelques temps. » parce qu’il avait remué trop de truc en peu de temps et là, je ne pouvais plus.

Convaincu que tu fais ce qu'il faut faire, tu lui balances une nouvelle salve d'arguments en carton à la figure. T'as jamais mis autant de force pour repousser quelqu'un de toute ta vie, et c'est d'autant plus difficile qu'il y a cette petite partie de ton esprit qui lutte a contrario pour faire éclater la vérité. Tu sais qu'elle ne rendra pas les armes et si cet affrontement perpétuel te bouffe complètement depuis quelques jours, tu ne veux même pas penser à ce que ce sera à l'avenir. T'es littéralement seul dans cette épreuve car tu ne pourras jamais partager ce lourd secret avec qui que ce soit. Mais pire encore, tu vois les yeux de Ziggy se remplir à toute vitesse et tu mesures une nouvelle fois l'ampleur de ce que tu lui fais. « je ne suis pas meghan » murmure-t-elle. Elle est Meghan, et tu lui mens sur toute la ligne, sur son identité. La panique te gagne alors que tu vois une première larme couler le long de sa joue. Puis une deuxième. Et encore une autre. Tu ne sais plus quoi dire ou quoi faire. Immobile alors que tu vois bien dans son regard qu'elle s'effondre comme un château de cartes. Mais mieux vaut ça plutôt que ce soit toi qui la démolisse une bonne fois pour toutes non ? « j’aurais pas du venir, excuse moi. » C'est plutôt toi qui devrait t'excuser, pour ce que tu lui fais. Mais t'as l'impression que tu pourrais passer le reste de ta vie à le faire que ce ne serait pas suffisant. « j’crois que.. je devrais me tenir à l’écart de toi pendant quelques temps. » T'acquiesces douloureusement de la tête. Tu devrais ressentir un soulagement qu'elle semble laisser tomber l'affaire mais il n'en est rien, au contraire. Pourtant tu enfonces encore davantage le clou. « Je crois que c'est mieux pour nous deux oui. » Les mots sont cruels mais nécessaires. Sans rien ajouter de plus, tu la raccompagnes à l'entrée, désormais incapable de la regarder dans les yeux. Le regard fixé au sol, tu devines les pleurs qui doivent inonder son visage. Elle part sans se retourner. Tu refermes la porte. T'as l'impression de perdre ta soeur une deuxième fois.

Une seconde. Deux secondes. Trois secondes. Quatre secondes. Tu rouvres brusquement la porte. « Meghan. »

j’avais l’impression que toutes mes émotions s’étaient entrechoquées soudainement et ça ne faisait pas bon ménage. parce que là, j’étais en souffrance intense. les larmes coulant à toute vitesse sur mes joues reflétaient le chaos présent dans ma tête. j’avais l’impression que quelque chose venait littéralement de se briser à l’intérieur de moi et y avait rien pour ralentir cette chute. aucune branche à laquelle se raccrocher. j’étais juste en train de dégringoler incapable de savoir ce que je devais croire. peut être qu’il avait raison, peut être que j’imaginais juste des choses en fait et.. ouais, j’avais besoin de m’en aller d’ici parce que j’avais juste la sensation d’étouffer. et il acquiesçait. il faisait rien pour me retenir malgré mes yeux suppliants. oh, j’aurais pu me mettre à genoux à ce moment précis pour le supplier de dire la vérité parce que y avait cette partie au fond de moi qui ne cessait de me dire que c’était louche. j’aurais pu me laisser tomber face à lui et rester là à pleurer jusqu’à ce que je sois sûre de ce qui était réellement vrai. mais j’avais de la fierté et à la place, je marchais jusqu’à la porte, le pas un peu traînant. j’avais mal et d’un autre côté, je voulais mettre tout ça derrière moi. ne plus jamais y penser, ne plus jamais aborder la question. refouler très loin mes doutes et mes questions parce que de toute manière, on ne me laissait pas vraiment le choix. et la porte se refermait derrière mon dos, mon visage toujours inondé et je continuais à avancer, sentant le poids dans ma poitrine devenir de plus en plus lourd à chaque avancée. « Meghan. » je bloquais. littéralement. interdite. confuse. et tant. d’autres émotions à la fois. me tournant au ralenti vers lui, je le voyais se tenir là, m’appeler par ce prénom précis alors qu’il tentait de me faire avaler depuis des jours que je n’étais pas elle. et la vérité était finalement là. j’étais meghan. j’étais sa soeur. sa petite soeur. j’étais meghan harrison et ma vie n’était qu’un mensonge depuis tout ce temps. je ne savais même pas comment est-ce que j'étais censée réagir dans tout ça. quoi dire ? quoi faire ? j'avais voulu la vérité, je l'avais. qu'est-ce que je devais en faire maintenant ? « pourquoi tu mens ?" pourquoi vouloir me faire avaler à tout prix que je n'étais pas elle pour finalement réouvrir la porte et lancer la bombe ?