Acharnement sur cet écran si minuscule, ce smartphone incapable de lui montrer plus que le réel, les posts publiés sur un compte qu’elle connaissait bien. Plusieurs comptes. Peu d’abonnements pour une multitude d’abonnés. Rich kid of Instagram, groupe dont elle faisait partie, groupe si futile depuis son entrée chez les Lowell. Pourquoi les artistes ? Pourquoi pas l’élite dorée du campus ? Swarovski, nom vendeur et pourtant cette peu de l’infériorité face à une autre famille plus influente et fortunée. Choix stratégique que l’entrée chez les artistes, choix de préservation d’une santé mentale. Cornelia connaissait déjà la réponse de son instinct dans une situation de danger, le mutisme l’emportant dans les ténèbres de son enfance. Aquarelle de larmes déferlant dans l’intimité de sa chambre d’enfant. Perles salées dont elle avait banni l’existence, perles salées refaisant surface durant cet anniversaire si particulier, celui qu’elle avait toujours souhaité oublié. Jamais le bon cadeau, jamais la bonne attention. Dessin déchiré en deux, bijoux mis dans la corbeille. Mutisme prédominant, celui contre lequel la jeune femme se battait chaque jour pour ne pas retomber. Confrérie rejoint et pourtant ce sentiment de solitude dont elle ne pouvait jamais se défaire, celui l’emportant dans des actions folles comme proposer un café à Katherine. Folie passagère, cet espoir d’un refus pour ne pas affronter ces effets chimiques s’emparant de son centre nerveux. Ces veines infusées des pires drogues en pensant à la jeune femme, cette interdiction formelle d’y penser comme cela. Société en marche vers le progressisme et pourtant cet élan conservateur dans son Europe. Élan destructeur l’enfermant dans une réalisation amère, se laissant porter dans un mutisme plutôt que de l’annoncer haut et fort. Attirance interdite, déchirure de l’âme, aquarelle de ténèbres l’emportant dans les tréfonds de son existence. Pathétique héritière imaginant le regard réprobateur de sa mère avant chaque action. Pourquoi tout était si facile en présence d’un homme ? Il lui en fallait bien moins pour proposer une nuit de passion à un inconnu. Cette éducation, ce regard, ses yeux regardant chacun de ses mouvements. Pathétique gamine incapable de se défaire d’un fantôme du passé, celle jurant une liberté sans nom venant à se brimer devant celle occupant son fil instagram depuis le summer camp. Ce rendez-vous dans le café pâtisserie était si étrange, de quoi allait-elle pouvoir parler avec la brunette ? Gamine aux passions subversives, gamine silencieuse devant son chocolat chaud et les macarons commandés.

les yeux rivés sur l'horloge de son salon, elle entendait gabriel s’affairer dans sa chambre. elle voulait pas le voir, pas maintenant, alors qu'elle devrait expliquer le pourquoi du comment elle était aussi bien habillée alors qu'elle allait voir une simple amie. c'était bien plus compliqué, bien trop. cornelia, au visage d'enfant et au caractère de lionne, katherine aimait sa compagnie, depuis cette rencontre sur les toits d'harvard alors que la blonde contemplait le vide sous pieds de bien trop près. peut-être que sans la princesse, la dunster ne serait plus de ce monde aujourd'hui. une sorte de coup de foudre sur le moment, c'était ce qui s'était passé. amical ? plus que ça ? elle n'en savait trop rien et elle ne voulait plus se poser la question la blonde. elle était avec nathanaël et elle était heureuse, elle était amoureuse, complètement folle de lui. elle avait retrouvé la joie de vivre grâce à lui, puis quand on le lui avait arraché, on avait pris une partie de son cœur en même temps. il n'était plus exactement le même depuis son kidnapping, mais elle ne voulait plus le voir partir, ni maintenant, ni jamais. ce café avec cornelia lui ferait le plus grand bien, elle le savait, pouvoir s'échapper pendant quelques heures de cet enfer, elle en avait besoin. la route jusqu'à harvard était étrangement longue, alors qu'elle se surprenait à dépasser les limitations de vitesses, pourtant grandes aux états-unis. le soleil de décembre tapant sur son front, ses lunettes de soleil assombrissant tout autour d'elle, elle était maintenant devant la porte du café. la main tremblante, elle ne savait toujours pas comment elle lui annoncerait. elle était là, rayonnante, ses lèvres étirées en un large sourire qui réchauffait le cœur de kat. une étreinte avant de s'installer sur la chaise, commandant un thé et une pâtisserie. « alors ? ça faisait longtemps qu'on s'était pas vu, tu m'as manqué. » honnête, elle s'était réellement languie de la présence de son amie, ces soirées à regarder des vieux films en noir et blanc.

Un fantôme dévorant chacun de ses gestes par un regard réprobateur toujours présent, enfance détruite par le silence, cette incapacité de tenir tête à celle lui donnant la vie pour perdre sa liberté de femme heureuse. Pouvait-elle lui en vouloir de lui avoir fait payer les infidélités de son père ? Infidèle. Digne fille de son père incapable d’offrir son coeur pour sa propre survie, cette déception constante qu’elle était. Décembre n’était qu’une mascarade où la survie était cruciale chaque année, des réunions de famille qui n’en finissait plus, des sourires sans réel sens. Déviance de l’âme, des visages passant à la vitesse grand v pour ne finir que par celui qui importait le plus. daddy’s little girl. Redondance d’excuses sur son absence, ces prétextes professionnelles qu’elle ne mettait plus en doute à présent, des chèques blanc comme unique cadeau pour les fêtes. Il ne faisait plus l’effort, plus l’envie ou plus le temps. Oubliait-il son unique héritière ? Son unique enfant ? Doutes persistants dans son esprit à chaque moment important, était-elle réellement son unique enfant. Père pire que la fille, enchaînant les maîtresses pour finir par s’en lasser et les jeter. Ténèbres la happant vers ses démons, viles pensées détruisant une détermination qui était sans failles dans ses plus jeunes années. Détermination s’érodant chaque année, la solitude l’effrayant, cette peur de ne jamais être aimée ou de ne jamais pouvoir aimer en retour. Ténèbres s’affaiblissant à chaque gorgée du chocolat chaud, un rendez-vous amical. Pouvait-il y avoir plus ? Jamais. Peur des regards sur elle, cette fille courageuse quittant son corps en pensant à une réaction de son paternel, gamine effrayée par ce que la vie pouvait bien lui lancer. Incertitudes et peurs se faisant balayer d’un revers de la main par la voix de son amie. Kat était enfin arrivée, enfin présente, ça faisait si longtemps d’après la jeune brune. « Kitkat, tu m’as manqué ! Pas faux, les examens et la famille tu sais. Et toi ? Enfin ton excuse ? »  Malice reprenant le contrôle de son visage, comme une vague de joie s’infiltrant dans ses pores pour ne pas ressortir avant que quitter la blonde.