C’était peut être aberrant de songer à ceci, mais tu le pensais. Tu pensais qu’en perdant votre enfant, tu prenais aussi le risque de perdre Ezio. La tétanie qui t’avait envahi était surtout à ce sujet. Envisager ta vie seule, sans ton italien n’était plus possible. Tu te connaissais assez pour savoir l’impact que pourrait avoir un éloignement de sa part. Ouais, s’il s’éloignait, s’il disparaissait, tu ne t’en remettrais pas, ce serait sûrement fatal. Ta main dans la sienne, tu fixais dorénavant l’écran qui allait dévoiler ce qu’il se passait en toi. La gynécologue avait enfin mis en route la machine, faisant rouler sa sonde sur ton ventre afin d'explorer tes abysses. Tes yeux étaient rivés sur l'écran, cherchant activement la petite bête qui poussait en toi, mais tu n’y connaissais rien. Tu ne voyais que des tâches incompréhensibles. Heureusement, le suspens n'avait pas duré longtemps, la médecin avait détecté votre progéniture, vous la pointant du doigt sur l’écran. Ton coeur s’était soudainement mis à battre à vive allure, tu la portais encore cette vie ! Si Ezio ne voyait rien, toi, tu avais la chance de sentir le remue-ménage que votre enfant créait dans tes entrailles. Ton oeil aiguisé avait aussi repéré ce que montrait la gynécologue, c’était minuscule mais identifiable. « C’est pas de moi que tu dois être fière, mais de lui… ou elle… On espère que ce sera un petit gars en fait » finis-tu par adresser à votre bonne étoile vêtue de sa blouse blanche « N’est-ce pas chéri ? Ezio projette déjà des tas de trucs, je vais devoir le calmer… sinon, je vais avoir une réplique de mon fiancé, et là, ça va commencer à être problématique. » plaisantas-tu en retrouvant une dernière fois la tâche sur le moniteur « On peut… on peut l’avoir en photo ? » La gynéco avait hoché positivement de la tête, appuyant sur une touche de sa bécane pour imprimer la bouille de votre futur gosse « Je vais l’encadrer. En fait, je ferais un grand cadre de toutes les échographies et je le mettrais dans sa chambre, au dessus de son berceau » expliquas-tu au Quincy en essuyant ton ventre de la gelée qui le recouvrait. De nouveau sur tes jambes, vous aviez été invité à passer de l’autre côté du bureau pour décider du nouveau rendez-vous. Tu n’écoutais à présent que d’une seule oreille, complètement perdue dans la photo de ton petit bout. Tu étais une fois de plus sous le choc. C'était pas du flan, tu étais enceinte. Tu allais être mère, tu en avais définitivement la preuve sous les yeux. Tu avais beau charrier Ezio sur ses projections, tu commençais aussi à en faire de même. « Allez les futurs parents, vous pouvez y aller, on se revoit normalement dans environ deux mois, on entendra son coeur battre cette fois-ci » vous déclara-t-elle en vous reconduisant vers l’extérieur. « Très bien Docteur, encore merci de m’avoir prise aussi vite » De nouveau dans la salle d’attente, tu avais récupéré la main du brun pour y déposer un baiser bien appuyé « T’es content ? On fête ça dans le placard ? » lui dis-tu en pouffant de rire. Tu avais par la suite emboité le pas vers le couloir, beaucoup plus détendue qu’à l'arrivée « Mais bon… Faut pas s’exciter non plus… On a pas franchi le cap le plus dangereux encore… Je le veux tellement tu sais. Je l’aime déjà moi. Je lui parle aussi des fois… Tu lui parleras ce soir d’ailleurs, il a besoin d’entendre les blagues pourries de son papa... Tu lui chanteras aussi tes chansons bidons » le taquinas-tu en tournoyant autour de sa paluche, le sourire étiré jusqu'aux oreilles.   

Ezio se prenait une claque en pleine gueule. Lui qui n'arrivait pas trop à réaliser la grossesse de sa fiancée, là il était face à la réalité et cela lui faisait tout drôle. Les yeux plissés vers l'écran, il sentait les émotions monter en lui mais ne montrait rien du tout, pas une larme, pas le moindre signe de faiblesse. Pourtant il était touché, au plus profond de lui. « Ouais c'est vrai mais j'serais quand même content si c'était une fille. Enfin j'aimerai bien un petit gars. » dit-il dans un besoin de se justifier. Louison râla sur lui et son envie d'avoir un mini-ezio. Il rigola légèrement en essayant de rester concentré sur la machine. « Deux Scorsese pour le prix d'un, tu devrais être contente Chamberlain. Je sais que c'est ton rêve aussi, ne dis pas le contraire. » lança-t-il sur un ton faussement dédaigneux. La gynécologue sortit quelques clichés de leur enfant et s'empressa de les donner aux futurs parents. Ezio en prit une dans ses mains et plissa les yeux en la rapprochant de lui pour distinguer son fils ou sa fille. Il était complètement perdu sur l'échographie et la tournait dans tous les sens en espérant trouver le bon. Il commençait bien comme père tiens. « Hm hm. » marmonna-t-il à Louison qui lui balançait encore l'une de ses brillantes idées. Le bel italien ne l'écoutait pas vraiment, il était concentré sur la photo. Les yeux toujours rivés dessus, il avança à l'aveugle jusqu'au bureau de la gynécologue qui leur donna le prochain rendez-vous. Le Quincy releva quand même la tête. On entendra son coeur battre cette fois-ci. Un fin sourire se dessina sur ses lèvres. « Merci pour tout, à dans deux mois alors. » Ils quittèrent le cabinet pour se retrouver dans la salle d'attente. Louison s'approcha de lui pour venir l'embrasser. Lui aussi avait envie de se retrouver avec elle, rien qu'elle. Surtout après la séquestration et la folie dans laquelle ils s'étaient plongés pendant une semaine. Ils se dirigèrent vers le couloir pour rejoindre la sortie. « De où j'ai un humour de merde ? Je suis très drôle, c'est toi qui ne sait pas capter la subtilité de mes blagues. » s'amusa-t-il à répondre en rigolant. « Tu lui parles ? J'ai envie de lui parler aussi tu sais. Tu le sens bouger ? J'sais pas, j'ai un peu de mal à m'imaginer tout ça, c'set quelque chose je ne connaîtrais jamais. Tu m'en parles pas souvent mais j'aimerai bien partager ça avec toi. Je veux dire, un peu plus que de t'apporter un verre d'eau en pleine nuit quoi. » Les deux fiancés se retrouvèrent devant la porte d'entrée tandis qu'Ezio arrêta Louison et l'approcha de lui. « Tu sais ce qu'on va faire ? On va acheter un bola, j'crois que ça s'appelle comme ça. C'est un genre de collier de grossesse, à ce qu'il parait c'est un truc pour apaiser les bébés, si ça peut marcher aussi pour la mère, moi je prends. J'veux que tu gardes confiance en toi et tu ne quittes pas l'étincelles dans tes yeux, celle que j'ai vu quand tu as compris qu'il était toujours là. » lui proposa-t-il dans le plus grand des calmes. Si cela ne tenait qu'à lui, Ezio aurait déjà acheté tout le mobilier et aurait refait le bureau de leur appartement en chambre bébé.

Dehors, dans les couloirs de l’hosto qui sentaient le désinfectant à plein tube, tu te ressassais l’instant que tu venais de vivre. Une vie se développait en toi et dans plusieurs semaines, tu entendrais son coeur… Du haut de tes vingt petites années, cela faisait beaucoup. Bien évidemment, il y avait Ezio pour te soutenir, il était plus mature, -en apparence- et il avait beaucoup plus vécu que toi, il saurait à coup sûr t’épauler. Mais, cela n’enlevait rien à la peur qui se tapissait derrière ta joie. Allais-tu être une bonne mère ? Comme le disait Liam, juste le fait d’y songer te menait déjà sur la bonne voie. En te confiant sur tes moments d’intimité avec ton futur enfant au Quincy, tu t’étais rendue compte à quel point tu demeurais secrète sur ta grossesse « Non je le sens pas bouger… Pas encore. C’est bizarre en fait… Je t’en parlerais plus chéri… Mais n’hésite pas à venir nous chercher aussi… On est timide » répondis-tu tout en s’approchant des baies vitrées électroniques menant à l’extérieur du bâtiment. Le brun s’était subitement figé, t’attrapant le bras pour capter ton attention tandis que tu déballais toujours tes inquiétudes sur votre progéniture. Sa réflexion t’avait fait doucement sourire « Un bola ? C’est quoi ce machin, un talisman vaudou ? » plaisantas-tu avant de redevenir un brin sérieuse par rapport à sa dernière phrase « C’est difficile ce que tu me demandes, j’suis pas très optimiste quand ça me concerne… Je préfère m’attendre au pire pour ne pas être trop déçue… J’ai hâte de franchir le premier trimestre, à partir de là, je serais sûrement beaucoup plus sereine bébé » lui confias-tu en agitant les bras pour faire ouvrir les portes coulissantes « Allez viens, on va goûter, Ezionino a besoin de forces ! »