Rhaël
Déterminée, tu recomptes le nombre de bouteilles d’alcool présentes sur ta table basse. Pour la énième fois. Cinq au total. T’hoches la tête, satisfaite de tous ces achats de dernière minute. Tu commences sérieusement à t’impatienter. Ton regard ne cesse de faire des va et des viens entre ta salle à manger et ton téléphone portable. Ton doigt tapotant nerveusement l’écran. Enaël, il est en retard. Pour changer. Et t’avais déjà commencé à t’imaginer tout un tas de scénarios dans ta tête. Scénarios loufoques. Irréalistes. Complètement banales.  Accident de voiture. Une partie de jambe en l’air toujours pas terminée. Ou même pas commencée. Peut-être t’avait-il tout simplement oublié. Tu tournes en rond dans ton appartement. Vérifiant que tout est à sa place, que tout est prêt. Une bonne soirée en perspective. Un moment déjà que vous ne vous étiez pas retrouvés dans de telles conditions. Juste tous les deux. Un moment que tu n’avais plus rien partagé avec lui. Regrets déjà visibles, déjà présents qui commencent lentement à se faire une place au fond de toi. Regrettant de ne pas passer plus de temps en sa compagnie. Regrettant cette distance non désirée qui s’installe progressivement entre vous. Tu veux creuser l’abcès. Tu veux le retrouver. Et ne plus jamais le lâcher. Relation tourmentée mais solide. Ne sachant plus vraiment quoi faire, tu finis par ouvrir une bouteille. Laissant tes lèvres accueillir avec joie ce liquide si particulier. Avalant de longues gorgées. Jusqu’à ce qu’enfin on vienne toquer à ta porte. Ta manche venant essuyer ta bouche, le saint graal toujours dans ta main, tu sautilles, allant directement lui ouvrir la porte. Sans prendre le temps de vérifier que c’était bien lui. « Enaëeeeel ! Enfin t’es là ! » tu lâches, venant te réfugier immédiatement dans ses bras. Embrassade longue et chaleureuse. Tu finis par te défaire de son emprise. A contre-cœur. Tu le laisses entrer, refermant la porte directement après lui. « T’as apporté à manger chaton ? »