L'écran de mon téléphone s'illumine et je daigne lâcher mon carnet de dessin pour regarder le message envoyé par un numéro qui ne fait pas parti de mon répertoire. La blague! Depuis que je suis revenu, je dois toujours demander qui m'envoie quelque chose. Cependant, cette fois, c'est signé. Tazel Goodman. L'espace d'un instant, je cherche avant d'accrocher sur une possibilité, même si je doute fortement. Le caractère formel… c'est pas une invitation, c'est une convocation. Genre, j'ai pas le choix d'y aller. Et la dernière fois que j'ai eu ça, c'était du bizutage. Chouette… Oh et puis, je verrai bien!

Deux coups discrets sur la porte de ma chambre et je vois apparaître la tête de ma belle-soeur.

- Y'a une voiture devant, c'est pour toi? questionne-t-elle avec un sourire.
- Merde!

Fuck, c'est rapide! Abandonnant mes croquis et crayons sur mon lit, je m'en éjecte pour attraper rapidement une chemise dans le placard que j'enfile par dessus mon t-shirt et je ramasse mes effets personnels - clés, porte-feuille, etc. - avant de filer vers l'entrée sous le regard amusée de Shirley. Mon jeans noirs élimé devra faire l'affaire! Une bise rapide, une fois les bottines aux pieds et je sors pour gagner le taxi qui attend.


223… 223… Ha! Voilà! Un respire et pas trop certain de ce que je vais trouvé de l'autre côté de la porte, j'en teste tout de même la poignée pour l'ouvrir. J'aurais du cogner avant? Oups.

Un mec, seul et il se présente comme étant Tazel. Bon bah, je suis au bon endroit au moins! À ses explications, je ris doucement posant mon regard sur la pièce alentour.

- T'en fait pas, c'est aussi grand que chez moi! riais-je, amusé.

Sans déconner, la suite doit faire la taille de la maison de mon frère!

- Oliver, enchanté, me présentais-je en tendant la main. Médias sociaux, c'est ça? questionnais-je à savoir d'où on se connaissait.

Histoire de pas faire de conneries quand même!

Il parle d'une faveur et j'hausse un sourcil avant de m'approcher pour voir les documents qu'il a saisi. Lorsqu'il mentionne un accord de confidentialité, mon regard glisse des feuilles jusqu'à ses yeux. Il est sérieux là? Je comprends qu'on ne se connaissent pas, qu'il aie des projets encore incomplets et tout ça… J'ai compris aussi qu'on gravitait pas dans le même monde - y'a qu'à voir la suite -, mais je vois pas l'intérêt de ce papier. À la mention de Cambrige's Secret, je suis étonné qu'il dise que j'y ai trop fait apparition. Mais je dois me rendre à l'évidence, ce n'est pas parce que Saël n'est plus dans ma vie que les autres étudiants ont oubliés les séries de rumeurs à notre compte. Cependant, mon regard se fait amusé.

- Je n'ai pas peur de CS ou de ce que les gens peuvent dire à mon sujet, affirmais-je doucement. Si c'était le cas, je n'aurais pas cette apparence. Je n'aurais pas de multiples tatouages et piercings et mes jeans n'aurait pas de trous aux genoux, expliquais-je en souriant. Que tu veuilles te protéger, je peux comprendre, mais, moi, j'ai aucune idée de ce que je fais ici, alors je ne sais pas à quoi ça m'enguage. Et puis, si je dis quelque chose, t'auras cent fois le pouvoir de me le faire payer, tentais-je de lui faire comprendre avec un mouvement de bras pour montrer le décor. Suffit de demander si tu veux que je me taise, lui assurais-je.

J'ai pas besoin de lui demander pour me douter qu'il pourra facilement se payer les meilleurs avocats de cette ville ou d'une autre si je viens à dire quoi que ce soit. De mon côté, j'aurai de la chance si je peux simplement m'en payer un sans m'endêter comme un fou.

- Ha et tu peux me tutoyer. C'est légèrement malaisant tous tes "vous", admis-je en riant doucement.

On doit avoir sensiblement le même, non? Et même s'il respire une certaine rigueur que je n'ai probablement pas, même s'il vient d'un milieu plus huppé, il parle pas comme ça à tout le monde, n'est-ce pas?

Cette rencontre n'est en aucun cas quelque chose dont je suis habitué. Ou, en fait, peut-être que ça se rapproche de certaine fois où j'ai vu Anna, mais meme si elle vient de la haute et moi pas, elle en restait une amie, alors c'était tout de même plus… chaleureux peut-être? Où du moins, un terrain un peu plus connu.

Le voyant chiffonné son contact, j'ai un mouvement d'étonnement. C'est pas vraiment ce que je voulais dire, plutôt lui faire réaliser que si lui il sait où on s'en va, moi non. Et, traitez-moi de parano, mais vu que y'a énormemment de bizutages en cours et que j'étais bizuteur l'an dernier, je serais pas étonné que mes protégés m'envoie les leurs, alors bon… Je crains pas les coups bas, mais je me suis quand même déjà fait dessiner dessus, ou peindre un nom un peu partout. Chose qui m'a fait rire à l'époque. N'empêche, pour revenir à Tazel, j'aurais pu les lui signer ses papiers à la fin de la rencontre s'il le désirait tant, mais de voir qu'il accepte ma parole seulement me fait plaisir. J'ai pas l'impression que ça fasse partie de ses habitudes, alors considérons que c'est un honneur.

- Promis, lui assurais-je. Ça sort pas d'ici.

Il a tout de même réussi à piquer ma curiosité. De quoi on a pu parler sur Formspring et auxquelles de ses questions, je pourrais avoir des réponse? Le pouvoir de ce truc, c'est que la plupart des gens viennent poser des questions de façons anonymes, alors parfois la délicatesse s'envole ou ça tombe dans les questions privés. Les trucs pour choquer c'est arrivé souvent : sur ma relation avec Saël, sur mes problèmes avec le paternel, sur mon orientation, mon apparence, name it. Certaines questions me font rire, d'autres me découragent, mais je réponds sensiblement toujours. Le seul gros temps où j'évitais ou détournait les questions c'est au départ de ma relation avec Saël et c'était pour pas lui causer plus de problèmes qu'il n'en avait déjà.

Tandis qu'il se lève, mon regard s'attarde un peu sur le décor et ce n'est que lorsqu'il recommence à parler, posant une remarque sur moi, que je recentre mes pupilles bleues sur lui.

- Merci, souris-je.

J'essaie de rester ouvert et accessible. Peut-être mon côté sociable qui veut ça. Y'a aussi qu'au fils des ans, je me suis rendu compte que lorsqu'on a plus ou moins rien à cacher, y'a moins de personnes qui viennent vous embêter. Ils n'ont pas de challenge.

- Et oui, d'accord pour le verre, acceptais-je. Je te laisse choisir ce qui te plait.

Riant doucement à ses remerciements, j'hoche la tête.

- Pas de problèmes, mais tu m'expliques le grand mystère?