• J'ai peur de me réveiller et de me rendre compte que j'ai déjà soixante-trois ans. J'ai peur de ne pas avoir assez le temps de profiter de toutes ces personnes que j'aime. J'ai peur de me retrouver dans un hôpital, sur un putain de lit de mort, relié à des dizaines de perfusions et de machine surveillant mon cœur. J'ai peur de tout ça, j'ai pas envie de regretter quelque chose, de me dire que j'aurais pu changer mon futur, que j'aurais pu faire mieux. J'sais pas vraiment ce que l'avenir nous réserve, vous savez, tout ça, la vie, c'est juste une étape, à notre plus grand regret, nous ne sommes pas éternel, et, ça m'fait flipper. C'est peut-être pour ça que je suis incontrôlable, que je passe mon temps à m'amuser, à faire des conneries plus grosses les unes que les autres. C'est peut-être pour ça que je veux défier la mort, pour le plaisir de me sentir en vie. Étrange pulsion. "Met le flash de ton portable s'teuplait j'ai plus de batterie ! M'adressant à Elbeth, je suis certain qu'on va pouvoir passer par là. Vous vous demandez surement ce qu'on est en train de faire ? Simple, je suis persuadé à cent pour cent de trouver un petit coin de paradis ou faire la fête tranquillement, et au pire. Je l'ai fait passé par des endroits les plus pourris les uns que les autres, par des espèces de mini jungle de deux mètres de long, mais vachement condensé en arbre et en liane, un gros bordel. "Regarde tu vois ! Là bas y'a de la lumière, obligé y'a une soirée !" Et puis si il n'y en a pas, on va en improviser une. Elbeth, je ne pourrais pas vraiment donner de nom à notre relation. Elle est là, toujours présente pour moi, on se dit tout, on se confie, et puis on dérape, on se laisse aller sans se poser de questions, elle est importante, c'est tout ce que je sais... •

• Jamais de ma vie j'ai foutu les pieds dans ce pays. Pour moi le Laos à la base c'était juste la jungle et les éléphants, rien de bien glorieux. Ma seule envie était de profiter de ce Summer Camp, de m'amuser, de prendre du bon temps et occasionnellement, faire gagner mon équipe. Ce soir, je voulais juste profiter d'une bonne soirée en compagnie d'Elbeth, sauf que toute ma vie se résumais à ce qui était en train de se passer. Un plan foireux,, encore une fois. Je ne sais pas ce qui a bien pu me passer par la tête pour avoir envie d'aller à une soirée loin de l'hôtel. Toujours il faut que je m'éloigne, toujours, et vu que je suis loin d'être un GPS ambulant, je ne suis pas d'une grande utilité. "Sort ta lampe alors Einstein, j'ai pas envie de marcher dans une merde d'éléphant !" D'ailleurs, comment ça s'appelle une merde d'éléphant ? Est-ce que ça porte un nom spécial ou pas du tout ? On continue d'avancer jusqu'au moment où je repère de la lumière un peu plus loin, obligé c'est un village, obligé il y a un bar. Peut-être pas une soirée de folie avec de la musique à fond, mais un bar au moins. Juste un peu d'alcool me conviendrait. "Maaaiis fait moi confiance un peu à la place de toujours vouloir me foutre à poil !" J'avance éclairé du téléphone de la jeune femme, et petit à petit, on se rapproche de l'espèce de village. Bon, on a des espèces de cabanes en bois, des lanternes un peu partout, merde... "Tu vois un truc qui pourrait ressembler à un bar toi ?" Même pas en rêve je danse la macaréna c'est bon, on va trouver merde. •

• J'me suis déjà senti seul, complètement abandonné, sans personne à qui parler, sans personne qui puisse vraiment me comprendre. J'me suis déjà retrouvé dans des situations que je n'arrivais plus à contrôler, me demandant comment j'allais pouvoir faire pour me sortir de tout ça, comme si il n'y avait aucune issue possible. Je connais, ce sentiment, ce sentiment où tu ne peux plus rien contrôler, ou tu vas te poser je ne sais combien de questions qui n'auront aucune réponses valables, aucune réponses qui pourraient convenir à la situation et qui t'aideraient à t'en sortir. J'ai déjà eu cette impression d'être abandonné de tout le monde, sans vraiment chercher l'aide de quelqu'un. J'ai jamais été quelqu'un de très expressif, quelqu'un qui affiche ces sentiments à la vue de tout le monde. J'me suis aussi toujours moqué de l'avis des gens, préfèrent avancer en solitaire, par peur d'être déçu, par peur de m'attacher à des personnes qui n'en valent pas la peine et qui me la mettront à l'envers à la première occasion venue. J'ai longtemps avancé seul, sans personne à qui m'accrocher. Mais au jour d'aujourd'hui, je ne suis plus seul. Elle râle, encore, en même temps, je la comprends, je gueulerais aussi si les rôles auraient été inversé. Mais je sais qu'on va s'en sortir, je me fais confiance. "Tu me fais trop d'avance, pas que ça soit déplaisant, mais comment tu veux que je me contrôle si tu passes tes journées à vouloir me pêcho ?" Je fais comme si tout ça me dérangeait alors que c'était loin d'être le cas. Après quelques minutes de marche, on arrive enfin dans ce qui ressemble plutôt à un village qu'une ville, et là, je me sens con. Direct, Elbeth me rappel ces paroles, directement, je vois qu'elle a juste envie de rentrer. Je m'approche d'elle, soupirant, je regarde un peu partout, il est vrai que pour le bar, on repassera... "Calme toi, déjà. J'ai toujours des solutions aux problèmes..." Aucun bruit, rien, le vide totale, jusqu'au moment où j'entends une espèce de petite musique d'ambiance. Bingo, une épicerie de nuit un peu plus loin. "AH TU VOIS ! Jamais tu veux me faire confiance, tu dis quoi là ?" Que je lui demande, ayant l'impression d'avoir gagner le match le plus important de ma vie alors que je ne suis même pas sportif. •

• J'ai beaucoup de fierté, et, ça m'a souvent joué des tours. Ma vie n'a pas toujours été celle que tout le monde connait, je n'ai pas toujours été ce connard qui te crache à la gueule quand quelque chose va pas, j'ai pas toujours été cet abruti à ce moquer de l'avis des autres et à chier devant le premier qui ne serait pas d'accord avec moi. J'ai cette image qui me colle à la peau, cette image de gars froid qui n'en a rien à foutre de la gueule des autres, que seul lui compte. Ce mec qui passe son temps à faire la fête, à se foutre dans des états pas possible. Et, j'en suis conscient, j'suis conscient d'avoir cette image, et, j'en ai souvent joué, j'm'en sert en quelque sorte de carapace, comme ça, rien ne peu m'atteindre, tout passe autour de moi, tourne autour de moi, mais je ne laisse rien entrer, je filtre tout, c'est moi qui choisi, moi qui décide. Elbeth, elle l'avait brisé cette carapace, j'en avais pas besoin avec elle, je lui faisais confiance à 100%. Je connaissais sa vie, je savais par quoi elle était passé, et jamais je ne la laisserais tomber. "Laisse nous quand même boire déjà un verre avant, non ?" Un léger rire et après plusieurs minutes de galère, on finit par trouver le Graal. Elle attrape ma main, contente d'être arrivé à destination, et on s'avance vers l'espèce d'épicerie. "Obligé l'alcool qui vendent ici c'est un truc du bucheron." Que je lui lâche, entrant dans l’épicerie. Regardant un peu partout, je lâche la main de la jeune femme pour attraper une couverture que je lui jette dessus. "Attrape, on se réchauffera avec ça si l'alcool suffit pas." Je connais bien d'autres méthodes... Tournant la tête un peu partout, je finis par tomber sur l'alcool. "Oh bébé, c'est ici l'alcool, regarde !" Lui montrant du doigt une étagère remplis de bouteille d'alcool, je savais qu'on allait finir par trouver. •

• Mon enfance a été chaotique. Entrainé dès mon plus jeune âge dans des histoires de gang, j'me suis laissé avoir, faisant de mon quotidien une course contre la montre avec pour adversaire la mort. J'en ai fait des mauvaises choses, j'en ai vu des gens mourir, comme mon meilleur ami, sous mes propres yeux alors que je n'étais qu'un enfant encore. Tout ça me hantera jusqu'à mon dernier souffle, j'ai du apprendre à vivre avec, à m'adapter et à avancer en sachant très bien que le Paradis, c'est loin pour moi. C'est peut-être ça qui avait fait qu'avec Elbeth nous soyons si proche. Notre passé pas très glorieux, fait de peine et de peur. Nous étions deux jeunes personnes complètements perdus, et ensemble, on se trouvait un but, ensemble, nous avancions. Aujourd'hui, elle était la personne qui comptait le plus pour moi, mon amie, ma confidente, ma famille, mon amante, elle était un mélange de tout ça, un magnifique mélange. Je ne pouvais pas imaginer ma vie sans elle. "On est là pour ça non?" Un petit haussement des sourcils et je vaque à mes occupations, finissant par lui lancer une couverture dessus. Bon, elle a pas trop aimé, elle m'a demandé d'être tendre. M'avançant vers elle, je viens pour la serrer quelques secondes dans mes bras, déposant un baisé contre sa joue. "C'est mieux comme ça ?" Je dessers mon étreinte, finissant par trouver l'alcool, le pourquoi du comment nous étions là. Elle veut faire le plein, pas mal, bonne idée, j'attrape donc deux trois bouteilles au hasard que j'apporte à l'épicier. Mais avant de payer, je me tourne vers mon amie. "Tu voulais prendre autre chose ?" Autant en profiter tant qu'on est là. •