Tu te regardes dans ton grand miroir, tes yeux s’arrêtent sur chaque détail de cette robe époustouflante. Le feu, le rouge, c’est tout toi, même si parfois on te traite de reine des glaces, tu es explosive. D’ailleurs tu en as envie là, tout de suite, d’exploser, de tout envoyer valser à travers ton appartement. Tu as cette haine au fond de toi qui grandit petit à petit, tu préfères la haine à la tristesse car même si tu te mens à toi-même dans de telles circonstances, tu sais que tu es triste. Cette belle robe rouge de dentelle, tu aurais dû la porter aux bras de Jimmy lors du bal, puisque vous étiez en couple depuis plusieurs mois. Mais au lieu de ça tu y vas avec Clay, non pas l’idée ne te déplaise, mais tu ne pensais pas, au cours de ta misérable vie, être abandonnée, sans un mot, par quelqu’un à qui tu as confié tes sentiments. Décidément, tu as conscience que tu n’aurais pas dû céder à une foutue utopie, que tu aurais dû t’écouter, ou même écouter Clay. Pourtant plutôt crever pour lui déballer la vérité, pour lui dire qu’il avait certainement raison. Tu souffles tout en fixant le plafond puis tu attrapes un verre de vin, tu en es déjà à ton second, tu en as besoin, pour te détendre et ne pas exploser tout ce qu’il y a autour de toi. Tu n’as pas envie d’aller au bal, tu as juste envie de boire, te droguer, planer et peut-être coucher avec un homme, Clay sera certainement ta bonne âme, tout simplement parce que vous avez déjà mis le couvert et parce qu’il est proche de Jimmy et secrètement tu espères qu’il apprendra cette nouvelle et qu’il s’en mordra les doigts. Tu es méprisable, cinglante et tu te fous des conséquences. C’est ta partie égoïste qui parle et tu t’en fiches complétement. En parlant de Clay, tu l’attends patiemment alors que tu viens de finir ton nouveau verre de vin. Tu souffles et tu te regardes une dernière fois dans le miroir, remettant une mèche derrière ton oreille. Tu es parfaite. Ton portable se met alors à vibrer et tu descends rapidement. Ton ami, amant du soir sûrement, t’attend, devant sa voiture. Un fin sourire sur tes lèvres, tu t’approches de lui puis tu le regardes, dans son beau costume. « Tu fais très gentleman dis-moi. » Un petit hochement d’épaule, tu passes tes doigts fins sur son col puis tu te hausses sur la pointe des pieds en déposant un baiser sur sa joue, proche des lèvres. La tentation, toujours. Tu entres dans sa voiture puis tu te laisses conduire jusqu’au bal qui ne se déroule pas très loin, à l’Université. Une fois arrivée, tu descends, tu remets ta robe correctement puis tu t’accroches à son bras pour entrer. Vous êtes un couple qui va faire jaser, certains ne vont pas comprendre pourquoi tu es au bras de Clay et tu t’en moques. « Un premier verre ? » Pour toi, ce ne sera pas le premier, mais qu’importe.

Tu es descendue, faisant claquer tes Louboutins sur le sol, tenant ta robe d’une main ferme et pourtant délicate. Ton regard plongé dans celui de ton ami, tes yeux de biche le détaillent, il est parfait, très classe. « Tu sais que j’aime tout autant te voir sans. » C’est cliché, tu moins ça pourrait l’être si cette phrase avait été prononcée par Clay mais ses biens de tes lèvres qu’elle vient de sortir, toi une femme indépendante et sans peur, qui obtient généralement ce qu’elle désire. Tu viens alors te rapprocher de lui, tu déposes un baiser à la commissure de ses lèvres tout en tapotant de tes doigts fins le mouchoir couleur sang que tu avais explicitement demandé qu’il porte. Comme ça vous êtes accordés, vous montrez au monde que sous ce regard glacial que vous pouvez avoir, vous brûlez intensément. Tu entres ensuite dans la voiture en faisant de ne pas déchirer la dentelle de ta robe et tu te laisses alors guider par ton cavalier sans dire un mot. C’est assez étrange, cette ambiance qui peut se montrer pesante entre vous. Tu sais que certains doutes hantent ses pensées et ce sont les mêmes qui tentent de creuser ton esprit. Tu les chasses un maximum mais elles sont tellement fortes qu’elles commencent à se creuser un foyer dans ton esprit. Au bout d’un moment, certainement au cours de la soirée, il faudrait bien que cela sorte. Tu sortais avec Jimmy, qui était plus que proche de Clay et toi s'est… compliqué. Quoi qu’il en soit, Jimmy s’était viré seul du tableau, pourquoi ceux qui y restaient devraient se priver ? Ce soir, tu vas au bal avec Clay et tu es fière de t’y aventurer accrochée à son bras. Même malgré vos coucheries, Clay est quelqu’un d’important à tes yeux, un rock sur lequel tu peux compter et pour qui tu serais prête à sacrifier beaucoup de choses. Au final, ta relation avec Jimmy n’avait fait que casser ce triangle… amoureux ? Peut-être, qu’importe de toute manière, cette histoire était loin derrière toi et il fallait bien quelqu’un pour mettre les pieds dans le plat. Une fois devant le perron de cette immense salle, tu proposes à Clay un premier verre, pour détendre l’atmosphère sans doute et parce que tu as envie de faire passer le goût de ce vin amer que tu t’es enfilée plus tôt. Mais une petite rousse rondelette vous arrête et vous demande vos invitations. « Pardon ? » Revoilà ton air hautain, condescendant. Tu la fusilles du regard quelques instants, si bien qu’elle termine par baisser le regard et par s’écarter. Invitations ou non, elle n’avait aucun charisme pour te barrer le passage, s’en était même presque trop facile. Tu lâches un petit rire cristallin et tu passes pour définitivement entrer dans la gueule du loup, là où des centaines d’étudiants vêtus de leurs plus beaux apparats crânent en espérant se démarquer, pitoyable. Tu te diriges alors tranquillement vers le bar, tu guettes d’un regard affuté votre table qui n’est pas trop loin mais pour l’instant personne n’est arrivé. Tu commandes alors deux verres en soupirant, pour l’instant, il n’y a que des bulles à la clé, toi qui veux boire jusqu’à ne plus te souvenir, tu es mal partie. « Prêt pour cette mascarade ? »