Live a little
— Starring MARLIE

La maison des Lowell avait été réduite en cendres récemment, donc c'était un peu le gros bordel dans Harvard ces derniers jours. Tous cherchaient à se reloger le temps des travaux et bien sûr, toutes les confréries ayant des chambres libres - donc celles qui étaient encore debout - avaient répondu à l'appel de ceux qui criaient asile. Mon altruisme légendaire m'avait d'abord fait penser "no way in hell", puis je m'étais sentie carrément coupable en voyant qu'ils avaient tout perdu et que moi je me promenais encore tranquille dans ma petite vie inchangée. J'avais donc proposé ma chambre et on m'avait attribué une nana dont le nom de famille m'était drôlement familier. Elle devait arriver aujourd'hui et j'étais en train de bosser mais du mouvement devant ma porte me dérangeait depuis quelques minutes. Énervée, je me levai et j'ouvris la porte à la volée alors que la rouquine était en train de toquer, sa main encore dans l'air. « Ah oui, j'me disais bien que j'entendais du bruit. » Je me poussai pour la laisser entrer en lui faisant signe de passer et j'esquissai un sourire en coin. « Malgré ma réputation, j'mange personne t'inquiètes. » Pas littéralement en tout cas. Je lui indiquai le lit dans un coin de la chambre, que j'avais préparé avant qu'elle arrive. « Tiens, j't'ai mis des draps propres. Je savais pas si t'en avais encore. » Ahah, le tact. « Margot, c'est ça ? »

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— Starring MARLIE

Bon malheureusement pour elle, elle était pas tombée sur la nana possédant le plus d'estime de sa maison. Je ne savais pas pourquoi, mais j'avais toujours eu une dent contre les Lowell. Sûrement parce que j'étais de ceux qui ne croyaient pas que l'art devait primer sur le reste. Mais j'étais quand même un être humain et j'appréciais pas non plus de voir des gens en galère. Et la rouquine avait l'air sympa, bien qu'un peu coincée. « Your parents are in Boston ? Wow, what a lucky girl. » Désolée pour le ton sarcastique, mais les parents c'était un sujet tabou pour moi. Je disais ça uniquement parce que j'aurais pas aimé avoir ma mère aussi près. Loin, très loin, c'était bien. Si elle pouvait même retourner en Italie, ça m'arrangerait. La rousse me fit part de son nom de famille et direct, je tiquai. « Weasley ? As in Kaya ? » La nana de mon meilleur ami, qui venait de tomber en cloque. Well, ça allait être fun cette coloc. « Rylie, yep. Coppola. » Je sautai sur mon lit et croisai mes jambes en continuant d'observer la nouvelle arrivante. « So, tell me Margot. What's your life like ? » Ouais, j'étais vraiment curieuse parce que sa personnalité avait l'air à l'opposé de la mienne.

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— Starring MARLIE

La pauvre, j'étais en train de lui montrer le pire de mes comportements. J'avais carrément l'air d'une peste vue de l'extérieur, mais en fait, c'était fait exprès. C'était pour la cerner et comprendre directement si je devais me méfier d'elle ou non. Il y avait de ça, et un bout de mon caractère hautain aussi, je l'avoue. Bon, elle avait pas mal pris ma remarque sur ses parents, un bon point pour elle déjà parce que c'était pas dirigé contre elle, donc j'étais contente qu'elle n'ait pas pris la mouche directement. Elle eut l'air carrément mal à l'aise quand je tiquai instantanément sur son prénom et je savais d'ores et déjà pourquoi. On lui faisait tout le temps visiblement. Mais moi, j'avais d'autres raisons. « Well, she's the president of the Lowell House, so everyone probably does, yeah. » J'émis un petit rire avant de me justifier. « Although, I know her because she's my best friends' girl. » Sa posture et son comportement montraient clairement qu'elle était perdue et pas encore à l'aise dans mon environnement. « Yes, it is. And I am. Well, actually my father was. » Elle me confia qu'elle étudiait le journalisme et je la regardai en haussant un sourcil, surprise. Ce n'était pas le genre de personnalité que j'imaginais dans ce domaine. Et elle revenait de Corée du Sud en plus. Peut-être que je la cernais mal, en fait. « Yeah, yeah I know. » J'eus un frisson d'horreur en l'entendant évoquer la prise d'otages. Mauvais souvenir. « And that you're now forced to live with a complete stranger. » ajoutai-je avec un petit rire. Je bidouillai deux trois trucs sur mon téléphone, puis je lui répondis en quelques mots. « I party. A lot. I drink. I smoke. I have sex. I insult my mother daily when she stalks me over the phone. I party a bit more. » Non, j'essayais pas de l'effrayer, non. « Oh, I also study for my PhD. in criminology and sociology. » Voilà, c'était à peu près ce à quoi ressemblait ma vie.

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— Starring MARLIE

Elle était douée la petite. Honnêtement, quand je l'avais vue débarquer dans ma chambre, j'avais pensé que dès que j'allais ouvrir la bouche, elle allait fuir en courant. Mais non, elle tenait bon face à ma personnalité chiante à accepter. Je l'observais et je sentais que je pouvais peut-être l'aider à se décontracter, la rouquine. « You've never met him ? Weird. Well yeah he's my bestie. » Ahah, il aimait pas quand je l'appelais comme ça, donc je me faisais un malin plaisir de le faire. J'esquissai un sourire et à nouveau, je scrutai miss Weasley pour prendre note de ses réactions à l'évocation de Nick. J'voulais voir si elle avait l'air de ne pas l'aimer, pour savoir si Kaya parlait de lui en mal ou non. Ouais, j'étais trop protectrice de ce petit couillon. Enfin bref. Là je sentais que j'avais installé un malaise sans faire exprès, en parlant de mon père au passé. C'était pas voulu, j'avais juste eu envie de clarifier que c'était mon père qui l'était de pure souche et pas moi. Et je ne pouvais pas parler de mon père au présent. Donc passons à autre chose discrètement. « Yeah, so you know everything there is to know. » dis-je en riant. Et là je lui débitais la réalité de ma vie, sans mentir et je la voyais se décomposer au fur et à mesure que je parlais. J'étais à nouveau en train de la perdre, je crois. « Am I scaring the crap out of you ? » Bon, c'était pas le but non plus quoi. Donc si c'était le cas, fallait que je fasse un pas en arrière. Mais son attention se porta sur mes études. Ah, bon choix. « It is fascinating. But journalism must be just as hard sometimes, so, you're a strong one too. » Oui attend, tu pouvais voir des trucs horribles quand tu faisais des reportages. Bon d'accord, c'était plus commun dans ma branche, mais en fait ça dépendait de ton domaine de prédilection en tant que journaliste. Elle me fit une grosse allusion sur le fait de ramener mes coups d'un soir dans la piaule et je ne pus m'empêcher d'éclater de rire face à ses insinuations qui se voulaient... discrètes ? « Don't worry. I don't bring anyone around, ever. I can't share it with a stranger, even for a few hours. » J'haussai un sourcil, puis me corrigeai. « Well, you know what I mean. Except for you. Or anyone I don't intend to... have coïtus with. » J'avais employé l'expression "pratiquer le coït" avec un grand rictus, parce que j'avais l'impression que la demoiselle face à moi avait peur de blasphémer en utilisant des mots trop vulgaires. Et j'voulais voir si elle allait se foutre de ma gueule ou au contraire, trouver ça parfaitement normale. Ouais, je tentais de la cerner jusqu'au bout.

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— Starring MARLIE

Certes, Harvard était une grande université mais ça restait un tout petit endroit donc il n'était pas fou de constater que ma nouvelle colocataire était la petite sœur de la copine de mon meilleur ami. Bon d'accord, si, un peu. Je ne connaissais que très peu Kaya et bientôt, j'allais mieux connaître sa petite sœur qu'elle. Enfin, si cette colocation se passait bien.  Mais j'avais un bon pressentiment. On était complètement différentes, aux antipodes et pourtant, je l'aimais bien. Le feeling était directement passé. Margot me confia que Kaya n'avait jamais présenté Nick à ses parents et je ne fus pas surprise, puisque nous en avions déjà discuté ensemble. Je savais que de toutes façons, il se ferait dessus le jour où ça arriverait. Donc oui en effet, il y aurait vraiment un gros malaise. Revenant à la rouquine face à moi, je lui expliquai ma vie, en faisant des caisses pour la mettre mal à l'aise parce que j'étais comme ça. Mais j'eus des remords et je lui demandai si je l'avais fait flipper. Apparemment, non. Je tiquai sur un détail et je réagis au quart de tour. « Leave it to me ? You've never had sex ? » J'ouvris de grands yeux. Mais elle avait quel âge en fait ? J'en savais rien. Me rendant compte que j'étais peut-être allée trop loin, je fis un petit rire et lançai un « Sorry, don't feel like you have to answer that. » au cas où elle était vraiment trop mal à l'aise. On revenait sur un sujet moins délicat, ses études, et c'était mieux comme ça. « Looks like you'll have one hell of a life after your graduation, miss Weasley. » Et elle bossait pour le Harvard Crimson. Eh bien, je lui tirais mon chapeau. Je fis une moue impressionnée parce que bon, ce n'était pas rien malgré ce qu'elle avait l'air d'en penser. Je fais mouche avec mon expression délicate concernant le coït puisqu'elle se prend un fou rire. Je reste adossée au mur, la regardant avec un grand sourire satisfait scotché sur mon visage. « Sorry, I didn't want to hurt your sensitivity. » dis-je en rigolant à mon tour. « I'm tiptoeing around you for now, until I know you better. » Elle me plaisait bien. Je sentais vraiment qu'on accrochait et c'était rare pour moi de m'entendre si bien avec quelqu'un aussi vite. « It's not, but I take it as a challenge. We'll try not to kill each other. » ajoutai-je avec un clin d’œil. « So tell me, what do you like to do ? You're a Lowell. I assume you're into arts. Which passion brought you there ? » J'allais chercher à comprendre un peu cette maison, histoire de détruire mes a priori et mourir moins bête, peut-être.